Construire un parti révolutionnaire. Congrès LO 2017

Marxisme et mouvement ouvrier.

Construire un parti révolutionnaire. Congrès LO 2017

Message par com_71 » 10 Déc 2017, 15:10

Le texte voté :

https://mensuel.lutte-ouvriere.org/2017 ... 00246.html

Extrait d'un autre texte voté, daté de septembre 2017 :

La nécessité d’un parti de classe, vitale pour les travailleurs

Cela fait des décennies que les partis réformistes, socialiste comme stalinien, s’acharnent à consacrer leurs efforts politiques à convaincre les travailleurs qui leur font confiance que c’est dans le cadre de la démocratie bourgeoise, par les élections, en votant bien, que les travailleurs peuvent améliorer leur situation.

Depuis plus de trente ans, la classe ouvrière fait et refait l’expérience que c’est un grossier mensonge, et y croire c’est se bercer d’illusions. Aucun homme politique qui place son activité dans le cadre de l’économie et de la société telles quelles sont, c’est-à-dire capitalistes, aucun parti bourgeois ne peut changer fondamentalement le sort des travailleurs, quoi qu’il puisse promettre pour se faire élire. Il faut que la classe ouvrière se donne un parti qui représente ses intérêts matériels, politiques, moraux, un parti qui prenne le contrepied de la politique de la bourgeoisie et qui organise ses luttes quotidiennes. Un parti qui, de la base au sommet, ne soit ligoté par aucun lien qui l’attache à l’ordre bourgeois et à ses institutions. Cela signifie non seulement que ce parti ne doit pas craindre d’ébranler l’ordre bourgeois, mais que la destruction de l’organisation capitaliste de la société soit son objectif fondamental, sa raison d’être. Seul un tel parti, un parti communiste révolutionnaire, peut mener les luttes quotidiennes des travailleurs jusqu’au maximum de leurs possibilités.

Il y a encore autre chose. La classe ouvrière de ce pays ne peut pas s’isoler du reste du monde, contrairement aux grossiers mensonges protectionnistes, qui ne viennent pas seulement du Front national. Croire que les travailleurs de ce pays peuvent préserver leurs dérisoires privilèges, ne serait-ce que celui de manger tous les jours, au milieu de l’océan de pauvreté qui domine les trois quarts de la planète, c’est non seulement abject mais stupide. L’actualité nous le rappelle chaque jour.

Les attentats terroristes qui ont frappé New York, Barcelone, Londres, Paris, Berlin, Bruxelles ou Stockholm rappellent qu’il est impossible de s’isoler du monde.

Comme nous le rappellent, d’une autre manière, les vagues de migrants. Notre solidarité vis-à-vis de ceux que la guerre ou la misère chasse de chez eux ne repose pas seulement sur un sentiment humain élémentaire. Elle s’enracine dans le constat que le monde est un et l’humanité indivisible. On peut bien dresser toutes les barrières matérielles entre les peuples, entre nations riches et nations pauvres, qu’on ne pourrait déchirer le tissu économique et social que l’histoire a tissé entre tous les êtres humains de cette planète.

Notre propre bourgeoisie nous rappelle en ces temps de crise que même nos minuscules privilèges de prolétaires de pays impérialistes, riches par rapport à nos frères de classe de pays pauvres, peuvent être liquidés, et qu’ils sont en train de l’être.

Et même le privilège de la paix relative qu’ont connue la France et la partie occidentale riche de l’Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale peut être remis en cause, et le sera inévitablement si la crise économique se poursuit et s’aggrave. Parler de paix est une vision du monde vue des fenêtres des grandes puissances impérialistes, vue surtout avec les yeux de la bourgeoisie. Pour bien des peuples, la paix impérialiste fut synonyme de guerres, de massacres ici pour le pétrole, là pour l’uranium, ailleurs pour la conquête de marchés et un peu partout lorsqu’un peuple levait la tête pour revendiquer des droits que l’impérialisme n’était pas prêt à lui accorder. Disons-nous bien, en regardant les images que les médias nous rapportent de Mossoul en Irak, d’Alep en Syrie ou d’Aden au Yémen, qu’elles préfigurent peut-être notre avenir à Paris, à Londres ou à New York.

Alors, tant que nous n’aurons pas mis fin au capitalisme et à sa concurrence, à l’impérialisme et à ses rivalités, même la paix est toute relative, fragile, comme l’est à bien plus forte raison le bonheur du genre humain.

Et le prolétariat des pays impérialistes, dont la France fait partie, doit savoir que la racine du mal ne se trouve ni au Moyen-Orient, ni en Afrique ou en Asie, mais dans les grands pays impérialistes.

