Famine effroyable en Somalie, Kenya, Ethiopie

Dans le monde...

Message par Vania » 27 Août 2011, 16:10

Il s'agit toujours de l'accaparement de terres par des compagnies étrangères ou des Etats. Cette fois, l'article concerne l'Ethiopie, dont la chambre de commerce du pays vient de céder 350 000 ha de terres vouées auparavant au pastoralisme, et qui après avoir été rachetées par des entreprises indiennes, serviront à l'agriculture, mais pour le marché mondial.

Voici le lien :

http://www.slateafrique.com/31627/ethiopie...-arables-famine

Je suis méfiant en tant ordinaire avec ce Slate, mais l'article est documenté ; il renvoie vers deux liens en langue anglaise, le Times économique et l’Institut international pour l’environnement et le développement. Et ce qu'il décrit correspond exactement à ce que décrit la revue Grain à l'échelle mondiale.
Vania
 
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Message par malaka » 28 Août 2011, 00:35

Dans le même ordre d'idée il y avait eu un documentaire sur Arte il y a quelques mois. Une planète à vendre.
J'ai retrouvé un site sur lequel il semble qu'on peut le revoir en entier (pas vérifié). L'exemple de l'achat de terres éthiopiennes par un industriel indien est cité. Assez vomitif le type d'ailleurs.
Une planète à vendre
malaka
 
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Message par Vania » 03 Sep 2011, 14:28

Salut, Malaka!

Le lien ne marche pas, malheureusement, et se contente d'annoncer que cette "vidéo est privée"...

Merci tout de même.
Vania
 
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Message par Vania » 17 Sep 2011, 17:35

Sur l'Ethiopie, encore.

a écrit :L'Usine Nouvelle | Le 15 septembre 2011

L’Ethiopie veut devenir un exportateur majeur de sucre

par Pascal Coesnon

L’Etat de la Corne de l’Afrique invite les fonds étrangers à investir dans la production de sucre. Une décision qui ne fait pas l’unanimité.

Sugar Corp., le producteur de sucre détenu par l’Etat éthiopien, a commencé la construction de dix nouvelles unités de production sucrière pour un coût d’environ 80 milliards de birr (4,4 milliards d’euros). La compagnie invite les investissements internationaux car les firmes privées éthiopiennes « ne sont pas prêtes financièrement et techniquement à réaliser de telles initiatives », regrette Abay Tsehaye, le directeur général de Sugar Corp. Le projet concernera quatre régions, indique Yilma Tibebu, le porte-parole de la compagnie : Beles dans la province d’Amhara, Wolkait dans le Tigré, Kesem dans l’Afar et le Sud-Omo dans la Région des nations, nationalités et peuples du Sud.

En décembre 2010, le gouvernement a lancé un plan sur cinq ans avec pour ambition d’augmenter la croissance économique de 14,9 % par an en développant l’agriculture et en stimulant l’épargne pour financer les investissements. Le projet vise à céder 3,3 millions d’hectares de terres aux investisseurs d’ici à la mi-2015. Cinq autres millions d’hectares seront destinés à la production sucrière. « L’Ethiopie a un grand potentiel en terme de climat et de ressources hydriques, ce qui est très favorable pour la production sucrière », ainsi que des terres bon marché, souligne Abay Tsehaye.

En 2010, l’Ethiopie a importé 150 000 tonnes de sucre. Avec ce projet, le gouvernement vise à devenir autosuffisant d’ici à la fin 2013 et à multiplier par huit la production de sucre d’ici à la fin 2015. Avec une production de 2,3 millions de tonnes (Mt) à cette date, le pays espère en exporter 1,25 Mt. « Dans les quinze prochaines années, nous espérons devenir un des dix premiers exportateurs mondiaux », se félicite Abay Tsehaye.

