La Ve Internationale... des copains de Kadhafi

Dans le monde...

Message par luc marchauciel » 01 Mars 2011, 12:03

Les réactions de plusieurs gouvernements latino-américains de gauche à propos de ce qui se passe en Liby devraient doucher l'enthousiasme de ceux qui auraient pu penser construire une Ve Internationale avec Chavez.

Cet article sur la gauche latino-américaine face aux événements de Libye est intéressant :

a écrit :
La Libye met mal à l'aise la gauche latino-américaine
Paru le Lundi 28 Février 2011

   BERNARD PERRIN, LA PAZ   
ANALYSE - Le soulèvement contre Kadhafi, allié politique et économique du bloc de gauche, déboussole certains gouvernements «révolutionnaires».
Stupéfiant et inquiétant parallélisme. Alors que de nombreuses chancelleries européennes sont inquiètes à l'idée de voir le colonel Kadhafi, qui était il y a peu encore un «ami intime» (Silvio Berlusconi) ou tout du moins un partenaire économique vital (90% du pétrole libyen prenait le chemin de l'Europe), tomber sous la pression de son peuple, une autre peur s'empare des gouvernements de gauche «progressistes» d'Amérique du Sud: celle d'assister à la chute d'un... camarade révolutionnaire. Le premier cas de figure n'a au fond rien de très surprenant. L'Europe capitaliste préfère un partenaire fiable, même s'il fut longtemps en tête de liste des terroristes les plus infréquentables de la planète, même s'il fait aujourd'hui tirer sur son propre peuple. Le cynisme de la realpolitik.


Faiblesse idéologique

Le second cas de figure, lui, est plus intrigant. Que du Venezuela à la Bolivie en passant par Cuba, l'Equateur et le Nicaragua, certains pleurent la chute du «guide spirituel de la révolution» malgré le massacre du peuple libyen dont il se rend coupable, démontre une triste lecture de l'histoire en cours et un aveuglement dont la gauche a déjà été trop souvent coutumière au cours du siècle passé.
Derrière la façade discursive du «socialisme du XXIe siècle», se dessine malheureusement une autre réalité: l'absence d'une réelle boussole idéologique, de Caracas à La Paz. Comment le dictateur sanguinaire libyen peut-il être un «frère révolutionnaire»? Son opposition à l'impérialisme américain justifie-t-elle donc toutes ses exactions? Comment se tromper ainsi de révolution?
Pour l'Argentin Pablo Stefanoni, directeur de l'édition bolivienne du Monde diplomatique, et auteur avec le politologue français Hervé do Alto de Nous serons des millions, Evo Morales et la gauche au pouvoir en Bolivie, la réponse est simple: «Le socialisme sud-américain a été pris par surprise par les événements, et s'est retrouvé sans ressources politiques ni idéologiques pour déchiffrer les clés de ce qui se passe dans le monde arabe.»
En Amérique latine, au Venezuela, à Cuba, en Equateur, en Bolivie ou au Nicaragua, Kadhafi est encore et toujours considéré comme un «combattant révolutionnaire», malgré sa volte-face historique et son idylle nouée avec l'Occident, de Washington à Rome en passant par Londres et Paris. Hugo Chavez ne l'a pas caché: pour comprendre la révolution en cours dans les pays arabes, il avait personnellement appelé il y a quelques semaines... Tripoli! Quant au ministre des Affaires étrangères bolivien, David Choquehuanca, il avoue sa fascination pour le «Livre vert» du leader libyen, comme de nombreux autres dirigeants latino-américains.


Suite sur

http://lecourrier.ch/index.php?name=News&f...icle&sid=448392
luc marchauciel
 
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Message par Matrok » 01 Mars 2011, 15:12

Ce n'est pas vraiment une surprise. Chavez a reçu le "Prix Khadafi des Droits de l'Homme" (!) en 2004, et Khadafi a été décoré de l'"Orden del Libertador" et 2009. La diplomatie de Chavez a toujours été construite sur la base d'un "anti-impérialisme" sans principe, qui revient à faire copain-copain avec des tyrans comme Poutine, Ahmadinejad, Khadafi, Mugabe, Omar Al-Bashir, etc. Et bien sûr Castro.

