Que se passe-t-il au Moyen-Orient ?

Dans le monde...

Message par com_71 » 17 Août 2006, 19:07

(éditorial d'Arlette Laguiller 16.08.2006 a écrit :Le terrorisme d’État israélien creuse un fossé entre les peuples

Après l’arrêt des combats au Liban, l’armée et le gouvernement israéliens ont visiblement du mal à faire passer leur opération militaire pour un succès. Elle a été déclenchée officiellement pour délivrer les deux soldats israéliens faits prisonniers par le Hezbollah, sans même envisager l’échange avec des prisonniers libanais que celui-ci proposait et qu’Israël avait déjà accepté dans le passé. Mais les près de 1200 morts faits du côté libanais, la destruction de tout un pays, et en retour les près de 120 morts qu’a comptés finalement l’armée israélienne, auxquels s’ajoutent les 41 victimes civiles israéliennes des bombardements du Hezbollah, n’ont même pas permis de récupérer ces deux prisonniers. La ministre israélienne des Affaires étrangères a dû reconnaître que maintenant Israël devra accepter de négocier l’échange de prisonniers auquel il s’est refusé au début.

En fait, les deux soldats faits prisonniers n’auront été qu’un prétexte servant à justifier, aux yeux de la population israélienne, l’attaque à laquelle s’est livrée son armée. Si l’objectif d’Israël n’avait été que de récupérer ses deux soldats, son armée ou son gouvernement auraient pu chercher à le faire sans détruire pour cela tout un pays. En fait, ils ont saisi l’occasion de se lancer dans une démonstration à l’usage des peuples palestinien, libanais et arabes en général, pour signifier qu’ils n’hésiteront pas à détruire un pays, voire à massacrer son peuple, quand ils le voudront. C’est cette affirmation brutale du droit du plus fort qui, depuis des années, tient lieu de politique pour Israël.

L’accord sur une résolution proclamant l’arrêt des combats avait été repoussé depuis des semaines par les grandes puissances, et en particulier par les États-Unis qui expliquaient crûment qu’il fallait laisser le temps à l’armée israélienne de finir son travail, c’est-à-dire le temps d’écraser le Hezbollah. Mais la prolongation de l’offensive israélienne, la résistance inattendue qu’elle rencontrait, les pertes importantes subies par son armée, son incapacité à arrêter les tirs de roquettes sur le nord d’Israël étaient en passe de transformer la démonstration de force en démonstration d’impuissance. C’est sans doute pourquoi Israël et les États-Unis ont cessé de s’opposer au vote d’une résolution par l’ONU, permettant à celle-ci d’être enfin votée.

Mais cette guerre, comme les précédentes, risque bien de ne faire qu’en préparer une autre. Car ni la résolution de l’ONU ni les grandes puissances ne disent rien qui puisse imposer à Israël de régler les problèmes en suspens. Or le principal est bien la politique d’agression permanente d’Israël contre les Palestiniens. Ce n’est ni l’existence du Hezbollah ni la politique de l’Iran ou de la Syrie.

Cette politique des gouvernants israéliens sert les grandes puissances, car elle leur permet d’entretenir une menace permanente envers les régimes des pays de cette région, stratégique pour leurs approvisionnements pétroliers. Ces grandes puissances n’ont pas intérêt à chercher une solution aux conflits qui opposent Israël à ses voisins. Tant que l’état de guerre dure, la population israélienne se sent dans la situation d’un peuple assiégé, n’ayant comme alternative que de soutenir la politique belliqueuse de ses dirigeants. C’est ce qui fait d’Israël un allié irremplaçable pour les puissances occidentales, bien plus fiable que leurs alliés des régimes arabes de la région.

L’intérêt véritable de la population israélienne serait de chercher les moyens d’une coexistence fraternelle avec les peuples qui l’entourent, palestinien, libanais, et arabes en général. Cela impliquerait de rompre avec la politique que mènent ses dirigeants et qui fait d’elle de la chair à canon pour des intérêts qui ne sont pas les siens.

Cette nouvelle guerre du Liban, les massacres et destructions auxquels s’est livrée délibérément l’armée israélienne auront malheureusement encore creusé le fossé de haine qui sépare les peuples des pays arabes de celui d’Israël. Il reste à souhaiter que le résultat douteux de l’action militaire israélienne contribue à ouvrir les yeux de sa population sur la politique à laquelle on l’enchaîne.

Arlette LAGUILLER
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par pelon » 17 Août 2006, 20:08

Complètement d'accord avec l'éditorial et aussi cet article :
a écrit :
Guerre au Liban: Le Hezbollah sort renforcé de l’épreuve

Au Liban, dès l’arrêt des combats, une grande partie des quelque 900000 personnes chassées de chez elles par les bombardements israéliens ont commencé à retourner vers leurs habitations ou vers ce qu’il en reste. Ceux qui campaient depuis plusieurs semaines dans les écoles ou dans les parcs, hébergés par des proches ou bien ayant gagné la Syrie voisine, sont retournés vers la banlieue sud de Beyrouth détruite, semble-t-il, à près de 20%. D’autres ont, sans attendre, commencé à regagner le sud du pays, lui aussi dévasté et difficilement accessible, du fait des routes et des ponts systématiquement détruits par l’armée israélienne.

