Mayotte, la Réunion et le "droit du sol"

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Message par anchaing » 11 Oct 2005, 04:23

(Le Monde a écrit :
A Mayotte, sur fond d'immigration clandestine massive, le débat sur le droit du sol enflamme encore les esprits

MAYOTTE de notre envoyé spécial


L'activité économique s'est singulièrement ralentie à Mayotte depuis une semaine, et la trêve du ramadan, dans cette île à 90 % musulmane, n'explique pas seule une telle apathie. Les travailleurs clandestins, qui faisaient en partie tourner la machine pour des salaires de misère, se cachent. En ce moment, dans les cuisines des restaurants ou les plantations d'ylang-ylang, il ne fait pas bon être d'Anjouan, l'île voisine qui appartient à la République des Comores.


A Paris, le débat relayé par François Baroin, ministre de l'outre-mer, sur un aménagement du droit du sol dans "certaines collectivités d'outre-mer" s'est apaisé après les propos prudents de Dominique de Villepin et de Nicolas Sarkozy, presque au diapason sur le sujet. A Mayotte, en revanche, il continue d'enflammer les esprits. Lundi 3 octobre, plusieurs milliers de Mahorais ont manifesté à Mamoudzou contre l'immigration clandestine. Une pétition demandant une consultation sur le sujet à recueilli 10 000 signatures.

L'unique député de l'île, l'UMP Mansour Kamardine, est à l'origine de cette mobilisation. "Les Mahorais disent leur exaspération devant le poids de l'immigration" , assure-t-il. Selon une étude de l'Insee, datant de 2003, un tiers des 160 000 habitants de l'île seraient des sans-papiers. Les clandestins viennent travailler mais également se faire soigner, accoucher, scolariser leurs enfants. Ils participent à l'insécurité et engorgent les prisons (70 % de la population carcérale).

Les réformes du droit du sol, soutenues par M. Kamardine, concerneraient, sur cette seule île et sur ces cinq dernières années, 24 000 enfants nés de parents en situation irrégulière. Si elles ne sont pas décidées, estime le député, les Mahorais seront minoritaires dans dix ans. L'élu aspire donc à ce que soit reconnue cette singularité et "couper l'autoroute de l'immigration" .

Depuis quelques temps, la droite locale s'est emparée du malaise et se livre à une surenchère verbale. Ce discours reçoit l'assentiment d'une large partie de la population. A la fin du mois de septembre, une manifestation de clandestins dans les rues de Mamoudzou a dégénéré, alimentant un peu plus le ressentiment.

Alors rares sont ceux qui osent s'opposer à cette campagne, comme Saïd Ahamadi, maire de Koungou et proche des socialistes, qui dénonce "une chasse à outrance" et "des arguments fallacieux et xénophobes" . "Les Comoriens qui viennent ici ne cherchent pas une nationalité mais un espoir" , assure-t-il. "On ne peut pas résoudre les problèmes dans la passion" , estime pour sa part Saïd Omar Oili, président sans étiquette du conseil général. "Est-ce que la lutte contre l'immigration peut être un programme politique ? La question vaut à Mayotte mais également dans le reste de la France" , poursuit l'élu.

"Les politiques relaient publiquement un ras-le-bol qui s'exprimait jusque-là dans le cercle familial" , constate Jean-Paul Kihl, préfet de Mayotte. Face à cette ébullition, l'Etat montre ses muscles. Les mesures de police ont été singulièrement renforcées. Les moyens maritimes et terrestres ont été augmentés. 8 500 reconduites à la frontières ont été ordonnées en 2004, soit plus de la moitié de ce qui s'est fait dans l'ensemble de la métropole la même année. "Mais si on ne participe pas activement à travers une coopération régionale à sortir les Comores de sa situation économique, on ne réglera pas la question" , concède M. Kihl.

Le PIB par habitant des Comores est cinq fois moins important que celui de Mayotte. Mais celui de Mayotte est dix fois moindre que celui du reste de la France. Du coup, l'île est également confrontée à une émigration massive. Des Mahorais partent par milliers en métropole ou à la Réunion, afin de bénéficier de salaires plus attractifs ou d'avantages sociaux inconnus (RMI, allocations chômage) ou majorés (prestations familiales). Du coup, à la Réunion, se développe envers ses arrivants soupçonnés d'être des profiteurs un ostracisme que des élus n'hésitent pas à leur tour à entretenir.
anchaing
 
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Message par anchaing » 11 Oct 2005, 04:30

(LO du 11 février 2005 a écrit :
Ile de la Réunion : le racisme contre Mahorais et Comoriens, un poison qu’il faut combattre

A la Réunion, il n’est malheureusement pas rare d’entendre des propos insultants et racistes envers des membres de la communauté mahoraise et comorienne. Cette xénophobie qui se développe dans l’île est le pendant local de cette idéologie de fond de poubelle qui a fait le succès d’un Le Pen en France.

