Conférence internationale des industries de santé
Publié : 28 Oct 2017, 10:17
A Montreuil, la fédération CGT de la chimie (la FNIC) en partenariat avec la Fédération Syndicale Mondiale (FSM qui compterait 92 millions de membres dans 126 pays) vient d'organiser pendant trois jours une conférence internationale des industries de santé, à laquelle ont participé une centaine de militants syndicaux de la FNIC et environ 30 délégués provenant de 15 pays. J'y ai moi aussi participé.
Il y a eu durant ces trois jours pas mal de déclarations vibrantes de solidarité internationale ou de dénonciation du capitalisme (dont on sait, connaissant certains participants, qu'elles ne seront suivies d'aucun effet...)
Le président de la FSM, Georges Mavrikos (qui vient de la métallurgie en Grèce et fait partie du KKE, le PC grec), a tenu un discours très radical, dénonçant la dégradation de la situation de la classe travailleuse partout dans le monde, la multiplication des privatisations dans le domaine de la santé, le fait que sur terre plus de 2 milliards de personnes n'ont pas d'accès au médicament. Il a rappelé certaines revendications comme "médicament pour tous et eau pour tous", "médicaments bons et gratuits pour tous". Il a même dit que tout ce qu'on peut avoir, c'est par la lutte qu'on l'a obtenu et pas par des gouvernements !
Il y a eu plusieurs débats, dont un sur les vaccins (il fallait crever l'abcès des préjugés sur les vaccins, répandus jusqu'au sein de l'assemblée, et les meilleurs soutiens sont venus de pays comme le Sénégal, le Congo RDC et l'Inde qui savent encore ce que sont les maladies infectieuses...), un sur la gestion des données de santé personnelles des patients par des gens comme Amazon ou d'anciennes filiales de Google avec les risques associés (transmission des données aux compagnies d'assurances qui montent leurs primes, aux banques qui refusent les prêts pour raisons de santé...), et un sur les nationalisations (j'ai dû rappeler ce qu'avaient été celles de 1981 en France et leur cohorte de cadeaux aux riches et de suppressions massives d'emplois, sinon personne ne l'aurait fait ! Et rappeler qu'on ne peut pas évacuer la question de savoir au service de quelle classe sociale est l'Etat !)
Mais ce rassemblement a été surtout intéressant pour ses témoignages en provenance de différents pays (reflétant une grande diversité de situations et... d'organisations).
Palestine
La déléguée palestinienne est intervenue plusieurs fois, mais le plus intéressant était quand elle a expliqué que dans les territoires sous occupation israélienne la population avait à faire face à la fois au pouvoir israélien et au pouvoir palestinien, chacun prélevant ses propres taxes sur les médicaments, avec une complicité entre l'industrie pharmaceutique palestinienne et le gouvernement palestinien pour maintenir des prix relativement élevés sous prétexte de garantir une production locale. Il y a beaucoup de mortalité due à l'absence de soins et de traitements. L'occupation israélienne interdit la production de certains médicaments en Palestine ainsi que l'importation de certains principes actifs ou autres produits chimiques sous prétexte qu'ils sont dangereux (sous-entendu : utilisables pour des explosifs ou des armes...) Il existe de nombreux chercheurs palestiniens dans le domaine de la santé, mais ils vivent dans les pays riches et, bien qu'ils participent à certaines découvertes scientifiques, cela profite à leur pays d'accueil et pas à la Palestine où il est très difficile de mettre en place une recherche.