UN SENTIMENT DE VICTOIRE?

Malgré les destructions, malgré les pertes humaines, malgré les énormes problèmes auxquelles ils auront à faire face, le soulagement est visible. Bien sûr, il y a l’arrêt des combats; mais, de plus, beaucoup tenaient à afficher un sentiment de victoire, faisant le V de la victoire ou affichant les drapeaux du Hezbollah et les portraits de son chef. Il est évident pour tous qu’Israël n’a pas atteint ses objectifs, et que cela est dû à la résistance que son armée a rencontrée de la part des combattants du Hezbollah.

Déjà fortement implanté dans la population chiite du Liban-Sud et de la banlieue sud de Beyrouth, le Hezbollah («Parti de dieu») sort visiblement de l’épreuve avec un prestige renforcé, y compris au sein des autres communautés, sunnite et même chrétienne. Son dirigeant Hassan Nasrallah ne se fait pas faute de proclamer qu’il a vaincu Israël, et que celui-ci a dû reculer. Dès le 14août au soir, parlant à la télévision, il a déclaré que le Hezbollah ne désarmerait pas. Répondant aux autres partis libanais qui se joignent aux grandes puissances et à Israël pour demander son désarmement, Nasrallah a répondu en substance: «Israël a essayé et n’a pas réussi, si vous voulez essayer à votre tour, allez-y!»

Mais le chef du Hezbollah a aussi promis l’aide de son parti à tous ceux qui ont souffert de la guerre, énumérant assez précisément les aides auxquelles chacun aurait droit pour sa maison détruite, pour ses meubles, etc. Face à un gouvernement libanais qui brille par son absence, non seulement quand il s’agit d’organiser la défense de la population, mais même pour l’aider à survivre, le Hezbollah peut se montrer efficace dans la prise en compte des besoins des petites gens frappées par la guerre. Et de fait, durant toute la guerre dans le sud et à Beyrouth, bien plus que les services de l’État, c’est l’infrastructure du Hezbollah qui a apporté son aide à la population, y compris dans les écoles ou dans les parcs où celle-ci s’était réfugiée.

Ainsi le principal résultat politique de l’intervention militaire israélienne est d’avoir renforcé le prestige du Hezbollah qu’elle voulait combattre. Tout comme en Palestine où la politique agressive d’Israël a fini par renforcer le Hamas, elle aboutit à renforcer un courant islamiste intégriste; non pas tant du fait des idées que celui-ci professe, mais parce que, tout comme le Hamas, le Hezbollah est le parti qui compte le plus de militants apparaissant au service de la population. Non seulement ceux-ci se sont montrés prêts à sacrifier leur vie, mais le Hezbollah est aussi présent par le biais d’associations d’entraide, de services sociaux et médicaux, et donne une image de probité comparée à celle des politiciens qui semblent avant tout soucieux de leur carrière et de leurs affaires.

LE DISCRÉDIT D’UNE PARTIE DES DIRIGEANTS LIBANAIS

De même que les dirigeants d’un certain nombre d’États arabes, de l’Arabie saoudite à la Jordanie et à l’Égypte, une partie des dirigeants libanais avaient visiblement espéré qu’Israël vaincrait rapidement le Hezbollah. C’est le cas en particulier du Courant du Futur de Saad Hariri, le fils de l’affairiste et ancien Premier ministre Rafic Hariri assassiné en février 2005. Le Courant du Futur et son allié Walid Joumblatt, dirigeant féodal de la communauté druze qui s’affirme «socialiste», s’étaient alliés pour réclamer le départ des troupes syriennes du Liban, avec l’appui des grandes puissances et notamment de la France et des États-Unis.

Ces représentants richissimes de la bourgeoisie libanaise peuvent se plaindre aujourd’hui de ne pas avoir été payés de retour. Toutes leurs courbettes devant les dirigeants impérialistes ne leur ont même pas valu quelques gestes de ceux-ci pour stopper l’offensive d’Israël et arrêter la destruction du pays. De plus, durant un mois, les Hariri et les Joumblatt, champions de l’indépendance libanaise face à la Syrie, n’ont rien su dire à la population en butte à l’agression d’Israël. Comment s’étonner si, face à eux, le prestige du Hezbollah augmente, au-delà de la population chiite, car chacun a constaté que «lui, au moins, il se bat!»

L’offensive d’Israël était-elle concertée avec les États-Unis, voire avec certains politiciens libanais, pour aider à fonder un Liban dominé par la bourgeoisie chrétienne et ses alliés musulmans sunnites, vassal d’Israël et de l’impérialisme? C’est possible car c’est un vieux projet d’Israël, poursuivi dans ses guerres successives et qui a plusieurs fois échoué. Au moment où l’armée américaine s’enferre dans le bourbier irakien, ce coup de main donné à Bush et à ses plans de «nouveau Moyen-Orient» était bienvenu pour lui. Mais c’est une fois de plus raté, et Israël et les États-Unis risquent plutôt de se retrouver devant des difficultés supplémentaires. Même si cela n’exclut pas que, dans un futur plus ou moins proche, on les voie se livrer à une nouvelle fuite en avant, au Liban ou même ailleurs: contre l’Iran ou la Syrie par exemple.

