par Cyrano » 09 Jan 2005, 11:35
Peut-on imaginer que la direction de la LCR prenne connaissance, vendredi matin, dans Libé, d'une initiative d'Olivier Besancenot ?
Y'a écrit à la fin de l'article : "Olivier BESANCENOT, porte-parole de la LCR".
Alors ne notons pas la rédaction de l'élève Olivier – cette lettre, oui, c'est « du racollage vers les libertaires » (Thomas).
Mais je crois qu'elle est plus que ça…
La LCR semble être engagée dans un processus d'abandon de la référence à la révolution russe, ou plutôt un processus d'abandon de la référence au bolchevisme – la Commune, c'est bien plus fun dans le milieu de la petite bourgeoisie alter mondialiste.
Dans le Manifeste qu'elle vient de publier, ça fourmille de petites phrases agaçantes…
« Des expériences négatives d’hier, nous avons des leçons à tirer. »
« démocratie et révolution ont partie liée ! Ceci a des conséquences sur la manière même d’envisager le combat révolutionnaire, et d’ériger en principes des exigences qui n’ont pas toujours été claires dans l’histoire du mouvement ouvrier dont nous nous réclamons. »
« Depuis la Révolution russe de 1917, bien des certitudes ont été mises à rude épreuve et bien des croyances se sont écroulées. »
Et la seule fois ou Léon Trotsky est mentionné, dans le Manifeste, on peut pas dire pas dire que c'est flatteur pour la sagacité de Léon :
« Il a fallu la victoire de Staline et que le despotisme bureaucratique se révèle dans toute son horreur, pour que Léon Trotski défende le pluralisme par principe (incluant le pluripartisme) en "fonction de la diversité du prolétariat des contradictions ou antagonismes qui traversent les classe sociales." ».
Mais c'est normal pour une révolution qui a montré « des limites de la réflexion sur la démocratie politique et l’importance du suffrage universel » et qui, du coup, a eu la mauvaise idée d'entretenir « la confusion, dès les années 1920 en URSS, entre l’État, son appareil politico-administratif, la classe ouvrière et le parti communiste. »
Donc, Léon n'est mentionné qu'une fois dans la cinquantaine de pages (version PDF) du Manifeste de la LCR. Le nom de Lénine n'apparaît à aucun moment – il est bien étonnant d'ailleurs que le Manifeste n'ait pas cité la fameuse formule de Trostky dans "Nos tâches politiques" sur la dictature du Parti.
Marx n'est présent qu'au hasard d'allusions ou de citations banales et vides :
« l’illusion sociale, symétrique de “l’illusion politique” dénoncée par Marx [...] »
« Marx pensait que "l’émancipation politique constitue un grand progrès" »
« Si, avec Marx, on considère qu’être prolétaire c'est tout simplement être contraint de vendre sa force de travail [...] »
« Marx, il est vrai, n’avait donné que quelques indications générales sur les rapports entre émancipation politique et émancipation sociale. »
Par contre, Rosa Luxembourg bénéficie de citations complètes et appuyées :
« Rosa Luxembourg dénonçait déjà le militarisme impérialiste et son appétit de conquête : "Le militarisme a une fonction précise dans l’histoire du capital : il accompagne toutes les phases historiques de l’accumulation". Et elle ajoutait déjà que "la concurrence mondiale" du capital avait désormais "le monde entier pour théâtre". » (On notera que sur l'impérialisme, on choisit Rosa – Lénine : exit…)
Rosa, encore, sur le manque de démocratie de la révolution russe :
« Rosa Luxembourg était consciente du danger : "Sans élections générales, sans liberté illimitée de la presse et de réunion, sans lutte libre entre les opinions, la vie se meurt dans toutes les institutions publiques, elle devient une vie apparente, où la bureaucratie est le seul élément qui reste actif" ». Après cette citation de Rosa, le texte embraye sur Léon Trotsky qui n'avait rien vu venir (Cf. citation plus haut).
Rien de nouveau. Oui et non. En tout cas, rien de nouveau depuis quelques années.
Olivier Besancenot, dans son bouquin "Révolution : 100 mots pour changer le monde" soufflait déjà le chaud et le froid sur cette révolution russe et se revendiquait communiste et libertaire.
Il manquait un parti menchevik dans le paysage français. Patiente, patience….