Sénégal
Le syndicat UTS (Union des Travailleurs du Sénégal) avait envoyé 4 représentants, 2 femmes et 2 hommes. Tous sont intervenus et ont été parmi les meilleurs acteurs des débats. Dans celui sur les vaccins, l'un d'entre eux a expliqué qu'il y avait longtemps eu chez eux aussi une crainte injustifiée par rapport à la vaccination, vue comme un truc de blancs, parfois même suspectée d'être un programme visant à rendre les femmes africaines stériles. Du coup, des tas de gens ont souffert de maladies comme la polio et il en reste encore aujourd'hui beaucoup de handicapés "à cause de leurs parents qui n'ont pas voulu de la vaccination". Heureusement, depuis, la vaccination s'est généralisée et la polio a disparu du pays. Une déléguée a aussi rappelé les immenses besoins du Sénégal et de l'Afrique en général face à des maladies comme le paludisme, le VIH / sida, la santé maternelle et néonatale, la santé de l'enfant, la santé mentale, la santé au travail, et la prise en compte très insuffisante des cancers du sein et du col de l'utérus. Un délégué est aussi intervenu pour dire que les débats sur les nationalisations ne le concernaient pas beaucoup, vu qu'il n'y a rien à nationaliser dans le pays, presque dépourvu d'industries de santé... La principale infrastructure étant l'Institut Pasteur local qui fait un boulot très utile. (J'ai pu discuter avec l'un des délégués sénégalais qui travaille à la Sécurité sociale et s'occupe des contentieux entre employés et employeurs ; c'est le modèle français qui prévaut là-bas ; selon lui, il n'est pas rare que l'inspection du travail prenne des décisions favorables aux salariés mais que l'employeur fasse appel auprès du ministère qui casse la décision).
Congo RDC
Avant l'effondrement du pays, les multinationales comme Sanofi vendaient des médicaments à des prix relativement abordables, puis elles se sont toutes retirées. Aujourd'hui elles reviennent, mais avec des prix bien plus élevés, ce qui favorise le marché parallèle de médicaments souvent indiens, chinois ou africains (Nigéria) dont une partie sont des contrefaçons qui ont de graves conséquences sur la santé des populations.
Brésil
Les syndicalistes délégués brésiliens sont visiblement des pro-Lula, englués dans la gestion lorsqu'il était au pouvoir mais qui n'ont pas de mots assez durs pour le nouveau gouvernement de droite issu selon eux d'un "coup d'Etat". Leur problème (de gestionnaires) était que, après avoir essayé de mettre en place un système de soins pour les plus pauvres, ils ont été confrontés à la dépendance du Brésil par rapport aux grandes puissances contrôlant la fabrication des médicaments ou de leurs principes actifs, ces dernières pratiquant des prix élevés, sans compter que les ruptures de stock se multiplient. Le Brésil doit acheter toute une partie de ses médicaments en passant par le Panama. (Il y a une industrie pharmaceutique assez importante au Brésil, mais pratiquement pas de chimie et le pays reste dépendant pour les principes actifs). L'organisation des soins et de la santé est très décentralisée, au niveau des différents Etats, et ceux repassés à droite auraient subi un démantèlement de tout ce qui avait été mis en place auparavant sous Lula en matière d'accès aux soins pour la population pauvre.
Grèce
Il y avait plusieurs représentants du syndicat PAME lié au KKE (le parti communiste grec), n'ayant pas de mots assez durs pour critiquer le gouvernement "d'union de la gauche et de l'extrême-droite" de Tsipras. Ils ont rappelé qu'avant la contribution des patients sur le prix des médicaments était de 5 % et qu'elle avait augmenté, notamment sous ce gouvernement pour atteindre désormais 36 %. Une série de mesures antipopulaires est prévue jusqu'en 2020. Tsipras préfère donner 2,4 milliards aux Etats-Unis pour l'amélioration de la flotte des avions de guerre. Mais une grande partie de leur discours a été centrée sur une dénonciation générale du capitalisme et on n'a pas appris grand chose d'autre concernant ce qui se passe en Grèce, sauf que le laboratoire Pfizer (américain, n°2 mondial) a augmenté de 20 % ses prix sur 100 médicaments.
Chypre
Là aussi, surtout une dénonciation générale du capitalisme et juste le rappel qu'il existe depuis 2001 dans le pays une législation sur la santé qui n'est pas appliquée en pratique. On n'a pas appris grand-chose sur le pays.
