Décès de Pierre Broué

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Koceila » 09 Août 2005, 18:12

a écrit :Son nom reste aussi attaché aux innombrables travaux qu'il consacra à l'histoire du communisme. Pierre Broué est notamment l'auteur d'une biographie monumentale (1.100 pages) de Léon Trotski (Fayard, 1988), qu'il rencontra trois fois.


Si je compte bien: 2005 - 79 = 1926, donc il avait 14 ans à la mort du vieux!!! ? Il a commencé à militer trés tôt donc?
Koceila
 
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Message par Barnabé » 09 Août 2005, 18:24

(Koceila @ mardi 9 août 2005 à 19:12 a écrit :
a écrit :Son nom reste aussi attaché aux innombrables travaux qu'il consacra à l'histoire du communisme. Pierre Broué est notamment l'auteur d'une biographie monumentale (1.100 pages) de Léon Trotski (Fayard, 1988), qu'il rencontra trois fois.


Si je compte bien: 2005 - 79 = 1926, donc il avait 14 ans à la mort du vieux!!! ? Il a commencé à militer trés tôt donc?
Non, cet article reprend cette erreur biographique, qui était je crois dans la dépêche AFP.
Sinon l'article du Monde sur le décès de Broué:
a écrit :Historien de renom et militant politique infatigable, Pierre Broué est mort, mardi 26 juillet, à Grenoble (Isère). Il était âgé de 79 ans.

Spécialiste du mouvement communiste international, Pierre Broué n'aura jamais cessé d'explorer le devenir des révolutions européennes, non seulement pour en méditer la grandeur, mais aussi pour en éprouver toutes les déceptions.


Né en 1926 à Privas (Ardèche), le jeune Broué a grandi dans une famille de fonctionnaires profondément républicains. Frappé par l'écho des émeutes "ligueuses" du 6 février 1934, il naît très tôt à la révolte politique, dans un double élan de solidarité avec les grévistes de juin 1936, en France, et avec les combattants antifranquistes.

Mais c'est au contact d'un professeur d'histoire, Elie Reynier, que le collégien cerne peu à peu sa vocation. A l'été 1940, le vieux militant-pédagogue est assigné à résidence. Il invite le lycéen à piocher dans sa bibliothèque : spontanément, celui-ci s'empare de la collection des Annales comme des livres de Marc Bloch ou de Georges Lefebvre. Surtout, il se jette sur les quatre volumes rouge vif de l'Histoire de la Révolution russe signés Léon Trotski. Il a 14 ans.

Dans un premier temps, Pierre Broué va toutefois s'engager au sein des jeunesses du Parti communiste clandestin. Il en sera bientôt exclu, avec d'autres khâgneux du lycée Henri-IV, à Paris, où il était "monté" pour préparer Normale Sup'. Lui et ses camarades n'avaient-ils pas voulu organiser un travail d'agitation "internationaliste" auprès des soldats de la Wehrmacht ?

"Vous êtes des trotskistes", avaient tranché les responsables du Parti, sans que les jeunes bannis comprennent encore vraiment ce que cette étiquette désignait. C'est ainsi qu'en 1944 Pierre Broué va rencontrer la poignée de révolutionnaires qui prétendent perpétuer l'héritage de Léon Trotski, en se réclamant d'un marxisme antistalinien, fidèle à la mémoire "originelle" d'Octobre 1917.


MILITANT ET ÉRUDIT


Au sortir de la guerre, et comme en hommage à son vieux maître Elie Reynier, Pierre Broué décide d'être à la fois un militant et un érudit, indissociablement. D'abord enseignant en région parisienne, cet amoureux de l'archive sera nommé par la suite à l'Institut d'études politiques de Grenoble, au milieu des années 1960. Là, sa voix grave et son accent ensoleillé, autant que son ardeur au travail, ont enthousiasmé des générations d'étudiants.

