par Puig Antich » 11 Août 2008, 00:01
Sans vouloir contester la modération d'Ottokar, il me semble tout de même difficile de discuter la politique du PT sans prendre des exemples concrets - dont l'éclatant exemple Algérien. Si on se cantonne à discuter des termes " république " et " nation une et indivisible ", c'est sûr qu'il sera aisé d'avoir raison sur les principes, mais on ne fouille pas vraiment les choses, on ne regarde pas ce que cette orientation implique dans la lutte politique concrète.
La camarade vérité nous présente le FLN comme un parti socialiste. Le FLN, c'est le parti qui a structuré l'Algérie de l'indépendance jusqu'aux années 90, et le RND - et dans un certain sens le FIS aussi d'ailleurs - n'en est qu'un rejeton, une vitrine créée par les gens du système pour garder le contrôle sur le pays. Comme parti unique, jusqu'à la révolte de 88, le FLN abritait, et le régime algérien actuel dont il est issu abrite, les intérêts contradictoires - mais pas antagoniques - d'un grand nombre de couches sociales : bureaucratie d'Etat, bourgeoisie nationale, officiers de l'armée, petite-bourgeoisie, intellectuels, etc. C'est donc un parti bourgeois.
Par la culture de l'unanimisme qui y régnait, les méthodes d'épuration de toute opposition ( torture des dirigeants communistes dès le coup d'Etat de Boumedienne) - méthodes qui existaient dès avant l'indépendance (parles en avec les vieux, l'OCI avait des contacts avec les messalistes rivaux du FLN)-, etc., c'est un parti autoritaire, dictatorial, qui a cherché a comprimer les contradictions insolubles (dans le cadre capitaliste) de la société algérienne. Par le rôle qu'il a joué dans la lutte contre l'impérialisme français, c'est un parti qui fut un parti de masse, populaire. En d'autres termes, et comme son nom l'indique, un front de plusieurs classes, sous la direction de la bourgeoisie nationale en constitution.
Qu'un militant comme toi, qui se revendique du communisme, nous présente ce parti populiste comme un parti socialiste, en d'autres termes un parti ouvrier, en dit long sur les déformations idéologiques qui ont cours au PT. Un peu comme ce que tu dis sur la Charte d'Amiens et le syndicalisme - un simple coup d'oeil sur les thèses de l'Internationale Communiste suffit à voir que ce n'est que plat révisionnisme.
Ce que tu dis plus haut, sur le fait que les travailleurs algériens ne sont pas des " trotskistes ", qu'ils ne sont pas d'accord pour la révolution, qu'ils ont des illusions dans le régime, le gouvernement, etc., pour justifier l'intégration de fait du PT aux institutions algériennes relève ta méconnaissance de la situation en Algérie. Outre le fait que même dans une période réactionnaire à 100%, avec zéro activité des masses, cette politique serait fausse, il suffit de regarder les trente/quarante dernières années pour voir que les travailleurs n'y sont pas complètement défaits - malgré les impitoyables années noires qui ont fait suite à la montée du FIS et à l'interruption du processus électoral en 92.
Des grèves ouvrières de la fin des années 70, au "printemps berbère" (il y aurait d'ailleurs à dire sur votre opposition quasi-panarabique aux mouvements récents en Kabylie) début des années 80, Octobre 88, et une lente reprise de la lutte de classe fin des années 90, début des années 2000 mouvement général de la population, et depuis pas un mois sans que dans un quartier, une entreprise, ici ou là, toute une fraction du peuple se soulève contre l'incurie gouvernementale. D'ailleurs Bouteflika a été obligé de reculer plus d'une fois (santé, privatisations, etc.).
Alors, dans ce contexte, il y aurait matière à éduquer, même de manière limitée, des militants dans la tradition du communisme révolutionnaire, dans la perspective d'un pouvoir socialiste, d'un régime prolétarien. Le PTA a choisi plutôt l'intégration - pas totale, certes - à la politique parlementaire, aux simples petits jeux des élections, les courbettes au régime pour se faire son nid. Il lutte dans son cadre pour de simples revendications démocratiques bourgeoises d'indépendance nationale, de redistribution de la rente pétrolière, etc. D'ailleurs, le dernier post du camarade vérité est un bon résumé du renoncement total au léninisme, à l'objectif de la prise du pouvoir insurrectionnel par la classe ouvrière : " le PT recourt à tous les instruments de la démocratie " (entendez : démocratie bourgeoise).
Alors, il y a au PT des centaines de militants, comme toi, attachés à l'objectif historique du communisme - mais avec cette folie en tête qu'il suffirait à un pays - même l'Algérie qui n'en fait pas partie ! - de " rompre avec l'UE ", et autres formules quasi-pavloviennes, pour qu'il se transforme immédiatement, par une sorte de transcroissance automatique, en une République Socialiste. Des distorsions inimaginables doivent être nécessaires de la part de la direction pour expliquer et justifier cette politique au nom du trotskisme ou de la révolution, mais au final en ressort une politique qui n'est, elle, pas révolutionnaire du tout.