Mais le projet ne fait pas l’unanimité. Dans le Sud-Omo, la construction de six unités de production est « un désastre » pour les dix-sept groupes ethniques qui vivent dans la région, accuse Peter Bosshard d’International Rivers, un groupe de défense basé aux Etats-Unis. « L’accaparement de la terre et de l’eau pour les plantations de canne à sucre sera une catastrophe écologique et apportera la faim pour 500 000 personnes. » Selon Abay Tsehaye, les champs seront irrigués par la rivière Omo, où une usine hydroélectrique est en cours de construction. Le nombre de personnes déplacées sera « très minime » et les unités de production construites dans « des zones arides ».

Le projet, dans lequel la coercition ne sera pas utilisée, vise à transformer les habitants du Sud-Omo « socialement, économiquement et culturellement ». Les personnes touchées seront indemnisées pour la perte de leurs revenus et recevront une quantité de terres au moins égale à leurs exploitations antérieures, souligne Abay Tsehaye. Les groupes de défenses « veulent que ces personnes restent aussi primitives qu’elles le sont aujourd’hui, aussi pauvres qu’aujourd’hui et aussi nues qu’aujourd’hui. Ainsi elles serviront d’échantillons pour la recherche et la collecte de fonds », accuse-t-il à son tour. Les communautés seront « beaucoup mieux », car elles bénéficieront de terres irriguées, des services sociaux, de l’appui d'experts agricoles et d’emplois, se flatte Abay Tsehaye.


Le lien : http://farmlandgrab.org/post/view/19286

Au total, ce projet pour la production de sucre va retirer plus de 8 millions d'hectares de terres agricoles à la production de nourriture pour la population éthiopienne.
Vania
 
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Message par Vania » 17 Sep 2011, 19:54

a écrit :En Ethiopie, la famine côtoie l’abondance

Par Philipp Hedemann, swissinfo.ch/InfoSud

Alors que des millions de personnes sont gravement menacées de famine dans la Corne de l’Afrique, des investisseurs étrangers récoltent dans la même région des tonnes de céréales à destination de l’Asie ou des pays du Golfe.

Il fait un peu moins de 40°C. Accroupi, un jeune garçon arrache la mauvaise herbe qui a poussé au milieu d'un champ de canne à sucre. Un Indien passe dernière lui en l'observant du coin de l'œil.

Red a 8 ans et il gagne 80 centimes par jour de travail dans ce champ de l'ouest de l'Ethiopie. C'est moins cher que les pesticides. Le fermier indien devrait gagner des millions dans les trois années à venir, en exportant ces récoltes loin de l'Ethiopie.

Dans l'un des pays les plus pauvres au monde, l'accaparement des terres agricoles ne fait que commencer, et au pire moment. L'Ethiopie a faim. La sécheresse dévastatrice qui frappe toute la Corne de l'Afrique depuis quelques mois menace plus de 10 millions de personnes.

«Ici c'est encore une région désertique, mais bientôt nous allons y construire de nouveaux champs de canne à sucre et d'huile de palme», confie Karmjeet Singh Sekhon, à bord de son pick-up Toyota.

A droite et à gauche de la piste, la brousse est déjà en feu. A 68 ans, l'investisseur indien est pressé. Son énorme ferme dans l'ouest de l'Ethiopie couvre une superficie de 300'000 hectares, une des plus grandes de la région.

Course au biocarburants

En 2008, suite à la hausse drastique du prix des produits alimentaires, et aux famines qui en ont résulté, une course sans précédent a été lancée pour s'accaparer les surfaces agricoles en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie.

Selon un rapport de la Banque mondiale, 45 millions d'hectares de terres ont été loués en 2009. On estime que d'ici à 2030, dans les pays en développement, chaque année six millions d'hectares de terres agricoles seront louées en plus, dont les deux tiers en Afrique sub-saharienne et en Amérique du Sud.

Des hectares de terres utilisés non seulement pour nourrir des pays comme l'Inde ou les Etats du Golfe, mais aussi un moyen pour ces pays de jouer les premiers rôles dans la course à la production de biocarburants. «L'accaparement des terres pose un grand risque. Le voile du secret qui règne sur ce commerce doit être levé, afin que les personnes pauvres ne paient pas le prix fort et perdent leur terre», affirme Ngozi Okonjo-Iweala, directrice de la Banque mondiale.

