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Message par Vania » 13 Juil 2012, 00:52

a écrit :Travail forcé chez un sous-traitant de Walmart

Une usine de transformation de produits de la mer est accusée d'avoir fait travailler des saisonniers 24 heures d'affilée. Sous la pression d'une association de défense des travailleurs immigrés, son principal client, le géant de la distribution Walmart, a fini par réagir.

10.07.2012 | Gabriel Thompson | The Nation

En mai dernier, le service des urgences de la police a reçu l'appel paniqué d'une employée de CJ's Seafood, une entreprise de transformation d'écrevisses de Breaux Bridge, en Louisiane. La conversation était confuse car cette femme ne parlait que l'espagnol. Lorsque la police est arrivée sur place, l'employée a nerveusement expliqué, sous le regard de son patron, qu'elle avait composé le 911 [numéro de la police aux Etats-Unis] par erreur.

Le lendemain, le propriétaire de CJ's Seafood, Michael Leblanc, a convoqué la quarantaine de personnes qu'il emploie dans le cadre du programme de visas H-2B [accordés aux saisonniers]. La plupart d'entre eux vient du Tamaulipas, un Etat du nord du Mexique. Selon les témoignages de nombreux ouvriers, Michael Leblanc leur a alors expliqué que CJ's Seafood était une entreprise familiale et que s'ils tentaient de causer du tort à la société en contactant les autorités, cela revenait à causer du tort à sa famille. "Il nous a dit qu'il connaissait des bons et des méchants au Mexique, raconte Ana Diaz, qui travaille comme saisonnière pour la société depuis plus de huit ans. Il a ajouté qu'il connaissait nos adresses, savait où vivaient nos familles et saurait nous retrouver."

Suite à ces menaces, les ouvriers ont contacté la National Guestworker Alliance [Alliance nationale des travailleurs immigrés]. Ils ont expliqué qu'on les forçait à travailler 24 heures d'affilée, dans des pièces dont les portes étaient barricadées par des cartons et des palettes pour les empêcher de s'échapper. On les décourageait de prendre des pauses par des menaces de violence. Leblanc ouvrait régulièrement leur courrier, et il avait fait installer sept caméras de surveillance pour suivre leurs faits et gestes (les ouvriers vivent dans des caravanes installées sur le terrain de l'entreprise).

Le contrat avec Walmart suspendu

En juin, huit employés se sont mis en grève et la Guestworker Alliance a déposé des plaintes contre CJ's Seafood auprès du ministère du Travail et de la Commission pour l'égalité des chances en matière d'emploi. Ils ont également alerté Walmart, le principal acheteur des écrevisses CJ, dont les normes interdisent aux fournisseurs de recourir au travail forcé et d'imposer une durée hebdomadaire du travail supérieure à 60 heures. Le géant de la distribution a d'abord tenté de minimiser l'affaire, expliquant au site d'information The Daily Beast qu'après avoir mené une enquête qui ne lui avait pas permis de parler aux grévistes, il n'était "pas en mesure de prouver le bien-fondé des accusations de travail forcé." Mais fin juin, Walmart a annoncé qu'il avait suspendu son contrat avec CJ's - le jour même où la Guestworker Alliance révélait qu'une dizaine d'autres fournisseurs de Walmart employant des travailleurs immigrés devait répondre de plus de 600 citations en justice pour infractions en matière de salaires et de sécurité.

L'affaire CJ's Seafood a éclaté dans un contexte particulier. Le ministère du Travail s'efforce en effet d'améliorer le système H-2B, qui permet trop souvent à des employeurs sans scrupules d'exploiter les travailleurs étrangers. L'année dernière, le ministère a édicté de nouvelles règles destinées à augmenter le salaire des travailleurs immigrés afin d'empêcher les employeurs d'utiliser le H-2B pour faire baisser la rémunération des Américains. Une coalition d'entreprises, dont la Crawfish Processors Alliance [Alliance des entreprises de transformation d'écrevisses], a contesté ce texte devant les tribunaux. Or le président de la Crawfish Processors Alliance n'est autre que Michael Leblanc, le propriétaire de CJ's Seafood. (Ni Leblanc ni Walmart n'ont voulu répondre à nos questions.)

"Nos vies ont de la valeur"

Le ministère a en outre défini en avril dernier une réglementation ambitieuse qui accorde de nouveaux droits aux travailleurs immigrés - et protège notamment les lanceurs d'alerte -, tout en obligeant les employeurs à prouver qu'ils ont cherché à recruter des travailleurs américains avant de faire appel à des étrangers.

Mais moins de deux semaines avant l'entrée en vigueur du dispositif, des entrepreneurs - rejoints par la Chambre du commerce - ont saisi la justice, si bien que la réglementation est suspendue. A la mi-juin, elles ont reçu le soutien d'un groupe de sénateurs démocrates et républicains de la Commission des finances, qui ont, à l'issue d'un vote, empêché le gouvernement d'appliquer les nouvelles règles.

"Cette réglementation n'a pas lieu d'être, elle aura des effets très néfastes sur les entreprises bénéficiant du programme H-2B dans tout le pays", a fait valoir le sénateur républicain Richard Shelby. Quant à Lindsey Graham, lui aussi républicain, il estime que la réglementation "punit l'employeur". Il va jusqu'à prétendre que même le BTP a du mal à recruter des Américains (alors que ce secteur connaît un taux de chômage de 14,2 %).

Reste à savoir ce que va devenir ce dispositif. Quant aux grévistes de CJ's Seafood, ils ont perdu leur emploi. Ana Diaz s'apprête à retourner au Mexique. Mais elle ne regrette pas d'avoir dénoncé les conditions de travail dans l'entreprise. "Si nous nous sommes mobilisés, assure-t-elle, c'était pour empêcher que d'autres travailleurs ne subissent un jour la même chose. Notre message est simple : nos vies ont de la valeur."


Le lien : http://www.courrierinternational.com/artic...tant-de-walmart
Vania
 
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