Que se passe-t-il au Moyen-Orient ?

Dans le monde...

Message par Pastorius » 19 Juil 2006, 21:00

Tout ceci est encore loin de permettre à un néophyte de comprendre ce qui se passe aujourd'hui au Liban. Je veux bien me jeter à l'eau pour fournir quelques éléments d'interprétation mais, pour commencer, je crois qu'il est utile de revenir sur ce qui s'est passé il y a un an.

Je cite ici un extrait d'un article paru dans CPS il y a un an:

a écrit :Liban : la « révolution du cèdre» vainct grâce à Chirac et au Pentagone

Le 14 février mourait, dans l’explosion d’une voiture piégée, l’ancien premier ministre libanais, Rafic Hariri. Aussitôt, les autorités américaines accusaient la Syrie de l’attentat et étaient relayées, sur place, par une « opposition unifiée » proclamée, en décembre, au Bristol, un hôtel cinq étoiles de Beyrouth. A son tour, Chirac se précipitait aux funérailles de son « ami », se prononçait en faveur d’une « commission d’enquête internationale », puis réclamait, de concert avec Bush, l’application immédiate de la résolution 1559 de l’ONU – résolution adoptée par eux quelques mois plus tôt et exigeant le retrait des troupes syriennes installées au Liban, ainsi que le désarmement des milices (le Hezbollah et les camps palestiniens).

Dans les semaines qui suivent, l’ « opposition du Bristol » organise des manifestations de dizaines, puis de centaines de milliers de manifestants pour exiger le départ des troupes de Bachar El-Assad et la démission du gouvernement pro-syrien dirigé par Omar Karamé. Le 29 février, Karamé annonce la dissolution de son gouvernement, puis, devant l’impossibilité de constituer un gouvernement d’ « union nationale » intégrant l’opposition, présente sa démission – refusée par le président Lahoud – le 29 mars. Parallèlement, les troupes de Damas s’engagent à un retrait progressif de leurs troupes et agents, avant de présenter publiquement, le 7 avril, un calendrier de retrait définitif qui doit prendre fin avant le 30 avril – date du début des élections législatives.

Est-ce à dire que, comme l’ont laissé entendre la télévision, la radio et la presse française, les rassemblements organisés par l’opposition - que certains appellent la « Révolution du Cèdre » - est parvenue à imposer la volonté du « peuple libanais » ? Les choses sont assurément plus compliquées, si l’on tient compte du fait que des manifestations pro-syriennes organisées en particulier par le Hezbollah, ont rassemblé des foules au moins équivalentes à celles qu’encadre l’opposition. Il suffit, au contraire, de constater que la Syrie est aujourd’hui l’objet d’une menace militaire considérable – bordée à l’est par l’Irak, au sud par la Jordanie et Israël, au nord par la Turquie – pour constater que le grand vainqueur de cet affrontement est l’impérialisme américain.

Politiquement, la fameuse « opposition du Bristol » repose d’ailleurs sur du carton-pâte : on y trouve, entre autres, des fascistes chrétiens, des « libéraux » pro-français, des transfuges du Parti Communiste Libanais, des partisans du défunt Hariri, sans oublier le très chrétien cardinal Sfeir, prélat de la communauté maronite. Ce bric-à-brac est actuellement chapeauté par Walid Joumblatt, dirigeant d’un « Parti Socialiste Progressiste » qui dissimule mal la domination séculaire et féodale de sa famille sur la communauté druze de la montagne libanaise. Une conclusion s’impose : l’ « opposition » est, en fait, un agglomérat de factions communautaires et affairistes qui se placent sous le haut patronage des impérialismes américain et français, lesquels marchent de front depuis l’adoption en commun de la résolution 1559.

Un tournant dans la politique de l’impérialisme français au Moyen-Orient

En 2003, Chirac avait opposé son droit de véto à la l’invasion de l’Irak par l’impérialisme américain et ses alliés. Il s’agissait pour lui de défendre les intérêts du capitalisme français dans ce pays – mais encore de tenter d’ériger une digue (à l’inititative de l’impérialisme allemand et s’appuyant sur la Russie) aux nouvelles ambitions américaines.

