crise de direction révolutionnaire

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par artza » 20 Sep 2005, 09:39

(Vérié @ mardi 20 septembre 2005 à 08:03 a écrit :

Conséquences ? Par exemple, une partie des Trotskystes a tenté par tous les moyens de s'emparer d'appareils, dans l'espoir de devenir cette "bonne direction", comme si l'armée était préte en manquait de généraux compétents. D'où l'entrisme, la politique de l'OCI dans FO etc (Evidemment, depuis, la politique du PT est déterminé par bien d'autres considérations et facteurs sociaux que cette théorie de la bonne direction.)

LO n'a jamais procédé ainsi. Néanmoins, au lendemain de la guerre, la lecture des textes du groupe de Barta montre qu'il partageait l'illussion qu'une révolution pouvait se déclencher à tout instant.

D'une façon générale, la théorie de la bonne direction manquante conduit à se faire des illusions sur les organisations "ouvrières" (ou prétendument ouvrières) existantes, croire qu'elles peuvent se redresser brusquement ou que des pans de révolutonnaires peuvent s'en détacher etc.

Non Vérié l'entrisme pratiqué par la moitié des militants trotskystes sur les conseils de Pablo ne visaient pas à s'emparer d'appareils afin de devenir "la bonne direction".
Pour eux c'était bien plus simple.
Obligés d'affronter dans la guerre l'Impérialisme l'URSS et les PC seraient de fait révolutionnaires.
Les trotskystes n'avaient plus qu'à suivre le mouvement.
Quand aux militants liés à Lambert leur incrustation dans FO relève bien plus d'un adaptationisme en partie imposé par la situation contre lequel ils ont renoncé à lutter...et d'une justification politique à postériori.

Quand à Barta que fallait-il dire ou faire?

Il est arrivé à Trotsky ce qui est arrivé à tous les révolutionnaires.
Lénine pour toi s'est-il trompé avec sa révolution européenne et mondiale commencée dans les faubourgs de Petrograd?
Et Engels enthousiasmé par les résutats électoraux de la SD et ses adhésions annonçant l'assaut final?
Et Marx pêt à remettre le couvert après l'écrasement de 1848?

De toutes façons la classe ouvrière et ses militants n'ont d'autres choix que le combat. Le combat pour la victoire maintenant...ou plus tard.

C'est la politique élaborée par Trotsky entre 30 et 40 qui garde ouverte la voie de l'avenir et il a bien fait plutôt que de terminer sa bio de Lénine ou de réaliser celle de Marx et Engels pour le seul plaisir de quelques lecteurs gourmands.

Devant les coups et les défaites les révolutionnaires qui se sont retirés sur le bord de la route comme Pannekoek ou Otto Rühle qu'ont-ils préparé de mieux? Que nous ont-ils légués?
Que serions-nous aujourd'hui sans le combat mené par Trotsky?
artza
 
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Message par Ottokar » 20 Sep 2005, 10:02

J'avoue avoir du mal à comprendre où veut en venir Vérié. Parce que, sans agressivité, ce qu'il dit ne ME sert pas à grand chose. La seule conclusion que j'en tire, c'est qu'on est un certain nombre à avoir perdu notre belle jeunesse à chercher à changer le monde, alors que ce n'était pas possible "objectivement" comme on disait dans la langue de bois des années 30. Que fallait-il faire alors ? attendre... ? et aujourd'hui encore sans doute, attendre que la situation devienne "révolutionnaire", afin qu'on puisse tenter de résoudre la crise de direction. Cela revient à la position pratique des bordiguistes, qui disent parfois de bonnes choses dans leurs journaux, mais ne font jamais rien d'autre que de reproduire de grandes analyses atemporelles, sans chercher à intervenir dans les évènements. Ou alors cela revient aux textes désabusés du Barta des années 50-60. Et cela, d'après ce qu'il dit, je ne crois pas que Vérié le souhaite.

Est-ce cela le "volontarisme" de LO ? Oui si l'on veut, comme celui de Marx, de Lénine, de Trotsky, de Rosa Luxemburg, de Guévarra aussi à sa façon même si son combat n'est pas exactement le nôtre. C'est le volontarisme de militants qui essaient, combattent, sans savoir si une situation ne va pas se développer et donner d'autres possibiltés.

