par emma-louise » 23 Jan 2003, 17:16
:bounce: oui , je sais...!!!! Les acquis du trotskysme indispensables à une renaissance du marxisme révolutionnaire Internationaliste
La fin de l'URSS pose le problème de réévaluer l'actualité du programme trotskyste à la lumière de la nouvelle période historique. Sa disparition met fin à un cycle commencé avec la révolution russe et les profondes transformations qu'elle a engendrées à l'échelle mondiale. Ce n'est pas la classe ouvrière, comme les révolutionnaires l'envisageaient, qui a pu venir à bout de la bureaucratie mais la bourgeoisie qui a fini par absorber l'ex-URSS et les partis communistes. Avec la fin du stalinisme, ont disparu un Etat et des partis qui, à cause de leur lointaine origine, avaient une influence importante dans la classe ouvrière bien qu'ils soient devenus des instruments de conservatisme social. Dans la période précédente, les partis socialistes avaient permis à la bourgeoisie de sauver sa domination dans des situations où les travailleurs et les peuples étaient en situation de lui disputer le pouvoir.
Aujourd'hui, la transformation de la social-démocratie en social-libéralisme et la faillite du stalinisme ne sont pas un phénomène conjoncturel mais bien l'aboutissement d'une évolution, celle de l'adaptation au capitalisme de partis qui s'étaient construits en tant que partis de transformation sociale. En même temps, la classe ouvrière est devenue une classe mondiale ayant une force économique comme jamais dans la période précédente, riche de l'expérience des combats menés non seulement en Europe mais aussi aux Etats-unis, dans les pays de l'Est, en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud.
Pour le courant trotskyste, la réévaluation du passé à la lumière des conditions nouvelles permet de mieux apprécier nos propres tâches.
Le trotskysme est le seul courant qui a survécu au recul général ce qui le place en situation de faire un retour sur son histoire pour prendre la pleine mesure de sa continuité, sa filiation programmatique et militante et, en même temps, discuter de la rupture nécessaire qui est celle, objective, de la nouvelle période historique.
L'actualité du programme trotskyste : redonner vie aux idées marxistes
Le bilan du courant trotskyste est largement positif dans le sens où il a contribué à transmettre les idées du marxisme révolutionnaire en tant que théorie de la lutte d'émancipation des travailleurs par eux-mêmes, en rupture avec les caricatures staliniennes ou social-démocrates. De par son histoire, de sa filiation avec le combat de Trotsky et de ses camarades, une continuité a été préservée avec l'idée de la nécessité de la lutte pour l'indépendance de classe du mouvement ouvrier, incluant la démocratie la plus large et la conscience de sa légitimité à diriger la société, la nécessité de son organisation tant sur le plan social, syndical que politique pour se constituer en parti pour la conquête du pouvoir. Dans ce sens, le programme trotskyste garde toute son actualité, en étant le seul à pouvoir donner un contenu concret et vivant aux idées de l'auto-organisation des travailleurs et de l'Etat-Commune comme perspective historique pour une fraction bien plus large des travailleurs et de la jeunesse que dans le passé.
Dans la situation nouvelle du capitalisme de libre concurrence à l'échelle de toute la planète, déniant aux peuples comme aux travailleurs tout droit démocratique et social, il est le mieux à même d'en faire la critique la plus radicale, non d'un point de vue moraliste et réformiste, mais d'un point de vue de classe.
Confronté à des événements inédits depuis la deuxième guerre mondiale, le mouvement trotskyste a eu bien des faiblesses et des limites dues pour l'essentiel aux conditions qui étaient celles de sa situation à contre-courant, et dont il nous faudrait faire les bilans. Mais son existence en tant que courant international est bien la preuve de sa capacité à avoir pu trouver l'audience d'une fraction même limitée de la classe ouvrière et à avoir décrit une réalité sociale perceptible par elle.
Le Programme de transition en 1938 définissait les tâches des militants trotskystes, au moment où la faillite de l'impérialisme se révélait dans la barbarie de la deuxième guerre mondiale, dans la perspective de la prise du pouvoir par la classe ouvrière, ayant sur son chemin l'obstacle de puissants partis communistes. " La situation politique mondiale dans son ensemble se caractérise avant tout par la crise historique de la direction du prolétariat ", était un des éléments déterminant " des prémisses objectives de la révolution socialiste. "
Dans la période de basculement politique actuel où le réformisme social-démocrate et stalinien a perdu de son influence, et où nombre de ceux qui ont gardé des convictions communiste et socialiste, cherchent à renouer avec les idées de la lutte des classes, les perspectives ne peuvent se définir par la seule crise de la direction révolutionnaire. Le capitalisme mondialisé en soumettant des masses de plus en plus larges à son exploitation, a par là-même créé les conditions d'un renouveau du mouvement ouvrier, en faisant la démonstration de son incapacité à satisfaire les besoins fondamentaux de ceux qui, par leur travail collectif, créent les richesses gaspillées par une classe de plus en plus minoritaire et parasitaire.
L'urgence démocratique et sociale est devenue un besoin profond pour l'ensemble de l'humanité : la liberté et la démocratie ont plus que jamais un contenu de classe. L'actualité du programme révolutionnaire s'appuie sur les besoins des travailleurs et des peuples pour faire la critique radicale de la propriété privée bourgeoise pour formuler un nouveau projet de transformation sociale. Contribuer à ce que le Programme de Transition redevienne un programme actuel est une tâche d'envergure mais le courant trotskyste peut s'appuyer sur les besoins vitaux du mouvement ouvrier pour formuler des tâches en phase avec la nécessité de la conquête de nouveaux droits démocratiques et sociaux. En mettant en avant le programme de la démocratie révolutionnaire, le contrôle démocratique de la population sur l'économie, le renversement de la propriété privée, les militants trotskystes ont les armes programmatiques pour dépasser une situation héritée du passé et s'affirmer comme la fraction la plus radicale et la plus conséquente du mouvement ouvrier.