Les succès politiques et militaires américains au Proche et Moyen-Orient ont amené l’impérialisme français et Chirac a chercher de plus en plus à se faire une place au sein du dispositif américain que contre lui. C’est pourquoi il a soutenu la résolution 1546 de l’ONU qui entérine l’annexion de l’Irak (v. CPS n°17). Puis il a concédé la participation de l’OTAN à la formation de l’armée et de la police irakiennes – s’engageant pour sa part à encadrer des troupes hors d’Irak. Enfin, la conférence internationale de Charm-El-Cheikh qui a eu lieu fin novembre 2004 a consacré l’annulation d’une part importante de la dette irakienne par l’impérialisme français.

Dans cette situation, le Liban constitue pour la France une monnaie d’échange. C’est en effet la dernière position historique de l’impérialisme français au Proche-Orient : la France y a été la puissance « mandataire » pendant plus de 20 ans. C’est l’impérialisme français qui a dessiné les frontières du Liban, État artificiel, pour diviser la Syrie. Il y a conservé une place de premier plan : Paris est le premier investisseur du pays, son troisième partenaire commercial, et son premier bailleur de fonds. Il y dispose par ailleurs d’une petite force militaire : c’est un officier français qui dirige la FINUL, force de l’ONU basée au sud du Liban.

La conférence dite de « Paris II » avait en effet permis au gouvernement Hariri de collecter un prêt de 4 milliards d’euros, dont 500 millions provenaient de l’État français : en contrepartie, Hariri s’était engagé pour le Liban à effectuer une série de « réformes structurelles », notamment la privatisation des entreprises publiques. Ces « réformes » ont heurté les intérêts des castes pro-syriennes en place, qui les ont bloqué et ont fait obstacle à leur instrument, Hariri, le poussant à démissionner. Chirac de son côté a utilisé ces circonstances et n’a pas hésité à sacrifier ses relations avec la Syrie (elles aussi datant de la colonisation du Moyen-Orient) pour se faire une place dans le jeu américain. Libération du 22 mars 2005 en fait un récit non dénué d’intérêt, sous le surtitre « Séisme dans la politique arabe de la France. »:

« Lorsqu'on interroge des proches de l'Elysée sur les préoccupations du chef de l'Etat, hors politique intérieure, quatre chiffres reviennent inlassablement : la «1559». Ce numéro, attribué à la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies demandant le respect de «l'indépendance et de la souveraineté» du Liban et le départ «des forces étrangères qui y sont encore», occupe depuis des mois une grande part des pensées de Jacques Chirac.

Le texte, adopté aux forceps le 2 septembre dernier, porte la signature de la France et des Etats-Unis. Mais Jacques Chirac peut, à juste titre, le considérer comme son bébé tant il l'a porté à bout de bras. (…) Les services de l'Etat et leurs bataillons d'analystes n'ont pas été mis dans la confidence. Le Quai d'Orsay n'a appris l'existence du projet qu'à la veille de sa présentation à New York. Avec surprise, parfois réticence, tant il marque un tournant dans la politique française au Proche-Orient.

Son langage diplomatique peut faire illusion, ses quelques lignes prennent soin de ne nommer personne. Ce n'est pas la première fois que l'ONU appelle au respect de la souveraineté libanaise. La 1559 est d'ailleurs passée presque inaperçue lors de son vote. Elle s'apparente pourtant à une déclaration de guerre, à un tremblement de terre dont les secousses se font toujours sentir. D'alliée «critique» de Damas, la France apparaît comme une ennemie. (…) Cette résolution (…) constitue le seul moyen de reprendre pied au Proche-Orient.

(…) En juin 2004, il évoque la question avec George W. Bush, à l'Elysée, en marge des cérémonies du débarquement. Le terrain a été balisé par Maurice Gourdault-Montagne et Condoleezza Rice. Chacun a son propre agenda. Les Américains se préoccupent du soutien de la Syrie à des organisations terroristes, comme le Hezbollah, et de la porosité de sa frontière avec l'Irak. Les Français pensent d'abord au Liban.

