La Question Juive

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par DocStarrduck » 06 Fév 2007, 11:10

Que pensez-vous de ce texte de Karl Marx ?

a écrit :L'application pratique du droit de liberté, c'est le droit de propriété privée. Mais en quoi consiste ce dernier droit ?

« Le droit de propriété est celui qui appartient à tout citoyen de jouir et de dispo­ser à son gré de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie. » (Constitution de 1793, art. 16.)

Le droit de propriété est donc le droit de jouir de sa fortune et d'en disposer « à son gré », sans se soucier des autres hommes, indépendamment de la société; c'est le droit de l'égoïsme. C'est cette liberté individuelle, avec son application, qui forme la base de la société bourgeoise. Elle fait voir à chaque homme, dans un autre homme, non pas la réalisation, mais plutôt la limitation de sa liberté. Elle proclame avant tout le droit « de jouir et de disposer à son gré de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie ».

Restent les autres droits de l'homme, l'égalité et la sûreté.

Le mot « égalité » n'a pas ici de signification politique; ce n'est que l'égalité de la liberté définie ci-dessus : tout homme est également considéré comme une telle mo­na­de basée sur elle-même. La Constitution de 1795 détermine le sens de cette égalité : « Art. 5. L'égalité consiste en ce que la loi est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. »

Et la sûreté ? La Constitution de 1793 dit : « Art. 8. La sûreté consiste dans la protection accordée par la société à chacun de ses membres pour la conservation de sa personne, de ses droits et de ses propriétés. »

La sûreté est la notion sociale la plus haute de la société bourgeoise, la notion de la police : toute la société n'existe que pour garantir à chacun de ses membres la conservation de sa personne, de ses droits et de ses propriétés. C'est dans ce sens que Hegel appelle la société bourgeoise « l'État de la détresse et de l'entendement ».

La notion de sûreté ne suffit pas encore pour que la société bourgeoise s'élève au-dessus de son égoïsme. La sûreté est plutôt l'assurance (Versicherung) de l'égoïsme.

Aucun des prétendus droits de l'homme ne dépasse donc l'homme égoïste, l'hom­me en tant que membre de la société bourgeoise, c'est-à-dire un individu séparé de la communauté, replié sur lui-même, uniquement préoccupé de son intérêt personnel et obéissant a son arbitraire privé. L'homme est loin d'y être considéré comme un être générique; tout au contraire, la vie générique elle-même, la société, apparaît comme un cadre extérieur à l'individu, comme une limitation de son indépendance originelle. Le seul lien qui les unisse, c'est la nécessité naturelle, le besoin et l'intérêt privé, la conservation de leurs propriétés et de leur personne égoïste.


Donc,
liberté de s'enrichir en exploitant les gens
Egalité devant la loi, c'est a dire, l'état protège les usine et punis les grévistes
Sureté que le police fera sont travail de répréssion anti-ouvrière

a écrit :Le besoin pratique, l'utilité personnelle. Quel est le culte profane du Juif ? Le trafic. Quel est son Dieu profane ? L'argent. Eh bien, en s'émancipant du trafic et de l'argent, par conséquent du judaïsme réel et pratique, l'époque actuelle s'émanciperait elle-même.


C'est interessant a étudier

a écrit :Le Juif s'est émancipé d'une manière juive, non seulement en se rendant maître du marché financier, mais parce que, grâce à lui et par lui, l'argent est devenu une puissance mondiale, et l'esprit pratique juif l'esprit prati­que des peuples chrétiens. Les Juifs se sont émancipés dans la mesure même où les chrétiens sont devenus Juifs.


C'est le juif qui a créé l'argent ?

a écrit :
la société actuelle que nous trouvons l'essence du Juif de nos jours, non pas une essence abstraite, mais une essence hautement empirique, non pas en tant que limitation sociale du Juif, mais en tant que limitation juive de la société.


Les juifs aurait créer le capitalisme ?

a écrit :L'émancipation sociale du Juif, c'est l'émancipation de la société du judaïsme.


http://www.marxists.org/francais/marx/work...km18430001a.htm
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Message par shadoko » 06 Fév 2007, 11:40

a écrit :
C'est le juif qui a créé l'argent ?

L'argent existait bien avant la religion juive.
a écrit :
Les juifs aurait créer le capitalisme ?

