Orwell

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Weltron » 08 Mai 2003, 10:25

Lors d'une discussion récente sur la possibilité du communisme au plan humain ("Mais non, ça ne peut pas marcher, l'Homme n'est pas assez bon pour cela !"), quelqu'un m'a cité Animal Farm de George Orwell en disant que ce livre prouvait que toute révolution devait nécessairement dégénérer.

J'ai répondu que cette histoire était davantage une critique du stalinisme qu'une critique du communisme. D'ailleurs, ai-je ajouté, Orwell était socialiste. "Pas à la fin de sa vie," me répondit-on, ce qui me laissa perplexe et un peu désarmé pour la suite du débat.

Je me tourne donc vers les savants participants de ce forum : qu'en est-il de George Orwell et de ce bouquin en particulier ? Avais-je raison ou pas ?
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Message par Matrok » 10 Mai 2003, 19:00

Caupo :
CITATION La démoralisation produite par le stalinisme eu raison d'Orwell aussi.[/quote]

C'est exact, comme de Victor Serge et de pas mal d'autres qui pourtant pendant un temps se sont opposés au stalinisme sans rien renier du communisme. La prise de conscience en fin de compte que l'ampleur des crimes commis par les staliniens allait bien au delà de ce qu'ils avaient cru dans un premier temps les a complètement démoralisés et les a amené à remettre en question tout ce pourquoi ils s'étaient battus.

Cependant dans le cas d'Orwell, comme c'est souvent le cas, l'oeuvre est très supérieure à l'auteur. "Animal's Farm" est un livre parfois ambigu, mais c'est plus antistalinien qu'anticommuniste. Il raconte une histoire de révolution trahie, certes : mais pourquoi y voir une démonstration que toutes les révolutions ont une fin amère ?

"1984", écrit alors qu'Orwell avait définitivement viré de bord, est bizarrement beaucoup moins ambigu : il s'agit d'une dénonciation du totalitarisme, de quel bord qu'il se réclame. Citer Orwell pour soutenir un discours anticommuniste est assez bizarre : même s'il était très anticommuniste vers la fin de sa vie, ça n'est pas exprimé dans ses romans.

Pour bien comprendre tout ça : George Orwell, une vie, par Bernard Crick (je ne me souviens plus quel éditeur).
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Message par reval71 » 12 Mai 2003, 13:21

L'hommage à la Catalogne est très intéressant pour plusieurs pour plusieurs aspects.

Dans un premier temps l'auteur traite des conditions de vie dans les brigades du POUM, de la formation militaire faite avec les moyens du bord du fait du manque d'armes, de la solidarité des brigadistes
La deuxième partie traite plus particulièrement des évènements qui aboutir a partir de mai 1937 à l'élimination du POUM, à l'intégration forcée des brigades dans l'armée républicaine et ,n'en déplaise à Vilenne, à la trahison des anars.

Si la première partie est plus le témoignage d'un combattant qui ne fait pas vraiment la différence entre les différentes organisations politiques , dans la deuxième partie Orwell prend conscience du rôle contre-révolutionnaire du PSUC qui le conduira a prendre la fuite étant recherché par les républicains et les stals.



le film de Loach "Land and Freedom " est largement inspiré de ce livre.
reval71
 
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Message par pelon » 12 Mai 2003, 15:46

Tu veux dire "trahison des dirigeants anars" bien sûr. Enfin de presque tous, Durruti, lui, est resté intraitable, il n'est pas devenu ministre d'un gouvernement bourgeois.
pelon
 
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Message par pelon » 12 Mai 2003, 20:13

Pour le plaisir, une analyse de Trotsky sur la direction anarchiste pendant la révolution espagnole :


CITATION
Le rôle des anarchistes.
Les anarchistes n'ont eu, dans la révolution espagnole, aucune position indépendante. Ils n'ont fait qu'osciller entre menchévisme et bolchévisme. Plus exactement, les ouvriers anarchistes tendaient instinctivement à trouver une issue dans la voie bolchévique (19 juillet 1936, journées de mai 1937), alors que les chefs, au contraire, repoussaient de toute leur force les masses dans le camp du Front populaire c'est-à-dire du régime bourgeois.

Les anarchistes ont fait preuve d'une incompréhension fatale des lois de la révolution et de ses tâches lorsqu'ils ont tenté de se limiter aux syndicats, c'est-à-dire à des organisations de temps de paix, imprégnées de routine et ignorant ce qui se passait en dehors d'eux, dans la masse, dans les partis politiques et dans l'appareil d'Etat. Si les anarchistes avaient été des révolutionnaires, ils auraient avant tout appelé à la création de soviets réunissant tous les représentants de la ville et du village, y compris ceux des millions d'hommes les plus exploités qui n'étaient jamais entrés dans les syndicats. Dans les soviets, les ouvriers révolutionnaires auraient naturellement occupé une position dominante. Les staliniens se seraient trouvés en minorité insignifiante. Le prolétariat se serait convaincu de sa force invincible. L’appareil de l'Etat bourgeois n'aurait plus été en prise sur rien. Il n'aurait pas fallu un coup bien fort pour que cet appareil tombât en poussière. La révolution socialiste aurait reçu une impulsion puissante. Le prolétariat français n'aurait pas permis longtemps à Léon Blum de bloquer la révolution prolétarienne au-delà des Pyrénées.

La bureaucratie de Moscou n'aurait pu se permettre un tel Iuxe. Les questions les plus difficiles se seraient résolues d'elles-mêmes.