Il y a 26 ans, la terrible famine qui a frappé l'Ethiopie avait tué plus d'un million de personnes, malgré l'aide internationale. Ce scénario pourrait se reproduire. Actuellement, la plupart de la nourriture est importée.

Bradage du pays

En Ethiopie, près de 85% de la population vit de l'agriculture. Mais la plupart des maigres champs restent stériles et sont toujours travaillés avec des méthodes archaïques. Les terres donnent l'un des rendements les plus bas au monde. Le gouvernement éthiopien espère profiter de la location de ces surfaces agricoles aux investisseurs étrangers pour lancer une vague de modernisation.

Toutes les terres appartiennent au gouvernement d'Addis-Abeba qui espère dans les années à venir en consacrer trois quarts à l'agriculture. Un objectif ambitieux, car pour l'instant seulement 3,6 millions d'hectares, principalement dans l'ouest du pays, ont été cédés aux investisseurs.

Mais la donne pourrait changer rapidement, avec un prix modique de location de 5 francs par hectare et par année. L'Ethiopie est devenue une terre de prédilection pour les entreprises d'investissement dans l'agro-business. Au désespoir des agriculteurs locaux comme Ojwato.

Le paysan se dresse devant son champ d'à peine un hectare. Il ne lui faut que quelques minutes pour le traverser. Bien loin des heures de routes que doit effectuer Karmjeet Singh Sekhon à bord de sa jeep pour traverser ses champs de canne à sucre.

A l'idée que dans les champs voisins, les récoltes sont exportées à l'étranger, alors que le pays est au bord de la famine, il fulmine. «Les étrangers avaient promis d'apporter l'électricité, de l'eau et des hôpitaux en échange. Mais au final, seuls quelques-uns d'entre nous ont trimé dans leurs champs, pour être mal payés en plus».

Philipp Hedemann, swissinfo.ch/InfoSud



Le lien : http://farmlandgrab.org/post/view/18971
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Message par Vania » 17 Sep 2011, 20:29

Sud-Soudan, cette fois. Ce pays n'est pas encore déclaré officiellement en situation de famine, mais à peine déclaré "indépendant" (en fait, à vendre), voilà.

a écrit :Terres fertiles, pétrole : le Sud-Soudan, pays neuf à vendre

By Gabriel Kenedi

Le Sud-Soudan [1] devient formellement indépendant samedi. Ravagé par la guerre, convoité pour son pétrole, le nouveau pays dispose d'un fort potentiel agricole. Et les investisseurs étrangers l'ont bien compris.

C'est l'ONG Norwegian People's Aid [2] qui s'alarme. Dans un récent rapport [3], elle souligne que depuis 2007, 9% de la superficie totale du nouvel Etat ont déjà été attribués à des firmes étrangères. Soit 5,74 millions d'hectares.

« Il est très difficile de vérifier ce genre d'information, en raison du caractère secret des transactions », affirme Philippe Hugon [4], directeur de recherches à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), en charge de l'Afrique.

Cela reflète néanmoins une tendance : de nombreuses firmes ont profité du chaos qui régnait ces dernières années pour acheter à bas coût.

Un hectare au Sud-Soudan ? 3 centimes

Une entreprise texane aurait ainsi acquis 600 000 hectares sud-soudanais [5] pour la modique somme de 25 000 dollars (17 500 euros). Le prix de l'hectare revient donc à… 3 centimes d'euro ! La société Nile Trading and Development Inc., selon le think thank Oakland Institute, obtient donc le droit d'exploiter toutes les ressources naturelles de « son » territoire pendant 49 ans. Avec en outre une option pour louer 400 000 hectares supplémentaires.

