La Libye, l'autre pays du mirage

Dans le monde...

Message par Sinoue » 24 Août 2011, 19:45

Personnellement je pense que seule la prise du pouvoir par le prolétariat international pourra assurer des libertés démocratiques au peuple libyen. Les nouveaux gérants du pouvoir se verront obligés de souscrire aux volontés de l'imperialisme international mené par les Etats-Unis.

Quelle liberté démocratique pourrait laisser un état qui est pied et poing lié par la bourgeoisie? Seules quelques miettes laissées à une classe moyenne pourrait donner l'impression d'une presse "libre" qui laisserait quelques colonnes a des intellectuels soucieux de beaux phrasés. Mais la Libye ne dispose pas d'assez de ressources pour ça. De plus aucun pays depuis une vingtaine d'années n'a pu passer du stade de dictature à un régime plus relaxe.

Le taux de profit de la bourgeoisie ne se développant plus que grace a des perfusions étatiques et a une surexploitation du prolétariat. Les premieres causant de graves désordres usuraires, la seconde comportant des limites difficilement décelables; il ne reste plus aux états bourgeois qu'à forcer les dernieres poches de résistance contre leur razzia sur les matieres premieres. Je me demande combien de temps vont encore tenir l'Iran et le Venezuela. Surement le temps de se retirer partiellement d'Irak et d'Afghanistan.

Voilà l'avis d'une personne regardant tout cela de loin avec les yeux tout ouverts.
Sinoue
 
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Message par Vania » 25 Août 2011, 01:19

Bonsoir, Granit, bien qu’il soit déjà nuit.

Je parlerai d’abord de ta première réponse, où il est question du paysannat. Tu dis tout d’abord que la « révolution » agraire n’est plus aussi importante aujourd’hui. Sur ce postulat, je suis en désaccord. Des luttes de paysans sans terres, il y en a tout les jours de par le monde, en Amérique latine, sur le continent africain, en Asie, dans les Caraïbes… Ces paysans sans terres peuvent avoir affaire à la police, à l’armée, quand ce n’est à des milices locales, dûment subventionnées par les propriétaires terriens. Ce qui se règle souvent par des morts, du côté paysan sans terres, bien sûr. Si cet affrontement existe, c’est sans doute que la question agraire existe. Et du coup survit aujourd’hui, dans bien des pays du Tiers Monde, une paysannerie sans terres, aux côtés aussi d’un petit paysannat, ne disposant pas de terres, ou alors de faibles surfaces de terres, et les plus pauvres, face à de gros propriétaires terriens. Si de tels affrontements existent, c’est qu’il y a lutte autour de cette question. Une lutte de classe, qui semble vue d’ici, de France, du pays de 1789 et de 1793, bien surannée, mais qui est toujours bien réelle dans une grande partie du monde, où les conquêtes élémentaires de la révolution bourgeoise n’ont jamais été atteintes, ce malgré la période des « indépendances » et du rôle qui eût la bourgeoisie locale… qui ne s’attaquât jamais aux structures féodales des sociétés dont elle prenait la tête.
Dans ta seconde réponse, tu abordes la question de la classe ouvrière libyenne, pour l’éluder de suite, en affirmant que cette classe ouvrière n’est pas d’origine nationale. Tout d’abord, quelque soit le pays considéré, le prolétariat est la plupart du temps, aujourd’hui, international. Pour la bourgeoisie du pays donné, cela dépend souvent de la main d’œuvre disponible localement. Pour la France, par exemple, le poids du paysannat au sein de la population active, très important, a longtemps été un handicap. Et sa main d’œuvre ouvrière, il lui a fallu la chercher hors de ses frontières. Cela ne veut certainement pas dire en tout cas que la classe ouvrière libyenne n’a aucun poids en Libye… sous le prétexte qu’elle n’est pas « libyenne » ! Et puis, cela veut dire quoi « libyen » ou « libyenne », pour un prolétaire ? D’où que soit originaire ce prolétariat, c’est lui qui produit les richesses en Libye, dont profite (un peu) la bourgeoisie libyenne, et surtout (beaucoup) la bourgeoisie des métropoles impérialistes. Cette classe ouvrière de Libye, bien réelle et bien vivante, même si les conditions de la guerre civile l’ont sans doute affaiblie physiquement, ce dont nous témoignèrent la longue litanie des ouvriers de Libye fuyant les combats et tentant de regagner leurs terres natales et leurs proches, qui en Tunisie, qui en Algérie, qui en Egypte, qui au Maroc… Cette classe ouvrière, tu l’annules, pour nous parler… de la bourgeoisie libyenne. Et de nous chanter ces louanges, et son merveilleux programme, nommé « feuille de route »… Même pas de programme… « Feuille », par ce que cela est léger, sans doute, et « route », pour ne pas trop se perdre…
Depuis le début du XXe siècle, en fait depuis 1905, la bourgeoisie a fait, en Russie et pour le reste du monde, la démonstration qu’elle n’était plus capable de révolutionner quelque société que ce soit. Déjà, la route lui est barrée par la grande bourgeoisie des métropoles impérialistes, qui dominent le monde, ses marchés, ses ressources, quand ce ne sont pas ses Etats. Depuis, aussi, la bourgeoisie de ces pays n’ayant pu se développer, est trop faible, plus faible encore que le prolétariat, qui lui, se développe. Ce prolétariat, elle le craint. Il est nombreux, concentré, et tient en ces mains l’appareil de production. En 1905, en Russie, lorsque commence la première révolution, le prolétariat est largement minoritaire, mais concentré, et déjà fort. La bourgeoisie frappe alors à la porte du pouvoir, oui, mais le prolétariat aussi. La bourgeoisie se réfugie alors dans les bras des féodaux, et appuie la répression. Elle a renoncé à sa révolution… Encore enfant et faible, elle est déjà sénile… Il en est de même en Libye, où le prolétariat est infiniment plus nombreux et plus fort, même s’il n’est pas estampillé « libyen ».
Une dernière remarque, à ton endroit, celle-là. Par tes deux réponses, tu éludes la paysannerie, puis le prolétariat. Te reste… la bourgeoisie… dont tu attends tout, et surtout sa révolution… Trop tard pour cela, de plus d’un siècle… En fait, tu n’as pas la moindre confiance dans les classes populaires. Le paysannat, tous ses problèmes sont réglés ! La classe ouvrière : elle n’est pas libyenne ! Reste la bourgeoisie…
Finalement, mon ton ironique ne fut pas inutile : il t’a contraint à nous en dire plus.
Vania
 
