(redspirit @ mardi 15 mai 2012 à 01:07 a écrit : (Sinoue @ samedi 12 mai 2012 à 16:33 a écrit : Voilà, pour ce qui concerne cette histoire, pour savoir, le mieux serait que tu poses des congés et que tu lises "le Capital" de Karl Marx...
Je ne suis pas sûr de ton sérieux dans cette partie de ta réponse Sinoue, dans le doute je l'interprète sérieusement. Si tel n'était pas le cas je te prie de m'en excuser.
Je pense que répondre à la question : "c'est quoi la classe ouvrière aujourd'hui en France" par "le mieux, c'est de lire Marx" est :
- sur le fond, assez symptomatique d'un manque de renouveau théorique des analyses marxistes.
- sur la forme, assez contre-productif et contribue à faire apparaître le marxisme comme d'un autre temps.
Bien sûr, il n'est pas question de remettre en cause ni la pertinence du Capital, ni l'actualité de ses principales propositions. Néanmoins, il me semble que plusieurs évolutions historiques depuis Marx appellent à s'interroger sur la définition de classe sociale qu'il retient, et donc sur la définition de la classe ouvrière.
Ces évolutions historiques sont essentiellement de trois natures par rapport à l'époque de Marx à mes yeux :
1) La dissociation entre propriété et gestion des moyens de production. De fait, une partie des salariés, qui vit bien de son travail et n'exploite pas la force de travail des autres, est rémunérée pour optimiser l'utilisation et la rentabilité des moyens de production. Je pense aux cadres notamment et plus généralement à tout salarié qui possède un pouvoir de direction au sein de l'entreprise. Quel est l'intérêt de classe de ces travailleurs situés en haut de l'échelle sociale ?
2) Le développement de l'état qui occupe une position dans les relations entre classes sociales tout à fait différente de l'époque de Marx. En particulier la place des fonctionnaires sur laquelle il me semble qu'il y a une contradiction logique dans les analyses que je lis sur ce forum (d'un côté, l'Etat est le bras armé du capital, de l'autre les fonctionnaires sont des travailleurs exploités).
3) La production s'est diversifiée et avec la diversité des types de travail. Pour aller vite, depuis Marx, il y a eu l'entrée dans l'ère de la consommation de masse (ce qui implique une masse de travaux hétérogènes).
Ce qui me fait m'interroger sur la pertinence de la définition de classe sociale de Marx, à partir de rapports de propriété, est l'état de la relation appartenance de classe/conscience de classe. Cette relation est asymétrique. D'un côté, il y a une bourgeoisie parfaitement consciente de ses intérêts politiques et sociaux. De l'autre une classe ouvrière au sein de laquelle la conscience de classe est diluée. Il existe beaucoup de raisons à ce recul de la conscience de classe chez les travailleurs qui ont été justement analysées par LO et d'autres. Toutefois, ce phénomène ne résulte-t-il pas tout simplement de l'hétérogénéité de la classe ouvrière dans sa définition marxiste ? Pour un marxiste, classe ouvrière = classe de tous les salariés. Mais le salariat renvoie à des réalités sociales tout à fait différentes qui ce soit au niveau des branches d'activité, des zones (urbaines ou rurales), ou même de la nature des tâches (biens ou services). Dès lors comment pourrait-il émerger une seule et unique conscience de classe de tous ces salariés alors que leurs conditions matérielles d'existence sont si hétérogènes ? A l'inverse, la bourgeoisie est définie de manière tout à fait homogène et renvoie à une même réalité : la propriété des moyens de production et la recherche du profit par l'exploitation. La bourgeoisie applique le même principe quelque soit l'activité.
Je ne suis absolument pas sûr de moi, mais j'ai toutefois l'impression qu'autant la définition marxiste des classes sociales était tout à fait opérante pour son époque, autant aujourd'hui je ne suis pas convaincu. Je la trouve toujours plus satisfaisante qu'une définition basée sur le niveau de rémunération, mais insuffisante pour prendre en compte certaines évolutions historiques.
J'ai mis du temps, mais j'y répond
1) Depuis la division du travail s'accentuant toujours plus, il y a toujours de plus en plus de postes de "cadres", du balayeur au progrommateur informatique l'évantail des niveaux de qualification s'est considérablement accru, mais ce n'est pas un phénomène nouveau. Il y a "toujours" eu un ancien pour apprendre au nouveau comment marche tel outil de production.
Toys les travailleurs sont utilisés pour "optimiser l'utilisation et la rentabilité des moyens de production" y compris les haut-cadre qui n'ont d'autre interet que de conserver leur boulot et que l'entreprise marche bien, la seule difference est qu'ils arrivent en général plus facilement à se remettre d'un licenciement ou d'un dépot de bilan.
2) Marx a commencé ses constatations en observant l'état prussien, surement l'un des pays où l'état est le plus puissant et omniprésent à cette époque. Alors oui l'état oppresse les travailleurs tout en étant composé de travailleurs, c'est contradictoire, mais c'est la triste réalité. Une des nombreuses contradictions de notre société capitaliste.
De même cette aristocratie ouvriere, ces syndicats qui constituent parfois plus des forces de l'ordre que des appareils revendicatifs; Marx l'avait constaté lors de son long séjour en Angleterre.
3) Cette derniere a l'air proche de la premiere, ca m'a l'air de désigner un phénomène qui s'est certes amplifié depuis Marx, mais qui existait deja. La derniere intervenante a donné une bonne description de ceux qui constituent "le prolétariat", ceux qui en bavent, qui ont des journées bien trop longues, de labeur ou de recherche de labeur.
En réalité bien peu de personnes ont intéret au maintien de cette societe. Encore faut-il en avoir conscience.