Il n'y a pas si longtemps (au moment des élections en Iran par exemple) lorsqu'on osait écrire ça sur un forum internet "de gauche" (même ici !) cela soulevait vite de nombreuses protestations. Attendons voir si les soutiens habituels du "camarade Chavez" et de la "révolution bolivarienne" se réveillent...
Matrok
 
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Message par luc marchauciel » 03 Mars 2011, 19:01

Sur le site du NPA :

a écrit :
L'Amérique latine et la révolution arabe
lundi 28 février 2011


En Europe, les gouvernements tentent d'empêcher la contagion et la solidarité entre les travailleurs européens et les masses arabes en révolte en agitant l'épouvantail de l'islamisme. En Amérique latine, ce sont les dirigeants progressistes vénézuéliens et cubains eux-mêmes qui tentent d'isoler ces révolutions montantes en agitant le caractère prétendument « anti-impérialiste » des régimes despotiques libyen, syrien ou iranien, eux aussi déstabilisés par la lame de fond des peuples en lutte.

La révolution arabe constitue une épreuve de vérité pour l'impérialisme, mais aussi pour les directions cubaine et chaviste. Or, si celles-ci ont également été totalement prises au dépourvu par l'irruption des masses arabes, elles semblent actuellement toujours incapables de saisir la nature, la profondeur et l'unité du processus révolutionnaire en cours dans toute la région. Elle ne semblent nullement comprendre la puissante soif de réelle démocratie, de justice sociale, d'indépendance et de souveraineté qui animent les masses arabes et la formidable opportunité que leurs luttes offrent afin de modifier en profondeur les rapports de force à l'échelle planétaire entre le capital et le travail, et face à l'impérialisme.

L'attitude de Fidel Castro et d'Hugo Chavez par rapport aux événements en Libye est particulièrement choquante. De manière moins affirmée dans le cas du premier et plutôt assumée dans le cas du second, on laisse entendre que la révolte du peuple libyen serait le fruit d'une manipulation, d'un complot impérialiste visant à renverser un régime ennemi. Curieusement, cette « thèse » ne reprend pas la version officielle du régime libyen lui-même, selon laquelle c'est au contraire Al-Qaeda qui se trouve derrière les « émeutes » ! Or, loin de toutes ces thèses conspirationnistes délirantes, il n'y a rien de « singulier » ou de « particulier » dans la révolution en Libye, nul complot étranger ourdi par la CIA ou par Ben Laden; elle s'intègre au contraire pleinement dans le processus de la révolution arabe qui déferle dans toute la région. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard, puisque le régime dictatorial libyen se trouve précisément géographiquement coincé entre la révolution tunisienne et la révolution égyptienne.

Malgré tout, Fidel Castro a déclaré qu’il «faudra attendre le temps nécessaire pour connaître vraiment ce qu’il y a de vrai et de mensonges ou de semi-vérités dans ce qu’on nous dit de la situation chaotique (sic) en Libye». Il en tire pourtant une conclusion immédiate: «Le pire serait maintenant de faire silence sur le crime que l’OTAN s’apprête à commettre contre le peuple libyen. Pour les chefs de cette organisation belliciste, il y a urgence. Il faut le dénoncer.» Le hic c'est que, comme le soulignent Santiago Alba Rico et Alma Allende, ce ne sont pas des avions de l'OTAN qui mitraillent aujourd'hui le peuple libyen, mais bien ceux du régime de Kadhafi! Ainsi, selon Fidel, l’urgence n’est pas à dénoncer le carnage de Kadhafi contre son peuple et de choisir le camp du soulèvement populaire, c'est de manifester contre l’intervention future et hypothétique de l’OTAN. Au nom de la menace d'un crime à peine esquissé, il faudrait donc « faire silence » sur un crime actuel bien réel.