Pourquoi ne pas relier les deux dossiers et opérer par la même occasion un début de réconciliation ? L'idée d'une initiative commune fait son chemin. (…)

Quand le parrain syrien décide d'amender la Constitution du Liban afin de prolonger le mandat de son président, Emile Lahoud, un fidèle allié, tous les clignotants virent au rouge. L'opposition hurle au putsch. Pour Hariri, ennemi juré du chef de l'Etat, la rupture est consommée. Fin août, Bachar le mande dans son palais. L'entretien ne dure que dix minutes. Hariri a rapporté les propos du dirigeant syrien à quatre témoins dont Walid Joumblatt, chef des Druzes : «Lahoud, c'est moi, lui aurait déclaré le dirigeant syrien. Si Chirac veut me sortir du Liban, je casserai le Liban.» (…)

A Paris, c'est le branle-bas de combat. Jacques Chirac se rue au secours de son ami. «Dans l'instant, on s'est parlé, avec les Américains. On leur a dit : vous voulez promouvoir la démocratie dans cette région ? Au Liban, elle est en train de disparaître. On ne peut pas laisser passer ça», raconte-t-on dans l'entourage élyséen.

(…)
Ce coup diplomatique permet à la France de renouer avec les Etats-Unis sans avoir à céder sur l'Irak. Ce rapprochement, même «s'il n'était pas la cause, mais la conséquence de la 1559», dixit un diplomate, arrive à point nommé.

Sous le choc, les Syriens ont trouvé un coupable. Ils accusent Rafic Hariri d'être le «serpent» qui a fomenté la résolution. Pour un ancien ministre des Affaires étrangères, son implication ne fait pas de doute. Vrai ou faux ? «C'est lui qui a poussé Chirac à s'engager contre les Syriens», assure ce dernier. Le 20 octobre, le Premier ministre libanais est poussé par les Syriens à la démission et rejoint l'opposition. Cinq mois plus tard, une énorme déflagration pulvérise sa voiture blindée et provoque des ravages sur plus d'une centaine de mètres. Pour Paris, «une telle opération ne peut pas être menée en dehors d'un grand service appuyé par un Etat».


Un autre symptôme du changement dans la politique française s’est manifesté récemment : l’impérialisme français affiche un ton nouveau envers l’Etat d’Israël (dixit Raffarin : « La France est à vos côtés », Le Parisien du 17/3/2005) et vient de conclure un nouvel accord de coopération économique avec lui.
Pastorius
 
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Message par Pastorius » 22 Juil 2006, 17:23

Donc, dans l'épisode précédent, Bush et Chirac étaient parvenus à imposer le retrait des troupes syriennes, premier volet de l'application de la résolution 1559: il leur restait à mettre en oeuvre le second volet, c'est-à-dire la neutralisation du Hezbollah, frange libanaise de l'axe syro-iranien, pour conforter leurs fantoches locaux, les Hariri, Joumblatt et consorts.

Mais, (re)portée au pouvoir par la pression de l'impérialisme US, la clique Hariri s'est avérée incapable d'imposer les diktats de la "communauté internationale". Ce pourquoi Israël interveient aujourd'hui.

Il apparaît de plus en plus probable que se mette un oeuvre un dispositif en trois temps:
1) Israël attaque. Washington multiplie les manoeuvres dilatoires pour permettre à Tsahal de détruire le Liban à loisir.
2) On commence à avancer le verre d'eau "humanitaire" qui fera passer la pilule des casques bleus. Pressions tous azimuts pour imposer au Liban et à la Syrie de faire plier le Hezbollah.
3) Déploiement d'une force internationale comprenant des troupes françaises pour finir le travail de Tsahal au Liban.
Tous les "amis" de la Palestine qui réclamaient une "médiation internationale" crient hourra face à ce nouveau pas en avant du colonialisme.

Mais laissons la parole à Rice (cf l'Orient le jour d'aujourd'hui):

a écrit :Rice : « Ceci est un Proche-Orient différent, un Proche-Orient nouveau. C’est dur »
Conférence internationale ministérielle sur le Liban, mercredi à Rome, sans la Syrie, l’Iran et Israël



