(artza @ vendredi 1 juin 2007 à 07:25 a écrit : (gerard_wegan @ vendredi 1 juin 2007 à 02:38 a écrit :2) Je reste gêné par des formulations comme "Les camps de la mort ont été créés pour les communistes allemands, on ne peut l’oublier", car cela masque une différence de taille entre camps de concentration (camps d'internement et de travail forcé) et camps d'extermination ("camps de la mort"). Or si les premiers ont bien été ouverts par les nazis pour les opposants politiques (les communistes allemands en tout premier lieu), ce n'est pas vrai des seconds qui visaient essentiellement les Juifs, les Tziganes, les homosexuels...
Crois-tu qu'il y ait ici une tentative de minimiser quoique ce soit?
J'insiste sur la question avant d'aller plus loin, afin de comprendre de quoi on discute exactement.
Non, je ne pense pas qu'il y ait la volonté de minimiser quoi que ce soit -- c'est-à-dire, pour être explicite, de minimiser ou de nier la spécificité de la Shoah. Je sais que ce procès existe contre l'extrême gauche ; ce n'est pas mon propos -- je n'aurais jamais rejoint LO si j'avais eu le moindre doute là-dessus...
De quoi je discute exactement ? Du fait qu'il n'est pas juste d'utiliser la même expression "camps de la mort" pour désigner les camps de concentration nazis ouverts à fin de répression politique et les camps d'extermination destinés à l'assassinat systématique de catégories spécifiques de la population. Même les camps d'internement (type Drancy en France) qui ont servi à "alimenter" les seconds (Auschwitz, Belzec, Treblinka, Sobibor...) ne relèvent pas de la logique de la répression politique. L'entreprise génocidaire répond à une autre logique que la répression politique ; ce n'est pas la seconde qui, par un simple enchainement, aurait conduit à la première.
L'article affirme que
"l’antisémitisme est le corollaire obligatoire en Europe" de la terreur fasciste. C'est discutable historiquement (pas évident d'emblée en Italie) mais, surtout, l'antisémitisme fasciste lui-même (avec son cortège de lois discriminatoires) ne conduisait pas automatiquement à la "solution finale". Autrement dit, le fascisme en Europe, même nourri d'antisémitisme, n'avait pas besoin d'un plan systématique d'extermination des Juifs pour exister [*]... Il y a là quelque chose d'irréductible, qu'il me semble important de souligner, notamment lorsqu'on parle des camps.
[*] Lorsque Trotsky aborde la question juive en décembre 1938, il écrit :
"même sans guerre, le prochain développement de la réaction mondiale signifie presque avec certitude l'extermination physique des Juifs." Mais il en parle -- compte tenu de la situation d'alors -- comme d'une conséquence du fait que
"Le nombre de pays qui expulsent les Juifs ne cesse de croître. Le nombre de pays capables de les accueillir diminue". Pas plus qu'aucun autre il n'envisage (à ma connaissance du moins) une entreprise étatique visant directement à cette extermination.
(La bourgeoisie juive et la lutte révolutionnaire % Léon Trotsky % 22 décembre 1938 a écrit :Le Père Coughlin, qui cherche apparemment à démontrer qu'une morale idéaliste absolue n'empêche pas l'homme d'être la pire canaille, a déclaré à la radio que j'avais dans le passé reçu pour la révolution d'énormes sommes d'argent de la bourgeoisie juive des États‑Unis. J'ai déjà répondu dans la presse que c'était faux. Je n'ai pas reçu d'argent non pas, bien entendu, parce que j'aurais refusé un soutien financier pour la révolution, mais parce que la bourgeoisie juive n'a pas proposé un tel soutien. La bourgeoisie juive est restée fidèle au principe : ne rien donner. Même aujourd'hui, quand c'est de sa tête qu'il s'agit. Étouffant dans ses contradictions, le capitalisme dirige des coups forcenés contre les Juifs et, en outre, une partie de ces coups tombe sur la bourgeoisie juive en dépit de tous ses “services” passés rendus au capitalisme. Des mesures de nature philanthropique pour les réfugiés deviennent de moins en moins efficaces en comparaison de l'immensité des maux qui accablent le peuple juif.
C'est maintenant le tour de la France. La victoire du fascisme dans ce pays signifierait un grand renforcement de la réaction et une monstrueuse croissance d'un violent anti‑sémitisme dans le monde entier, surtout aux États‑Unis. Le nombre de pays qui expulsent les Juifs ne cesse de croître. Le nombre de pays capables de les accueillir diminue. En même temps la lutte ne fait que s'exacerber. Il est possible d'imaginer sans difficulté ce qui attend les Juifs dès le début de la future guerre mondiale. Mais, même sans guerre, le prochain développement de la réaction mondiale signifie presque avec certitude l'extermination physique des Juifs.
La Palestine s'est révélée un tragique mirage, le Birobidjan une farce bureaucratique. Le Kremlin refuse d'accepter des réfugiés. Les “congrès antifascistes” de vieilles dames et de jeunes carriéristes n'ont pas la moindre importance. Maintenant plus que jamais le destin du peuple juif — pas seulement leur destin politique, mais leur destin physique — est lié indissolublement à la lutte émancipatrice du prolétariat international. Seule une mobilisation courageuse des ouvriers contre la réaction, la constitution de milices ouvrières, la résistance physique directe aux bandes fascistes, une confiance en soi plus grande, activité et audace de la part de tous les opprimés, peuvent provoquer un changement dans le rapport des forces, arrêter la vague mondiale de fascisme et ouvrir un nouveau chapitre dans l'histoire de l'humanité.
La IV° Internationale a été la première à proclamer le danger de fascisme et indiquer la voie du salut. La IV° Internationale appelle les masses populaires juives à ne pas se faire d'illusions et à affronter ouvertement la réalité menaçante. Il n'est de salut que dans la lutte révolutionnaire. Le “nerf” de la lutte révolutionnaire, comme celui de la guerre, c'est l'argent. Les éléments progressistes et perspicaces du peuple juif doivent venir au secours de l'avant‑garde révolutionnaire. Le temps presse. Un jour, aujourd'hui, équivaut à un mois ou même à une année. Ce que tu fais, fais‑le vite !