Toujours selon cette conception purement « campiste » (« les ennemis de mes ennemis sont mes amis »), ce 25 février le président Hugo Chavez vient officiellement quant à lui, à l'instar du président nicaraguayen Daniel Ortega, d'apporter son « soutien au gouvernement libyen », au moment même où ce dernier massacre son peuple à l'arme lourde. Certes, il ne fait pas de doute que l'impérialisme est à l'affût et souhaite profiter de la moindre occasion. Certes, il faut dénoncer la double morale de l'impérialisme, qui condamne les victimes civiles en Libye, mais pas en Irak, en Afghanistan ou en Palestine. Mais cela ne justifie aucunement pour autant le soutien à un tyran sanguinaire, qui donne justement une belle occasion à l'impérialisme de reprendre son équilibre et qui, en dépit de sa logorrhée sur la soi-disant "révolution verte", est à la tête d'un système d'exploitation et d'un régime corrompu qui font partie du dispositif impérialiste de pillage de la région et de ses ressources.

Au Venezuela, des organisations révolutionnaires telles que Marea Socialista ont clairement pris position en faveur du peuple libyen et contre le dictateur Kadhafi. Nous ne pouvons qu'éspérer que les travailleurs vénézuéliens et cubains feront preuve d'une meilleure capacité de discernement que leurs dirigeants. Mais, même en cas d'un sursaut et d'une rectification, il ne fait aucun doute que les déclarations catastrophiques de Chavez vont immédiatement et durablement ruiner le prestige immense dont il jouissait jusqu'à présent auprès des masses arabes. Cette popularité est née de son opposition déclarée à la guerre et à l'occupation de l'Afghanistan en 2001 et de Irak en 2003, ainsi qu'à l'agression contre le Liban par Israël en 2006. Elle a atteint son point culminant en janvier 2009, lorsqu'il décida l'expulsion de l'ambassadeur d'Israël et d'une partie du personnel de l'ambassade pour protester contre le massacre perpétré par l'État sioniste contre la population de Gaza, marquant ainsi sa « solidarité sans restriction avec le peuple palestinien héroïque ». Le plus grave étant que, à travers la figure de Chavez, c'est le prestige d'une alternative identifiée comme progressiste et voulant construire le « socialisme du XXIe siècle » qui risque d'être frappée d'un profond discrédit dans le monde arabe.

Cette attitude constitue un cadeau en or pour les forces réactionnaires et impérialistes qui, actuellement désorientées par l'ampleur des événements, cherchent coûte que coûte à reprendre la main, à contrôler ou à stopper la révolution arabe. En outre, en se rangeant honteusement au côté du tyran libyen, la direction chaviste se tire également une balle dans le pied en offrant des munitions à ses propres adversaires et détracteurs, qui ne cessent de l'accuser sans fondement d'être de nature « dictatoriale ».

En Europe, en Amérique latine, aux États-Unis ou en Asie, le peuple arabe — qui est aujourd'hui à l'avant-garde de la lutte anti-impérialiste — doit recevoir un appui sans réserve de la part de l'ensemble des forces progressistes du monde. Ce n'est qu'ainsi que l'on disputera efficacement à l'impérialisme sa prétention hypocrite à incarner les intérêts démocratiques des peuples et que l'on écartera effectivement toute menace, réelle ou agitée à dessein, d'une intervention militaire.

Ataulfo Riera (LCR-web Belgique), le 27 février 2011.
luc marchauciel
 
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Message par Sterd » 03 Mars 2011, 20:03

(luc marchauciel @ jeudi 3 mars 2011 à 19:01 a écrit : En Europe, les gouvernements tentent d'empêcher la contagion et la solidarité entre les travailleurs européens et les masses arabes en révolte en agitant l'épouvantail de l'islamisme.
:33:

Vu de France, c'est pas vraiment l'impression que j'ai.
Sterd
 
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Message par com_71 » 03 Mars 2011, 23:56

(site du NPA a écrit :

Toujours selon cette conception purement « campiste » (« les ennemis de mes ennemis sont mes amis »), ce 25 février le président Hugo Chavez vient officiellement quant à lui, à l'instar du président nicaraguayen Daniel Ortega, d'apporter son « soutien au gouvernement libyen », au moment même où ce dernier massacre son peuple à l'arme lourde. Certes, il ne fait pas de doute que l'impérialisme est à l'affût et souhaite profiter de la moindre occasion. Certes, il faut dénoncer la double morale de l'impérialisme, qui condamne les victimes civiles en Libye, mais pas en Irak, en Afghanistan ou en Palestine. Mais cela ne justifie aucunement pour autant le soutien à un tyran sanguinaire, qui donne justement une belle occasion à l'impérialisme de reprendre son équilibre et qui, en dépit de sa logorrhée sur la soi-disant "révolution verte", est à la tête d'un système d'exploitation et d'un régime corrompu qui font partie du dispositif impérialiste de pillage de la région et de ses ressources.

