Mali, Guinée, le pouvoir cède aux réactionnaires

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Mali, Guinée, le pouvoir cède aux réactionnaires

Message par Plestin » 17 Jan 2019, 19:03

Deux extraits du dernier numéro du Pouvoir aux Travailleurs (UATCI) montrant la pression des réactionnaires (religieux ou traditionalistes) sur le pouvoir, au Mali et en Guinée :

MALI

IBRAHIM BOUBACAR KEITA À PLAT VENTRE DEVANT LE MOUVEMENT FONDAMENTALISTE MUSULMAN

Le ministère de l’Éducation Nationale du Mali voulait introduire dans les écoles publiques quelques notions d’éducation sexuelle mais face au tollé des imams du Haut Conseil Islamique du Mali (le HCIM), le Premier ministre a fait marche-arrière et a retiré le projet sans même avoir livré une petite résistance devant les tenants de l’islam rigoriste.

Pour montrer sa force, l’imam Mahmoud Dicko, président du HCIM, a fait défiler ses fidèles à Bamako malgré l’annonce du retrait de ce projet par le gouvernement. Ainsi, ils étaient des milliers à converger vers le Palais de la Culture le dimanche 23 décembre dernier, sous le cri de « Allah Akbar... » alors que la manifestation avait été interdite. Ce fut une véritable démonstration de force devant laquelle le gouvernement malien a pitoyablement reculé.

Ce n’est pas la première fois que les imams du HCIM font reculer le pouvoir. Il faut rappeler la débandade de l’ancien président Amadou Toumani Touré (alias ATT) en 2009 devant les partisans de ce même Dicko lorsqu’il a voulu apporter un petit toilettage du Code de la famille. Celui en vigueur était particulièrement réactionnaire sur le statut de la femme malienne. ATT avait déjà fait voter le nouveau code par les députés, mais les imams ont crié à la trahison de l’Islam et ont mobilisé leurs fidèles. Le 22 août 2009, environ 50.000 personnes sont venues au stade de Bamako à l’appel du HCIM et ont écouté les prêches enflammés de Dicko contre le nouveau code trop « occidental » à son goût car il donnait quelques nouveaux droits aux femmes.

ATT n’a même pas essayé de défendre son texte. Il l’a fait modifier sur le champ par les mêmes députés qui venaient de l’adopter. Tous les paragraphes qui ne plaisaient pas aux imams ont été gommés. Quelques voix d’associations de défense des droits de la femme se sont élevées contre la pression des mouvements fondamentalistes mais ATT a fait le choix de les ignorer.

L’actuel président IBK se retrouve devant la même situation. Il a envie de se montrer comme un président « moderne » pour plaire notamment à ses protecteurs de Paris, mais il a en même temps besoin de l’appui des dignitaires religieux pour calmer la colère de la population contre son régime.

Jusqu’ici, tant que les intérêts généraux de l’impérialisme français ne sont pas remis en cause au Mali, il est assuré du soutien de Paris. Reste à savoir s’il continuera à avoir celui des dignitaires religieux les plus influents.



GUINEE

ALPHA KONDÉ LÉGALISE LA POLYGAMIE POUR PLAIRE À CEUX QUI VEULENT QUE LA FEMME RESTE SOUS LA DOMINATION DES HOMMES

Le 29 décembre dernier, le gouvernement guinéen a adopté un nouveau « code civil » qui légalise le mariage polygame. Jusqu’à présent, bien qu’autorisée pour le mariage religieux, la polygamie était officiellement interdite pour les mariages civils. À partir de maintenant, l’État reconnait légalement la polygamie.

Selon les statistiques officielles des autorités guinéennes, 48% des mariages pratiqués en 2012 étaient polygames. Le gouvernement en a conclu que puisque c’est une pratique courante il fallait la légaliser pour être « en conformité avec les réalités du moment » tel que le souhaitent les milieux traditionalistes. Ces gens-là veulent en effet que la société reste figée sur les valeurs traditionnelles ancestrales et que le statut de la femme reste comme il est depuis des siècles.

La « réalité du moment » (pour reprendre leurs termes) c’est aussi que le pouvoir d’Alpha Kondé fait face à une contestation de plus en plus ouverte et active. Elle est dirigée politiquement par les partis d’opposition et elle rencontre un écho favorable auprès d’une partie importante de la population, plus particulièrement dans les grandes villes, à cause de la cherté de la vie, de la corruption et des fraudes électorales pratiquées par les tenants du pouvoir. La jeunesse scolaire et estudiantine est aussi en colère contre le mauvais fonctionnement des établissements publics. Cela fait beaucoup de mécontentements contre le pouvoir.

Malgré la répression policière, Alpha Kondé ne parvient pas à étouffer cette contestation. Alors il a sorti de son chapeau la carte des « valeurs traditionnelles » en espérant attirer la sympathie de la frange la plus réactionnaire de la société.

En légalisant la polygamie, il enlève le peu de protection qui restait dans la législation et qui permettait à des femmes de s’opposer à cette forme de mariage sur le terrain légal.

Quelques femmes ont dit non à cette légalisation mais leur voix n’a pas pesé lourd devant la dictature de Kondé. Elles n’ont pas trouvé non plus un appui favorable auprès des dirigeants de l’opposition puisque sur cette question ils sont plutôt d’accord avec la position de Kondé. Rappelons tout de même que le chef de fil de l’opposition actuel, Cellou Dalein Diallo, est lui-même un polygame et se dit fier de l’être. C’est dire qu’avec une opposition comme celle-là, les pratiques rétrogrades auront encore de beaux jours devant elles.

Quel autre cadeau Kondé ferra-il encore en faveur des milieux traditionalistes pour ne pas être balayé du pouvoir ?
Plestin
 
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