L'assassinat du clown Bim-Bom selon Libération

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par titi » 07 Oct 2007, 12:00

alors, mes souvenirs viennent d'un livre qui expliquait, en prenant entre autres cet exemple, comment enflent les rumeurs (si seulement je retrouvais la référence, qui lui meme contient peut-etre les références de ces dires...)

bref, l'histoire vraie semble la suivante : Bim et Bom formaient un duo de clown, qui se produisait dans un cirque de moscou dans les années de la révolution
lors d'un spectacle, des miliciens n'auraient pas apprécié certains sketches contre les bolchéviques, auraient sorti leur arme et tiré en l'air, puis sortirent du cirque en disant que la prochaine fois ils tueraient les clowns

plusieurs livres témoignent de l'existence du duo (leur nom m'avait fait penser à Pim Pam Poum, glorieux chenapans de Pif Gadget :D )
par contre l'incident en question (ou le meurtre), je n'ai pas d'autres souvenirs que ce livre sur les rumeurs.


sur ce, l'imagination a brodé, avec des tas de versions différentes, celles où c'est la chéka qui a tiré volontairement, d'autres où c'est djerzinski en personne, d'autres où les clowns ont été poursuivis dans les coulisses et abattus dans leur loge (qui n'existait pas...), etc.
Comme le duo s'appelait Bim-Bom, il faut croire que maintenant, l'histoire recommence mais avec de nouvelles versions !
titi
 
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Message par Louis » 07 Oct 2007, 12:16

Ma bio sur les rumeurs (des livres que je n'ai pas lu, mais peut etre que cela rappelera quelque chose a Titi :

Pascal Froissart La rumeur : histoires et fantasmes Belin 2002

Véronique Campion-Vincent, Jean-Bruno Renard : De source sûre : Nouvelles rumeurs d'aujourd'hui Payot septembre 2002

Jean-Noël Kapferer Rumeurs, le plus vieux média du monde Seuil - février 1997

Jean-Bruno Renard, Rumeurs et légendes urbaines Que sais je 2002
Louis
 
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Message par Wapi » 07 Oct 2007, 12:22

La rumeur a déjà une page sur Wikipedia en anglais, c'est quand même assez incroyable cette mission dont se sentent investis certains rédacteurs de cette encyclopédie !

Bim et Bom sur Wikipedia

Pour l'instant, l'origine de cette histoire est l'affirmation d'un "historien", Orlando Figes, qui la raconte dans un livre :

Orlando Figes, A People's Tragedy: The Russian Revolution 1891-1924
(New York: Penguin Books, 1996) pp. 631-632

Il y a même le numéro de la page.... Si des forumeurs ont accès à des bibliothèques anglophones, ils pourront peut-être nous donner plus de détails ? :wavey:
Wapi
 
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Message par Matrok » 07 Oct 2007, 12:32

Il faut cliquer sur la page de discussion pour voir une autre référence :

a écrit :Bim and Bom were two different clowns. They performed long after 1918 when the article says they were shot. There are numerous sources for this, one being Fueloep-Miller's "The Mind and Face of Bolshevism" (1926, originally in German).
Matrok
 
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Message par regivanx » 07 Oct 2007, 13:38

a écrit :Malheureusement pour les clowns et pour les autres, L. et T. ne pouvaient pas avoir l'oeil sur tout et se préoccupaient d'abord de sauver la révolution pour éviter que ça soit encore pire.
Une fois qu'on aura expliqué au lecteur de Libé que le clown, bon, c'était pa sun ordre, tu crois que ça va le calmer ?


Ha! ha ! ha! Je vois bien le lecteur de libération fulminer : quels monstres ces bolchéviks. C'est comme pour les empreints Russes qu'ils ont volés à grand-mère ! Quelle horreur !

Mais il y a eut des milliers d'histoires de ce genre colportés par les journaux bourgeois ! Personne ne va croire ces ragots !