LE SUCCÈS DU HEZBOLLAH N’EST PAS CELUI DES MASSES PAUVRES

Malheureusement le succès politique du Hezbollah n’est pas non plus une victoire du peuple libanais, ni du peuple palestinien et des autres peuples arabes. Comme le Hamas en Palestine, et même s’il est capable de se montrer proche des masses pauvres, le Hezbollah est un parti réactionnaire par ses références, mais aussi par ses objectifs sociaux et politiques. Le régime qu’il vise à instaurer serait une réédition de la dictature des mollahs iraniens et ne profiterait qu’à une bourgeoisie qui, pour être «islamiste», n’en serait pas moins féroce à l’égard de la population pauvre.

Au Liban il existe pourtant un Parti Communiste fort d’une certaine tradition, et disposant de militants dévoués. Tout en affirmant ses désaccords avec le Hezbollah quant à ses objectifs politiques, il a décidé de participer aux combats à ses côtés, au nom de la «résistance», et le Hezbollah lui a fourni des armes. Des militants communistes sont tombés aux côtés de ceux du «Parti de dieu». Malheureusement, si cela montre leur esprit de sacrifice, cela montre aussi l’incapacité du Parti Communiste Libanais à proposer une politique défendant vraiment les intérêts des classes exploitées, indépendamment d’un parti religieux réactionnaire comme le Hezbollah, qui a d’ailleurs lui-même organisé, dans le passé, l’assassinat de militants communistes.

Défendre les intérêts des travailleurs et de l’ensemble des masses pauvres, contre l’impérialisme et ses agents mais aussi contre la bourgeoisie dans ses différentes variantes, chrétienne ou musulmane sunnite ou chiite ou druze, au Liban mais aussi en Palestine, en Israël et dans tout le Moyen-Orient, ce serait pourtant indispensable pour que, à un moment ou à un autre, les peuples de la région puissent sortir de l’impasse des multiples conflits dans lesquels on les jette.

A. F.

Lutte Ouvrière n°1985 du 18 août 2006
pelon
 
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Message par pedro » 18 Août 2006, 20:51

Convidado a dit :

a écrit :Que est ce qu'ils ont fait les bolsheviks après juin 1918?

Se defendre.

Par quels moyens?

Victor Serge ou Trotsky?




Les bolcheviks n'ont jamais pratiqué la politique du terrorisme aveugle, dont sont généralement victimes d'autres travailleurs. Surtout, ils n'ont jamais défendu une politique réactionnaire, anti-ouvrière, comme peut l'être celles du hamas ou du hezbollah.
Le hezbollah, comme le hamas, est avant tout un parti cherchant à apparaître comme un interlocuteur, vis à vis des dirigeants impérialistes. Il sort renforcé de cette guerre, et peut se servir de son aura populaire pour obtenir la place qu'il désire, auprès des américains, des français, des anglais.
La moindre des choses, pour des personnes qui se disent révolutionnaires, c'est de ne pas s'aligner derrière des gens qui n'hésiteront pas à serrer la bride à leur peuple, à user de répression, à vouloir imposer leurs idées rétrogrades (notamment vis à vis des femmes).
Par le passé, les partis Communistes de pays comme l'irak, l'iran, etc, se sont rangés derrière des gens qui étaient les pires ennemis des travailleurs, mais qui se donnaient des airs radicaux, contre les puissances impérialistes. Cette politique leur a coûté plutôt cher, non?
pedro
 
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Message par disset » 19 Août 2006, 01:08

(El convidado de piedra @ jeudi 17 août 2006 à 13:21 a écrit :
a écrit :Mais si tu le dis tu admets donc que il n'y a ni victoire ni défaite mais des manoeuvres et manipulations.


Peut-on y avoir des "manouevres et manipulation" et des "victoires et défaites" non?

Bien sur on peut tout confondre, tout mélanger et ensuite passer aux sentiments, "la tristesse", le "dégout" tout ça bien enrobé avec des maximes moralisantes. C'est une forme de voire les choses et une que je crains est fort repandu parmi certains.

Quand une armée n'est pas capable, malgré une nette supériorité matériel d'attendre ses objectifs, ça s'appele comment? Ni victoire ni défaite?
c'est une défaite militaire pour l'état israëlien et donc une victoire pour le hezbolah qui ajoute une victoire politique dans sa capacité à réagir plus vite que l'état libanais et que l'onu (pas trés difficile) dans l'organisation d'aprés-guerre (on peut toujours réver). Mais ce qui est sur c'est qu'il n'y a pas de vainqueurs parmis les peuples. Les libanais qui ont perdus leurs proches et ont vus leurs logis détruits et les israëliens qui devront payer cette nouvelle guerre qui ne leur a pas apporté la sécurité (quelle surprise). En gros les seuls vainqueurs sont une poignée de réacs démagogues. Quel espoir...
disset
 
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