Analyse de la crise (texte du dernier congrès de LO)

Marxisme et mouvement ouvrier.

Re: Analyse de la crise (texte du dernier congrès de LO)

Message par artza » 19 Jan 2014, 09:25

GL affirme en conclusion de sa critique que les "organisations communistes (il ajoute "et anticapitalistes" ce qui est rigolo, j'y reviendrai) doivent se doter d'analyses marxistes justes, ben oui tant qu'à faire !

Trotsky dit quelque part qu'une erreur théorique peut-être lourde de conséquences.

Oui, sinon à quoi bon la théorie?

GL dit que LO tire des conclusions révolutionnaires d'une analyse qui ne l'est pas. Comme quoi les choses ne sont pas si simples !

Peut-on alors tirer des conclusions contre-révolutionnaires d'une analyse qui serait révolutionnaire ?

C'est ce que GL devrait penser de Grossmann.

GL présente sa critique comme contribution à l'adoption par les révolutionnaires-prolétariens d'une analyse juste de la crise.

C'est une discussion, une polémique entre camarades visant le même but.

Cette divergence a-t-elle des conséquences aujourd'hui dans notre politique, notre propagande?

GL reproche à Besancenot de dire à la télé que le pacte de responsabilité ne créera aucun emploi.

Mais bon dieu sur ce coup OB a mille fois raison c'est un constat dont chaque travailleur doit être convaincu. Toute la politique du gouvernement prétendant sauver l'emploi n'est que mensonge grossier c'est en fait de soutenir le capital contre le travail qu'il s'agit.

Pour finir quelles conclusions politiques GL tire t-il de son analyse de la crise ?

Qu'il faut construire un parti anti-capitaliste, c'est-à dire un parti qui n'est ni communiste, ni trotskyste (c'est la même chose) ni même ouvrier.

Il n'est qu'à entendre OB répéter en boucle qu'il se réclame de Louise Michel (violemment anti-marxiste) et du Che résolument étranger à la classe ouvrière...
artza
 
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Re: Analyse de la crise (texte du dernier congrès de LO)

Message par Gaston Lefranc » 19 Jan 2014, 11:31

"c'est un constat dont chaque travailleur doit être convaincu" : non, je maintiens que le pacte de responsabilité est plus efficace pour créer des emplois que des politiques keynésiennes qui visent à augmenter les salaires et les dépenses publiques. Une politique joue positivement sur le taux de profit, l'autre négativement, et donc leur effet n'est pas le même sur la création d'emplois. Dire cela, ce n'est évidemment pas défendre le pacte de responsabilité ou penser que Hollande est préoccupé par les besoins des travailleurs. C'est expliquer que le capitalisme, pour tenter de sortir de sa crise, doit taper de plus en plus fort sur les travailleurs. Il ne s'agit évidemment pas de dire que le pacte de responsabilité va créer des millions d'emplois et qu'on retrouvera le taux de chômage des années 1950 ou 1960. Pour réellement que le capitalisme renoue avec des taux de croissance des années 1950 ou 1960, il faudrait une purge de capital faramineuse que seule une guerre ou une vague de faillites considérable (et donc un effondrement économique) pourrait provoquer.

Enfin, artza me fait le très mauvais procès de dire que je défends la nécessité de construire un parti anticapitaliste qui ne serait ni communiste, ni ouvrier, ni... C'est évidemment faux. La tendance CLAIRE, à longueur de textes, se bat précisément pour que le NPA donne un contenu "positif" à son anticapitalisme, se batte ouvertement pour l'expropriation des grands groupes capitalistes, et pour le communisme. "Anticapitaliste" n'est pas un gros mot, et cela n'a aucun sens de l'opposer au communisme. On reproche précisément à la direction du NPA d'être seulement contre le capitalisme, sans mettre en avant un projet alternatif concret pour sortir du capitalisme.
Gaston Lefranc
 
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Message par Gaby » 19 Jan 2014, 21:24

je maintiens que le pacte de responsabilité est plus efficace pour créer des emplois que des politiques keynésiennes qui visent à augmenter les salaires et les dépenses publiques. Une politique joue positivement sur le taux de profit, l'autre négativement, et donc leur effet n'est pas le même sur la création d'emplois.