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Message par quijote » 25 Août 2011, 09:52

Renseignes toi .. qui travaille entre autres dans les exploitations petrolieres si ce n est le proletariat ? oui , le proletariat existe en Lybie ,il est concentre , indispensable ,, quoiqu il lui manque une conscience de classe et qu il ait ete etranger a cette lutte qui a eu lieu et a encore lieu ...quant a la bourgeoisie lybienne .. qu attendre d' elle elle est divisee en diverses factions , et la partie revendiquant la democratie , c est essentiellement la petite bourgeoisie intellectuelle : medecins , informaticiens , etc . Je remarque en tout cas que sa cohabitation avec les autres factions au seiin du CNT ne semble pas trop la gêner pour l ´heure . L ´"uinion sacree " en quelque sorte ? Ne peut-on donc avoir des doutes sur les intentions democratiques de cette bourgeoisie lybienne et sa volonte de rompre totalement avec l ímperialisme? . En tous cas , les grosses firmes petrolieres ne paraissent pas trop inquietes .. et semblent s áccommoder du nouveau pouvoir .
quijote
 
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Message par Puig Antich » 25 Août 2011, 13:09

Indépendemment de la discussion sur la Libye où des éléments complexes qui peuvent nous échapper entrent en ligne de compte, j'aimerais tout de même nuancer ce que dit Vania.

Effectivement le poids de l'impérialisme, la persistance des structures féodales, etc., sont des réalités dans bien des régions du monde qui obstruent la réalisation du programme " bourgeois-démocratique", c'est à dire la révolution bourgeoise, l'introduction des rapports purement capitalistes de production, avec la révolution agraire et le citoyen atomisé et " égal en droit " devant la loi qui masque la dure réalité de l'exploitation. Cette forme "pure" de la société bourgeoise reste un privilège des sociétés riches, là où se concentre le capital financier - encore que, là aussi, un certain nombre de questions "démocratiques" restent en suspens et sont destinées non pas à s'amoindrir, mais à s'aggraver et à devenir plus visibles avec la crise.

Ceci dit, avec des hauts et des bas, des avancées et des reculs, et sans jamais accomplir ses tâches " jusqu'au bout ", cette révolution bourgeoise a eu lieu dans bien des pays au cours de la seconde moitié du XXème siècle : Chine, Cuba, Algérie, etc. La bourgeoisie locale n'a jamais, bien sûr, pu aller au-delà de ce que permettait le marché mondial, mais elle a pu désserrer certains étaux, amoindrir les privilèges de l'impérialisme et des classes pré-capitalistes, etc.
Puig Antich
 
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Message par Puig Antich » 25 Août 2011, 13:23

Quant au CNT, il faut lire sa " déclaration constitutionnelle ", adoptée dans les premiers temps de la rebellion, et où cohabitent quelques revendications sociales, principes démocratiques bourgeois classiques et Charia comme source principale de la loi. Khadafi avait vidé le pays de ses frères musulmans par une répression féroce, ces derniers vont chercher à prendre leur revanche : le capital rentier d'Etat risque d'être remplacé par un capital commercial "halal", d'où le fait d'ailleurs que le CNT s'accomode bien de l'idéologie "libérale" portée par les grandes puissances qui le soutiennent.
Puig Antich
 
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Message par Vania » 25 Août 2011, 18:35

"Le CNT libyen demande une aide financière d'urgence

MILAN (Reuters) - Mahmoud Djibril, Premier ministre du CNT, le gouvernement rebelle en Libye, a souligné jeudi l'urgence pour l'Occident de venir en aide aux nouvelles autorités et à la population libyennes, faute de quoi le pays risquerait la déstabilisation.

