Sanctions commerciales Iran et relations USA-Europe

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Sanctions commerciales Iran et relations USA-Europe

Message par Plestin » 14 Mai 2018, 14:14

L'épisode de la fin de l'accord sur le nucléaire iranien suite à une décision unilatérale des Etats-Unis de le rompre, n'en finit pas de susciter des réactions indignées de la part des gouvernements et des grands groupes d'autres pays, d'Europe notamment.

Ce n'est évidemment pas le sort de la population iranienne qui leur importe (ça, ils s'en fichent), mais celui des profits des entreprises capitalistes qui faisaient affaire avec l'Iran.

Ce qui les révolte le plus, c'est le "principe d'extraterritorialité" : toute entreprise faisant affaire avec un pays sous embargo américain, ou convaincue de corruption dans n'importe quel pays de la planète, peut, si elle est également présente aux Etats-Unis, se voir infliger des sanctions financières parfois très importantes par ces derniers.

Ce n'est pas la première fois que ça arrive, il y avait eu d'importants précédents, dont BNP-Paribas (amende record de 8,9 milliards de dollars du fait de la réalisation de faux pour masquer sa présence en Iran, à Cuba et au Soudan). Il y avait eu aussi Alstom (772 millions de dollars d'amende pour des faits qui se sont déroulés à Taïwan et en Indonésie), un élément du bras de fer économique qui a contribué au démantèlement ultérieur du groupe (au profit de General Electric notamment...)

Cela veut dire que les Etats-Unis sont maîtres du jeu. Certains pays d'Europe dont la France montrent leurs muscles, font du battage médiatique, se demandent s'ils ne doivent pas s'unir pour résister à la pression américaine... Mais c'est du flan : que peuvent-ils faire contre les condamnations américaines ? Condamner les entreprises américaines présentes en Europe ? Les condamner sous quel prétexte ? Se réunir et déclarer que les entreprises européennes ont le droit de faire affaire avec l'Iran ? Cela n'empêcherait pas la moindre sanction américaine... La seule issue pour eux est de se soumettre, sauf à se lancer dans une escalade protectionniste qui plairait aux Mélenchon et autres Le Pen. Et encore... ils devraient confisquer des actifs américains en Europe, jamais ils n'en seront capables !

Les entreprises, elles, savent ce qu'elles risquent. Les Sanofi, Total, Renault-Nissan ou PSA sont en première ligne. Chacune soupèsera ses intérêts et devra choisir entre sa présence aux Etats-Unis et en Iran. A part peut-être PSA (qui n'est pratiquement pas présent aux Etats-Unis), le choix est vite vu... Et même celles comme Sanofi dont les relations avec l'Iran sont plus discrètes (pas de présence officielle, mais un partenariat avec le laboratoire local Dr. Abidi...) seront obligées de faire machine arrière ou de trouver des artifices plus sérieux.
Plestin
 
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Re: Sanctions commerciales Iran et relations USA-Europe

Message par Plestin » 18 Mai 2018, 05:55

Cet article sur Total qui se retire d'Iran, dans Le Revenu du 16 mai 2018, est assez révélateur du rapport de force entre capitalistes et Etats qui les soutiennent, et de la façon dont les Etats-Unis peuvent siffler la fin de la récréation quand ça leur chante :


Sauf dérogation, Total quittera l’Iran d’ici novembre

Par Johann Corric

Le géant pétrolier a réagi à la décision américaine de réactiver des sanctions contre l’Iran. À moins qu’il n’obtienne une dérogation, le groupe français cessera ses activités dans le pays et il explique dans le détail pourquoi.

Depuis juillet 2017, Total est engagé en Iran dans un important projet gazier. Avec la compagnie nationale iranienne et le chinois CNPC, le français devait développer une partie du gigantesque champ South Pars pour un coût total de 5 milliards de dollars avec, à la clé, une production de 2 milliards de pieds cube de gaz par jour (ou 400.000 barils équivalent pétrole par jour). La première partie du projet supposait un investissement de 2 milliards de dollars, dont la moitié pris en charge par Total en tant qu’opérateur et actionnaire à hauteur de 50,1% (CNPC a 30%).

La décision américaine de sortir de l’accord sur le nucléaire iranien risque néanmoins de forcer le groupe dirigé par Patrick Pouyanné à abandonner ce projet avant le 4 novembre prochain.

À moins qu’«une dérogation propre au projet ne soit accordée par les autorités américaines, avec le soutien des autorités françaises et européennes», Total «ne pourra pas continuer [ce] projet», a indiqué le groupe dans un communiqué publié le 16 mai en milieu d’après midi.

Liens forts avec les États-Unis

«Cette dérogation (…) devra comprendre une protection de la société contre toute sanction secondaire applicable en vertu du droit américain», précise la société.

Ces déclarations ne sont pas vraiment une surprise. «Il a toujours été clair que Total ne peut pas se permettre d’être exposé à des sanctions secondaires américaines», explique le pétrolier.

Et le groupe de détailler l’ampleur de ses liens avec les États-Unis : les banques américaines «sont impliquées dans plus de 90% de [ses] opérations de financement», plus de 30% de son actionnariat est américain et il possède plus de 10 milliards de dollars d’actifs dans le pays.

La société a toutefois cherché à relativiser les conséquences d’un tel abandon, indiquant notamment que ses dépenses engagées à ce jour dans le projet iranien «ne dépassent pas 40 millions d’euros».

Total a en outre confirmé son objectif de croissance de sa production de 5% par an entre 2016 et 2022, qui ne serait donc pas impacté par un retrait d’Iran.

En Bourse, l'action n'est pas perturbée par ces annonces. Le 16 mai elle a clôturé en repli de 0,67% après avoir touché, la veille, un plus haut de dix ans à 54,14 euros.
Plestin
 
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