(Endymion @ jeudi 2 septembre 2004 à 23:05 a écrit : Juste sur la nature de classe de la paysannerie, citation de Marx dans Les Luttes de classe en France :
a écrit :Son exploitation ne se distingue que par la forme de l'exploitation du prolétariat industriel. L'exploiteur est le même : le Capital
Donc exploitation aussi, par le même exploiteur : donc oui, les paysans sont des exploités et doivent participer à la lutte contre le capital suivant le mot d'ordre : "l'émancipation des travailleurs doit être l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes".
Mais cependant la FORME de leur exploitation diffère de la forme d'exploitation des ouvriers (qui est plus directe). On ne doit oublier aucune nuance.
Il me semble qu'on fait dire ici à Marx plus de choses qu'il n'en dit.
Marx parle d'une certaine paysannerie (en fait, les petits propriétaires de la France de 1848), et pas de la paysannerie en général. Et dans ce passage, il en parle dans un raisonnement politique, pour montrer que cette paysannerie n'est pas capable d'avoir une politique autonome, qu'elle n'a le choix qu'entre la direction de la bourgeoisie et celle du prolétariat, et que son intérêt serait de choisir la seconde. Alors, il insiste sur certains aspects, en mettant les autres de côté.
Mais pour Marx, la paysannerie en général n'est pas une classe homogène ; ce n'est même pas une classe tout court.
Guévariste, qui affirme que dans les campagnes russes, il y avait d'un côté des paysans sans terre, de l'autre des nobles, se trompe : la grande majorité des paysans étaient des propriétaires. Très peu étaient finalement de véritables "prolétaires", même ruraux (mettons de côté la question de savoir si un ouvrier agricole possède les mêmes aspirations qu'un ouvrier d'usine).
Parmi cette myriade de propriétaires, certains, ne possédant qu'un lopin insuffisant, devaient se louer pour vivre comme salariés une partie de leur temps, tandis que d'autres... les employaient comme salariés. Autrement dit, face à la noblesse, il y avait une véritable bourgeoisie rurale (les koulaks), des petits propriétaires, et très minoritairement des prolétaires.
Cela, ainsi que la dislocation du mir notamment sous la pression de cette montée de la bourgeoisie rurale, Lénine l'a expliqué dès la fin du XIXe siècle, dans son "développement du capitalisme en Russie".
Tout cela pour dire qu'en matière agricole, il faut se méfier des raisonnements à coup de serpe, qui sont souvent faux (désolé, pas pu m'empêcher).