a écrit :Le panslavisme démocratique
F. Engels
Un article essentiel de la Nouvelle Gazette Rhénane sur la question nationale.
Cologne, le 14 février.
[…] Un mot seulement sur la « fraternisation générale des peuples » et le tracé de « frontières que la volonté souveraine des peuples détermine elle-même sur la base de leurs particularités nationales ». Les États-Unis et le Mexique sont deux républiques; dans les deux, le peuple est souverain.
Comment se fait-il qu'entre ces deux républiques qui, conformément à la théorie morale, devraient être « fraternelles » et « fédérées », comment se fait-il qu'une guerre ait éclaté ait sujet du Texas ? Comment se fait-il que la « volonté souveraine » du peuple américain, appuyée sur la vaillance des volontaires américains, ait déplacé à quelques centaines de lieues plus au Sud les frontières tracées par la nature « pour des nécessités géographiques, commerciales et stratégiques » ? Et Bakounine reprochera-t-il aux Américains une « guerre de conquête » qui porte, certes, un rude coup à sa théorie fondée sur la « justice et l'humanité » mais qui fut menée purement et simplement dans l'intérêt de la civilisation ? On bien est-ce un malheur que la splendide Californie soit arrachée aux Mexicains paresseux qui ne savaient qu'en faire ? Est-ce un malheur que les énergiques Yankees, en exploitant rapidement les mines d'or qu'elle recèle augmentent les moyens monétaires, qu'ils concentrent en peu d'années sur cette rive éloignée de l'Océan Pacifique une population dense et un commerce étendu, qu'ils fondent de grandes villes, qu'ils créent de nouvelles liaisons maritimes, qu'ils établissent une voie ferrée de New York à San Francisco, qu'ils ouvrent vraiment pour la première fois l'Océan Pacifique à la civilisation et que, pour la troisième fois dans l'histoire, ils donnent au commerce mondial une nouvelle direction ? L'« indépendance » de quelques Californiens et Texans espagnols peut en souffrir, la « justice » et autres principes moraux peuvent être violés ça et là, mais qu'est-ce en regard de faits si importants pour l'histoire du monde ?
[ …] Nous avons développé comment des petites nations remorquées depuis des siècles contre leur propre volonté par l'histoire, étaient nécessairement contre-révolutionnaires, et comment leur position dans la révolution de 1848 fut réellement contre-révolutionnaire. Face au manifeste panslaviste démocratique qui réclame l'indépendance de tous les Slaves sans distinction, il nous faut revenir sur ce point.
[ … ] Nous le répétons : en dehors des Polonais, des Russes et à la rigueur des Slaves de Turquie, aucun peuple slave n'a d'avenir pour la simple raison que les conditions premières de l'indépendance et de la viabilité, conditions historiques, géographiques, politiques et industrielles manquent aux autres Slaves.
[…] Quels sont donc les grands et terribles crimes commis par les Allemands et les Magyars contre la nation slave ? Nous ne parlons pas ici du partage de la Pologne qui n'est pas du tout notre sujet, nous parlons du « tort séculaire » qu'on aurait fait aux Slaves.
[…Et finalement, quel « crime », quelle « maudite politique » est-ce donc, si à une époque où d'ailleurs en Europe les grandes monarchies devinrent une « nécessité historique », les Allemands et les Magyars ont réuni en un grand empire des groupuscules nationaux, étiolés et impuissants et les ont ainsi rendus capables de participer à une évolution historique qui leur serait restée complètement étrangère s'ils avaient été livrés à eux-mêmes ! Évidemment, de semblables réalisations sont impossibles sans écraser brutalement quelques tendres fleurettes nationales. Mais dans l'histoire rien ne se produit sans violence et sans une brutalité implacable. Et si Alexandre, César et Napoléon avaient montré la sensiblerie à laquelle le panslavisme fait appel en faveur de ses clients décadents, que serait devenue l'histoire ! Et les Perses, les Celtes et les Germains convertis au christianisme ne valent-ils pas les Tchèques, les militaires d'Ogalin et les Manteaux rouges ?
Or maintenant, du fait des progrès puissants de l'industrie, du commerce et des communications, la centralisation politique est devenue un besoin encore plus pressant qu'au XV° et au XVI° siècle. Tout ce qui peut encore se centraliser se centralise. Et maintenant les panslavistes arrivent et exigent que nous « libérions » ces Slaves à demi germanisés, que nous supprimions une centralisation imposée à ces Slaves par tous leurs intérêts matériels !
Bref, il s'avère que ces « crimes » des Allemands et des Magyars envers les Slaves en question appartiennent aux actions les meilleures et les plus remarquables dont notre peuple et le peuple magyar puissent se vanter dans l'histoire.
[…]
My Webpage Certains auront -ils des lumiéres sur ce texte qui polémique avec Bakunin ?
Engels , même si l'on passe sur "les mexicains paresseux " semble défendre très clairement l'annexion d'une partie du Mexique par les USA .
La aussi :emb: :emb: :emb: je sèche un peu ...a écrit :comment des petites nations remorquées depuis des siècles contre leur propre volonté par l'histoire, étaient nécessairement contre-révolutionnaires
Enfin
la encore :emb: ????a écrit :aucun peuple slave n'a d'avenir pour la simple raison que les conditions premières de l'indépendance et de la viabilité, conditions historiques, géographiques, politiques et industrielles manquent aux autres Slaves