Refonder une Internationale par la confrontations des idées et des expériences
La IVème Internationale a été fondée par Trotsky et ses camarades en tant que parti mondial de la révolution, dans la continuité du combat pour la défense du programme bolchevique, combinant la lutte politique et sociale dans un même combat pour l'émancipation des travailleurs par eux-mêmes, représenté par l'apogée de la révolution russe dans ses premiers mois d'existence. Sa fondation correspondait à une nécessité objective qui était celle de l'époque où, après la victoire des travailleurs russes et des masses paysannes pauvres en 1917 qui avait ébranlé le pouvoir de la bourgeoisie mondiale, la réaction bourgeoise a accouché du fascisme et du stalinisme, avant de plonger le monde dans la violence de la deuxième guerre mondiale. Le capital politique immense légué par Trotsky nous permet de comprendre la période comprise entre 1917 et la deuxième guerre mondiale, période d'une lutte exacerbée à l'échelle internationale entre la bourgeoisie menacée dans son existence-même et la classe ouvrière. Mais si la lutte de Trotsky et de l'Opposition de gauche s'inscrivait dans un combat plus large que celui de la lutte contre la dégénérescence du premier Etat ouvrier, cette lutte s'est soldée par la défaite du mouvement ouvrier avec le stalinisme en URSS, le fascisme en Italie et en Allemagne, la deuxième guerre mondiale.
Les idées marxistes révolutionnaires ont pu parvenir jusqu'à nous grâce au combat de Trotsky et de la IVème Internationale à ses débuts. Mais la IVème Internationale a dû mobiliser toutes ses forces pour exister à contre-courant, malgré le stalinisme incarné dans de puissants Partis communistes et la lutte pour la révolution est devenue la lutte pour la démocratie au sein du mouvement ouvrier, la lutte contre le stalinisme.
A l'issue de la deuxième guerre mondiale, si les soulèvements révolutionnaires des peuples colonisés ont ébranlé la domination impérialiste, en Europe même, les classes ouvrières ne se sont pas détournées des Partis communistes, la lutte contre le fascisme apportant une nouvelle légitimité au stalinisme.
Les différents courants du mouvement trotskyste, marginalisés par rapport à la classe ouvrière, ont tenté de nouvelles expériences qui visaient à sortir coûte que coûte de leur situation minoritaire, quitte à prendre des détours qui les ont souvent éloigné de la tâche d'implanter les idées marxistes révolutionnaires au sein de la classe ouvrière et à revendiquer des solidarités avec des directions nationalistes sans exprimer le droit à la critique.
Mais un capital d'expériences et d'idées existe bel et bien à une large échelle qui permet aujourd'hui que les différents courants trotskystes qui ont su préserver une perspective politique indépendante, aient tous leur rôle à jouer, dans la diversité et la richesse d'un courant international.
Dans ce sens, une existence séparée ne se justifie plus au moment où les conditions objectives nécessitent le regroupement des forces. La mise en commun d'un capital d'idées, des acquis des luttes passées, les possibilités d'en discuter avec une fraction bien plus large des travailleurs et de la jeunesse que dans le passé, passent par une volonté consciente et volontariste qui ne peut que mettre à l'ordre du jour l'actualité d'un projet d'une nouvelle Internationale.
Rupture et continuité
Notre courant s'est défini historiquement dans une période qui n'existe plus aujourd'hui.
La période d'expansion de l'économie capitaliste dans les pays riches, après l'effondrement économique dû à la deuxième guerre mondiale, a été le terreau sur lequel a pu exister le réformisme, qu'il soit social-démocrate ou stalinien. Pour encadrer le mouvement ouvrier en dénaturant les idées socialistes et communistes, le réformisme s'est appuyé sur les illusions suscitées parmi les classes ouvrières, comme quoi, il suffisait de s'en remettre au parlementarisme et de déléguer la défense de ses intérêts à d'autres qu'elles-mêmes. Il a été un facteur déterminant de conservatisme social.
Maintenues en marge de la classe ouvrière, par la pression objective du stalinisme, les idées révolutionnaires n'ont pu vérifier leur validité sur une arène plus large que celle de petits groupes n'ayant pas suffisamment de liens vivants avec leur classe. L'existence séparée pendant de longues années a engendré la cristallisation des divergences et des spécificités qui ne pouvaient ni se vérifier, ni s'évaluer à la juste mesure de leur utilité pour le mouvement ouvrier.
La crainte de la confrontation démocratique, l'incapacité à faire passer les intérêts généraux du mouvement ouvrier avant toute préoccupation étroite d'organisation, à faire les bilans, est une des scories héritée de la période précédente. Le sectarisme a souvent servi à justifier une existence indépendante plutôt qu'à maintenir une réelle fermeté politique vis-à-vis de certains courants réformistes ou à la marge du courant stalinien.
Affirmer la continuité des idées marxistes révolutionnaires nécessite d'en assumer la rupture avec la période précédente pour être à même de donner un contenu nouveau aux tâches découlant de la situation mondiale à l'époque de la mondialisation qui porte en germe, les possibilités d'une société libérée du carcan de la propriété privée.
Si la IVème Internationale n'a pas pu jouer le rôle de parti mondial de la révolution qu'elle s'assignait, les idées trotskystes sont un fil à plomb indispensable pour comprendre la période passée et transmettre les idées marxistes révolutionnaires aux jeunes générations et à la fraction de la classe ouvrière qui s'émancipe en cherchant à renouer avec la lutte des classes.
Valérie Héas