a écrit :Le FMI dément les rumeurs d'appel à l'aide de l'Espagne
LEMONDE.FR avec AFP | 04.05.10 | 17h29 • Mis à jour le 04.05.10 | 22h31
C'est une rumeur sur la possible non-solvabilité de l'Espagne et sa possible baisse de notation qui a déclenché, mardi 4 mai, une spectaculaire chute des Bourses européennes. Une rumeur qui a contraint d'abord le premier ministre espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, puis le FMI à intervenir pour démentir l'idée que l'Espagne son tour obligé de faire appel à l'aide internationale.
"Une rumeur est en train de circuler dans les salles de marché selon laquelle l'Espagne aurait besoin de 280 milliards d'euros et pourrait les demander" au Fonds monétaire international, expliquait mardi après-midi Yves Marçais, vendeur d'actions chez Global Equities. Après Standard and Poor's la semaine dernière, d'autres rumeurs évoquaient la prochaine dégradation de la note de l'Espagne par d'autres agences de notation, et indiquaient que Madrid pourrait demander une aide financière colossale au FMI. Les marchés ont vite manifesté leur inquiétude : la Bourse de Paris a fini à – 3,64 % ; Londres à – 2,56 % ; Madrid a plongé en clôture à – 5,41 % et à Athènes, la Bourse s'est effondrée à – 6,68 %. L'Euro a atteint son niveau le plus bas depuis un an, sous le seuil symbolique de 1,30 dollar.
Une heure après la fermeture des Bourses européennes, un porte-parole du Fonds monétaire international, William Murray, a envoyé un message à la presse affirmant qu'il n'y avait "aucune vérité dans [l]es rumeurs [d'appel à l'aide de l'Espagne]".
"J'ai entendu parler de cette rumeur, et je ne lui accorde aucun crédit", a pour sa part déclaré le chef du gouvernement espagnol lors d'une conférence de presse à Bruxelles. "C'est une folie que d'avancer cela", a-t-il ajouté, parlant d'"une absurdité énorme", mais s'inquiétant de l'impact de cette rumeur sur les marchés boursiers de son pays et de ses conséquences possibles sur l'économie espagnole. "Ces rumeurs sont tout à fait intolérables", a-t-il estimé.
"Toute nouvelle spéculation sur la zone euro est sans fondement et irresponsable, a martelé le chef du gouvernement espagnol. Il faut un peu de recul, il faut s'en remettre aux données objectives." "Il n'y a pas de raison de s'inquiéter", a-t-il ajouté, "car les données économiques [espagnoles] pointent en direction de la croissance" économique dans le pays.
PLAN D'AUSTÉRITÉ DE 50 MILLIARDS D'EUROS SUR TROIS ANS
Après la Grèce, les marchés sont donc passés à l'offensive contre l'Espagne, autre maillon faible présumé de la zone euro, avec ses finances publiques en berne, la récession dont elle peine à sortir et un taux de chômage record de plus de 20 %. Les Espagnols ont adopté en janvier un plan d'austérité de 50 milliards d'euros sur trois ans pour enrayer les déficits publics, qui se sont envolés, en 2009, jusqu'à 11,2 % du PIB, pour les ramener à 3 % d'ici à 2013. Mais certains investisseurs et analystes doutent du réalisme de ces prévisions et de la volonté réelle de l'exécutif socialiste à l'heure d'imposer des mesures impopulaires.
La semaine dernière, l'agence de notation américaine Standard & Poor's a donné le coup d'envoi. Elle a abaissé la note de la dette à AA contre AA+ auparavant, affirmant que le pays risquait de traverser plusieurs années de croissance molle qui allaient gêner l'application du plan d'austérité. Le quotidien américain New York Times en a remis une couche lundi en évoquant "les faiblesses du gouvernement espagnol à l'heure de régler son principal problème : enrayer la flambée des déficits provoqués par le taux de chômage et la récession".
L'économie espagnole est cependant quatre fois plus importante que celle de la Grèce. Le PIB espagnol s'est élevé à 261,4 milliards d'euros au quatrième trimestre 2009, selon Eurostat, contre à peine 59,78 milliards d'euros pour celui de la Grèce. L'Espagne va passer jeudi un test important sur ce marché obligataire, qui lui sert à se financer : le Trésor va en effet mettre aux enchères des bons à cinq ans. Il espère lever au moins 2 milliards d'euros.