Malgré l’agitation sanglante de crapules fanatisées du genre de l’État islamique ou d’al-Qaida, même les guerres qui ensanglantent le Moyen-Orient partent d’ici, des pays impérialistes. Elles sont préparées par les états-majors d’ici et se décident en dernier ressort en fonction des intérêts des conseils d’administration de ces grands trusts dont les sièges sont à New York, Paris, Londres ou Francfort. C’est ici le cœur du grand capital, c’est ici qu’on peut le détruire définitivement.

Tout cela semble aujourd’hui hors de portée de la classe ouvrière des pays impérialistes, prostrée, sans confiance en elle-même, privée de conscience de classe par tout le poids de la bourgeoise, avec la collaboration active des grandes organisations qui prétendent représenter les travailleurs.

La classe ouvrière constitue cependant toujours la seule force sociale capable de renverser le pouvoir de la bourgeoisie. La conscience politique de sa tâche irremplaçable viendra, inévitablement. C’est de cette prise de conscience politique des exploités que dépendent leur avenir et celui de la planète.

13 septembre 2017


Eléments de discussion :

L’ensemble des textes soumis à la discussion, ainsi que les tâches qui en découlent pour notre organisation, trouvent en quelque sorte leur conclusion dans le texte sur la construction d’un parti communiste révolutionnaire.


Contribuer à la renaissance d’un parti communiste révolutionnaire après les faillites successives de la social-démocratie réformiste et du stalinisme est à la base de nos activités depuis toujours. Au-delà de notre petite organisation, c’est même la raison d’être du courant trotskyste depuis qu’il a émergé dans la lutte contre la bureaucratisation de l’État issu de la révolution de 1917. Et cet objectif, le nôtre depuis toujours, s’impose dans la réalité concrète de notre temps.

Quelle est cette réalité ? La crise économique interminable. Des millions de chômeurs, même dans les pays impérialistes les plus riches. La précarité, l’instabilité. La puissance sans entrave des gros possédants. La dégradation des rapports sociaux. La montée des préjugés et la crasse réactionnaire dans tous les domaines de la vie. Des flots de migrants qui fuient la guerre ou la misère, et les barbelés hérissés pour les en empêcher. Les bruits de bottes dans les relations internationales.

Eh bien cette réalité, qui est aujourd’hui celle de la société dans son ensemble, pèse évidemment sur nos activités. Mais elle peut peser dans deux sens contradictoires.

D’un côté, le chômage, la menace de perdre son emploi, pèsent matériellement et ô combien sur notre classe sociale, la classe ouvrière, sur sa combativité, sur sa confiance en elle-même.

Mais d’un autre côté, même dans la fraction privilégiée, riche, de la planète, dont la France fait partie, le capitalisme montre sa faillite. Il ne peut pas représenter l’avenir de l’humanité.

Il fut un temps où l’on enterrait le marxisme révolutionnaire périodiquement. Mais, avec le cours réactionnaire des choses, disons depuis l’écroulement de l’Union soviétique, on l’enterre de moins en moins, pour la simple raison qu’on le considère maintenant comme vraiment mort et enterré.

Au lendemain de la Deuxiè­me Guerre mondiale et bien après, la vie intellectuelle était marquée par une multitude de courants qui se revendiquaient du marxisme. Cette vie intellectuelle dans son ensemble (historiens, sociologues, romanciers) était profondément marquée par des variantes plus ou moins frelatées du marxisme.

La variante dominante était représentée par ceux qui, dans l’intelligentsia, étaient sous l’influence de l’Union soviétique ou du stalinisme. Le marxisme-léninisme que l’on enseignait dans les universités des pays de l’Est et dans les écoles des partis communistes, en France comme ailleurs dans le monde, n’avait rien à voir avec le marxisme révolutionnaire. Cette formulation elle-même est déjà un pléonasme car le marxisme n’est que révolutionnaire. Le marxisme enseigné par le stalinisme était une sorte de liturgie au service de la bureaucratie stalinienne et de ses intérêts, y compris les plus mouvants.

De la lutte « classe contre classe » de la troisième période (1928-1933) de l’Internationale communiste à sa liquidation en 1943, en passant par le pacte germano-soviétique, ce « marxisme-léninisme » officiel a servi à justifier non seulement la bureaucratie et son règne, mais aussi les zigzags de la politique de Staline.

C’est à partir de ce tronc commun que sont nées les multiples variantes et sous-variantes qui se prétendaient marxistes. À commencer par le maoïsme et toutes ses adaptations locales extrêmement diverses.