Marc Lavergne [6] est géographe, directeur du Centre d'études et de documentation économiques, juridiques et sociales d'Egypte et du Soudan (Cedej [7]). Le chiffre lui paraît « énorme » :

    « Cette firme a dû obtenir un bout de papier qui ne vaut pas grand-chose. Son but est clairement de morceler les terres acquises et de les revendre. Car personne n'est en mesure de mettre en valeur 600 000 hectares au Soudan. Il y un évident but de spéculation. Ce genre d'accord est signé par des compagnies véreuses qui ont souhaité profiter de l'état de non-droit. »

Les Chinois reluquent le pétrole sud-soudanais

Et cette entreprise américaine n'est pas la seule. Nombreuses sont les firmes ayant des vues sur ce nouveau marché. Selon l'ONG Norwegian People's Aid, des dizaines d'entreprises ont acquis des terres cultivables. Parmi elles, des investisseurs indiens, canadiens ou ougandais.

Et encore, l'étude se concentre uniquement sur les transactions liées à l'agriculture, la foresterie et le tourisme. Les accords entre les compagnies minières et pétrolières n'ont pas été pris en compte.

Or, du pétrole, le futur 193e Etat en regorge. Marc Lavergne (Cedej) met en avant les intérêts chinois qui « souhaitent aussi investir dans le pétrole ».

Le consul chinois du Commerce pour le Sud-Soudan, Zhang Jun, l'a confirmé au journal espagnol ABC [8] :

    « Le pétrole reste la colonne vertébrale de l'économie du nord et du sud. Donc attendez-vous à ce que nous poursuivons notre excellente relation avec les deux Etats. »

Le premier défi du chef de l'Etat Salva Kiir [9] sera de stabiliser les relations [10] avec son voisin du nord, le Soudan, et d'éviter l'engrenage de la violence au sein de son pays. Depuis le début 2011, près de 2 400 [11] Sud-Soudanais sont morts suite à des accrochages entre les différentes tribus.

Réguler la vente des terres n'est donc pas la priorité du moment. Au Sud-Soudan, tout reste à construire. (Voir le reportage de France 24)

Selon Marc Lavergne :

    « [Le président Kiir] n'a aucune politique agricole déterminée pour le moment. Depuis 1970, les terres appartiennent à l'Etat. Mais il n'y a aucune raison pour que les titres de propriété du nord tombent d'un coup. Pour le moment, le Sud-Soudan n'est pas en mesure de distribuer ses terres. Mais à terme, il peut choisir ou non de rendre leurs terres aux tribus. »

Des populations sur le départ ?

« La population est souvent exclue des négociations », confirme Philippe Hugon (Iris), quand bien même elle « dispose d'un droit d'usage, ancestral et non écrit, de ses terres ».

Que deviendront ces contrats à partir du 9 juillet ? Quelle sera la politique de droit foncier choisie par le nouvel Etat ?

Un aspect demeure cependant certain : la location de terres et la spéculation sur celles-ci ne profitent jamais aux populations locales. Or, le Sud-Soudan est un pays très hétérogène. A partir du moment où un contrat est signé, deux choix s'offrent à eux, selon Marc Lavergne :

    « Soit ils deviennent ouvriers agricoles, soit ils rejoignent les bidonvilles de la capitale, Juba [12]. C'est ce qui se passe déjà au nord. Il n'y a donc aucune raison pour qu'il n'en soit pas de même au sud. »

Selon le chercheur, les populations les plus menacées sont les tribus nomades, les éleveurs de vaches ou cultivateurs de maïs. Une préoccupation bien lointaine des investisseurs étrangers.


Tout est fait pour dans les mois à venir, ce pays connaisse aussi la famine. Seul le pillage des impérialistes en sera responsable, pas la météo.
Vania
 
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Message par Vania » 17 Sep 2011, 21:23

Ethiopie toujours...

a écrit :
Terres à louer pour cultiver le profit

Politis | 2 juin 2011

Par Jean Sébastien Mora

C’est dans la vallée du Rift, à quelques kilomètres d’Awasa, dans l’État Oromia, que l’on trouve la plus grande serre d’Éthiopie. Sur plus de 25 hectares, des millions de tomates et de poivrons poussent dans des rangs longs de 500 m. Ici, un millier de jeunes femmes éthiopiennes emballent quotidiennement 50 tonnes de légumes. En vingt-quatre heures, après avoir roulé 200 km jusqu’à Addis-Abeba, ces denrées s’envoleront vers le Moyen-Orient, et on les retrouvera sur les étals des commerces de Dubaï ou d’Abu Dhabi.

