sur l'article de LO consacré à Gramsci :
Les bordiguistes allaient voir dans l’évolution ultérieure de l’IC la confirmation de ce jugement de 1922. Du fait de l’emprisonnement de Bordiga, ils furent privés de l’apport de celui-ci, qui ne devait reprendre vraiment l’activité politique qu’après la Deuxième Guerre mondiale. À la divergence sur le front unique, ils ajoutèrent un désaccord avec Trotsky sur la nature de l’URSS, devenue pour eux dès ce moment un État capitaliste,
C'est faux, la gauche italienne considérait que l'état russe était prolétarien au moins jusque 1939. La rupture était consommée bien avant. Le 1er article et la caractérisation claire de l'état russe comme un état capitaliste date de 1939.
Les 2 vraies raisons de la ruture sont :
- Une tendance politique gauchiste de refus de tout compromis, rendant difficile toute discussion (d'où effectivement le refus net de la gauche italienne d'adhérer à l'opposition internationale de Trotsky). De là également son abstentionnisme, meme si Bordiga s'en défend : Il pense qu'il y a plus de désavantages, dans les périodes révolutionnaires, à mener la lutte au parlement qu'en dehors ... cette position sera caricaturée à sa suite (1926), les "bordiguistes" faisant de l'abstentionnisme un principe obligatoire en tout lieu et de tout temps.
- Le "refus" du front unique. Là encore le gauchisme des communistes italien est flagrant : S'ils ont mille fois raison de refuser la compromission définitive qu'est le front populaire ou le gouvernement ouvrier (s'allier politiquement avec les socialistes, gouverner ensemble), ils ne comprennent pas que le front unique est de nature très différente : "Frapper ensemble, marcher séparément", s'allier physiquement et de manière très ponctuelle avec socialistes et autres pour résister aux assauts mortels des fascistes.
Bordiga considère que Mussolini n'est pas Kornilov et que la position du front unique n'a pas de sens face au fascisme.
Ce qui n'est pas dit dans l'article, c'est que Trotsky rompra unilatéralement les discussions avec les communistes italiens, affirmant que le refus du front unique est absolument incompatible avec l'opposition internationale.
Gramsci avait lui compris la nécessité de ce front unique en Italie contre les fascistes mais pas compris les transformations intérieures du parti russe fusionnant avec l'état (et ses écrits montrent une déformation du marxisme de par son idéalisme philosophique hérité de Benedetto Croce, son véritable maitre).
Gramsci regrettera de sortir du PSI dès 1921 pour la construction du parti communiste, tandis que Bordiga la souhaitait bien avant. Gramsci voulait sortir du PSI avec la grande majorité des militants, ce ne fut pas le cas.
Ps : le jugement de Trotsky sur la politique des "bordiguistes", c'est à dire de la majorité du parti communiste d'Italie, me semble tout à fait juste. Ce qui n'empeche pas de lire Bordiga dont certains écrits sont à la hauteur de Trotsky, en particulier sur la nature de l'état russe et sur les principes du communisme. En matière d'organisation et de dynamique des masses par contre, le gauchisme de Bordiga surgit assez nettement.