Inde
Les délégués indiens ont rappelé que dans ce pays, plus de la moitié de la population (700 millions de personnes sur 1,3 milliard) n'a tout simplement aucune couverture sociale et doit payer tous les médicaments et traitements de sa poche, donc n'a en réalité pas d'accès aux soins, alors qu'il y a pourtant une industrie pharmaceutique très importante mais qui préfère exporter. En ce moment, on constate une résurgence de la malaria, ainsi que des épidémies de chikungunya et on se heurte dans ce dernier cas au prix très élevé des tests de dépistage, hors de portée pour la plupart des patients. Les délégués indiens ont rappelé que la santé ce n'est pas que l'industrie pharmaceutique, c'est aussi de bons médecins, de bons hôpitaux etc. : en Inde faute de bons médecins en quantité suffisante, dans bien des villages il y a des médecins non qualifiés ou des prétendus médecins qui prescrivent des traitements parfois concoctés par eux-mêmes ou issus du marché noir, parfois bons parfois mauvais. De plus en plus d'activités publiques liées à la santé sont privatisées par le gouvernement. Il y a aussi eu une intervention pour rappeler les ravages liés au réchauffement climatique et à la pollution. Par contre, les mêmes ont aussi réclamé que les médecines douces soient davantage prises au sérieux. Un délégué indien a expliqué qu'il se sentait peu concerné par les débats sur les sels d'aluminium dans les vaccins, la priorité en Inde étant d'éradiquer les maladies infectieuses.
Serbie
Les délégués serbes sont clairement des apparatchiks très proches du gouvernement, qui n'ont pas beaucoup participé à la conférence (ils ont même loupé une demi-journée pour aller voir Notre-Dame...) Néanmoins ils ont rappelé l'état d'isolement et de délabrement de leur pays depuis les bombardements, la disparition totale de l'industrie pharmaceutique locale qui en a découlé, le fait que désormais 50 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, qu'il y a énormément d'enfants malades pas soignés et beaucoup de cancers qui semblent s'être accrus avec les bombardements.
Panama
Un délégué du Panama a tenu un discours extrêmement virulent et radical. Il a par ailleurs expliqué comment on voyait l'industrie pharmaceutique gonfler ses prix entre le début et la fin de la chaîne. Il a aussi dénoncé un processus d'harmonisation à l'échelle de l'Amérique centrale concernant les protocoles de fabrication des médicaments dans la région, comme étant surtout un moyen pour les grosses entreprises internationales d'éliminer les petites locales. Il a aussi expliqué comment le FMI et les banques agissaient pour imposer de repousser l'âge de la retraite et de privatiser les activités de santé et les caisses, et qu'il faudrait donc organiser des luttes contre ça.
Soudan
Le délégué du Soudan a brièvement rappelé le manque criant d'infrastructures de santé dans son pays. Il s'est plutôt attaché à demander ce qu'il faudrait faire face à la crise écologique et à la mauvaise santé découlant de la mauvaise utilisation des sciences ou des médicaments.
Afrique du Sud
Un délégué sud-africain a rappelé que son mouvement syndical était bien présent dans le secteur de la santé et notamment les hôpitaux publics et privés, mais très peu présent dans les industries de santé hormis dans l'imagerie médicale. Un autre a fait état de ses préoccupations concernant les nouveaux problèmes de santé en lien avec l'évolution des sociétés ("certaines sciences affectent le rythme biophysique" ???) et le réchauffement climatique.
Vietnam
Le délégué vietnamien a parlé essentiellement des questions de la santé au travail dans les industries de santé. Là-bas (et il le disait avec une pointe d'amertume), il y a une sorte de cogestion syndicat / employeur autour de la santé des travailleurs dans les entreprises. Les deux définissent ensemble la liste de ce qui peut profiter aux employés en matière de santé sans trop gêner la production. Cela aboutit à une enveloppe de 50 dollars par an et par travailleur, c'est tout, attribués aux visites médicales qu'ils doivent passer, et ce n'est pas assez pour avoir une visite approfondie, il n'y a que des visites médicales périodiques de faible qualité ne permettant pas de détecter beaucoup de maladies. L'effectif du secteur étant féminin à 64 %, une bonne partie de ce maigre effort est lié en fait à tout ce qui concerne la grossesse et la maternité. Par ailleurs, il y a dans le pays beaucoup de problèmes de santé liés à l'expansion rapide des zones industrielles et de la pollution qui va avec.
* * * *
Il n'y a eu, et c'est bien dommage, aucune intervention des délégués du Portugal et de l'Angola.
A noter aussi que 4 pays n'ont pu envoyer de délégués car ils n'ont pas pu se voir accorder de visa pour venir en France : Syrie, Tunisie, Cameroun et Sri Lanka.
