Conjoncture. Quand le pétrole s’emballe

Dans le monde...

Message par mael.monnier » 13 Mai 2004, 17:17

a écrit : La hausse du brut et des rumeurs de relèvement des taux d’intérêt pourraient menacer la croissance aux États-Unis et en Europe.

L’inquiétude monte concernant l’impact de la hausse des prix du brut dans les pays OCDE. Singulièrement aux États-Unis où John Snow, le secrétaire au Trésor américain, estime : " Les prix élevés de l’énergie que nous voyons aujourd’hui ne nous aident pas. " L’Europe que les experts estimaient protégée, jusque-là, par le décalage monétaire positif entre l’euro et le dollar - la devise américaine régnant sur les marchés de l’énergie mondiaux - est désormais atteinte. De fait, le baril s’échange sur les marchés mondiaux dans une fourchette oscillant entre 38 et 40 dollars, soit une hausse selon l’AIE (Agence spécialisée de l’OCDE dominée par les spécialistes américains) de 10 dollars entre mars dernier et trois ans plus tôt.

L’AIE soulignait dans sa dernière étude qu’" une augmentation durable de 25 à 30 dollars du prix du baril entraînerait dans les pays de l’OCDE une baisse globale du PIB de 0,4 % durant la première et la deuxième année de prix élevés ". Par réflexe pavlovien, dans la foulée, elle dénonçait " le transfert de valeur des pays importateurs vers les pays exportateurs ". On l’aura compris, alors que le Proche et le Moyen-Orient sont à feu et à sang, les Orientaux arabes s’arrangent encore pour extorquer le bon argent des grands pays civilisés occidentaux.

L’intervention de l’Arabie ssaoudite, mardi, a cependant calmé les esprits, et les cours du brut sont légèrement retombés ces dernières heures. En fait, le risque majeur auquel sont confrontés les grands pays OCDE ne tient pas tant au prix du pétrole qu’à celui de la perspective d’une hausse des taux d’intérêts aux États-Unis, qui serait immédiatement suivie dans cette voie par la par la Banque centrale européenne (BCE).

Certes, la hausse des prix du brut peut rebondir d’autant plus aisément en Europe que les prix des carburants sont essentiellement constitués de taxes (TIPP en France, par exemple) et que l’inflation des prix à la consommation va s’en trouver pénalisée. Une fois de plus on sera tenté de faire porter le chapeau à l’Organisation des pays producteurs de pétrole (OPEP).

Pour autant l’OPEP ne représentant que 50 % environ des besoins de l’OCDE, et la hausse des prix est constatée dans d’autres secteurs de l’activité des matières premières. Ainsi les cours de l’acier sont-ils dopés par une forte demande chinoise, demande qui tend à progresser également en matière d’énergie pétrolière mais ne représente que 7 % de la demande mondiale.

La hausse annoncée du loyer de l’argent ne relève pas selon les experts de la flambée du pétrole dont, au demeurant, le déploiement militaire en Irak et la perspective d’action de sabordage pétrolier en pleine mer constituent les principaux ressorts. Pour l’essentiel, la montée des taux d’intérêt relève d’une conjoncture qui, bien qu’hésitante dans les pays du G7, est soumise à la guerre des OPA, et d’une crainte de la baisse des rendements sur les actions. Les spéculateurs se réfugient alors sur les obligations garanties par les taux, les actions l’étant par les dividendes.

Aux États-Unis, la hausse de croissance repose toujours sur des déficits jumeaux colossaux (budget-dette) qui pompent l’épargne mondiale et qui alimentent non seulement des conflits coûteux (orchestrées directement ou non par les États-Unis) le long d’un croissant qui va de l’Atlantique en Mauritanie jusqu’en Afghanistan (thème du prochain G7 de Savanha) mais la reprise des guerres financières à travers la multiplication d’OPA géantes sur toute la planète.

En Europe, la stagnation de la croissance se confirme. Elle sera inférieure en prévision à 1,5 %, en Allemagne, locomotive essoufflée de l’UE. En Italie et en France, les gouvernements ne veulent ni ne peuvent agir sur le chômage de masse avec des politiques restrictives en matière de formation et de dépenses salariales et sociales. Tous les gouvernements confondus, avec des nuances sociales ici où là, sont en fait coincés par le carcan du pacte de stabilité - dont ils respectent, si ce n’est la lettre, la logique. Ce mur, qui est considéré comme une protection indispensable à la rentabilité des capitaux investis sur les marchés financiers, apparaît ainsi dans sa destination essentielle : préserver coûte que coûte la haute finance des attentes sociales des Européens. L’objectif reste de faire de l’ Union le chalenger de l’Amérique en matière de compétition financière pour financer les OPA et autres fusions et acquisitions.

La remontée attendue du dollar qui se dessine face à la devise européenne devrait, nous explique-t-on, donner un nouveau tonus aux exportations européennes. Rien n’est moins sûr. Les pays du Sud vont en effet voir leur facture pétrolière libellée en dollars progresser de manière astronomique. Ce qui va alimenter les phénomènes d’exclusion de blocs entiers de la planète, avec les effets que l’on commence à percevoir dans les grandes zones de conflits.

Okba Lamrani
mael.monnier
 
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