La secrétaire d’État américaine, Condoleezza Rice, a fait l’annonce hier d’un « Proche-Orient différent, un Proche-Orient nouveau », indiquant qu’elle quitterait demain les États-Unis pour des entretiens sur le Proche-Orient, qu’elle participera à la conférence internationale au niveau ministériel sur le Liban, qui se tiendra à Rome mercredi prochain, et rejetant à nouveau les appels à un cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah.
« Je rencontrerai le Premier ministre (Ehud) Olmert et son équipe dirigeante, et le président Mahmoud Abbas et son équipe. Je me rendrai aussi à Rome pour rencontrer les responsables d’un “ groupe de contact ” sur le Liban », a-t-elle déclaré lors d’une conférence de presse.
À Rome, le ministère italien des Affaires étrangères a indiqué que les participants à cette conférence seraient, outre les États-Unis et l’Italie, le Liban, la France, la Russie, la Grande-Bretagne, l’Égypte, l’Arabie saoudite ainsi que l’Union européenne, la Banque mondiale et les Nations unies. Des « Israéliens devraient également venir », a indiqué à l’AFP une source gouvernementale italienne. Sauf que cela a été démenti par le chef de la diplomatie italienne, Massimo d’Alema, qui a également exclu la présence de deux des principaux intéressés, la Syrie et l’Iran. « Nous sommes convenus avec le département d’État américain de tenir une conférence internationale sur le Liban à Rome pour trouver ensemble les chemins menant à un cessez-le-feu, pour relancer l’action humanitaire envers la population libanaise et pour réfléchir sur une stabilisation de la région, y compris à travers l’envoi d’une force multinationale », a dit le ministre d’Alema.
Ce qui n’a pas empêché la chef de la diplomatie américaine de refuser à nouveau d’appeler à un cessez-le-feu, estimant qu’une telle approche relevait du « vieux » Proche-Orient et ignorait ce que Washington considère comme la « racine » du problème, le soutien de la Syrie et de l’Iran au Hezbollah. « Un cessez-le-feu serait une fausse promesse s’il ne faisait que nous ramener au statu quo ante. Il permettrait aux terroristes de lancer des attaques à la date et du type de leur choix, et de menacer des innocents, arabes et israéliens, dans l’ensemble de la région », a affirmé Condoleezza Rice, soulignant que « nous devons être plus efficaces et plus ambitieux que cela. Nous devons œuvrer de toute urgence à créer les conditions d’une stabilité et d’une paix durables », a-t-elle ajouté, reconnaissant que ce sera « difficile ».
Elle a ensuite évoqué ce qu’elle a appelé un « Proche-Orient nouveau » : « Ce qui est différent aujourd’hui par rapport à 1982, c’est qu’on a une situation dans laquelle un gouvernement jeune et démocratique tente d’exercer son autorité sur l’ensemble du territoire libanais et d’essayer donc d’agir en bon voisin, en bon contributeur à la paix et à la stabilité mondiales », a-t-elle affirmé, déplorant que « ces extrémistes veulent l’étrangler au berceau. La perspective d’un Liban qui ne soit plus une source d’instabilité les effraie », a-t-elle estimé, annonçant que « ceci est un Proche-Orient différent ; c’est un nouveau Proche-Orient. C’est dur. Nous traversons une période très violente », a-t-elle encore dit. Ce message a été renforcé lors d’un point presse de son adjoint David Welsh, qui a réuni quelques journalistes du Proche-Orient accrédités à Washington pour leur assurer qu’il est hors de question désormais de retourner à un statu quo ante dans la région.
Condoleezza Rice en a ensuite profité pour rendre un hommage très appuyé au gouvernement libanais et à son chef, Fouad Siniora. « Le gouvernement libanais est un bon gouvernement, jeune et démocratique. Mais les extrémistes du Hezbollah l’ont mis en danger et ont plongé la région dans le malheur », a-t-elle affirmé, jugeant qu’« il est clair que ce jeune gouvernement n’est pas en mesure de faire ce qui était prévu dans la résolution 1559 ». Enfin, elle a insisté sur le fait que « M. Siniora est un excellent Premier ministre. Il fait preuve d’une grande autorité et d’un grand courage en cette période très difficile », a-t-elle assuré.
La secrétaire d’État US a également appelé le Hezbollah à relâcher les deux prisonniers israéliens qu’il détient. « Il est important de se rappeler que la violence actuelle a été provoquée par une attaque illégale du Hezbollah à partir du territoire libanais », a-t-elle souligné. « Le Hezbollah est une organisation terroriste et je ne pense pas qu’il pourrait y avoir d’arrangement entre le Hezbollah et la communauté internationale », a-t-elle ajouté.
Concernant les propositions de force d’interposition et de couloirs humanitaires, elle a affirmé que « ce que nous devons faire, c’est aider à créer un cadre dans lequel la fin de la violence permettra d’accroître la souveraineté du gouvernement libanais et le déploiement de l’armée libanaise au Sud, avec une assistance internationale sous une forme ou une autre. Je pense que tout le monde comprend que cela doit être une force suffisamment solide pour mener sa mission à bien », a-t-elle poursuivi, précisant que la question est de savoir de quel genre de force il s’agira, qui la commandera, si ce sera une force onusienne ou bien internationale, etc. Elle a en outre déclaré avoir été « heureuse d’entendre que le gouvernement israélien avait répondu positivement à la proposition des États-Unis et d’autres pays d’ouvrir des couloirs humanitaires au Liban ».
Avant son départ, Mme Rice participera dimanche après-midi à un entretien à la Maison-Blanche du président George W. Bush avec le Premier ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud al-Fayçal.
Vendredi matin, Mme Rice avait rencontré à New York la mission de médiation de l’ONU de retour d’un voyage dans la région. Elle a aussi dîné jeudi soir avec le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan.
Pastorius
 