Dans "terrorisme et communisme", Trotsky parle d'une autre histoire cité par le Kautsky :

a écrit :Pour donner à ses dévots partisans et partisanes une idée en règle du niveau moral du prolétariat russe, Kautsky cite à la page 116 de son livre le mandat suivant, soi-disant délivré par le Soviet ouvrier de Mourzilovka :

"Le Soviet donne, par la présente, tous pouvoirs au camarade Grégoire Saréïef de réquisitionner à son choix et sur son ordre et de conduire dans les casernes, pour les besoins de la division d'artillerie en garnison à Mourzilovka, district de Briansk, 60 femmes et jeunes filles choisies parmi la classe des bourgeois et des spéculateurs. Le 16 septembre 1918". (Publié par le docteur Nath. Wintch-Malejeff, dans son livre What are the Bolchevists doing, Lausanne, 1919, p. 10).

Sans douter un seul instant de la fausseté de ce document et du caractère mensonger de toute cette communication en général, j’ai donné l'ordre de procéder à une enquête détaillée afin de tirer au clair les faits ou les épisodes qui auraient pu servir de prétexte à cette fiction. Voici ce qu'une enquête a établi :

Dans le district de Briansk, il n'existe absolument aucune localité connue sous le nom de Mourzilovka. Ce nom ne se rencontre pas non plus dans les districts voisins. Le nom qui se rapproche le plus de celui qu'on a cité serait Mouraviofka, village du district de Briansk. Mais aucune division d'artillerie n’y a jamais pris ses quartiers, et il ne s'y est rien passé qui pût avoir quelque chose de commun avec le "document" plus haut cité.

L'enquête a été menée sur toute la ligne des unités d’artillerie. Nulle part on n'a pu découvrir le moindre indice qui rappelât, même de loin, le fait que cite Kautsky d'après les termes de son inspirateur.

Enfin l'enquête a recherché si l'on n'avait pas entendu parler, sur place, de bruits de ce genre. Là non plus, on n'a absolument rien découvert. Et ce n'est pas étonnant. Le contenu du faux en question est en contradiction trop grossière avec les mœurs et l'opinion publique des ouvriers et des paysans avancés qui dirigent, même dans les régions les plus arriérées.

Ainsi ce document doit être qualifié de faux grossier, tels que seuls peuvent en publier les sycophantes calomniateurs de la plus jaune des presses jaunes.
Pendant qu'on procédait à l'enquête mentionnée ci-dessus, le camarade Zinoviev me fit remettre un numéro d'un journal suédois (Svenska Dagbladet) du 9 novembre 1919, où était reproduit, en fac-similé, un mandat de la teneur que voici :
"Mandat"

"Le porteur de ceci, le camarade Karaséïef, est investi du droit de socialiser dans la ville d'Ekatérinodar [cet endroit est effacé] toute fille âgée de 16 à 36 ans que désignera le camarade Karaséief.

Le commissaire principal Ivatchef"

Ce document est encore plus stupide et plus impudent que celui que cite Kautsky. La ville d'Ekatérinodar, centre de la région de Kouban, ne s'est trouvée, on le sait, que fort peu de temps au pouvoir des Soviets. Peu fixé, apparemment, sur la chronologie révolutionnaire, l'auteur de ce faux a effacé, dans son document, la date, de crainte d'indiquer par mégarde que le "commissaire principal Ivatchef" avait socialisé les femmes d'Ekatérinodar à l'époque où la ville était occupée par la soldatesque de Dénikine. Que ce document ait pu séduire quelque bourgeois suédois des plus obtus, il n'y a là rien d'étonnant. Mais le lecteur russe verra immédiatement que ce document est non seulement un faux, mais un faux fabriqué par un étranger, le dictionnaire à la main. Il est très curieux de remarquer que les noms des deux "socialiseurs" de femmes, "Grégoire Saréïef" et "le camarade Karaséïef", ont une consonance parfaitement étrangère à la langue russe. La terminaison éïef dans les noms de famille russes ne se rencontre que rarement, et seulement dans des combinaisons déterminées. Mais le démasqueur de bolcheviks, l'auteur de la brochure en langue anglaise qu'invoque Kautsky, porte justement un nom en éïef (Wintch-Maléïeff). Il est évident que cet individu, ce flic anglo-bulgare, crée depuis son cabinet à Lausanne des socialiseurs de femmes qui sont, au plein sens du terme, à son image et à sa ressemblance.