La communauté mahoraise et comorienne compte environ 30000 membres à la Réunion, soit la majorité des migrants, dont le nombre total ne dépasse pas 38000, toutes nationalités et communautés confondues. Les Mahorais (habitants de l’île de Mayotte) et les Comoriens viennent des anciennes possessions françaises des Comores, situées au nord-ouest de Madagascar.

Les hommes et les femmes issus de cet archipel, et qui sont pour beaucoup de nationalité française, fuient le manque de travail, la misère et donc des conditions de vie très difficiles. A Mayotte, qui reste aujourd’hui la seule île rattachée à la France, avec un statut de collectivité territoriale, les prestations sociales sont quasi inexistantes, le chômage bien peu indemnisé, et les salaires fort bas: le Smic est par exemple de moitié inférieur au Smic de France. Le système hospitalier est archaïque, il y a plusieurs centaines d’évacuations sanitaires par an en provenance de Mayotte. Le système scolaire est insuffisant, entre autres par l’absence d’université. Alors, beaucoup de Mahorais tentent leur chance à la Réunion, espérant vivre un peu mieux et surtout pouvoir offrir à leurs enfants un avenir meilleur.

Mais ce qu’ils y trouvent a de quoi les faire rapidement déchanter. Victimes de discriminations à l’embauche, ces travailleurs ne peuvent espérer qu’un emploi non déclaré, et encore, quand ils en trouvent un, pour effectuer des travaux pénibles et souvent fort mal payés. Pour eux, la recherche d’un logement devient vite une course d’obstacles infranchissables qui les jette dans les bras de marchands de sommeil sans scrupule.

Un bidonville s’est développé dans la ville du Port, où des familles mahoraises et comoriennes s’entassent dans des cases non seulement insalubres mais aussi propices aux incendies ravageurs, comme celui du 6 décembre 2004 qui a jeté à la rue sept familles, soit trente-deux personnes. Le 10 janvier, un autre incendie a détruit une maison de Saint-André, provoquant la mort de trois enfants. A plusieurs reprises déjà, la famille s’était plainte auprès de la société immobilière (qui n’a jamais daigné vérifier) de problèmes récurrents au compteur électrique; problèmes qui ont pu être à l’origine du drame.

La presse réunionnaise rapporte de temps à autre la situation de ces populations. Ainsi, un reportage du Journal de l’île de décembre 2004 disait les déceptions d’une Mahoraise de 35 ans qui, après la mort de son mari, était venue à la Réunion, espérant manger à sa faim et élever décemment ses six enfants. Deux ans plus tard, elle avait perdu nombre de ses illusions, vivant avec ses enfants et deux autres membres de sa famille dans un appartement immonde, qu’un marchand de sommeil lui louait 700 euros par mois: pas d’électricité, des chambres sans fenêtre, inondées à la moindre averse, une cuisine totalement hors normes, les eaux usées qui se déversaient dans le salon. «Je n’ai pas eu le choix, tous les autres propriétaires ne voulaient pas louer à une Mahoraise», expliquait-elle.

«Comores dehors», «Voleurs d’alloc»: ce sont des slogans qui se rencontrent sur des murs d’immeubles, tracés par les mains imbéciles d’un raciste notoire ou d’un Réunionnais peu conscient, qui rend responsable de sa situation un plus pauvre ou plus démuni que lui; comme si ce qui lui manquait était à prendre dans les poches de ceux qui n’ont rien.

Le racisme et la xénophobie divisent les pauvres, les détournent de leur vrais ennemis: ceux qui sont responsables du chômage, des bas salaires; ceux qui, exploitant la misère, ont intérêt à ce qu’aucune solidarité ne puisse exister.

Correspondant local


Un politicien local, reprenant la phrase de Baroin sur le droit du sol, a même poussé la démagogie jusqu'à réclamer des tests ADN pour vérifier la paternité effective des pères mahorais d'enfants anjouanais, remettant en cause le droit du sang... :bleu-vomi:
anchaing
 
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