Au lieu de cela, les anarcho-syndicalistes qui tentaient de se réfugier dans la politique des syndicats se sont retrouvés, au grand étonnement de tout le monde et d'eux-mêmes, la cinquième roue du carrosse de la démocratie bourgeoise. Pas pour longtemps, car la cinquième roue ne sert à personne. Après que Garcia Oliver et Cie eurent bien aidé Staline et ses acolytes à enlever le pouvoir aux ouvriers, les anarchistes furent eux-mêmes chassés du gouvernement de Front populaire. Ils dissimulèrent la frayeur du petit bourgeois devant le grand bourgeois, du petit bureaucrate devant le grand bureaucrate, sous des discours pleurnichards sur la sainteté du front unique (des victimes avec les bourreaux) et sur l'impossibilité d'admettre toute dictature, y compris la leur propre. « Nous aurions pu prendre le pouvoir en juillet 1936... Nous aurions pu prendre le pouvoir en mai 1937... » C'est ainsi que les anarchistes imploraient Negrin et Staline de reconnaître et de récompenser leur trahison de la révolution. Tableau repoussant.

Cette seule autojustification : « Nous n'avons pas pris le pouvoir, non parce que nous n'avons pas pu, mais parce que nous n'avons pas voulu, parce que nous sommes contre toute dictature », etc., renferme une condamnation de l'anarchisme en tant que doctrine complètement contre-révolutionnaire. Renoncer à la conquête du pouvoir, c'est le laisser volontairement à ceux qui l'ont, aux exploiteurs. Le fond de toute révolution a consisté et consiste à porter une nouvelle classe au pouvoir et à lui donner ainsi toutes possibilités de réaliser son programme. Impossible de faire la guerre sans désirer la victoire. Personne n'aurait pu empêcher les anarchistes d'établir, après la prise du pouvoir, le régime qui leur aurait semblé bon, en admettant évidemment qu'il fût réalisable. Mais les chefs anarchistes eux-mêmes avaient perdu foi en lui. Ils se sont éloignés du pouvoir, non pas parce qu'ils sont contre toute dictature - en fait, bon gré, mal gré... - mais parce qu'ils avaient complètement abandonné leurs principes et perdu leur courage, s'ils eurent jamais l'un et l'autre. Ils avaient peur. Ils avaient peur de tout, de l'isolement, de l'intervention, du fascisme, ils avaient peur de Staline, ils avaient peur de Negrin. Mais, ce dont ces phraseurs avaient peur avant tout, c'était des masses révolutionnaires.

Le refus de conquérir le pouvoir rejette inévitablement toute organisation ouvrière dans le marais du réformisme et en fait le jouet de la bourgeoisie; il ne peut en être autrement, vu la structure de classe de la société.

Se dressant contre le but, la prise du pouvoir, les anarchistes ne pouvaient pas, en fin de compte, ne pas se dresser contre les moyens, la révolution. Les chefs de la C.N.T. et de la F.A.I. ont aidé la bourgeoisie, non seulement à se maintenir à l'ombre du pouvoir en juillet 1936, Mais encore à rétablir morceau par morceau ce qu'elle avait perdu d'un seul coup. En mai 1937, ils ont saboté l'insurrection des ouvriers et ont sauvé par là la dictature de la bourgeoisie. Ainsi l'anarchiste, qui ne voulait être qu'antipolitique, s'est trouvé en fait antirévolutionnaire et, dans les moments les plus critiques, contre-révolutionnaire.

Les théoriciens anarchistes qui, après le grand examen des années 1931 à 1937, répètent les vieilles sornettes réactionnaires sur Cronstadt et affirment : le stalinisme est le produit inévitable du marxisme et du bolchévisme, ne font que démontrer par là qu'ils sont à jamais morts pour la révolution.

Vous dites que le marxisme est violence en soi et que le stalinisme est sa descendance légitime. Alors pourquoi donc nous, marxistes révolutionnaires, nous trouvons-nous en lutte mortelle contre le stalinisme dans le monde entier ? Pourquoi donc la clique stalinienne voit-elle dans le trotskisme son ennemi principal ? Pourquoi toute proximité avec nos conceptions ou notre d'action (Durruti, Andrés Nin, Landau et autres force-t-elle les gangsters du stalinisme à recourir à une répression sanglante ? Pourquoi, d'autre part, les chefs de l’anarchisme espagnol, au moment des crimes du G.P.U. à Moscou et à Madrid, étaient-ils des ministres de Caballero-Negrin », c'est-à-dire les serviteurs de la bourgeoisie et de Staline ? Pourquoi, même maintenant, sous le prétexte de lutter contre le fascisme, les anarchistes restent-ils prisonniers volontaires de Staline-Negrin, c'est-à-dire des bourreaux de la révolution, par leur incapacité à lutter contre le fascisme ?

Les avocats de l'anarchisme qui prêchent pour Cronstadt et pour Makhno ne trompent personne. Dans l'épisode de Cronstadt et dans la lutte contre Makhno, nous avions défendu la révolution prolétarienne contre la contre-révolution paysanne. Les anarchistes espagnols ont défendu et défendent encore la contre-révolution bourgeoise contre la révolution prolétarienne. Aucun sophisme ne fera disparaître de l'histoire le fait que l'anarchisme et le stalinisme se sont trouvés du même côté de la barricade, les masses révolutionnaires et les marxistes de l'autre. Telle est la vérité qui entrera pour toujours dans la conscience du prolétariat.

[/quote]
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Message par Louis » 12 Mai 2003, 22:00

Et c'est quelque chose que l'on retrouve dans "catalogne libre"

Ceci dit, les critiques 'encore plus ennervées" de Trotsky sur le 'poum" sont passées a la trape
Louis
 
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