C'est faux. En Allemagne, le chômage a baissé selon la mesure habituelle, mais comment ? Plan Hartz : on remplace des emplois relativement sûrs par des contrats courts et fragiles, en gros, le chômage n'a pas baissé, ils ont partagé le temps chômé entre plus de travailleurs à mi-temps ou souvent entre deux jobs ! Et des mesures coercitives du genre on supprime les aides aux chômeurs pour leur faire mieux accepter l'inexistence du SMIC (il vient littéralement d'y être introduit, à des niveaux très bas).

Ton schéma est incapable d'expliquer l'histoire économique des années 30 aux années 60. En gros pour toi, les ultra-libéraux ont raison par rapport aux Keynésiens. Quand on dit que les politiques d'austérité ont des effets que n'auraient pas des politiques de relance (pour des effets connus et que Marx ne nierait pas, sur la vélocité de la monnaie, sur la plus forte tendance à la consommation des pauvres, etc), pour toi c'est une trahison contre-révolutionnaire, même si on prétend aussi qu'aucune politique de relance ne saurait être une solution à long terme (ce qu'est encore moins l'austérité...).

Ta lecture historique est linéaire, et plus tu écris, plus tu révèles ton idée qu'il n'y a qu'une seule politique possible pour la bourgeoisie. Des aménagements du capitalisme il y en a plusieurs et selon mille choses (dont des facteurs culturels...), et l'analyse que tu fais ne réside que dans un seul moment : l'insaisissable "dernière instance". On n'y est pas.
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Re: Analyse de la crise (texte du dernier congrès de LO)

Message par Ottokar » 21 Jan 2014, 08:14

artza a écrit :Il n'est qu'à entendre OB répéter en boucle qu'il se réclame de Louise Michel (violemment anti-marxiste) et de u Che résolument étranger à la classe ouvrière...


juste au passage. Moi aussi cela ne me gênerait pas de me réclamer de Louise Michel, elle figure au Panthéon des révolutionnaires. Mais se réclamer de Louise Michel sans ajouter Lénine et Trotsky, c'est cela qui est significatif et gênant. Au moins, elle appartient au mouvement ouvrier, ce qui n'est pas le cas du Che, même si je salue évidemment sa figure de révolutionnaire, son combat, son désintéressement, son courage (et son sacrifice).
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Re: Analyse de la crise (texte du dernier congrès de LO)

Message par andrea » 21 Jan 2014, 12:36

Le problème c'est que même si globalement, la tendance à la baisse du taux de profit est une réalité, ça n'empêche pas une minorité des capitalistes (les grosses et moyennes entreprises), par le renforcement du taux d'exploitation d'une part et par la spéculation purement financière (rentabilité insuffisante de l'économie réelle), de dégager des marges extraordinaires qui nécessitent d'autant plus l'expropriation capitaliste.
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Re: Analyse de la crise (texte du dernier congrès de LO)

Message par Gaston Lefranc » 26 Jan 2014, 01:31

Pourquoi, Gaby, continuer à dire que tout se vaut plus ou moins ? Non, les politiques d'austérité ou les politiques de relance par la dépense publique ou les hausses de salaires n'ont pas les mêmes effets sur l'accumulation du capital. Désolé d'être basique, mais l'une améliore le taux de profit et l'autre le détériore. Considérer que toutes les politiques se valent plus ou moins, c'est considérer que le taux de profit n'a pas d'impact sur le taux d'accumulation, le taux de croissance. Je ne comprends toujours pas vos arguments pour nier ce lien qui est évident tant sur le plan théorique que empirique.