Dans les alentours d’Awasa, plus d’un millier d’hectares ont été loués pour cent ans par la Saudi Star Company, propriété du riche businessman saoudien Sheikh Mohammed al-Amoudi. L’impact sur l’environnement est flagrant : « Annuellement, la ferme d’al-Amoudi consomme plus d’eau que 100 000 Éthiopiens », déplore Haile Hirpa, le président de l’Oromia Studies Association. En aval d’Awasa, du fait de l’irrigation, le niveau d’eau des grands lacs Shala et Abiata ne cesse de baisser : la hausse de la salinité a entraîné la quasi-­disparition des poissons et, par conséquent, la migration de la plupart des espèces de volatiles.


Mais c’est la province de Gambela, à deux jours de route à l’ouest ­d’Addis-Abeba, qui est en passe de devenir la cible majeure des investisseurs étrangers. La Saudi Star Company y est déjà installée avec un projet pilote de 10 000 hectares, et 300 000 hectares au total devraient lui être accordés pour produire du riz majoritairement destiné à l’exportation. Ici, on retrouve aussi la BHO Agro Plc, une firme indienne qui prévoit de produire de l’agrodiesel sur 27 000 hectares. Mais le « deal du siècle », selon le quotidien anglais The Guardian, c’est le bail qui vient d’être conclu, sur 250 000 hectares de terres, par le gouvernement éthiopien avec la société indienne Katuri Global Ltd pour une durée de cinquante ans : « La terre est très bonne et vraiment pas chère », se réjouit Karmjeet Sekhon, son manager. 


Depuis 2008 et la flambée des prix alimentaires, 50 millions d’hectares de terres arables dans le monde ont ainsi été achetés ou loués par des pays tiers. Ce phénomène d’accaparement concerne particulièrement l’Afrique et l’Amérique du Sud mais n’épargne pas l’Europe de l’Est. « Ne touche pas à ma terre. C’est ma vie ! » : c’est sous ce titre qu’au forum social de Dakar les ONG et les petits paysans déploraient les conséquences de cet accaparement, à savoir la relocalisation forcée de populations pastorales, la médiocrité des salaires payés dans les nouvelles fermes, la dégradation de l’environnement et l’échec des promesses de meilleures infra­structures. Au même moment, en raison des pluies insuffisantes, le gouvernement éthiopien demandait 226,5 millions de dollars d’aide humanitaire. En effet, alors que l’Éthiopie, un des pays les plus pauvres de la planète, constitue la deuxième population du continent, son gouvernement brade ses terres les plus fertiles aux investisseurs étrangers. « Je sais que c’est une question délicate et controversée. Mais nous ne voyons pas cela comme une menace », a déclaré le ministre de l’Agriculture, Tefera Deribew. Le gouvernement de Menes Zelawi maintient que les millions de dollars étrangers lutteront contre l’insécurité alimentaire du pays. Les tensions sur le terrain se multiplient car, outre les cultures vivrières, les investisseurs ont fait de l’Éthiopie, depuis cinq ans, le deuxième pays exportateur de fleurs du continent. « La plupart des ouvriers agricoles sont des jeunes femmes, plus libres, car [elles deviennent] indépendantes financièrement », insiste Selam Retta, manager pour la compagnie israélienne Roshanara Roses à Debre Zeit.