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Message par Puig Antich » 22 Juil 2006, 18:08

Et du point de vue du mouvement ouvrier ? Quelle influence a t'il eût au Liban, quels mouvements de masse ont éventuellement été placé sous sa direction ? Y'a t'il eût, historiquement, une opposition de gauche au stalinisme, aussi faible soit-elle, qui ait joué un rôle majeur à un moment ou à un autre ? Avis aux érudits et merci aussi à pastorius pour le recadrage historique.
Puig Antich
 
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Message par Combat » 22 Juil 2006, 18:10

A part le PC Libanais et quelques groupuscules mao ou albanais, rien de serieux.
Combat
 
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Message par Pastorius » 24 Juil 2006, 10:34

(Pastorius @ samedi 22 juillet 2006 à 18:23 a écrit :
Il apparaît de plus en plus probable que se mette un oeuvre un dispositif en trois temps:
1) Israël attaque. Washington multiplie les manoeuvres dilatoires pour permettre à Tsahal de détruire le Liban à loisir.
2) On commence à avancer le verre d'eau "humanitaire" qui fera passer la pilule des casques bleus. Pressions tous azimuts pour imposer au Liban et à la Syrie de faire plier le Hezbollah.
3) Déploiement d'une force internationale comprenant des troupes françaises pour finir le travail de Tsahal au Liban.
Tous les "amis" de la Palestine qui réclamaient une "médiation internationale" crient hourra face à ce nouveau pas en avant du colonialisme.

Nous y voilà :headonwall: :

a écrit :Paris, lundi 24 juillet 2006

Le quotidien Le Monde daté mardi 25 juillet 2006, actuellement en cours de bouclage, développe pour ses lecteurs les informations suivantes. 

LE TITRE DU JOUR
Liban sud : l'idée d'une force internationale progresse


Et Condolezza Rice évoque pour la première fois un cessez-le-feu. Mais le vice-premier ministre israélien, Shimon Pérès, indique de son côté que "la guerre n'est pas finie". Jan Egland, secrétaire général adjoint de l'ONU pour les questions humanitaires, accuse Israël de "violation du droit humanitaire". Dans un entretien au Monde, Saad Hariri appelle à une "solution globale" au Liban. Le commando "Hubert" encadre l'évacuation d'une centaine de réfugiés français et étrangers à Habbouch, au Liban sud. 
Pastorius
 
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Message par Pastorius » 24 Juil 2006, 11:32

Sous prétexte d'"aide humanitaire", les troupes impérialistes sont déjà dans la place.

Cf Le monde du 23/7/2006

a écrit :Une véritable armada rassemblée au large du Liban
(Beyrouth, à bord de la frégate " Jean-de-Vienne " et du " Siroco ",) envoyé spécial)

Lorsque, vers 6 heures du matin, vendredi 21 juillet, le TCD (transport de chalands de débarquement) Siroco de la marine française est entré dans la zone de blocus imposé par Israël à tout navire désireux de se rendre au Liban ou de le quitter, une certaine tension régnait sur la passerelle.