Mais surtout, je ne suis partage pas la façon de voir de Vérié des rapports entre une situation et ses possibiltés. Dans une entreprise, un quartier, un endroit où des gens sont en colère contre quelque chose, selon le ton des militants qui dirigent le mouvement, leur détermination, les salariés ou les habitants font des choses différentes. Il y a bien sûr des explosions violentes, spontanées, où personne ne demande rien à personne. Mais il y a aussi toutes ces situations où, en présence de leaders décidé, les gens se sentent en confiance, renforcés dans ce qu'ils pensent, et vont de l'avant. Et inversement, des situations où, en l'absence de militants de cette trempe, les mouvements avortent.

Même les grandes révolutions ou les grands mouvements du passé auraient pu avorter si elles n'avaient pas vu surgir en leur sein ces hommes et ces femmes doués de cette capacité. Il y aurait eu des explosions, mais entre des explosions comme les révoltes de ghettos noirs de 68 et des révolutions il y a une marge, non ? Les grèves de Pologne auraient pu tourner autrement. Elles auraient pu ne pas s'étendre, ne pas gagner, si Walesa et son équipe n'avaient pas été là. Et elles auraient pu aller plus loin si les quelques trotskystes polonais avaient su créer une petite équipe eux aussi et proposer autre chose que ce qu'a proposé Walesa ! Même sans aller jusqu'à la révolution, 68 aurait pu se développer autrement avec une autre direction, ou avec des équipes de révolutionnaires capables de contester le monopole des staliniens et des réformistes.

Ce que j'ai toujours entendu LO reprocher aux autres trotskystes, c'est leur manque de "volontarisme" leur manque de confiance en leurs propres idées. C'est ce qui les fait adhérer aux mouvements qui marchent, même s'ils marchent de travers, ou marchent vers le mur comme le PT brésilien en son temps ou le Linkspartei en Allemagne que la LCR encense.

"Le propre du révolutionnaire c'est de faire la révolution", comme disait le Che. Tout en essayant de voir lucidement la situation, sans voir effectivement des révolutions là où il n'y en a pas, le propre du militant révolutionnaire c'est au moins d'essayer de la faire, et de ne pas s'arrêter à ceux qui lui disent que ce n'est pas possible, que c'était inscrit dans l'Histoire, les cycles productifs, la croissance, le niveau de vie des esclaves du capital, etc. Parce que ça, ça n'avance à rien, ça ne l'aide en rien.
Ottokar
 
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Message par quijote » 20 Sep 2005, 10:46

je crois que ce que dit Vérié est dû à un certain découragement qu 'on peut éprouver parfois : " ça ne va pas assez vite mesuré à la longueur de notre vie individuelle " !

Bien sûr qu ,'il faut tenir compte du passé , des erreurs faites et au niveau de l 'analyse des faits au niveau de ce qu 'il aurait fallu faire ...

Mais quand on milite , on regarde devant soi , car ce que nous faisons est une "sorte de " pari "

Oui , c 'est un pari .

Il n ' y a aucune fatalité .

Trotski lui -même disait que si la société n 'est pas capable de construire le socialisme , ce sera la barbarie

" Socialisme ou barbarie " ça ne te rappelle rien vérié ?


Alors , que faire? comme dirait l 'autre

Eh! bien continuer , même si on a l 'impression de pédaler dans la choucroute : oui , c 'est une démarche volontariste , qui peut apparaître comme " subjective " , peu réaliste , mais parce que nous l 'entreprenons cette démarche , au risque d 'apparâitre " marginaux " ( " nous ne sommes qu 'une minorité disait Rosa Luxembourg ), nous sommes militants ...
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Message par pelon » 20 Sep 2005, 10:49

Je suis partagé sur la question. Caractériser correctement une période ne revient pas à être passif mais à en tenir compte. Si nous étions dans une période pré-révolutionnaire, nous ferions peut-être de la propagande (et même de l'agitation) pour l'armement du prolétariat. On ne peut pas reprocher à LO d'avoir surévalué le rapport de force ces dernières décennies. Nous avons toujours essayé de mesurer le plus objectivement possible les situations. En 1981 (mais on pourrait donner bien d'autres exemples), contrairement à l'OCI et à la LCR nous n'avons pas vu une montée de la classe ouvrière à travers la victoire de Mitterrand, même de manière déformée (électorale). Cela n'a pas empêché les militants de LO de s'activer. Un militant n'a pas besoin de bluff.
Pronostiquer une crise révolutionnaire après la seconde guerre mondiale n'était quand même pas du domaine de la science fiction. Bien sûr, il y avait l'exemple de la 1ère (où la classe ouvrière avait été aussi vaincue, abandonnée par ses dirigeants entrés dans l'Union sacrée) et la seconde risquait d'être encore bien plus dévastatrice (même s'il était difficile au début de voir jusqu'à quel point). D'ailleurs cette possibilité, les Etats l'avaient dans la tête. Hiroshima, Dresde et bien d'autres massacres de civils montrent combien, au-delà des vengeances les impérialistes craignaient, dans le chaos, que la fin de la guerre allait créer, les populations. (L'armée rouge, elle aussi, par ses abominations sur la population civile en Allemagne (massacres, viols systématiques..) a eu, contrairement aux espoirs des trotskystes, un rôle contre-révolutionnaire, ce que Barta a reconnu.)