Dans la conclusion générale, la FNIC a entre autres appelé à ce que les industries de santé soient nationalisées...
Une conférence bien vivante malgré ses (grosses) limites, et des préoccupations grandissantes concernant les pathologies liées à l'environnement, notamment dans les pays pauvres.
Il y a eu durant ces trois jours pas mal de déclarations vibrantes de solidarité internationale ou de dénonciation du capitalisme (dont on sait, connaissant certains participants, qu'elles ne seront suivies d'aucun effet...)
Le président de la FSM, Georges Mavrikos (qui vient de la métallurgie en Grèce et fait partie du KKE, le PC grec), a tenu un discours très radical, dénonçant la dégradation de la situation de la classe travailleuse partout dans le monde, la multiplication des privatisations dans le domaine de la santé, le fait que sur terre plus de 2 milliards de personnes n'ont pas d'accès au médicament. Il a rappelé certaines revendications comme "médicament pour tous et eau pour tous", "médicaments bons et gratuits pour tous". Il a même dit que tout ce qu'on peut avoir, c'est par la lutte qu'on l'a obtenu et pas par des gouvernements !
Il y a eu plusieurs débats, dont un sur les vaccins (il fallait crever l'abcès des préjugés sur les vaccins, répandus jusqu'au sein de l'assemblée, et les meilleurs soutiens sont venus de pays comme le Sénégal, le Congo RDC et l'Inde qui savent encore ce que sont les maladies infectieuses...), un sur la gestion des données de santé personnelles des patients par des gens comme Amazon ou d'anciennes filiales de Google avec les risques associés (transmission des données aux compagnies d'assurances qui montent leurs primes, aux banques qui refusent les prêts pour raisons de santé...), et un sur les nationalisations (j'ai dû rappeler ce qu'avaient été celles de 1981 en France et leur cohorte de cadeaux aux riches et de suppressions massives d'emplois, sinon personne ne l'aurait fait ! Et rappeler qu'on ne peut pas évacuer la question de savoir au service de quelle classe sociale est l'Etat !)
Mais ce rassemblement a été surtout intéressant pour ses témoignages en provenance de différents pays (reflétant une grande diversité de situations et... d'organisations).
Palestine
La déléguée palestinienne est intervenue plusieurs fois, mais le plus intéressant était quand elle a expliqué que dans les territoires sous occupation israélienne la population avait à faire face à la fois au pouvoir israélien et au pouvoir palestinien, chacun prélevant ses propres taxes sur les médicaments, avec une complicité entre l'industrie pharmaceutique palestinienne et le gouvernement palestinien pour maintenir des prix relativement élevés sous prétexte de garantir une production locale. Il y a beaucoup de mortalité due à l'absence de soins et de traitements. L'occupation israélienne interdit la production de certains médicaments en Palestine ainsi que l'importation de certains principes actifs ou autres produits chimiques sous prétexte qu'ils sont dangereux (sous-entendu : utilisables pour des explosifs ou des armes...) Il existe de nombreux chercheurs palestiniens dans le domaine de la santé, mais ils vivent dans les pays riches et, bien qu'ils participent à certaines découvertes scientifiques, cela profite à leur pays d'accueil et pas à la Palestine où il est très difficile de mettre en place une recherche.
Sénégal
Le syndicat UTS (Union des Travailleurs du Sénégal) avait envoyé 4 représentants, 2 femmes et 2 hommes. Tous sont intervenus et ont été parmi les meilleurs acteurs des débats. Dans celui sur les vaccins, l'un d'entre eux a expliqué qu'il y avait longtemps eu chez eux aussi une crainte injustifiée par rapport à la vaccination, vue comme un truc de blancs, parfois même suspectée d'être un programme visant à rendre les femmes africaines stériles. Du coup, des tas de gens ont souffert de maladies comme la polio et il en reste encore aujourd'hui beaucoup de handicapés "à cause de leurs parents qui n'ont pas voulu de la vaccination". Heureusement, depuis, la vaccination s'est généralisée et la polio a disparu du pays. Une déléguée a aussi rappelé les immenses besoins du Sénégal et de l'Afrique en général face à des maladies comme le paludisme, le VIH / sida, la santé maternelle et néonatale, la santé de l'enfant, la santé mentale, la santé au travail, et la prise en compte très insuffisante des cancers du sein et du col de l'utérus. Un délégué est aussi intervenu pour dire que les débats sur les nationalisations ne le concernaient pas beaucoup, vu qu'il n'y a rien à nationaliser dans le pays, presque dépourvu d'industries de santé... La principale infrastructure étant l'Institut Pasteur local qui fait un boulot très utile. (J'ai pu discuter avec l'un des délégués sénégalais qui travaille à la Sécurité sociale et s'occupe des contentieux entre employés et employeurs ; c'est le modèle français qui prévaut là-bas ; selon lui, il n'est pas rare que l'inspection du travail prenne des décisions favorables aux salariés mais que l'employeur fasse appel auprès du ministère qui casse la décision).