La question du bénéfice des investissements étrangers reste pourtant complexe et doit être comprise à long terme. Selon Lorenzo Cotula, chercheur à l’International Institute for Environment and Development, seuls des contrats bien menés peuvent garantir des emplois et de meilleures infrastructures. De plus, un rapport récent de la FAO et du Fonds international pour le développement agricole (Ifad) critique l’opacité des transactions éthiopiennes, dont le montant global apparaît rarement dans le budget de l’État. Enfin, l’Éthiopie loue à l’année 1 hectare de terre pour seulement 1,50 euro, ce qui encourage la spéculation foncière sur les denrées alimentaires. C’est dans ce contexte, sans consultation des indigènes, qu’un million d’hectares sont en passe d’être cédés dans la ville de Gambela.
À Ilea, à une cinquantaine de kilomètres de Gambela, l’implantation principale de Katuri Global Ltd est tournée vers d’immenses mono­cultures d’huile de palme et de canne à sucre, pour lesquelles on aménage et défriche au bulldozer. Sur les 90 km de piste qui suivent le fleuve Baro, le spectacle est édifiant : les hameaux abandonnés se comptent par dizaines, et la forêt a laissé place à un chaos de troncs et de cendres. Parfois, perdue dans ces étendus immenses, on croise une famille anuak, colis sur la tête, témoignant ainsi qu’elle a été déplacée de force.


Avant d’être louées par le géant indien, les terres non cultivées servaient au pâturage du bétail. Si certains Anuaks d’Ilea affirment n’avoir eu aucune compensation, la plupart ont, hélas, vite dépensé la contrepartie versée par le gouvernement éthiopien. « Alcool et gadgets achetés en ville : les gens n’ont pas su s’organiser », regrette Don Filipo, un prêtre italien qui aide la communauté. Privés de leurs terres, les indigènes survivent grâce à l’aide alimentaire internationale, et la situation est devenue ubuesque : au centre d’Ilea, les femmes attendent en file indienne que leur soit distribuée la ration de maïs hebdomadaire, tandis que la « nursery » de palmiers, à quelques centaines de mètres, reçoit les attentions des techniciens indiens.
Birinder Singh, le directeur marketing de Karuturi Agro Products, se défend en expliquant que l’éviction n’est pas son intention. « Nous aimerions engager autant de personnel que possible tout en étant compétitifs sur le marché mondial », confie-t-il. Mais seule une poignée d’Anuaks parvient à travailler pour la compagnie. Les journées sont longues et mal payées (entre 0,50 et 1,20 euro) ; par ailleurs, les Abeshas sont privilégiés à l’embauche car les Nuers et les Anuaks, les deux principales ethnies de Gambela, ont toujours été négligés par les gouvernements éthiopiens. De culture nilotique et vivant en contrebas des plateaux éthiopiens, ils sont considérés au pire comme des Soudanais, au mieux comme des citoyens de second rang par le pouvoir central. Au final, leur sort importe peu, leurs revendications sont réprimées. « Ondong Omont, un paysan d’Ilea qui s’était mobilisé, vient d’être assassiné. Beaucoup d’entre nous se sentent menacés », affirme Anywaa Othow, président de Gambela Peace and Development.


Depuis quelques jours, cependant, confronté à la pression internationale, le gouvernement éthiopien évoque à demi-mot la réduction de moitié du bail conclu avec Katuri Global Ltd. Car, en cinquante ans, la couverture forestière de l’Éthiopie est passée de 40 % à moins de 3 % de la superficie, et l’avenir de Gambela préoccupe : « Les investisseurs étrangers empiètent même sur le parc national, alors que les pratiques agricoles traditionnelles des peuples indigènes ont toujours préservé l’environnement naturel  », dénonce Argaw Kifle, directeur de l’Ethiopian Wildlife Conservation.
En outre, la question de l’eau est sur toutes les lèvres car le projet de Saudi Star Company utilise les réserves de la minuscule rivière Aloworo, dont dépendent 20 000 personnes pour la pêche, l’agriculture et leur consommation. Anywaa Othow met en garde : « Les petits paysans sont la base de la sécurité alimentaire. Outre les problèmes importés du Soudan, on doit s’attendre à des conflits et à plus d’instabilité politique. »



Le lien : http://farmlandgrab.org/post/view/18778
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Message par Vania » 18 Sep 2011, 16:52

Un reportage sur l'Ethiopie. Expropriation des paysans locaux, conditions de travail sur les nouvelles exploitations (de vastes latifundia), salaires de misère... Particulièrement choquantes, les premières images sur une vaste roseraie (une culture très indispensable dans un pays frappé par la famine).