Déjà à cette époque, le marxisme en tant que théorie révolutionnaire ne survivait que dans le courant trotskyste, qui subissait lui aussi les pressions et les déformations imprimées à la pensée communiste révolutionnaire par le stalinisme triomphant.

Nous n’avons pas l’intention de revenir ici sur les dégâts catastrophiques du stalinisme sur le mouvement ouvrier réel. Des combats majeurs de la classe ouvrière, des révolutions, trahies ou directement écrasées par la bureaucratie, la conscience de classe du prolétariat infectée par le conservatisme social, par le nationalisme : le stalinisme a été au départ des évolutions qui ont conduit à la situation actuelle du mouvement ouvrier.

Le stalinisme avait déjà une responsabilité majeure, décisive, dans le fait que le prolétariat n’a pu se saisir des circonstances créées par la précédente grande crise mondiale du capitalisme, celle des années qui ont suivi 1929.

Ce n’est pas le prolétariat qui n’a pas été à la hauteur. La révolution espagnole et Juin 1936 en France, la grande vague de grèves aux États-Unis comme dans un grand nombre de pays, témoignaient de la vigueur du mouvement ouvrier et de l’aspiration des masses exploitées à s’engager sans cesse sur la voie de la révolution. Mais, comme le résumait Trotsky : « Chaque fois, elles se heurtent à leurs propres appareils bureaucratiques conservateurs. »

Aujourd’hui, le stalinisme a accompli son œuvre destructrice et a quitté la scène politique. C’est une classe ouvrière pratiquement sans traditions et avec une conscience de classe déformée, pervertie, qui est confrontée à la nouvelle crise de l’économie capitaliste mondiale. Elle est désarmée, sur les plans politique et organisationnel.

C’est dans ce contexte que se pose la question du parti pour notre génération.


Construire un parti communiste révolutionnaire

« Pourquoi faire un texte sur le parti ? » Parce que c’est notre raison d’être. Mais il est vrai que nous sommes tellement profondément d’accord là-dessus que nous n’avons pas besoin de nous prononcer tous les ans sur cette question. La raison immédiate, c’est de nous inciter à en rediscuter. Il nous faut montrer que ce que nous cherchons à recréer n’est pas quelque chose qui surgit de l’actualité politique, de la crise du système d’alternance, de la Ve République bourgeoise, de la décadence ou de la disparition des partis traditionnels. […]

Notre perspective, c’est celle qu’ont donnée au mouvement ouvrier organisé les communistes révolutionnaires, à commencer par Marx et Engels. Cette perspective, c’est le combat politique de la classe ouvrière pour renverser le pouvoir de la bourgeoisie, pour l’exproprier, pour mettre fin à la société basée sur la propriété privée, sur l’exploitation et sur la concurrence.

Pour mener ce combat jusqu’au bout, jusqu’à la victoire du prolétariat à l’échelle du monde, la classe ouvrière a besoin d’un parti mondial de la révolution, d’une internationale. En plus d’un siècle et demi de combats, le prolétariat a réussi à plusieurs reprises à se donner cet instrument irremplaçable.

Même si, comme nous le disons dans le texte, « la victoire du prolétariat en octobre 1917 en Russie trancha, dans le feu de la révolution, le débat sur la nature du parti qui lui est nécessaire pour prendre le pouvoir », la révolution russe n’a pas débouché sur la victoire du prolétariat à l’échelle du monde.

La seule conclusion que nous pouvons en tirer, c’est que les échéances de l’histoire sont bien plus longues que ne peut en contenir une vie de révolutionnaire.

Malgré la simplification apportée à la lutte de classe par le développement capitaliste qui a réduit, dans la société moderne, les antagonismes à deux classes, la bourgeoisie et le prolétariat, cette lutte est bien plus variée, bien plus multiforme et bien plus longue que ce qu’espéraient le jeune Marx et ses compagnons en leur temps.

À plusieurs reprises dans l’histoire sociale, le prolétariat, trahi par ses propres organisations et vaincu par la bourgeoisie, n’a pas pu aller jusqu’au bout de son combat. Au bout d’un siècle et demi, avec ses hauts et ses bas, ses succès et ses défaites, la seule chose qu’on puisse affirmer avec certitude est que ce combat sera un perpétuel recommencement jusqu’à la victoire définitive du prolétariat à l’échelle du monde. Mais l’agonie prolongée du capitalisme et la barbarie qui monte de toutes parts nous rappellent qu’il n’y a pas d’autre alternative pour sauver l’humanité.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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com_71
 
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