Gaby, tu avances des arguments qui iraient dans le sens d'une moindre efficacité des politiques d'austérité par rapport aux politiques de relance :

- tu évoques l'argument keynésien sur la propension à consommer qui serait plus élevée chez les pauvres. Si je te suis bien, c'est pour dire que si on fait de la redistribution, alors cela va stimuler la consommation (parce que les pauvres consomment plus en proportion de leur revenu), et donc cela va stimuler la production. Donc c'est "efficace". Tu raisonnes comme si la partie non consommée du revenu disparaissait dans la nature. Or, ce n'est pas le cas. Et je ne vois pas sur quoi repose l'idée que plus la part de la consommation dans le revenu est important, plus c'est bon pour la croissance. Le taux d'épargne en Chine est très élevé, et il ne me semble pas que cela soit synonyme de croissance faible....

- tu évoques la "vélocité de la monnaie" ; peux tu en dire plus ? S'il s'agit de dire qu'il ne suffit pas de créer de la monnaie pour faire repartir l'économie, on est d'accord. On constate aujourd'hui que beaucoup de liquidités est injectée par les banques centrales, mais que la "vélocité de monnaie" diminue. La monnaie créée ne se retrouve ni dans un surcroît de production, ni dans l'inflation sur les biens. Elle alimente la spéculation sur les marchés financiers. Et donc ?
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Re: Analyse de la crise (texte du dernier congrès de LO)

Message par Ripaulin » 08 Fév 2014, 14:00

Bonjour Gaston !

Dans l'ensemble je suis d'accord avec les analyses économiques que tu développes et elles me semblent s'accorder avec les explications de Marx.
Cependant je me permets de faire les remarques suivantes avec lesquelles tu ne seras peut-être pas forcément d'accord !......

