J’aimerais réagir à l’intervention de « meichler » sur un autre fil (il s’agit d’un extrait de sa réaction à la position du PT algérien) :
a écrit :Notons que le PT d'Algérie ne se contente pas d'écrire cette énormité :
«rien ne saurait être supérieur aux intérêts de la nation»
Ce qui est en soi, une monstruosité pour une organisation prétendant se réclamer du marxisme, sinon du trotskysme : la «nation» n'est-elle pas composée de classes sociales antagonistes, qui luttent et combattent entre elles ? La «nation» n'est-elle pas depuis toujours sous le capitalisme la meilleure duperie par laquelle on berne les masses, par laquelle on cherche à abolir tout combat indépendant du prolétariat, pour le faire marcher derrière le drapeau «national», à l'abattoir ou à la soumission ? »
Plus que la notion de nation, c’est sur la conception de l’idée d’intérêt général dans l’analyse marxiste que je souhaite vous interroger.
Je ne suis pas sûr d’avoir bien compris mais peut-on la résumer de la manière suivante : « dans une société, il n’existe pas d’intérêt général mais seulement des intérêts de classe qui reflètent les intérêts des groupes sociaux qui la compose. Ces intérêts sont antagonistes dès lors qu’il y a des relations de domination entre les différences classes sociales. »
De ce point de vue, j’ai le sentiment que l’approche marxiste rejoint finalement sur cette question la position des libéraux. La main invisible chez Smith invite en effet à ne pas tenir compte de l’intérêt général puisque celui-ci est la somme des intérêts particuliers. Dès lors une bonne politique économique et sociale est une politique qui laisse la possibilité aux intérêts particuliers de s’exprimer. Une telle politique dans sa logique fait primer le marché sur le reste – y compris sur la démocratie (l’opposition libérale à toute réglementation publique des marchés l’illustre bien).
Pourtant, la démocratie, en tant que moyen et finalité de la vie en collectivité, donne un contenu politique précis à la notion d’intérêt général.
A plusieurs reprises, j'ai eu l'occasion de lire ou d'entendre dans le mouvement anti-libéral cette phrase tirée d’Aristote : « le tout n’est pas réductible au jeu des parties » c’est-à-dire l’idée que l’intérêt général n’est pas réductible à des intérêts particuliers et transcendent les groupes sociaux.
J’ai le sentiment de ne pas être clair. J’avance des hypothèses sans certitudes plus que je n’affirme ci-dessus. Cette question d’intérêt général me pose problème, car finalement, s’il n’existe aucun intérêt général dans une société, comment justifier le projet d’une société dans laquelle les classes sociales sont abolies ? Le point de vue moral que les intérêts du prolétariat doivent s’imposer à l’ensemble de la société, ne se justifie alors plus que par le nombre : c'est parce que les prolétaires sont plus nombreux que les capitalistes que leurs intérêts doivent prévaloir. A l’inverse s’il existe un intérêt général, qui a pour base politique la démocratie et base économique le communisme, l’idée d’une société sans classe apparaît socialement non seulement acceptable mais également idéal.