En tout cas, ce sont des inspirateurs et des compagnons d'armes bien étranges que ceux de Kautsky !


Si quelqu'un a l'intention ici de démentir tous les mensonges de la presse bourgeoise, des journaux de Rothschild, il n'aura pas assez de toute sa vie pour en finir !

Quant à ceux qui sont prêt à prendre la responsabilité de tous les crimes imaginaires qu'imputent la bourgeoisie au prolétariat, je leur dirais : un peu de modestie camarades !

à bon entendeur !
regivanx
 
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Message par Apfelstrudel » 07 Oct 2007, 14:26

Je n'ai pas trop compris ce que Regivanx essaie de nous dire mais ça a l'air vachement impressionant. :mellow:
Apfelstrudel
 
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Message par com_71 » 07 Oct 2007, 14:34

(Vérié @ dimanche 7 octobre 2007 à 09:08 a écrit : Néanmoins, il peut y avoir eu DES crimes commis par DES Bolcheviks.
Oui, mais ce n'est pas ça qui a été relevé :

a écrit :Moi ça ne me gêne pas qu'on parle de crimes des bolcheviks.


où "crimes" et "bolcheviks" ont un sens bien plus générique que dans ton affirmation ci-dessus.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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com_71
 
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Message par Vérié » 07 Oct 2007, 14:44

(com_71 @ dimanche 7 octobre 2007 à 15:34 a écrit :
(Vérié @ dimanche 7 octobre 2007 à 09:08 a écrit : Néanmoins, il peut y avoir eu DES crimes commis par DES Bolcheviks.

Oui, mais ce n'est pas ça qui a été relevé :

a écrit :Moi ça ne me gêne pas qu'on parle de crimes des bolcheviks.


où "crimes" et "bolcheviks" ont un sens bien plus générique que dans ton affirmation ci-dessus.
D'accord.
___
Sinon, pour Wikipedia, c'est effectivement intéressant. Je n'avais pas trouvé ces infos, sans doute à cause de la façon dont j'avais orhographié Bi et Bom...
Vérié
 
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Message par lavana » 07 Oct 2007, 15:09

(regivanx @ dimanche 7 octobre 2007 à 14:38 a écrit :

Ha! ha ! ha! Je vois bien le lecteur de libération fulminer : quels monstres ces bolchéviks. C'est comme pour les empreints Russes qu'ils ont volés à grand-mère ! Quelle horreur !


Ben c'est pas tant l'horreur que ça pour ceux qui se sont fait rembourser ces emprunts récemment.

Ca se vendait au poids dans les brocantes ces saloperies d'emprunts russes.

(apfestrudel a écrit :Je n'ai pas trop compris ce que Regivanx essaie de nous dire mais ça a l'air vachement impressionant.


Cette remarque m'a fait rire. Peut-être parce que je n'ai pas bien compris moi non plus qui essayait de "prendre la responsabilité de crimes imaginaires".


Bon Cyrano... au boulot.
lavana
 
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Message par sylvestre » 09 Oct 2007, 10:38

Pour en revenir au premier message de ce fil, le bouquin d'Orlando Figes qui est sorti il y a dix ans en anglais est un exemple typique de l'histoire de la révolution russe comme démonologie. Les camarades du SWP avaient à l'époque publié une critique fort juste :

a écrit :BOOKS

Unreliable witness

A People's Tragedy: The Russian Revolution 1891-1924
Orlando Figes Cape £20

The history of the Russian Revolution is regarded with confusion and Orlando Figes has written a massive new history that will add to the mess. For Figes the problem is not that the revolution ultimate[/B]

A People's Tragedy: The Russian Revolution 1891-1924
Orlando Figes Cape £20

The history of the Russian Revolution is regarded with confusion and Orlando Figes has written a massive new history that will add to the mess. For Figes the problem is not that the revolution ultimately failed to dethrone wealth, power and privilege but that anyone ever tried to do so in the first place.

In fact this is a dreadful book, based on lamentable scholarship which, despite its claims to archival research, adds nothing substantially new but draws for effect on hostile gossip and anti-Bolshevik accounts which previous and better historians treated with caution.

