"Aucun changement profond de la société ne se fera sans une mobilisation déterminée des travailleurs et des couches populaires."
Tel est l'axe de "Voie Ouvrière pour le socialisme" au stade actuel du mouvement. S'agit-il d'oeuvrer pour l'apparition d'une force politique indépendante de la classe ouvrière ?
Voie Ouvrière pour le socialisme 20 novembre a écrit :Le hirak entre le marteau du pouvoir et l’enclume de ses forces conservatrices : Que faire ?
9 mois après son irruption, la mobilisation populaire se poursuit pour réclamer le départ du régime. Le rejet de la feuille de route du pouvoir en général et des élections présidentielles du 12 décembre en particulier ne se limite pas uniquement au refus des populations de se rallier aux marches organisées par ses partisans. Il se traduit, également, par un boycott actif des manifestants.
Les candidats qui se sont lancés dans la campagne électorale ne suscitent pas de sympathie mais rencontrent, plutôt, mépris et opposition. Leurs meetings, qui se tiennent dans des salles presque vides et qui ne se maintiennent que grâce aux dispositifs policiers, servent, désormais, d’occasions de mobilisations populaires pour dénoncer cette mascarade électorale. Les arrestations, les lourdes peines d’emprisonnements à l’encontre des manifestants ne dissuadent pas ces protestations anti-élections. Elles les renforcent !
Le régime puise sa force de la faiblesse du hirak…
Cette situation montre à quel point le régime est en difficulté. Cependant, il serait naïf de le considérer «finissant», comme veulent nous le faire croire certains. Force est de constater que se sont ces mêmes tenants du pouvoir qui mènent des attaques contre les masses populaires, emprisonnent des manifestants et font passer leur lois.
Certes, le mouvement populaire se perpétue. Toutefois, sa faiblesse politique et l’absence d’une direction véritablement révolutionnaire l’empêche d’atteindre son objectif par «les seules marches du vendredi». Ce constat est fait, aujourd’hui, par tous et les slogans appelant à une grève générale sont de plus en plus répandus dans les marches.
Ceci dit, ces appels persistants à la grève générale ne rencontrent pas d’écho dans la société et restent, pour le moment, inaudibles au sein des entreprises.
Paradoxalement, c’est à la périphérie du hirak que se développent d’autres luttes plus revendicatives et plus offensives; le mouvement en cours des travailleurs du pré-emploi, la formidable lutte des enseignants du primaire organisée en dehors des syndicats, les protestations populaires pour le logement, l’eau et gaz et les grèves ouvrières qui avaient marqué la rentrée sociales, sont des symptômes d’un bouillonnement social…
Toutes ces luttes, qui n’arrivent toujours pas à se fédérer et qui devaient normalement intégrer et renforcer le mouvement populaire, sont menées à la marge du hirak et elles s’en démarquent, parfois, ouvertement.
Cet écart n’a rien de naturel. Si la jonction ne s’opère pas entre ces deux mouvements (Hirak et luttes sociales), c’est principalement à cause de l’absence d’une perspective claire pouvant unir tous les exploités dans la même lutte.
Alors que les partis, leurs alliances et les notables du hirak ignorent ces luttes, les syndicats, qui devraient se poser en courroie de liaison entre le mouvement populaire et ces batailles sociales, se positionnent plutôt en fonction de leurs appartenances politiciennes.
Si la direction de l’UGTA reste toujours docile et servile devant le pouvoir, la Coordination des Syndicats Autonomes (CSA) se constitue, quant à elle, en instrument bureaucratique de la feuille de route des partis libéraux et ne se soucie guère des préoccupations de sa base. L’échec cuisant de la grève du 28 octobre dernier initiée par cette Coordination démontre combien est grand le fossé existant entre les syndicats autonomes et leurs bases respectives.
Le hirak doit représenter une perspective pour tous les révoltés
Ainsi, au lieu d’offrir une alternative à ces luttes sociales, les partis libéraux et les syndicats les ignorent et les méprisent sous prétexte qu’elles «se battent pour des questions sociales». Cette attitude est le fruit d’un raisonnement stupide quand elle n’a pas pour objectif d’inhiber la révolte des exploités.
Aucun changement profond de la société ne se fera sans une mobilisation déterminée des travailleurs et des couches populaires. Les libéraux le savent et leur refus obstiné de s’adresser à ces Algériens en lutte prouve qu’ils redoutent une implication des masses. Car, ils sont conscients que ces véritables victimes du système ne vont pas se contenter d’un simple ravalement de façade et de quelques réformettes démocratiques, mais exigeront un changement radical du régime contre les intérêts des patrons et des puissances impérialistes dont ces libéraux ne sont que les valets. C’est pourquoi, ils font tout pour les maintenir à l’écart du mouvement et évite de discourir sur les questions qui divisent les exploités de leurs exploiteurs.
Si non, comment expliquer la démarche de ces forces qui n’avaient pas hésité à se mobiliser pour soutenir la grève, bien que corporatiste et syndicale, des magistrats. Pire encore, même sur les questions d’ordre purement politiques, comme l’adoption de la loi sur les hydrocarbures qui a suscité une réaction populaire vive et unanime, ces forces n’ont pas jugé utile d’engager la résistance. Elles se sont contentées de simples déclarations, alors que cette question pouvait fédérer les énergies et montrer la voie même à ceux qui se sont laissés duper par la surenchère nationaliste du régime.
Les révolutionnaires n’ont pas à supplier ces forces, dont les aspirations sont conservatrices et les politiques freinent le mouvement, d’intégrer les questions sociales pour renforcer le hirak. Notre rôle aujourd’hui est de nous constituer en une force alternative pour organiser la convergence du mouvement populaire avec les luttes sociales.