par meichler » 03 Juil 2008, 14:31
Ce n'est pas (seulement) une «mère de famille qui retrouve ses enfants», c'est d'abord et surtout une opération politique d'«union nationale» en Colombie autour d'Urribe, et aussi une opération politique d'«union nationale» en France, autour de Sarkozy. Décidément la «madone» Ingrid est bien utile. Elle tient bien son rôle sur les écrans : «Vive l'armée ! Vive le président Urribe !». Elle se révèle pour ce qu'elle a toujours été : une politicienne bourgeoise expérimentée (une heure de discours devant les caméras, à sa descente d'avion sur la base militaire de Bogota, et ce après plus de 6 ans de détention !), fraiche et dispose pour prendre sa place dans le jeu politique bourgeois. Des pauvres, des exploités, des travailleurs broyés par les politiques impérialistes, par la crise de ce système piourri jusqu'à la moëlle, pas un mot ! Par contre : flots de mots tous plus mensongers les uns que les autres sur les «droits de l'homme» et les bienfaits de la «démocratie» capitaliste. Prochaine étape à présent : la liquidation (politique et/ou militaire et physique des «FARC»). Quelle que soit l'ineptie politique désolante de ce groupe armé débile, on ne peut oublier qu'il est systématiquement présenté (mensongèrement !) par tous les «médias» de la planète comme «marxiste», ce qui jette une louche de plus de discrédit sur le programme révolutionnaire du socialisme, du marxisme. Ensuite : Il n'y a nullement à se réjouir, au compte de la bourgeoisie, d'une probable disparition des FARC. Pour les paysans pauvres et le prolétariat de Colombie, cela signifiera : les mains plus libres pour les grands propriétaires terriens (aussi, souvent, "narcos") et leurs chiens de garde, groupes paramilitaires, et gouvernement Urribe, pour exploiter davantage, terroriser et assassiner tous les travailleurs de la terre et des villes.
La réaction de tous pays et sous toutes ses formes compte bien exploiter les déluges indécents d'«émotion» médiatique, déversés à foison par les télés du monde entier, exploiter cet événement au compte des maîtres capitalistes contre tous les exploités et opprimés, pour les éloigner du socialisme, de la révolution, de la lutte des classes, de la défense de leurs intérêts, immédiats et historiques, pour les lier davantage à la classe ennemie («Tous unis dans l'émotion !»). Cet écoeurement est à vomir. Déjà en France, Sarkozy n'a de cesse d'occuper les tribunes médiatiques pour étouffer le vacarme de ses récentes bévues politiques, de ses sales coups contre les travailleurs, pour détruire les acquis et les intérêts ouvriers, de ses mensonges éhontés sur le pouvoir d'achat... Alors, oui, décidément, il a bien raison, de son point de vue, de "remercier" Ingrid !
Juste une dernière remarque en passant : une jeune assistante sociale de mon entourage me faisait remarquer que cette diplômée de Sciences Po Paris qu'est Ingrid Betancourt, a après plus de 6 ans de captivité dans la jungle colombienne, l'air bien plus frais, les dents en bien meilleur état, et le teint bien plus reposé, que nombre de personne qui dorment dans la rue, dont elle a à s'occuper, ici en France.
Faut-il en conclure que les conditions d'une Ingrid Betancourt, aux mains des ces «barbares moyenâgeux» des FARC dans la jungle colombienne, seraient moins dures que celles faites aux pauvres sur l'asphlate de nos villes "modernes" impérialistes ? La question mérite d'être posée, je crois...
«Ni rire ni pleurer, comprendre.»
(Baruch SPINOZA)