Les Israéliens sont nerveux depuis l'attaque du Hezbollah contre un de leurs bateaux, la corvette Hanit, le 14 juillet, touchée par un missile C 802, de conception chinoise (et fabriqué par l'Iran), qui a tué quatre marins. Israël a été surpris par cette attaque, et les contrôles, effectués sur la ligne de blocus par 4 ou 5 bateaux de la marine israélienne, sont stricts.

Rien, dans le droit international, n'autorise Israël à isoler le Liban dans une zone d'exclusion s'étendant de la frontière syrienne au nord, à la frontière israélienne, au sud, et jusqu'à 70 miles en mer. Rien, sinon le fait accompli accepté par toutes les marines étrangères qui s'efforcent d'extraire leurs ressortissants du Liban.

Le " pacha " du Jean-de-Vienne, le capitaine de vaisseau Patrick Macary, explique avec diplomatie qu'il ne veut pas " rentrer dans une logique d'autorisation - ni - provoquer un incident ". Une action intempestive de la marine israélienne ou une provocation du Hezbollah ne sont pas les seuls risques. Jeudi, un hélicoptère français EC 275 (Cougar), qui assurait une mission de rapatriement de ressortissants français de Beyrouth à Larnaka (Chypre), a été " illuminé " par le radar de tir d'un bateau de guerre américain...

Cette nervosité s'explique par la concentration croissante de navires de guerre dans la région. C'est désormais une véritable armada qui s'est rassemblée devant Beyrouth. Huit bâtiments américains, sept britanniques, quatre français, cinq italiens, trois grecs, trois indiens, etc. En tout, 38 navires sont sur zone. Ils devraient être une cinquantaine dans une semaine, soit, souligne le capitaine de vaisseau Olivier Coupry, commandant du Siroco, " le plus vaste rassemblement de navires de guerre depuis la seconde guerre du Golfe ". Le paradoxe - et aussi le risque -, c'est que la gestion militaire de ces flottes de guerre n'est assurée par personne.

Chaque nation affirme sa souveraineté et la protection de ses ressortissants de manière autonome, sans en référer à quiconque. Les marines française et britannique, qui ont l'habitude de travailler et de s'entraîner ensemble, se font profiter mutuellement de leur " retour d'expérience " dans les opérations d'évacuation. Une telle coordination est minimale avec les Américains, même si les échanges d'information existent, grâce aux procédures OTAN, qui sont communes aux pays de l'Alliance atlantique, comme à ceux de l'Union européenne.

De façon empirique, le porte-aéronefs britannique HMS Illustrious, qui était jusque-là le plus gros bateau sur zone, a pris une sorte d'ascendant. Mais le Mount Whitney, qui est le bateau de commandement de la 6e flotte américaine en Méditerranée, sera là dans quelques jours. Il est probable qu'il va tenter d'insuffler un peu de coordination dans ce désordre organisé. Celle-ci a ses limites. En attendant un hypothétique mandat des Nations unies pour créer des " corridors humanitaires ", chaque pays est libre d'envisager (en coordination avec Israël) une opération d'évacuation de ses ressortissants en situation précaire.

Laurent Zecchini
Pastorius
 
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Message par Puig Antich » 24 Juil 2006, 14:33

Oui tout les états sont "artificiels", dans le sens historiquement constitués pour les intérêts d'une ou plusieurs couches exploiteuses à un moment ou à un autre.

Ensuite, si on part de la thése de base de Lénine-Hilferding qu'il y a à un moment de la concentration du capital passage à l' "impérialisme", celà veut dire que les états façonnés à cette période dans le cadre des confrontations impérialistes et du partage du monde sont encore plus visiblement que les autres des carcans dans la mesure où leur carte a été dessiné bien loin de l'extérieur et selon les besoins des classes bourgeoises impérialistes et leur prétendue civilisation à l'échelle du monde. Je pense que c'est ce que Pastorius veut dire ? Mais il faut évidemment prendre garde à ne pas semer des illusions sur de prétendues unités territoriales ou étatiques qui seraient "naturelles" ... selon quel critère ?
Puig Antich
 
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Message par Pastorius » 24 Juil 2006, 15:42

Je veux tout simplement dire que le Liban ne repose pas sur une base nationale et historique comme c'est le cas des Etats français, anglais, etc.