Congo RDC
Avant l'effondrement du pays, les multinationales comme Sanofi vendaient des médicaments à des prix relativement abordables, puis elles se sont toutes retirées. Aujourd'hui elles reviennent, mais avec des prix bien plus élevés, ce qui favorise le marché parallèle de médicaments souvent indiens, chinois ou africains (Nigéria) dont une partie sont des contrefaçons qui ont de graves conséquences sur la santé des populations.
Brésil
Les syndicalistes délégués brésiliens sont visiblement des pro-Lula, englués dans la gestion lorsqu'il était au pouvoir mais qui n'ont pas de mots assez durs pour le nouveau gouvernement de droite issu selon eux d'un "coup d'Etat". Leur problème (de gestionnaires) était que, après avoir essayé de mettre en place un système de soins pour les plus pauvres, ils ont été confrontés à la dépendance du Brésil par rapport aux grandes puissances contrôlant la fabrication des médicaments ou de leurs principes actifs, ces dernières pratiquant des prix élevés, sans compter que les ruptures de stock se multiplient. Le Brésil doit acheter toute une partie de ses médicaments en passant par le Panama. (Il y a une industrie pharmaceutique assez importante au Brésil, mais pratiquement pas de chimie et le pays reste dépendant pour les principes actifs). L'organisation des soins et de la santé est très décentralisée, au niveau des différents Etats, et ceux repassés à droite auraient subi un démantèlement de tout ce qui avait été mis en place auparavant sous Lula en matière d'accès aux soins pour la population pauvre.
Grèce
Il y avait plusieurs représentants du syndicat PAME lié au KKE (le parti communiste grec), n'ayant pas de mots assez durs pour critiquer le gouvernement "d'union de la gauche et de l'extrême-droite" de Tsipras. Ils ont rappelé qu'avant la contribution des patients sur le prix des médicaments était de 5 % et qu'elle avait augmenté, notamment sous ce gouvernement pour atteindre désormais 36 %. Une série de mesures antipopulaires est prévue jusqu'en 2020. Tsipras préfère donner 2,4 milliards aux Etats-Unis pour l'amélioration de la flotte des avions de guerre. Mais une grande partie de leur discours a été centrée sur une dénonciation générale du capitalisme et on n'a pas appris grand chose d'autre concernant ce qui se passe en Grèce, sauf que le laboratoire Pfizer (américain, n°2 mondial) a augmenté de 20 % ses prix sur 100 médicaments.
Chypre
Là aussi, surtout une dénonciation générale du capitalisme et juste le rappel qu'il existe depuis 2001 dans le pays une législation sur la santé qui n'est pas appliquée en pratique. On n'a pas appris grand-chose sur le pays.
Inde
Les délégués indiens ont rappelé que dans ce pays, plus de la moitié de la population (700 millions de personnes sur 1,3 milliard) n'a tout simplement aucune couverture sociale et doit payer tous les médicaments et traitements de sa poche, donc n'a en réalité pas d'accès aux soins, alors qu'il y a pourtant une industrie pharmaceutique très importante mais qui préfère exporter. En ce moment, on constate une résurgence de la malaria, ainsi que des épidémies de chikungunya et on se heurte dans ce dernier cas au prix très élevé des tests de dépistage, hors de portée pour la plupart des patients. Les délégués indiens ont rappelé que la santé ce n'est pas que l'industrie pharmaceutique, c'est aussi de bons médecins, de bons hôpitaux etc. : en Inde faute de bons médecins en quantité suffisante, dans bien des villages il y a des médecins non qualifiés ou des prétendus médecins qui prescrivent des traitements parfois concoctés par eux-mêmes ou issus du marché noir, parfois bons parfois mauvais. De plus en plus d'activités publiques liées à la santé sont privatisées par le gouvernement. Il y a aussi eu une intervention pour rappeler les ravages liés au réchauffement climatique et à la pollution. Par contre, les mêmes ont aussi réclamé que les médecines douces soient davantage prises au sérieux. Un délégué indien a expliqué qu'il se sentait peu concerné par les débats sur les sels d'aluminium dans les vaccins, la priorité en Inde étant d'éradiquer les maladies infectieuses.