1/ Comme tu le démontres, il semble effectivement "irréaliste", c'est-à-dire en contradiction avec le fonctionnement du mode de production capitaliste, de s'imaginer qu'il serait possible en période de "crise" (le concept de "crise" devrait effectivement être plus précisément décrit comme le dit Jacquemart à plusieurs reprises) de relancer l'accumulation du capital (la croissance) par une augmentation des salaires (accroître la demande). Une augmentation générale des salaires, en d'autres termes une augmentation du capital variable ne peut qu'entraîner une diminution de la plus-value. Si l'on s'en tient à l'opposition salariés vs capitalistes industriels, une augmentation générale des salaires provoque d'abord une augmentation de la demande des salariés en produits de consommation (mais les salariés consacrent aussi une part de leurs revenus à l'épargne, à l'achat de biens immobiliers et de valeurs mobilières), tandis que la "demande" des capitalistes baisse. Cette "demande" des capitalistes se décompose d'une part en achat de biens de consommation et produits de luxe (consommation individuelle) et d'autre part en achat de biens de production (consommation productives = investissements).
Que certains produits de luxe soient dorénavant - à la suite d'une augmentation générale des salaires - consommés par les salariés aux dépens de la "consommation individuelle" des capitalistes, n'entraîne donc pas une augmentation de la production (Par contre le "niveau de vie" des salariés s'améliore... ce qui n'est pas négligeable). Qui plus est, si les capitalistes maintiennent leur consommation individuelle, ils devront réduire la part de la plus-value qu'ils consacrent aux investissements (achats de moyens de production et de forces de travail). C'est donc l'accumulation du capital qui en pâtirait.
2/ Cependant la plus-value globale ne se ramène pas au seul profit (d'entreprise), mais se répartit en profit, intérêt, rente foncière et impôts. En d'autres termes ce sont les capitalistes (les propriétaires individuels ou collectifs des moyens de production), les capitalistes financiers ou prêteurs de capitaux, les propriétaires fonciers et l'Etat qui se partagent la plus-value. Donc une hausse généralisée des salaires entraîne une baisse de la plus-value "sociale" et partant une baisse des revenus des différentes catégories sociales ou institutions qui se la partagent.
Je sais qu'il n'est pas très "orthodoxe" d'affirmer que les impôts relèvent d'une ponction sur la plus-value. A ma connaissance nulle part dans l'oeuvre de Marx il en est question explicitement. Il faut cependant garder à l'esprit que das Kapital ne représentait qu'une fraction des études auxquelles voulait se livrer Marx afin d'expliquer le fonctionnement de l'ensemble du mode de production capitaliste. Son plan d'ensemble était en effet le suivant : 1/ le Capital (étude restée inachevée !) 2/ la rente foncière (cette étude est contenue dans le livre III 3/ le salaire 4/ L'Etat (ce qui suppose entre autre une théorie de l'impôt) 5/ le commerce extérieur 6/ le marché mondial.
Quoi qu'il en soit l'impôt ne peut provenir que d'un prélèvement sur le surproduit. On rétorquera bien sûr immédiatement que l'impôt ne pèse pas que sur les capitalistes industriels, mais aussi sur ses comparses capitalistes marchands, capitalistes financiers,propriétaires fonciers) et surtout sur les salariés. La plupart des salariés paient en effet des impôts directs (sur leurs revenus) et des impôts indirects (TVA principalement). Or le salaire est par définition censé permettre au vendeur de sa force de travail de la reproduire : se nourrir, s'habiller, se loger, se déplacer, se distraire, élever des enfants, etc. et .... payer les impôts et taxes que l'Etat exige ! En somme c'est une fraction du capital variable qui met en mesure les salariés de payer leurs impôts. On peut en déduire que si les salariés étaient moins imposés, le capital variable destiné à leur embauche pourrait diminuer et partant la plus-value que s'approprient les capitalistes, augmenterait d'autant !!!!...
3/ Pourquoi maintenant s'appesantir sur l'impôt dans un débat sur la baisse tendancielle du taux de profit considéré comme facteur principal de la "crise" ?
D'abord parce que depuis la seconde moitié du 20è siècle les Etats des grandes puissances capitalistes détournent en gros la moitié de leur PIB (= valeur ajoutée = capital variable + plus-value) pour ensuite la redistribuer. Il s'agit là manifestement dans le cadre du mode de production capitaliste d'une forme de "planification sociale" !
Ensuite depuis les années 70, c'est-à-dire le début de la "crise", les patrons, leurs politiciens et leurs chiens de garde idéologiques (économistes nobelisés, journalistes et autres faiseurs d'opinion) réclament à cor et à cri une baisse des impôts et des prélèvements sociaux. La "baisse des charges" pour "nos" entreprises qui veulent investir et embaucher est devenu un enjeu majeur des débats politiques et apparemment aussi de la lutte des classes. Lire à ce sujet le dernier Lutte de classe n° 157 / Février 2014 qui y consacre deux articles, mais qui selon moi est loin d'aider à comprendre la fonction de l'impôt dans le "capitalisme réellement existant".
Pour finir on comprend bien que la volonté de baisser les impôts et autres prélèvements obligatoires correspond à une tentative de contrer la baisse tendancielle du taux de profits en diminuant donc la part que l'Etat prélève sur la plus-value "sociale". Il en va de même des politiques visant à privatiser les services publics. Il s'agit d'offrir au capital de nouveaux secteurs d'accumulation. Le prélèvement de l'écotaxe tel qu'il avait été envisagé est à ce sujet caricatural : c'est un consortium d'entreprises privées qui avait été chargé de collecter l'écotaxe, ces dernières en prélevant au passage le cinquième pour engraisser leurs actionnaires. On se croirait revenu au temps de l'Ancien régime et des Fermiers généraux ! (http://fr.wikipedia.org/wiki/Ferme_générale )
Bon, finalement ça peut être de bon augure puisque la crise financière et fiscale de la monarchie constitue l'un des facteurs déterminants de l'éclatement de la Révolution française...
Ripaulin
 
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