Consacrés à l'Internationale communiste (Komintern), les travaux de Pierre Broué ont contribué à renouveler l'historiographie dans un pays où l'hégémonie idéologique du PCF a longtemps figé la vie intellectuelle. Ainsi, dès 1961, dans La Révolution et la guerre d'Espagne (avec Emile Témime, Ed. de Minuit), il brisait la légende de l'unité "antifranquiste" et sortait de l'ombre la chasse aux révolutionnaires à laquelle les hommes du Komintern s'étaient alors livrés. De même, dans Le Parti bolchevique (Ed. de Minuit, 1963), Pierre Broué décrivait la généalogie politique du stalinisme, pour comprendre comment le parti de Lénine avait fini par massacrer la génération d'Octobre dans sa quasi-totalité.

Aussi cet itinéraire de combat et d'idées est-il tout entier placé sous le signe du trotskisme. En janvier 1980, lorsque les archives de Trotski sont ouvertes, Broué est l'un des premiers à pénétrer dans la Hougthon Library de Harvard (Etats-Unis), où elles sont déposées. Trois ans auparavant, avec quelques amis, il avait fondé à Grenoble l'Institut Léon-Trotski, afin d'éditer les oeuvres complètes du fondateur de l'Armée rouge (27 tomes parus à ce jour), et de créer les Cahiers Léon Trotski, où ont été publiées de nombreuses études portant sur le mouvement révolutionnaire international.

De celui-ci, Pierre Broué aura finalement embrassé tous les combats, pour le meilleur et pour le pire. Jusqu'à en endurer lui-même les aspects les plus pénibles. Ainsi, lorsqu'en 1988 il publie sa biographie monumentale intitulée, sobrement, Trotski (Fayard), il est l'un des principaux dirigeants du Parti communiste internationaliste (PCI), la tendance dite "lambertiste" des trotskismes français.

En tant que tel, Pierre Broué a participé à toutes les guerres intestines qui ont rythmé l'histoire de ce courant. Il a accompagné bien des ruptures, oeuvré à quelques exclusions aussi.

Un an plus tard, il était à son tour poussé vers la sortie, après quatre décennies de luttes communes et d'espoirs partagés. Jamais peut-être les deux casquettes de Pierre Broué ne s'étaient à ce point confondues : d'un côté, l'historien sondait les ressorts du stalinisme ; de l'autre, le militant en expérimentait les avatars au sein de son propre mouvement.

Jean Birnbaum
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Message par Gaby » 09 Août 2005, 18:25

(Koceila @ mardi 9 août 2005 à 19:12 a écrit :
a écrit :Son nom reste aussi attaché aux innombrables travaux qu'il consacra à l'histoire du communisme. Pierre Broué est notamment l'auteur d'une biographie monumentale (1.100 pages) de Léon Trotski (Fayard, 1988), qu'il rencontra trois fois.


Si je compte bien: 2005 - 79 = 1926, donc il avait 14 ans à la mort du vieux!!! ? Il a commencé à militer trés tôt donc?
Non, c'est de la connerie... Cette erreur a été reprise par plusieurs journalistes.

A noter une nouveauté sur le Marxists Internet Archive en Français, l'ouvrage de Pierre Broué, "Les Trotskystes en Union Soviétique".
http://www.marxists.org/francais/broue/wor...ue_19800000.htm
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Message par quijote » 09 Août 2005, 20:46

Indépendamment des divergences qu'on pouvait avoir , je considère que c'est une grosse perte
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Message par ianovka » 09 Août 2005, 23:36

Oui, je crois savoir qu'il ne nous tenait pas vraiment dans son coeur, mais son travail sur Trostky et le mouvement trotskyste est un trésor pour nous, et il a bien contribué à faire connaitre notre courant.

C'est effectivement une perte pour nous tous.
"Le capital est une force internationale. Il faut, pour la vaincre, l'union internationale, la fraternité internationale des ouvriers." Lénine
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Message par Cyrano » 10 Août 2005, 08:26

Pour beaucoup d'entre nous, Pierre Broué c'est un bouquin, qu'on a lu parce que notre contact LO nous le prêtait. Et on commençait alors à lire "La révolution et la guerre d'Espagne", et on l'avalait avec enthousiasme. La petite étoile accolée au m des Editions de Minuit, sur la couverture. Je l'ai en édition brochée, vieillie, mais je le reprends parfois, et toujours avec émotion, et je crois que je saurais, les yeux fermés, reconnaître le bruit sourd qu'il émet lorsque je le feuillète.