"Le principal élément qui pourrait concourir à cette déstabilisation, ce serait que le Conseil national de transition ne soit pas en mesure de répondre aux besoins essentiels de la population et de payer les salaires qui n'ont pas été versés depuis des mois", a-t-il dit lors d'une conférence de presse à Milan, à l'issue d'un entretien avec le président du Conseil italien, Silvio Berlusconi.

"Le (nouveau) gouvernement (libyen) ne pourra pas répondre à ses priorités s'il n'a pas tout de suite l'argent nécessaire", a-t-il insisté.

Silvio Berlusconi a annoncé à cette occasion que Rome allait commencer à débloquer 350 millions d'euros d'avoirs libyens qui étaient gelés dans des banques italiennes en raison de la guerre civile.

Au total, l'Italie a gelé environ huit milliards de dollars d'avoirs libyens dans le cadre des sanctions contre le régime de Mouammar Kadhafi.

Le groupe pétrolier et gazier Eni, le plus important opérateur étranger en Libye dans le domaine énergétique, doit signer un accord sur la fourniture gracieuse d'une "grande" quantité de pétrole à la Libye afin de répondre aux besoins les plus immédiats de la population, a ajouté le chef du gouvernement italien.

Cet accord sera probablement signé lundi prochain à Benghazi, a poursuivi Silvio Berlusconi, qui avait également évoqué dans un premier temps la fourniture de gaz, ce qu'ENI a ensuite corrigé.

Tripoli, où des combats se poursuivent entre insurgés et loyalistes, n'a plus d'eau courante, a par ailleurs souligné le dirigeant italien.

Le PDG d'Eni, Paolo Scaroni, estime que sa production de pétrole en Libye reprendra d'ici six à dix-huit mois, en fonction des gisements. "Cela va prendre du temps. Je dirais six à dix-huit mois" a-t-il dit à l'issue de la rencontre entre Silvio Berlusconi et Mahmoud Djibril.

La priorité d'ENI, a ajouté Paolo Scaroni, est de faire en sorte que son gaz libyen se remette à circuler et il a réaffirmé n'avoir aucune inquiétude concernant les contrats d'Eni en Libye.

Silvia Aloisi, avec Gianluca Semeraro; Guy Kerivel pour le service français, édité par Gilles Trequesser"

Le "CNT" a demandé et accepté l'aide militaire des puissances impérialistes pour s'emparer du pouvoir (les mêmes puissances qui avaient peu avant soutenu et armé le régime de Kadhafi), ayant à peine conquis la capitale, il déroule un tapis rouge devant les trusts du pétrole, qui trépignent d'impatience de faire rentrer dans leurs caisses les dividendes du pétrole, aujourd'hui, il appelle au secours... les rois de la finance mondiale, spécialistes ès spéculations, krachs et spoliations... pour l'aider à payer les salaires en retard. Il pourrait prendre sur les richesses accumulées par la grande bourgeoisie libyenne, ou sur celle accumulées par les chefs des tribus, les féodaux du coin. Mais non! Le CNT, plutôt que de toucher aux richesses des nantis, demande à ce que l'impérialisme lui passe autour du cou le noeud coulant de la dette. Ou plutôt autour du cou des classes populaires. Enfin, Granit, c'est cela une révolution bourgeoise????
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Message par Vania » 25 Août 2011, 18:57

Attrapé au vol en parcourant EL Watan, quotidien algérien : "Nous promettons de favoriser les pays qui nous ont aidés, notamment au travers du développement de la Libye. Nous les traiterons en fonction du soutien qu'ils nous ont apporté", a déclaré Moustapha Abdeljalil, chef du Conseil national de transition (CNT), l'organe politique de la rébellion.
"Je ne dispose pas du chiffre exact, mais le conflit armé a fait plus de 20.000 morts", depuis le début mi-février de l'insurrection contre le régime de Mouammar Kadhafi, a-t-il également annoncé lors d'une conférence de presse à Benghazi, "capitale" rebelle dans l'Est.
Interrogé sur la possible présence d'armes chimiques dans le pays, il a assuré ne rien craindre d'elles: "en tant qu'ancien membre du régime, je sais bien que ces armes sont périmées", a-t-il dit."

Le lien : http://www.elwatan.com/depeches/libye-prio...-137561_167.php

Que le "nouveau" régime se montrerait gracieux envers les puissances qui l'ont armé et soutenu, c'était une évidence. Mais c'est la dernière phrase que je veux souligner : "en tant qu'ancien membre du régime"... Voilà, le régime Kadhafi à juste un peu changé de peau, et il poursuit, sans Kadhafi... Combien d'autre membres de ce CNT pourrait dire "en tant qu'ancien membre du régime"... Beaucoup! Là encore, pas de révolution, même bourgeoise. A moins de croire que c'est l'entourage direct de Louis XVI qui a fait la révolution...
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