C'est le 50ème aniv. de la mort de F. Fanon

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par com_71 » 17 Déc 2011, 13:49

Sur le site de Combat Ouvrier :

(CO n° 1059 a écrit :Le GRS et Frantz Fanon

Le modèle du FLN algérien, un modèle anti ouvrier

Le cinquantième anniversaire de la mort de Frantz Fanon, décédé le 6 décembre 1961 a donné lieu, surtout en Martinique, son pays d’origine, à une série, de colloques, conférences,  commémorations, articles et écrits
Dans son édition de novembre 2011, le journal "Révolution Socialiste", organe du GRS,  groupe révolution socialiste, qui se réclame du trotskysme, tendance 4 Internationale, Max Rustal signe une présentation du livre à de Philippe Pierre-Charles, "Frantz Fanon, l'héritage".
Quoique celui-ci soit disparu depuis cinquante ans, M. Rustal fait parler Fanon, et pour cela il affectionne l'usage du conditionnel. Ainsi il écrit :
« Il ne fait pas de doute que, vivant, Frantz Omar Fanon aurait fustigé sans ménagement les agissements d'une caste militaro-politique, criminelle et corrompue, qui détournant à son profit le prestige du FLN, a fait main basse sur la révolution algérienne. »
Pourtant ce qui ne fait pas de doute, c'est l'adhésion de Fanon au FLN et à son programme. Le FLN qui mena la guerre pour l’indépendance de l'Algérie sans jamais représenter le prolétariat en tant que tel. Du reste il ne le prétendait pas. D’autre part, les règlements de compte entre cliques rivales du FLN, les liquidations sommaires pour le pouvoir ont jalonné son histoire tout au long de la guerre qu’il mena avec succès contre le colonialisme français.
Les dirigeants FLN prirent bien soin de construire, en dehors des zones de combat, aux frontières, algéro-tunisienne et algéro marocaine, l'appareil militaro-politique qui fût l'ossature de la dictature que subit encore le peuple algérien.
Ainsi, le véritable acte de naissance de l’Etat algérien ne fut même pas la proclamation officielle de l’indépendance le 5 juillet 1962, mais ce fut la victoire militaire de « l’armée des frontières », l’ALN (Armée de Libération Nationale), de Boumediene en septembre de la même année. Le clan militaire de Boumediene, avec comme chef politique Ben Bella s’opposa militairement à un autre clan formé de membres de l’ancien gouvernement provisoire, alliés à quelques chefs militaires de plusieurs willayas (réseau de guérilla par zone géographique).
Et c’est après que des centaines de combattants du FLN de l’intérieur aient été massacrés par l’ALN, que cette armée des frontières prit le pouvoir en septembre 1962, en mettant Ben Bella président. Ce même Ben Bella qui fut, comme on pouvait le prévoir, déposé par le chef de l’armée, Boumediene, trois ans plus tard.
Le  développement de cet appareil dictatorial a découlé naturellement des méthodes et des choix politiques initiaux des dirigeants FLN, de leur programme d'un état national qu'ils disaient du reste, vouloir "dans le cadre des principes islamiques" (déclaration du 1er novembre 1954).

FRANTZ FANON A CHOISI SA CLASSE SOCIALE

Dans le passage suivant du même article de "Révolution Socialiste", on lit :
« De même, libéré de ses responsabilités dans l'appareil du FLN, on veut croire que toutes les précautions de langage dont s'est entouré Fanon à l'égard du "monde communiste" ne l'auraient plus empêché d'en dénoncer les dérives clairement établies. »
On peut en effet croire ce qu'on veut, mais les faits sont que F. Fanon, comme bien d'autres intellectuels, n’a pas cherché à comprendre le stalinisme qui n’avait plus rien à voir avec la révolution socialiste mondiale prônée par Lénine et Trotsky et qui même la combattait au nom de l’ineptie du «socialisme dans un seul pays ». Il est vrai que ne se réclamant pas du programme de la révolution ouvrière, Fanon n'avait nulle raison de déplorer que la bureaucratie stalinienne ait confisqué le pouvoir aux travailleurs.

Alors, que Fanon ait été un militant courageux un anticolonialiste fervent, un écrivain de talent, qu’il ait été souvent bon analyste psycho-politique du colonialisme et des colonisés, cela ne fait aucun doute. Mais il n’en restait pas moins un « nationaliste » et avait fait ce choix là !
Par là même il limitait son combat à la libération nationale de l’oppression coloniale. Il limitait son combat à l’avènement d’une bourgeoisie « nationale » indépendante, en Algérie et dans les pays colonisés.
On ne sait pas ce que Fanon aurait vraiment dit aujourd’hui, mais même s’il aurait«  fustigé sans ménagement les agissements d'une caste militaro-politique, criminelle», cela n’en aurait pas fait forcément quelqu’un d’autre qu’un nationaliste. Ils sont légion les nationalistes qui font cette analyse aujourd’hui après avoir défendu les luttes anticolonialistes des années 60 sans voir ou ne voulant pas voir qu’elles contenaient en germe les dictatures actuelles.
Depuis longtemps, le GRS est particulièrement complaisant envers Fanon sur le plan idéologique tout en faisant encore référence à la Révolution Socialiste, C’est un tour de passe-passe.