Que la constitution de cet Etat, ses frontières, ses subdivisions communautaires, etc, sont autant de leviers sur lesquels les puissances impérialistes se sont appuyées pour établir leur domination.

Et effectivement, toutes les frontières de la région ayant été dessinées par les impérialismes français et anglais avant d'être validées par l'ONU, la quasi-totalité des Etats de la région sont des Etats artificiels - comme d'ailleurs la plupart des Etats africains - n'en déplaisent aux lambertistes qui s'acharnent à voir des "nations" irakienne ou libanaise.

D'ailleurs, dans bien des cas, ces Etats sont maintenus sous perfusion par les grandes puissances (l'Egypte et Israël sont ainsi les deux principaux destinataires, dans le monde, des subventions américaines et d'aides sous des formes multiples).

Par exemple: les kurdes, qui occupent une zone de peuplement à peu près homogène, sont opprimés par quatre Etats différents (Syrie, Turquie, Iran, Irak) où ils sont soit traités en citoyens de seconde zone, soit placés sous la tutelle de leaders communautaires de type féodal, soit les deux.
Autre exemple: initialement, l'impérialisme français avait déchiqueté la Syrie en de nombreux mini-Etats, mais les masses ont étouffé ce projet dans l'oeuf, à l'exception du Liban. L'aspiration à détruire les frontières du Liban est par ailleurs réelle et a largement marqué la vie politique du pays.
Troisième exemple: la Jordanie n'est autre chose qu'un pays à majorité palestinienne, concédé en fief, par l'impérialisme anglais, aux bédouins.

Ce qui veut dire:
a) que les revendications nationales des masses du Moyen-Orient et du Proche-Orient supposent la destruction des Etats artificiels (et les trotskystes défendent les revendications nationales des peuples opprimés, cf le programme de transition)

8) que les castes dominantes (féodales ou bourgeoisies compradores), dépendant étroitement de l'impérialisme, sont incapables d'accomplir les tâches de libération nationale et s'appuient tout au contraire sur les Etats artificiels contre les masses

c) que, les revendications nationales ne pouvant être satisfaites que par l'action du prolétariat et contre les castes dominantes, les revendications nationales constituent des revendications transitoires vers le socialisme (cf la révolution permanente et le programme de transition, à nouveau)

d) que par ailleurs, les subdivisions multiples existant dans la région (il n'existe pas que des questions nationales: que penser, par exemple, du clivage sunnite/chiite qui traverse profondément l'Irak, le Liban, l'Arabie Saoudite ou les Emirats?), les revendications nationales ne peuvent en définitive trouver de solution que dans le cadre d'une fédération socialiste des Proche et Moyen-Orient garantissant les droits des minorités.

Je sais que ces points font débat avec LO (c'est peut-être ce pourquoi Txi m'interroge là-dessus) et je m'attends à des commentaires de ce côté-là. J'espère du moins s'il y a lieu que cela permettra de débattre sérieusement et posément des problèmes de cette région du monde.

PS: je ne considère pas qu'il existe d'Etat "naturel", mais il existe évidemment une différence entre des Etats-nations constitués notamment par l'action révolutionnaire de la bourgeoisie, par exemple la France, et des Etats constitués précisément pour opprimer différentes minorités nationales pour le compte de l'impérialisme, et où de fait la question de l'émancipation nationale reste posée.
J'espère que personne n'aura la mauvaise foi de m'imputer quelque patriotisme de mauvais aloi parce que je parle de nations: je suis évidemment contre l'"unité nationale" et pour la destruction des Etats bourgeois devenus réactionnaires depuis plus d'un siècle, ainsi que pour les Etats-Unis socialistes d'Europe.
Tout l'objet de mon développement est au contraire de montrer - en conformité avec les thèses de Trotsky sur la révolution permanente - que c'est en grande partie sur le terrain même des revendications nationales que, dans les pays opprimés, arriérés, dominés par l'impérialisme, peut s'opérer l'affrontement entre le prolétariat et les castes dominantes (bourgeoisies compradores, castes communautaires, féodales, militaires, religieuses).
Pastorius
 
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