Revendications et tensions sociales en Chine

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Message par Andreas » 16 Mars 2005, 17:32

a écrit :

Revendications et tensions sociales à la chinoise

Le recours à la protestation collective est désormais permanent en Chine. La violence de masse, phénomène qui ne date pas d'hier, tend de plus en plus à déborder du cadre de la simple ritualisation du mécontentement, tel qu'on l'a observé depuis plusieurs années. 

Fleurissant sur le terreau fertile des conflits sociaux, du malaise paysan, voire de la tension interethnique, la protestation devient plus étendue, plus fréquente - et surtout plus déterminée. S'il ne s'agit pas de remettre en question le dogme du parti, un nombre croissant de citoyens démontrent leur frustration devant les représentants de l'administration ou exigent que justice leur soit rendue.

Le premier ministre, Wen Jiabao, conscient de la montée des mécontentements, vient de déclarer devant l'Assemblée du peuple qu'il faut prendre en compte les "préoccupations des masses populaires".

Selon les statistiques officielles de 2003, on a comptabilisé 58 000 incidents liés aux questions sociales. Et le nombre de plaintes adressées aux instances gouvernementales a augmenté de 46 % la même année.

La liste des incidents de ces dernières semaines est longue et traduit la diversité des frustrations même si elle ne donne pas de la Chine l'image d'un pays en perpétuelle bataille avec lui-même.

Entre autres exemples, relevés ces derniers mois : des dizaines de milliers de fermiers ont manifesté en novembre 2004 dans un district reculé du Sichuan, au sud-ouest. Ils protestaient contre l'insuffisance des compensations accordées par l'Etat qui a ordonné le déplacement de dizaines de milliers de personnes vers des régions montagneuses de la province afin de construire un barrage. Des centaines de protestataires ont été arrêtés après avoir retenu par la force le responsable provincial du Parti communiste.

Dans une ville de la même province, un incident mineur a dégénéré, traduisant la colère refoulée du petit peuple à l'égard des gens du pouvoir. Un portefaix avait effleuré de son sac une dame marchant au côté de son mari, laissant une trace de boue sur sa cuisse. L'époux insulte le "coupable", arguant de sa qualité d'officiel du parti, puis le frappe et menace de le tuer. Des témoins s'indignent et, rapidement, l'émotion grossit en ville où, à la nuit tombée, des milliers de manifestants incendient des véhicules officiels et s'en prennent aux symboles du pouvoir - la mairie, un commissariat de police.

Durant la même période, dans la province du Shanxi, au sud-ouest de Pékin, deux policiers sont tués après l'attaque d'un poste de police par des ouvriers à la suite d'un accident de la circulation qui tourne mal. Dans le centre du pays, après la mort d'un enfant tué sur la route par un camionneur hui (une ethnie chinoise musulmane), l'incident dégénère en une violente explication intercommunautaire. Bilan, au moins sept morts et des dizaines de blessés.

LA CORRUPTION POUR CIBLE

La liste est loin d'être exhaustive comme le prouve une émeute d'ouvriers migrants - ils sont des centaines de milliers venus des campagnes chercher du travail en ville -, fin décembre 2004, au Guangdong (province de Canton) à la suite du décès de l'un d'entre eux, battu à mort par la police après avoir volé une bicyclette.

A l'heure où les dégraissages dans les entreprises publiques condamnent au chômage des masses de travailleurs autrefois protégés par le système, les revendications se sont multipliées ces dernières années.

Les entreprises privées en partenariat avec des firmes étrangères ne sont pas épargnées au vu de certaines grèves d'employés rendus furieux par des baisses de salaires ou l'imposition de cadences infernales, après avoir connu un système qui les prenait en charge de la naissance à la mort.

Désormais, les gens ne doivent plus compter que sur eux-mêmes pour survivre.

"Auparavant, les gens pensaient que leurs problèmes pouvaient être résolus par le gouvernement, explique Li Qiang, un ancien syndicaliste chinois, aujourd'hui en exil à New York. Maintenant, ils n'ont plus confiance dans les autorités, ce qui explique que des incidents mineurs tournent à l'émeute."

La corruption des membres du parti dans les provinces est devenue l'une des cibles les plus fréquentes des paysans ou ouvriers, et l'une des priorités affichées d'un gouvernement central qui met en avant sa volonté - théorique en tout cas - de nettoyer les écuries d'Augias de l'empire.

GRAND ÉCART IDÉOLOGIQUE

Le régime est conscient, comme l'a évoqué une récente directrice du parti pendant l'automne 2004, que ce dernier "perdrait le contrôle" s'il ne parvenait pas à endiguer la corruption et la montée des périls sociaux dans un pays en pleine transition économique.

Mais ce que veut le pouvoir central, pour des raisons liées à sa survie politique, n'est pas forcément écouté par les "seigneurs" locaux, c'est-à-dire les responsables du parti pour lesquels la croissance à tout va se confond souvent avec l'enrichissement personnel. Même chose dans les campagnes où les spoliations de terres paysannes démontrent la volonté des affidés du pouvoir de pousser à l'urbanisation rampante.

En fait, Pékin n'hésite pas à faire tomber des têtes dans les provinces quand il le faut ; le pouvoir central espère ainsi réparer une légitimité mise à mal, en instrumentalisant à son profit les désordres périphériques dont les manifestations sont autant de clignotants d'alerte qu'il lui faut prendre en compte.

A l'heure où la représentativité politique des entrepreneurs chinois a été légitimée par un parti qui n'a plus de communiste que le nom, le fossé existant entre le discours et la réalité ne peut que se traduire par ce grand écart idéologique où Pékin s'efforce de concilier l'inconciliable. Le premier ministre vient d'insister sur la nécessaire garantie de "l'harmonie sociale".

Après l'écroulement du mur de Berlin et la fin du modèle soviétique, les hiérarques chinois misent sur la crainte populaire du désordre, peur ancestrale de la civilisation de l'empire du Milieu. La réalité post-soviétique consécutive à l'éclatement de l'URSS peut ainsi agir comme un contre-modèle.

Bruno Philip

Andreas
 
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Message par Strike! » 02 Avr 2005, 16:11

Tiens, tiens...

Cet article me rappelle un documentaire que j'ai vu sur France 2 à propos de la Chine où je voyais des chinois "d'en bas" porter plainte et toujours perdre contre des petits chefs de l'administration...

Ca me rappelle aussi des nouvelles infos sur Cuba, ces derniers temps. Le P"C"C a fait dess enquetes (dignes des beaux sondages IPSOS) sur le mécontentement de la population. Résultat, CASTRO a promis d'augmenter de 50% les prestations sociales - allant de 6 euros à 8 euros, quelle générosité quand on voit l'argent récolté du tourisme... - et s'en prend aussi à la corruption. C'est clair, on cache la vrai source de l'injustice dans ces pays (régimes capitalistes) avec la "corruption", c'est elle la seule responsable de que certains vivent comme les riches des pays développés....
Strike!
 
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