Non plus. Mais les juifs ont eu une position paradoxale dans l'Europe moyênageuse, car ils étaient d'un côté rejetés et privés de leurs droits du fait de leur religion, et de l'autre, comme ils n'avaient pas les interdits religieux des chrétiens vis-à-vis de l'usure (prêt d'argent avec intérêt), dans de nombreux cas ils se sont spécialisés dans les métiers liés au prêt d'argent. Et d'une certaine mesure, cette situation leur a permi de perdurer en tant que juifs (et de ne pas s'assimiler) au sein des sociétés occidentales. C'est à cela que Marx fait surtout référence. Il y a des détails là-dessus dans le livre d'Abraham Léon intitulé La conception matérialiste de la question juive si cette question t'intéresse.
shadoko
 
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Message par DocStarrduck » 06 Fév 2007, 11:51

Merci pour ta réponse, je vais lire le livre que tu m'a présenté
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Message par Louis » 06 Fév 2007, 12:07

pour avoir une idée de ce que signifait pour marx la "question juive" (et le texte lui meme, contextualisé, avec les débats qui partageaient le mouvement ouvrier) il faut lire a mon avis le texte de marx publié aux édition "la fabrique" avec un important matériel historique et les commentaires de notre camarade (pour la lcr) Daniel Bensaïd

Voila une critique de ce livre sur un site pas spécialement de gauche mais qui me semble relativement honnête:

("parution.com" a écrit :Réflexion à haute teneur explosible, Sur la question juive de Karl Marx n’en a pas fini de susciter commentaires, polémiques et mésinterprétations. Publié en 1843 dans la Nouvelle Gazette Rhénane, «Zur Judenfrage» était initialement une réponse à Bruno Bauer à propos de l’émancipation des juifs, que l’auteur prétendait atteindre par l’abandon pur et simple du judaïsme, par lequel ses adeptes s’auto-exclueraient de la société civile. Marx se doutait-il que ce débat lui inspirerait les passages les plus discutés de son immense travail critique ? Imaginait-il que ces quelques pages amèneraient certains de ses futurs glossateurs à classer sa pensée parmi celle des représentants du «socialisme des imbéciles», d’après l’expression dont August Bebel taxait les antisémites de gauche ?

Grâce au dossier très détaillé qui l’encadre, et dans lequel Daniel Bensaïd éclaire autant le contexte de sa rédaction que son établissement philologique ou les infortunes de sa traduction, Sur la question juive reprend pleinement la dimension qu’il mérite : celle d’un moment-clé dans le parcours intellectuel de Marx qui, quand il le publia, avait à peine 25 ans. Bensaïd va jusqu’à écrire que «toutes les tentatives pour traiter de la question juive comme question politique profane et non plus comme mystère théologique s’inscrivent encore dans les traces de ce texte fondateur».

Marx sape en effet rapidement les remarques étriquées de Bauer en affirmant que, même si l’État prétend se séparer de la religion, il démontre par là encore sa force et n’agit en rien pour l’affranchissement de notre espèce. Toute libération politique n’est qu’un leurre et laisse le citoyen à la merci d’une sophistique qui le dépasse, justement celle imposée par l’État.

Ce qui inspire naturellement à Marx de remettre en cause les «Droits de l’homme», de loin plus significatifs à ses yeux que l’unique problème de la pratique religieuse. Après avoir souligné les apories des «Déclarations» successives et être arrivé au constat que la notion de «citoyen» ne crée qu’une entité égoïste, incarnée en bourgeois, Marx définit ce qu’est selon lui la véritable émancipation humaine : «C’est seulement lorsque l’homme individuel réel réintégrera en lui le citoyen abstrait et sera devenu comme homme individuel dans la vie empirique, dans son travail individuel, dans ses rapports individuels, un être appartenant à l’espèce, que l’homme aura reconnu et organisé ses forces propres comme forces sociales et ne séparera donc plus de lui la force sociale sous la forme de force politique».

Moins que ce pan de l’argumentation de Marx, ce seront les raccourcis fulgurants, ou plutôt expéditifs, de la deuxième partie de son article qui se verront incriminés par la postérité. «Quel est le fondement profane du judaïsme ? Le besoin pratique, le profit personnel. Quel est le culte profane du juif ? L’agiotage. Quel est son dieu profane ? L’argent. Eh bien soit ! s’émanciper de l’agiotage et de l’argent, donc du judaïsme pratique, réel, serait l’autoémancipation de notre temps.» Ayant lu ces lignes, d’aucuns clameront que déjà sous Marx pointait Drumont, voire un précurseur du génocide. Bensaïd opère, pour sa part, les précisions historiques nécessaires à la compréhension du propos, notamment quand il rappelle la «modernitude» du corpus idéologique antisémite. Le judaïsme ne serait finalement chez Marx que «le pseudonyme provisoire d’un système qui n’a pas encore reçu le nom de Capital», ou mieux : «la dénomination métaphorique, inexacte et balbutiante de ce que sera l’esprit du capitalisme adéquatement nommé».