C'est ici : http://www.dailymotion.com/video/xh3aig_le...n-ethiopie_news
Vania
 
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Message par Vania » 24 Déc 2011, 14:01

Salut, Zelda.

En me promenant sur les blogs des camarades conseillers municipaux, je suis tombé sur celui du copain de Lanester. Le 28 septembre de cette année, le conseil municipal soumettait au vote une subvention de 3000 euros pour l'Unicef, à destination de la corne africaine. En votant pour, le copain a fait cette intervention :

a écrit :MON INTERVENTION POUR LE GROUPE AU CONSEIL DU 28 SEPTEMBRE 2011
A propos du bordereau sur l’aide aux populations de la corne de l’Afrique : (3000€ pour l'UNICEF)

Notre groupe votera  cette subvention mais en faisant remarquer que, en plus de l’absence de pluie dans la région, la responsabilité est à chercher parmi les  grands groupes capitalistes internationaux qui ont fait main basse sur des centaines de milliers d'hectares pour leurs cultures industrielles, au détriment des cultures vivrières.
Les coupables sont ces capitalistes des pays riches qui, accaparant des stocks de céréales en quantité suffisante pour nourrir la terre entière, créent une pénurie artificielle pour pouvoir les revendre au prix fort sur le marché mondial.
En un an, les prix alimentaires mondiaux ont augmenté de 33 % en moyenne. En Afrique de l’est, la hausse des cours des aliments de base, le maïs (+ 100 %) et le sorgho (+ 240% dans certaines régions de Somalie), plonge des millions de personnes dans la famine.
Retirer à ces groupes affameurs leur pouvoir de nuisance, c’est, au sens propre, une question de vie ou de mort.
Quant au gouvernement français, quand il veut s’occuper de l’Afrique, il trouve les moyens. Ainsi l’intervention française en Libye a coûté 1,4 million d’euros par jour aux contribuables, alors que pendant ce temps  les sommes promises par les États n'arrivent qu'au compte-gouttes...et beaucoup trop tard ! Cela fait trois ans qu’on voyait venir cette famine.
Selon les organisations humanitaires: il faudrait au moins 1,32 milliard d'euros pour nourrir les populations affamées d'ici novembre, et certainement plus ensuite en attendant les récoltes. Malheureusement, on est loin du compte.


http://cyril-lebail.blogspot.com/2011/10/m...-groupe-au.html

La presse parle beaucoup moins de cette famine pour l'instant, mais elle n'est pas finie pour autant. Et ce genre de discussion peut ressurgir.
Vania
 
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Message par Sinoue » 10 Fév 2012, 17:44

a écrit :Le Sahel menacé par une crise alimentaire prévue depuis octobre
LEMONDE.FR | 10.02.12 | 17h38  •  Mis à jour le 10.02.12 | 17h38


Carte de suivi par images satellitaires du couvert végétal au Sahel, mise au point par Action contre la faim. En rouge, les zones particulièrement vulnérables.ACF

Alors que la menace d'une famine au Sahel se rapproche, la Commission européenne a décidé, mercredi 8 février, d'augmenter son aide aux 12 millions de personnes menacées en la portant à 123,5 millions d'euros.
La sonnette d'alarme a été tirée dès décembre par des organisations comme l'Unicef, Action contre la faim (ACF) et le Programme alimentaire mondial. Les risques de crise alimentaire sont même connus depuis le mois d'octobre, notamment chez ACF, grâce à un système basé sur le traitement d'images satellites révélant les anomalies de production de biomasse, c'est-à-dire les zones où le couvert végétal est moins important. Ce suivi satellitaire, mis en place dès 2002, permet ainsi de déterminer dès la fin de la saison des pluies (septembre-octobre) les zones les plus touchées par la sécheresse et, à l'inverse, celles où il y a une concentration inhabituelle de végétaux, et de troupeaux. Ce relevé permet ensuite de calculer le stock de biomasse dont les populations disposeront jusqu'à mai-juin.