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La restructuration financière des caisses d'épargne espagnoles suscite l'inquiétude
LEMONDE | 24.05.10 | 15h57 • Mis à jour le 24.05.10 | 15h57
Madrid Correspondant
"A vendre, très urgent." L'annonce n'a pas été placardée sur la porte des 474 agences de Cajasur, une caisse d'épargne d'Andalousie que la Banque d'Espagne a dû placer sous tutelle, samedi 22 mai. Mais l'intention de la banque centrale espagnole, selon la presse, est de régler "le plus vite possible" le cas de cet établissement au bord de la faillite en le cédant "au plus offrant", soit en totalité, soit par lots. Elle a aussitôt missionné la banque conseil japonaise Nomura pour "chercher des offres".
Madrid n'a pas intérêt à laisser pourrir la situation : ce nouveau sauvetage public d'une caisse d'épargne régionale intervient au plus mauvais moment, les marchés internationaux ayant le regard fixé sur la solidité du système financier de l'Espagne.
En mars 2009, il avait fallu la convocation en catastrophe d'un conseil des ministres pour voler au secours de la Caisse d'épargne de Castille-La Manche (CCM) en situation de banqueroute. Cette fois, les représentants du Fonds de restructuration ordonnée bancaire (FROB), un outil de la banque d'Espagne créé il y a un an, ont instantanément pris le relais des administrateurs de Cajasur.
Dans un premier temps, le FROB va devoir injecter 523 millions d'euros pour remettre la caisse à flots, mais le coût total de l'assainissement pourrait atteindre deux milliards d'euros, selon les experts. Cajasur, fondée en 1864 à Cordoue et contrôlée par l'Eglise catholique, a perdu 596 millions d'euros en 2009, et 114 millions au premier trimestre de 2010.
Elle détient l'un des taux d'impayés le plus élevé du secteur (8,47 %). Son passif est pratiquement égal à ses actifs (environ 19 milliards d'euros). Une situation catastrophique due essentiellement, selon le quotidien El Pais, à "un appétit vorace pour la pierre et une coûteuse politique de ressources humaines".
La "banque des curés", comme certains la surnomment, a participé au développement des trois principaux constructeurs immobiliers de Cordoue, notamment sur la Costa del Sol. Dès 2005, un rapport de la banque d'Espagne avait insisté sur le "caractère spéculatif marqué" de certains financements.
L'unique voie de sortie pour cette petite caisse, lestée d'un effectif de 3 114 employés, dont 700 pour le seul siège social, consistait en une fusion avec Unicaja, une caisse d'épargne de Malaga en meilleure santé.
Les pourparlers entre les deux établissements s'éternisant, la banque d'Espagne avait fixé un ultimatum au vendredi 21 mai, à minuit. Les raisons pour lesquelles le président de Cajasur, le prêtre Santiago Gomez Sierra, a finalement fait capoter la négociation et précipité la mise sous tutelle, restent mystérieuses pour la plupart des commentateurs.
L'épisode illustre les difficultés que rencontre le gouverneur de la banque d'Espagne, Miguel Angel Fernandez Ordonez, pour mener à bien la restructuration des caisses d'épargne.
Fragilisées par l'éclatement de la bulle immobilière, elles représentent la moitié du système financier espagnol. La Commission européenne a récemment averti l'Espagne de la nécessité de réduire leur nombre afin de renforcer leur taille et leur capital. Début mai, l'unique engagement commun pris lors d'une rencontre entre le chef du gouvernement, José Luis Rodriguez Zapatero, et le chef de l'opposition, Mariano Rajoy, fut de "favoriser les opérations entre caisses".
Une trentaine de ces entités financières sont actuellement en discussion. Certains rapprochements sont en bonne voie, mais plusieurs projets de fusion ont avorté, et beaucoup d'autres sont au point mort en raison de résistances politiques. Ces caisses sont en effet très liées aux pouvoirs locaux. Certains gouvernements autonomes, comme l'Andalousie, voient d'un mauvais oeil des alliances avec des caisses d'autres régions.
Pour bénéficier des aides du FROB, ces opérations de concentration devront être bouclées avant le 15 juin, un délai devenu trop court aux yeux de la plupart des observateurs. "Le temps passe, il y a un risque d'insolvabilité de diverses caisses et la méthode choisie des fusions bat de l'aile, résume El Pais dans un éditorial. S'il y a un moment adéquat pour démontrer que la banque d'Espagne contrôle fermement la réforme financière, c'est maintenant."
Jean-Jacques Bozonnet