Bien sûr, on pourra crier au tour de passe-passe rhétorique, à la justification de l’injustifiable, à l’impardonnable aveuglement. Les procès d’intention n’ont de meilleure plaideuse que la mauvaise foi… La lecture de Daniel Bensaïd est certes engagée, par exemple lorsqu’il fait le lien avec la situation actuelle des banlieues en France ou l’autisme des nouveaux théologiens du sionisme ; elle semble en tout cas peu suspecte de complaisance et offre une vision dépoussiérée d’un opus qu’on ne ressort habituellement des oubliettes que pour le livrer à l’autodafé.
Louis
 
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Message par DocStarrduck » 06 Fév 2007, 23:27

a écrit :Le judaïsme ne serait finalement chez Marx que «le pseudonyme provisoire d’un système qui n’a pas encore reçu le nom de Capital»


Il dit que le judaisme est le pseudonyme "provisoire" du capitalisme ?
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Message par Matrok » 06 Fév 2007, 23:42

(DocStarrduck @ mardi 6 février 2007 à 23:27 a écrit :
a écrit :Le judaïsme ne serait finalement chez Marx que «le pseudonyme provisoire d’un système qui n’a pas encore reçu le nom de Capital»


Il dit que le judaisme est le pseudonyme "provisoire" du capitalisme ?
Oui, Bensaïd dit que quand Marx a écrit "La Question Juive" en 1843, son système (ce qu'on appelle le marxisme aujourd'hui) n'était pas encore formé. Et qu'il écrit "judaïsme" là ou plus tard il écrira "Capital".

N'empêche que ça fait froid dans le dos car ça ne répond pas à la question qu'on est tenté de se poser : quand Marx a écrit ça, était-il antisémite ? Parce que ça veut dire qu'à l'époque pour Marx, juif et capitaliste c'était kif-kif... :wacko:
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Message par Jacquemart » 06 Fév 2007, 23:51

a écrit :N'empêche que ça fait froid dans le dos car ça ne répond pas à la question qu'on est tenté de se poser : quand Marx a écrit ça, était-il antisémite ? Parce que ça veut dire qu'à l'époque pour Marx, juif et capitaliste c'était kif-kif...

On a déjà eu plusieurs fois la discussion ici. Le mieux serait que les copains qui ont des doutes (ou des sueurs froides) lisent l'original et discutent directement à partir de lui, plutôt que sur la base de on-dit, fussent-ils bien intentionnés...
Le texte de Marx est disponible ici-même.
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Message par com_71 » 06 Fév 2007, 23:57

a écrit :Il dit que le judaisme est le pseudonyme "provisoire" du capitalisme ?


Non, que dans la période précapitaliste, les juifs apparaissent comme "peuple-commerçant".

La brochure dont parle Louis, avec le texte de Marx, présenté par Bensaïd, et un texte de Rosdolsky sur la Nlle Gazette Rhénane et les juifs, est effectivement bien utile.

Rosdolsky débute ainsi :

pour la nlle gazette Rhénane, il ne pouvait y avoir de "question juive" nationale au sens actuel. Les juifs ne constituaient ... ni une nation, ... ni une nationalité.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par zeanticpe » 07 Fév 2007, 21:01

Le matérialisme dialéctique que nous a légué Marx, c'est a peu près le contraire de toutes sortes de préjugés racistes, religieux ou autres.
Ca ne l'a pas empêché de comprendre comment s'est développé le capitalisme.
Les juifs étaient bien placés à l'époque pour jouer un rôle dans le développement des villes, puisque rejetés par tout le monde. Mais ils n'ont pas été les seuls.
Si j'ai bien tout compris la religion protestante est née aussi au début du capitalisme et correspondait à la nouvelle bourgeoisie révolutionnaire, qui voulait s'émanciper du féodalisme, obtenir plus de droits sur le commerce, obtenir des franchises de taxe. (les villefranche francheville,etc...)
Dupont de Nemours est parti aux US en tant que protestant, pas en tant que juif.
J'aimerais bien d'ailleurs en savoir plus sur cette époque où la bourgeoisie a encore joué un rôle révolutionnaire.
Sinon, j'ai lu le livre recommandé par Shadoko. (Forcément, c'est Shadok, qui me l'a indiqué! :wavey: )
Et je l'ai trouvé très bien, très clair.
Je crois me souvenir, que Abraham Leon était dans un camp de concentration quand il a écrit ce livre.
Pour ma part je continue de penser ue l'antisémtisme est le racisme le plus angereux et le plus ancré dans les mentalités. Il n'appartient pas à notre classe, il n'appartient évidemment pas aux idées de Marx, mais et c'est cela qui me fait froid dans le dos, j'ai l'impression qu'il reste encore profondément ancré. Je m'explique, peu de gens devant moi discutent pour s'en prendre aux arabes ou aux noirs où en y mettant la forme.
Mais quand il s'agit de parler d'un directeur d'une autre société, d'un commercial etc... , s'il a des origines juives, ca ne les gène pas de le souligner. Enfin, je sais pas, mais je pense qu'on aura à lutter contre cela. Heureusement on a Marx pour nous aider.
zeanticpe
 
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