Le vieux lion semblait bien malade depuis quelques années. Son fils Michel avait des amours adultérines avec la Gauche Socialiste. Mais de son lit d'hôpital, en 2002, malgré tout, le vieux lion ne se rasait pas la crinière. Et il ne s'abaissa pas à la veulerie de vouloir battre Le Pen dans les urnes, il ne vota pas Jacques Chirac. Il avait alors publié un communiqué :

« Entré à l'hôpital pour une opération au lendemain du premier tour, je découvre en sortant que des camarades que j'estime ont jeté par-dessus bord idées et principes et appellent à voter Chirac ! J'avoue avoir reçu ce coup en plein visage et en tituber encore. Mon fils Michel m'offre de m'aider matériellement à exprimer mon point de vue. J'accepte.
Je vais être brutal. Ces derniers jours, dans mon état semi-comateux, ne me récupérant que par morceaux, je me suis cru en août 14. Je ressens l'attitude de ces camarades, et notamment ceux de la Gauche socialiste (dont je ne suis pas et n'ai jamais été), comme un coup de schlague, une humiliation, une initiative très grave. Je suis trop fatigué pour écrire un vrai texte mais je vais essayer d'énoncer des repères.
1. Il n'y a pas de problèmes français. C'est guignolesque d'expliquer que ce vote Chirac deviendra un référendum contre Le Pen. Nous sommes dans le monde et ce que nos concitoyens du monde apprennent, c'est ce que disent leurs journaux : "Les démocrates se rangent derrière Chirac." C'est grave, une vieille du goulag, une hija argentine, me demandent comment c'est possible… et mes amis d'Algérie.
2. J'affirme que la plupart de vos arguments (je m'adresse à ceux qui veulent voter pour Chirac) relèvent de l'épicerie. Ce ne sont pas les totaux de voix qui comptent mais la création, les manifestations, les réunions, les prises de parole, autrement dit la solidarité, l'élan, la ténacité et l'attachement au monde du travail : je n'oublie pas celui qui m'a dit, quand j'ai quitté l'hôpital : "Il faut dire à Jospin qu'on l'aime." Se cracher les uns sur les autres, même si on a raison dans sa rogne, cela ne profite qu'à Chirac et Le Pen. Il faut s'abstenir de violences verbales sans renoncer au débat et à la critique.
Marx et Ledru-Rollin,Trotsky et Hindenburg.
3. Déjà, Marx refusait le vote pour Ledru-Rollin et Trotsky celui pour Hindenburg. Honnêteté et courage. Vous qui dénoncez l'escroc et le super-menteur et qui avez de jeunes enfants, vous le leur dites comment, que vous votez pour lui ? Je crois que, dans votre désarroi, vous cherchez désespérément à gagner… du temps."
4. On ne gagne rien à se renier. Il faut marcher de l'avant, faire un Premier Mai grandiose, aider la jeunesse à renouer avec les traditions qu'elle cherche. Michel écrit qu'il appelle à voter Chirac, " la rage au cœur ". Dans le mien, mes camarades, il n'y a pas de rage, mais nos espoirs, nos rêves, ce monde nouveau que vous voulez et qui sera vôtre, les jeunes, et toute l'amitié et l'amour qu'on a pour vous, connus ou inconnus.
Et même nos amours mortes et celles qui n'ont pas pu éclore. Non, on ne va pas se masquer pour combattre.
Dans les yeux, face à face, s'il vous plaît, et tête haute.
Bulletins blancs ou nuls !
Vive la vie ! »
Pierre Broué
le 28 avril 2002

Vive la vie.
Cyrano
 
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Message par Koceila » 11 Août 2005, 16:41

=D>
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Message par Valiere » 12 Août 2005, 09:01

Qu'elle a été la réaction du PT et surtout du CCI?
Valiere
 
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