Serbie
Les délégués serbes sont clairement des apparatchiks très proches du gouvernement, qui n'ont pas beaucoup participé à la conférence (ils ont même loupé une demi-journée pour aller voir Notre-Dame...) Néanmoins ils ont rappelé l'état d'isolement et de délabrement de leur pays depuis les bombardements, la disparition totale de l'industrie pharmaceutique locale qui en a découlé, le fait que désormais 50 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, qu'il y a énormément d'enfants malades pas soignés et beaucoup de cancers qui semblent s'être accrus avec les bombardements.
Panama
Un délégué du Panama a tenu un discours extrêmement virulent et radical. Il a par ailleurs expliqué comment on voyait l'industrie pharmaceutique gonfler ses prix entre le début et la fin de la chaîne. Il a aussi dénoncé un processus d'harmonisation à l'échelle de l'Amérique centrale concernant les protocoles de fabrication des médicaments dans la région, comme étant surtout un moyen pour les grosses entreprises internationales d'éliminer les petites locales. Il a aussi expliqué comment le FMI et les banques agissaient pour imposer de repousser l'âge de la retraite et de privatiser les activités de santé et les caisses, et qu'il faudrait donc organiser des luttes contre ça.
Soudan
Le délégué du Soudan a brièvement rappelé le manque criant d'infrastructures de santé dans son pays. Il s'est plutôt attaché à demander ce qu'il faudrait faire face à la crise écologique et à la mauvaise santé découlant de la mauvaise utilisation des sciences ou des médicaments.
Afrique du Sud
Un délégué sud-africain a rappelé que son mouvement syndical était bien présent dans le secteur de la santé et notamment les hôpitaux publics et privés, mais très peu présent dans les industries de santé hormis dans l'imagerie médicale. Un autre a fait état de ses préoccupations concernant les nouveaux problèmes de santé en lien avec l'évolution des sociétés ("certaines sciences affectent le rythme biophysique" ???) et le réchauffement climatique.
Vietnam
Le délégué vietnamien a parlé essentiellement des questions de la santé au travail dans les industries de santé. Là-bas (et il le disait avec une pointe d'amertume), il y a une sorte de cogestion syndicat / employeur autour de la santé des travailleurs dans les entreprises. Les deux définissent ensemble la liste de ce qui peut profiter aux employés en matière de santé sans trop gêner la production. Cela aboutit à une enveloppe de 50 dollars par an et par travailleur, c'est tout, attribués aux visites médicales qu'ils doivent passer, et ce n'est pas assez pour avoir une visite approfondie, il n'y a que des visites médicales périodiques de faible qualité ne permettant pas de détecter beaucoup de maladies. L'effectif du secteur étant féminin à 64 %, une bonne partie de ce maigre effort est lié en fait à tout ce qui concerne la grossesse et la maternité. Par ailleurs, il y a dans le pays beaucoup de problèmes de santé liés à l'expansion rapide des zones industrielles et de la pollution qui va avec.
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Il n'y a eu, et c'est bien dommage, aucune intervention des délégués du Portugal et de l'Angola.
A noter aussi que 4 pays n'ont pu envoyer de délégués car ils n'ont pas pu se voir accorder de visa pour venir en France : Syrie, Tunisie, Cameroun et Sri Lanka.
Dans la conclusion générale, la FNIC a entre autres appelé à ce que les industries de santé soient nationalisées...
Une conférence bien vivante malgré ses (grosses) limites, et des préoccupations grandissantes concernant les pathologies liées à l'environnement, notamment dans les pays pauvres.