par Plestin » 05 Nov 2017, 17:23
Acte 1 : en Catalogne, le gros du mouvement trotskyste local (Anticapitalistas) "démissionne" et s'aligne sur les positions de la gauche indépendantiste (CUP) qui s'aligne sur les positions de la droite indépendantiste (qui a voté les mêmes mesures d'austérité que le gouvernement de Madrid).
Acte 2 : dans le contexte de déliquescence de l'économie espagnole et de corruption du régime de Madrid, l'écoeurement des classes populaires pousse une partie d'entre elles à se tourner vers la seule alternative qui lui est proposée : l'indépendantisme. Tout simplement parce que le choix n'existe pas. Aucun courant communiste significatif n'est implanté en Catalogne, aucun n'est en mesure de faire prévaloir les intérêts de la classe ouvrière. La classe ouvrière n'a pas de politique propre et est à la remorque de la petite et moyenne bourgeoisie. Les grands partis de gauche traditionnels sont déconsidérés et le PSOE est lui-même à la remorque de Rajoy.
Acte 3 : dans le référendum organisé par les indépendantistes contre la volonté de Madrid et dans les conditions que l'on sait où la répression par Rajoy a indigné une bonne partie de l'opinion publique (indépendantiste ou pas), l'indépendance l'emporte à 90 % parmi les 43 % de l'électorat qui sont allés voter. (Sur l'opinion des 57 % d'autres, on ne sait rien, pas plus que sur l'opinion des travailleurs immigrés qui n'ont pas le doit de vote). Une grève générale en faveur de l'indépendance mobilise une partie importante des étudiants, le patronat des PME et, dans leur sillage, certains secteurs de la classe ouvrière (notamment dans les transports et le port).
Acte 4 : la plupart des groupes d'extrême-gauche qui ont souvent déserté le terrain de la classe ouvrière mettent en avant le "droit des peuples à disposer d'eux-mêmes", viennent à la rescousse des indépendantistes catalans et vont chercher une justification dans Trotsky. Ce qui n'a d'ailleurs strictement aucun effet vu que ces groupes n'ont aucun poids en Catalogne.
Et ils comparent cette situation à celle des années 1930, où il existait de puissantes organisations ouvrières (anarchistes), des partis ouvriers, le POUM etc. et où la population catalane avait vraiment le choix entre l'option de l'indépendance et l'option des luttes ouvrières, en toute connaissance de cause. La défaillance de l'extrême-gauche ayant ôté le deuxième choix, elle se "rattrape" en soutenant le premier !
C'est grave, parce que cela signifie que pour qu'une organisation vraiment communiste révolutionnaire soit présente en Catalogne, il va falloir attendre que le courant international de LO s'y implante. C'est grave, parce qu'on ne pourra compter que sur nos propres forces, qui sont maigres.