Throughout 1917 Russian workers grew in self confidence to challenge not only capitalism in Russia but a world system that was killing someone in a world war every 15 seconds. In its place they wanted to build a united socialist world in which real expression could be given to the best human wants and desires.

Figes, however, tries to negate this in four ways. Firstly, he systematically eliminates the international elements, reducing the revolution to narrowly Russian confines. Secondly, he all but eliminates capitalism and the role of the bourgeoisie in Russia. Thirdly, he paints a picture of a revolutionary movement built on excesses with Lenin bent on power. This involves some breathtaking distortions. To show how evil terrorism was in Russia before 1914 he compares it with Northern Ireland since 1968. Five times more killed and wounded (even though Russia's population was over a hundred times greater!). Then there are the flat contradictions. Typically the evil Lenin's whole strategy is to use the soviets as a front to seize power while later on in the book it's to ditch the soviets when they stand in his way. Finally, he paints a picture of the popular movement in 1917 as one driven by class conflict but one in which only a few reach class consciousness. In his view, the majority of workers, peasants and soldiers merely have their bloodlust awakened and, legitimised by Bolshevik support, descend into an orgy of mob violence.

The next step is to make the civil war unravel as a consequence of this. Once again the crucial role of imperialist intervention in giving men, supplies and, most importantly, confidence to the counter-revolution is minimised. So too is the question of international revolution ­ it gets a few paragraphs. The result is that the terrifying losses of the civil war ­ some 10 million dead (mostly of disease and hunger though with bitter atrocities as well), and the Volga famine of 1921 fall on the shoulders of Russians. Where better historians try to trace the spiralling dynamic of war and terror, Figes simply jumps from one point to another, connecting them in a straight line supported by his continuing emphasis on popular bloodlust which by 1921, in his analysis, has even developed into a cannibalistic craving for human flesh. Causation is lost, context is destroyed and circumstances are stripped away. Quotations are chopped, changed and shifted willy nilly. Take a good one from 1921 and make it appear in 1918 as he does with Shliapnikov's famous comment that at the end of the civil war the Bolsheviks were the vanguard of a non-existent class, and so created the idea that all popular support evaporated within a few months.

And although the violence of both sides is condemned, so far as cause is concerned that of the Whites is whitewashed as a reaction to Bolshevik provocation.

Not surprisingly, then, Figes' version of the revolution and civil war has few constructive elements even if this too creates absurdities. Take the issue of women. What about the fact that women's liberation was an important aspect of the revolution, that Alexandra Kollontai became the first woman in world history to be officially a government minister? Well, if you wait until page 689 women get a mention there (it's a disparaging one). Wait until pages 740-741 and women get several paragraphs more which give Figes an opportunity for more sarcasm about Kollontai's sex life. But the real gem is something else.

Not the least of the propaganda used against the revolution was that it was undermining families. Spoof decrees circulated as black propaganda retailing the nationalisation of women. They were widely used in the west to attack early Communists. But for Figes even black propaganda is okay if it damns the Bolsheviks and so he falls for them hook, line and sinker and throws them in. And since he falls for this why should we expect him to be reliable on anything else? Look at the dreadful music of the time ­ including Shostakovich's second symphony, actually written in 1927. Zamytin's We was written in '1924', allowing Figes to link it to NEP discussions of Taylorism ­ it was actually written in 1920 but if it helps rubbish the revolution who cares.

Finally a word to those readers who left school early, mature students and other late developers ­ Figes thinks you will appreciate his subtleties even less than this reviewer, 'When people learn as adults what children are normally taught in schools, they find it difficult to progress beyond the simplest abstract ideas making them resistant to the subsequent absorption of knowledge on a more sophisticated level.' And so the snootiness of the Cambridge intellectual merges with the disdain of the Russian intelligentsia towards the workers and 'lumpens'. Class, it seems, is not just alive as a social power in 1996, it is alive as social prejudice, linking the common rooms of the dreaming spire universities with the crumbling academic institutes of Moscow. To which there is only one reply ­ confirm though it will Figes' disdain for the left and the idea that ordinary people can take control of their own lives and make their own history ­ 'Workers of the world unite!'

Mike Haynes
sylvestre
 
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