A PROPOS DU LIVRE DE PHILIPPE PIERRE CHARLES SUR FANON

Tout dans ce livre d’un des dirigeants du GRS, du début à la fin est complaisant à l’égard des idées nationalistes de Fanon, depuis son titre : «Frantz Fanon, l’héritage», en passant par une citation de Che Guevara pour illustrer un chapitre.
    Les communistes révolutionnaires ne se réclament d’aucun héritage de Fanon ni de prés ni de loin. Les militants qui s’en réclament ou qui même posent cette question sont des militants nationalistes. Les communistes révolutionnaires se réclament du programme de Marx, Lénine, Trotsky et du programme sorti des textes des quatre premiers congrès mondiaux de la troisième internationale
          Alors que les nationalistes, comme ils l’ont toujours fait prennent Fanon comme exemple, on peut le comprendre. Mais qu’un  militant se réclamant du programme trotskyste, léniniste, communiste révolutionnaire aille dans cette voie là, voilà qui ne peut qu’apporter de l’eau au moulin des nationalistes. Pierre Charles ne peut que contribuer à entretenir des illusions dans le mouvement ouvrier sur les soi disant valeurs nationalistes. Et notamment quand il écrit : «  Peut on pour autant suivre André Lucrèce lorsqu’il écrit : «  Fanon n’a jamais été marxiste….les choses nous semblent plus complexes quand on constate le caractère marxiste de bien des analyses de Fanon, tant sur la colonisation, le colonialisme que sur la décolonisation, les fondements du racisme, l’impérialisme »….
Depuis quand «le caractère marxiste des analyses de quelqu’un, si tant est qu’il y en est, fasse de ce quelqu’un, en l’occurrence Fanon, un marxiste ou presqu’un marxiste ? Voilà le tour de passe passe !
On est marxiste, communiste ou on ne l’est pas !

Lorsque des intellectuels comme P Charles sont aussi complaisants envers ces  intellectuels de renom, tiers-mondistes, comme Fanon, Guevara ou Césaire, ils démontrent bien par défaut toute la valeur de cette citation connue de Léon Trotsky : «  la crise du prolétariat est la crise de la direction révolutionnaire ».Autrement dit la crise des intellectuels, de ceux là même qui avaient la possibilité intellectuelle de faire le choix de se placer résolument dans le camp du prolétariat, mais qui ont fait un autre choix de classe celui de la petite bourgeoisie anti impérialiste. Ceux là portent, entre autres causes, une responsabilité considérable dans le recul  aujourd’hui des idées communistes révolutionnaires et le retard mis à construire d’authentiques partis ouvriers révolutionnaires. Et Philippe Pierre Charles, à un moindre niveau, dans son livre si sympathique et compréhensif à leur égard leur donne quitus en quelque sorte.
 
UNE DISCUSSION LOIN D’ETRE NEGLIGEABLE

De telles différences d'appréciation entre militants se réclamant du programme trotskyste, soit entre nous, Combat Ouvrier et le GRS sont loin d’être mineures.
Car les mêmes causes et analyses produisant souvent les mêmes effets, on peut penser que si demain dans nos pays émergeait une véritable lutte de libération nationale, le GRS pourrait alors être aussi complaisant avec les nationalistes bourgeois qu’il l’est avec Fanon. Et sans parti ouvrier révolutionnaire et prolétarien il y a toutes les chances que cette lutte débouche alors sur un Etat du même type que bien des états indépendants du tiers monde. C’est bien là le drame du prolétariat mondial actuel et singulièrement de celui des pays sous développés. D’où l’importance d’une clarté théorique très nette et d’une véritable analyse sans concession de la politique des nationalistes du passé et d’aujourd’hui.
Une chose est de mener des luttes unitaires contre le colonialisme, toutes tendances anticolonialistes confondues, comme cela s’est déjà présenté bien des fois. Une autre est la nécessité de préserver scrupuleusement une totale indépendance théorique du programme prolétarien, le programme communiste. Car c’est le seul chemin vers l’indépendance organisationnelle des travailleurs contre l’ennemi de classe, la bourgeoisie, donc aussi pour l’élimination de tous ses sous-produits dont le colonialisme. L’anticolonialisme et l’anti-impérialisme conséquents ne peuvent passer que par la classe ouvrière à la direction es luttes révolutionnaires, puis au pouvoir.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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com_71
 
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