Alors il était normal de se préparer à cette éventualité. Bien entendu, cela ne veut pas dire que les organisations trotskystes auraient été à la hauteur dans une telle éventualité. Mais, comme l'a dit Ottokar, il faut dans certaines circonstances être volontariste ce qui ne veut pas dire faire n'importe quoi.
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Message par Ottokar » 20 Sep 2005, 11:24

(Vérié @ lundi 19 septembre 2005 à 22:09 a écrit : Alors que je n'en conclut pas qu'il faut etre fataliste et attendre la grande crise pour lutter, mais il faut etre conscient qu'un parti et sa direction se construiront dans des luttes... des luttes d'une apreté dont nous n'avons plus aucune idée depuis ces trente ou cinquante dernières années, du moins en France. Vouloir plaquer une bonne direction et une armée de militants sur la situation actuelle (ou celle de 1968) est une démarche totalement volontariste, substitutiste et absurde. C'est l'inverse du fatalisme, mais ça n'aboutit pas à de meilleurs résultats.
Je n'ai évidemment pas de recette dans ma poche, mais il faut etre conscient de ces réalités et éviter de plaquer quelques formules de Trotsky qui remontent à plus de 60 ans, dans une période très différente, et qui étaient déjà très discutable à l'époque.

J'accorde bien volontiers à Vérié qu'il ne m'a pas conseillé d'aller me coucher ou de m'occuper autrement. Mais puisqu'il dit lui-même ne pas avoir de recettes, que dois-je faire alors ? Continuer à tenter de construire un parti qui ne naît que dans des périodes révolutionnaires alors que la période n'est pas révolutionnaire ? la poule et l'oeuf, quoi !

Certes, un parti ne naît pas de rien, et s'il y a un certain déterminisme dans les situations (nous sommes entre marxistes, que diable !), il y a aussi la part de la volonté individuelle, du choix d'hommes et de femmes d'une époque, le "volontarisme" si l'on veut. La vieille dialectique entre hasard et nécessité, liberté et nécessité. Et aussi le fait qu'en matière de révolutions comme parfois en physique, exister, expérimenter, agir, c'est changer la situation.

C'est pour cela que je disais amicalement à Vérié que sa conclusion ne m'aidait en rien. Quand bien même il aurait raison, et sachant aujourd'hui la suite des évènements, que conseillerait-il à Barta si, comme dans les romans de SF, il revenait en 1950 ? et aux autres qui n'ont pas plié devant la situation ?

Ils n'ont pas changé le monde parce qu'ils ne le pouvaient pas, nous dit en substance Vérié. En ce sens, la crise ne se serait pas résumée à une crise de direction. En sommes-nous si sûrs ? Une direction (qui ne naît pas de rien nous dit Vérié, mais quand naît-elle ? et que devons-nous faire pour la faire naître ?) n'aurait-elle pu changer les choses ici ou là ? et de proche en proche, offrir d'autres modèles aux révoltés de l'après-guerre ? d'autres perspectives au Che, autres que le castrisme et la guérilla stérile où il a laissé sa vie ?

C'est pourquoi je redis que la position va plus loin qu'une simple analyse de texte. Poussée à son extrême - ce que Vérié se refuse, se sentant insulté par la comparaison avec non pas Pannekoek mais les groupes bordiguiste actuels - la seule conclusion logique qui s'en dégage est un appel à la passivité devant les évènements sous le nom de "conscience des réalités".

Alors que c'est cette réalité que nous voulons changer : "soyons réalistes, demandons l'impossible !"
Ottokar
 
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Message par quijote » 20 Sep 2005, 12:11

A propos de l 'intervention de Vérié ,le mot " saugrenu " me semble déplaçé et peu courtois dans une discussion entre camarades ... mériterait d'être" modéré "
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