UNE CRISE PLUS PRÉCOCE QUE D'HABITUDE

Ce système a révélé que, en 2012, les stocks ne seront pas suffisants pour tenir jusqu'à la prochaine récolte, et que la "période de soudure", la période entre deux récoltes, va arriver plus tôt que d'habitude. Ce moment particulièrement difficile pour les populations agricoles du Sahel va débuter dès mars, alors qu'elle se situait en mai-juin les années précédentes. Des informations qui ont permis à l'ONG d'anticiper la situation.

"Cette année, on a utilisé à fond le système d'imagerie satellite dès novembre-octobre : on a établi un plan de réduction des effets de la crise, et on a commencé le transfert d'argent vers les populations les plus vulnérables", déclare Frédéric Ham, responsable des risques de catastrophe et de l'imagerie satellite pour ACF Espagne. Un budget de 13 millions d'euros pour le Burkina Faso, le Mali, le Niger, le Tchad et la Mauritanie, où les petits agriculteurs doivent faire face à une baisse de 14 % des récoltes.

"Normalement, on estime qu'il y a une famine tous les cinq ans dans cette région d'Afrique, ce qui permet en général aux populations de reprendre des forces. Mais à cause du dérèglement climatique, on observe un raccourcissement du cycle à deux ou trois ans", révèle Frédéric Ham. Après la grande sécheresse de 2005 et celle de l'été 2010, les habitants du Sahel n'ont pas eu le temps de reconstituer leurs stocks, et ce malgré la relativement bonne récolte de l'été 2011.


Fews.net, le système de veille de la famine mis en place par US Aid, estime que, au Sahel, la Mauritanie, le Mali et le Tchad sont les zones les plus vulnérables d'ici mars 2012.Fews.net
"La famine n'est jamais inévitable, la situation est prévue depuis octobre, révèle Alain Antil, chercheur et responsable du programme sur l'Afrique subsaharienne à l'Institut français des relations internationales. Là on ne pouvait pas dire qu'on ne savait pas." Depuis plusieurs mois, le site Fews.net, le système de veille alimentaire mis en place par l'Agence des Etats-Unis pour le développement international, a déterminé les pays risquant d'être touchés par la famine.

LE BUSINESS DU GRAIN

Pour le chercheur, les causes de la crise actuelle étaient prévisibles. La pénurie de grains causée par le déficit de pluie est toujours entretenue par une augmentation des prix. Dès le début de la récolte, les marchands grossistes ont acheté mil, riz et sorgho pour les revendre à des prix beaucoup plus élevés en mars. De cette manière, les difficultés rencontrées directement par les paysans pour se nourrir se sont répercutées sur les populations des villes, et même parfois sur les zones disposant de bonnes récoltes.

Une logique économique très classique aux répercussions parfois absurdes. "En 2005, lors de la dernière crise alimentaire grave au Niger, les marchands nigériens revendaient les grains à l'étranger alors que les associations d'aide humanitaire distribuaient du grain aux populations !", se souvient Alain Antil.

Des mécanismes connus, contre lesquels les ONG ne peuvent rien. "Alors que faire ? Exiger de l'Etat qu'il régule les prix ? Un marché parallèle ne se mettra-t-il pas automatiquement en place ?", s'interroge le chercheur.

A cela s'ajoute des facteurs politiques : dans le nord du Mali, la pénurie alimentaire est aggravée en raison de la révolte touareg qui empêche les associations d'apporter de la nourriture. Et avec les crises libyennes et ivoiriennes, de nombreux migrants sont revenus dans leurs pays, aggravant la situation.

Delphine Roucaute
Sinoue
 
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Inscription : 25 Déc 2008, 13:10

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