(Ottokar @ samedi 29 mars 2008 à 08:16 a écrit : ce n'est pas une discussion bien passionnante. (...)Le CLT ne répondait pas à Vérié, excuse-nous, vieux. Il répondait à CE baratin, qui vise à nous présenter la Chine comme le prochain grand, le rival dangereux de l'Europe. Et le camarade montrait bien que pour l'instant, la Chine était davantage en position de vassal que de rival.
(...)
Le PIB de la France dépasse 1700 milliards d'euros. Cela ferai un PIB par tête 15 à 20 fois inférieur au nôtre. En " ppa", une monnaie fictive de la banque mondiale, qui tient compte des niveaux de prix, le PIB de la Chine devrait être réévalué à 7000 milliards, trois fois plus. Mais par tête, cela fait encore 6 fois moins que la France. .
QUEL INTERET ?
Pas passionnant ? C'est évidemment une question de point de vue. Je comprend très bien que Ottokar (et d'autres) n'éprouvent ni l'envie de relire le texte du CLT 101 ni celle de se documenter sérieusement sur la Chine. Mais, si le sujet n'a aucun interet, pourquoi donc lui consacrer un CLT et de nombreux articles ? :33:
Le développement de la Chine est tout de même un des phénomènes majeurs de notre époque.
Ensuite, comme Ottokar n'écrit pas uniquement pour le plaisir de me contredire, je supppose qu'il trouve tout de meme un interet minimum au sujet. Pour ma part, il y a plein de sujets qui ne m'intéressent pas, sur lesquels je ne connais rien ou pas grand chose, et sur lesquels je n'interviens pas, bien que je sois bavard comme chacun l'a remarqué...
LA CHINE, "VASSAL" AD VITAM AETERNAM ?
Revenons à la Chine. La question posée n'est pas de savoir si le PIB moyen par habitant de la Chine va rattraper celui de l'Europe. Les chances que cela se produise dans un avenir prévisible sont en effet très faibles. (On notera tout de meme que certains pays encore arrièrés dans les années 50-60, comme la Corée du Sud, y sont parvenus.)
La question est de savoir si la Chine est en passe de devenir une grande puissance économique, militaire et politique. Donc de sortir de la situation de pays dominé - "vassal" dit Ottokar.
La thèse globale de LO, c'est non. Car LO part du point de vue implicite que les Etats sous-développés ne peuvent plus se tailler une place dans le système impérialiste. Ce point de vue est lié à une autre idée générale, à savoir que le capitalisme ne développe plus les forces productives, que le développement est factice etc. Certes LO ne dit pas tout à fait que "les forces productives ont cessé de croître" - comme le défendent toujours les Lambertistes -, mais ses positions ne sont pas claires sur ce sujet. (Au passage, notons que personne ne reproche à Trotsky d'avoir dit cela à la veille de la guerre de 1939.)
Donc, pour justifier cette vision générale, sur laquelle elle ne s'est jamais clairement expliquée, LO cherche à minimiser les développement de la Chine aujourd'hui, comme du Japon hier. C'est pour cela que je dis que ce sont des raisons idéologiques qui conduisent à cette attitude. Idem, inversement pour le développement de l'URSS : Trotsky, à la veille de la guerre, en pleine crise, pouvait avoir l'illusion que l'URSS était seule à continuer à se développer alors que le capitalisme était bloqué, que l'économie étatisée prouvait sa supériorité en dépit de ce qu'il considérait comme un "gaspillage bureaucratique". On a vu, au moment de l'effondrement de l'URSS, qu'il n'en était rien et que, sous bien des aspetc, ce développement était illusoire.
Les statistiques sur la croisssance ? Bien sûr, elles ne sont jamais complètement fiables et il faut voir ce qu'il y a derrière. Mais les chiffres concernant la Chine sont certainement beaucoup moins gonflés que ne l'étaient ceux sur le développement de l'URSS !
Alors, la Chine va-t-elle devenir une grande puissance, oui ou non ? Pour ma part, je pense que oui, sauf crise majeure évidemment. Si demain, des dizaines de millions de prolétaires chinois entrent en lutte, ça pourrait changer beaucoup de choses.
Le fait que la majeure partie de la population continue à vivre dans la misère n'empêchera pas la Chine de devenir une grande puissance. Ce sont deux questions différentes. Je le rèpète, si 100 millions de Chinois, soit 10 % de la population, vivent comme les Européens, cela représente déjà un marché de l'ordre de celui de l'Allemagne.
LES CHANGEMENTS QUALITATIFS DE L'ECONOMIE CHINOISE
Si on considère l'évolution récente de la Chine, on constate qu'elle est déjà sortie de son rôle d'atelier de main d'oeuvre non qualifiée pour fabriquer des produits de plus en plus sophistiqués. Elle commence à concurrencer les grands Etats dans le domaine de la production automobile par exemple, meme si ce n'est encore qu'à un petit niveau. (1)
Surtout les fabrications délocalisées en Chine, une partie d'Airbus par exemple, s'accompagnent toujours de transferts de technologie - la Chine l'impose systématiquement. Et, au niveau de la recherche scientifique et technologique, elle avance à grand pas. Sur l'autre fil, je donnais l'exemple de la formation des chercheurs et ingénieurs : la Chine en forme chaque année 20 fois plus que la France. Alors, même s'il y a toujours dans le Yunnan ou ailleurs, des paysans qui utilisent des socs en bois, ça n'empêche pas la Chine de devenir une grande puissance. Elle fabrique des sous-marins nucléaires, des engins spaciaux. Un de ses domaines de retard est l'aéronautique, mais elle s'applique à le combler.
Dire que la Chine sera une des plus grandes puisssances mondiales de demain, ce n'est donc pas seulement un bluff destiné à nous faire peur. Idem d'ailleurs pour les délocalisation qui, meme si elles ne jouent qu'un role secondaire aujourd'hui dans les suppressions d'emplois, ne sont pas pour autant négligeables et tendent à augmenter. CF l'exemple d'Airbus.
Ce n'est donc pas en nian la réalité, en faisant comme si le monde ne changeait pas qu'on pourra le comprendre et le combattre.
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1) Sur l'autre fil, j'ai reproduit divers documents, des exemmples des chiffres etc.
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Le point de vue d'un patron français en Chine (une réponse polémique à un livre de l'essayiste Thierry Wolton - "spécialiste" auto-proclamé des sujets les plus divers - qui défend une thèse proche de celle de LO, à savoir que le développement de la Chine serait un bluff.)
a écrit :
La Chine est l'atelier du monde mais ses produits manquent de technologie, affirme T. Wolton. La Chine est désormais l'un des laboratoires de la planète. Dans l'environnement de 52 zones de développement de haute technologie, 700 centres R&D et 55 000 start-up se déploient. La R&D atteint désormais 1,38% du PIB, la part des entreprises chinoises étant en forte augmentation. Qui plus est, l'affirmation de la puissance technologique de la Chine repose souvent sur l'existence de projets à rentabilité non immédiate. Dans ce cadre, la contrainte comptable est plus lâche, le canevas expérimental plus étendu, les axes de recherche plus variés. Dès lors, il est plus facile de valoriser une nouvelle technologie en Chine qu'en Europe où les contraintes sont lourdes. (...) La Chine qui copie nos brevets sera bientôt celle à qui on achètera des licences d'exploitation.
François de la Chevalerie (entrepreneur en Chine)