Au Venezuela, des organisations révolutionnaires telles que Marea Socialista ont clairement pris position en faveur du peuple libyen et contre le dictateur Kadhafi. Nous ne pouvons qu'éspérer que les travailleurs vénézuéliens et cubains feront preuve d'une meilleure capacité de discernement que leurs dirigeants. Mais, même en cas d'un sursaut et d'une rectification, il ne fait aucun doute que les déclarations catastrophiques de Chavez vont immédiatement et durablement ruiner le prestige immense dont il jouissait jusqu'à présent auprès des masses arabes. Cette popularité est née de son opposition déclarée à la guerre et à l'occupation de l'Afghanistan en 2001 et de Irak en 2003, ainsi qu'à l'agression contre le Liban par Israël en 2006. Elle a atteint son point culminant en janvier 2009, lorsqu'il décida l'expulsion de l'ambassadeur d'Israël et d'une partie du personnel de l'ambassade pour protester contre le massacre perpétré par l'État sioniste contre la population de Gaza, marquant ainsi sa « solidarité sans restriction avec le peuple palestinien héroïque ». Le plus grave étant que, à travers la figure de Chavez, c'est le prestige d'une alternative identifiée comme progressiste et voulant construire le « socialisme du XXIe siècle » qui risque d'être frappée d'un profond discrédit dans le monde arabe.

Cette attitude constitue un cadeau en or pour les forces réactionnaires et impérialistes qui, actuellement désorientées par l'ampleur des événements, cherchent coûte que coûte à reprendre la main, à contrôler ou à stopper la révolution arabe. En outre, en se rangeant honteusement au côté du tyran libyen, la direction chaviste se tire également une balle dans le pied en offrant des munitions à ses propres adversaires et détracteurs, qui ne cessent de l'accuser sans fondement d'être de nature « dictatoriale ».

Ataulfo Riera (LCR-web Belgique), le 27 février 2011.


Incroyable ce salmigondis
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par Puig Antich » 04 Mars 2011, 08:31

Donc en somme, il faudrait convaincre les bourgeois nationaux d'arrêter d'être solidaires entre eux, car cela serait dû à une " incompréhension de l'irruption des masses ", et non pas à des intérêts matériels. Belle compréhension du marxisme ... ou bel opportunisme!
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Message par Puig Antich » 07 Mars 2011, 12:01

a écrit :Vu de France, c'est pas vraiment l'impression que j'ai.


Le " débat sur l'islam ", la référence aux " patrimoine chrétien de la France ", tout ce climat pourri qui est complètement à contre-courant de la société, c'est tout de même quelque chose de bien réel.
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Message par redsamourai » 07 Mars 2011, 13:40

C'est sûr, mais enfin de la à dire que c'est la volonté de lutter contre le sentiment de solidarité du prolétariat non arabe vis-à-vis des révoltes qui explique ces discours, il y a quand même un monde... :wacko:
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Message par Matrok » 07 Mars 2011, 13:57

(redsamourai @ lundi 7 mars 2011 à 12:40 a écrit : C'est sûr, mais enfin de la à dire que c'est la volonté de lutter contre le sentiment de solidarité du prolétariat non arabe vis-à-vis des révoltes qui explique ces discours, il y a quand même un monde... :wacko:
Pas seulement, bien sûr, mais ça ne me parait pas idiot d'y voir aussi ça...
Matrok
 
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Message par redsamourai » 07 Mars 2011, 14:39

bof, ça a commencé bien avant les révoltes, et on ne voit aucun signe de "contagion" ne serait-ce que "morale" par chez nous, alors ça me semble quand même plus plausible de penser que cela est tout de même bien plus lié à des questions politiques intérieures!
redsamourai
 
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