Comme promis un texte sur l'autogestion et comment nous y discutions avec d'autres organistions ... il y a 30 ans.
CITATION
L’AUTOGESTION, NOUVEL ORIPEAU DU RÉFORMISME
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Dans la gauche et l’extrême-gauche française «l’autogestion», très à la mode il y a
une dizaine d’années, est redevenue ces derniers mois un des thèmes les plus discutés
et mis en avant par une pléiade de groupes, d’organisations ou de tendances diverses
allant de l’anarchisme à la social-démocratie en passant par les chrétiens de gauche.
Il ne se passe plus désormais un seul mois, une seule semaine sans que telle ou telle
organisation fasse une déclaration allant dans ce sens. Prenons quelques exemples. En
janvier 1972 c’est le C.E.R.E.S. (Centre d’Études, de Recherches et d’Éducation Socialistes),
c’est-à-dire la «gauche» du nouveau Parti Socialiste, qui organisait à Paris le
premier colloque national sur l’autogestion. A l’automne de cette même année, lors de la
Conférence Nationale Ouvrière organisée conjointement par Lutte Ouvrière, l’Alliance
Marxiste Révolutionnaire et le P.S.U., la discussion sur l’autogestion avait été inscrite à
l’ordre du jour à la demande du P.S.U. et de l’A.M.R. qui considéraient ce thème comme
essentiel. Au début 1973, les 20 et 21 janvier, le même P.S.U. organisait une rencontre
nationale sur l’autogestion avec la participation de différentes revues de gauche (Auto-gestion
et Socialisme, Critique Socialiste, Politique Aujourd’hui, Objectif Socialiste) proches
du Parti Socialiste et du P.S.U. et de militants de divers groupes d’extrême gauche
dont l’A.M.R. et la Ligue Communiste. Et, au cours de la campagne des dernières élections
législatives, on a pu entendre Mitterrand et Rocard affirmer, presque dans les
mêmes termes, qu’une victoire électorale de la gauche ouvrirait aux travailleurs, à plus
ou moins long terme, les perspectives, parait-il exaltantes, de l’autogestion. Enfin, il y a
quelques mois l’A.M.R., le P.S.U. et les militants des Centres d’initiative Communiste,
proches de l’ancien dirigeant du P.C.F. Roger Garaudy, mettaient sur pied un «Comité
de liaison pour l’autogestion socialiste» afin de constituer un pôle de regroupement de
tous les partisans de cette conception.
Sur le plan syndical c’est la C.F.D.T. qui a fait de l’autogestion l’axe essentiel de ce
qu’elle baptise son «projet socialiste». Et le secrétaire général de cette Confédération,
Edmond Maire – qui en compagnie d’autres dirigeants cédétistes tels Detraz et Krumnow
a fait paraître un livre sur ce sujet – se réjouissait publiquement récemment que le
programme du Parti Socialiste reprenne, sur ce point, un grand nombre d’analyses de la
C.F.D.T.
Mais qu’est-ce donc que cette fameuse autogestion ?
En fait personne n’en donne de définition précise et chacun met ce qu’il veut derrière
ce terme tiroir. Jusqu’en Mai 68 les idées autogestionnaires étaient défendues, au sein
du mouvement révolutionnaire, par le courant libertaire et l’A.M.R. qui regroupait les
militants trotskystes les plus proches des thèses de Michel Pablo.
1.Sous le nom d’autogestion réapparaissaient alors les vieilles idées proudhonniennes,
combattues par Marx, qui affirmaient que des fédérations de producteurs gérant eux-mêmes
leurs propres entreprises étaient le gage essentiel de la révolution sociale. A un
degré ou à un autre ces courants voyaient dans l’autogestion yougoslave ou algérienne
des modèles qu’il fallait certes retoucher mais qui, globalement, offraient des éléments
positifs de gestion ouvrière.
En fait toutes ces conceptions, en mettant l’accent essentiel sur le contrôle économi-que
que devaient exercer les travailleurs sur leurs entreprises, ou bien niaient carrément
l’importance que représentait pour la classe ouvrière le fait de détruire l’Etat bourgeois
et de construire à la place son propre Etat, ou bien acceptaient en principe cette néces-sité,
en étant pourtant bien incapables de montrer le lien qui pouvait exister entre la stra-tégie
autogestionnaire et l’instauration, par la classe ouvrière, de sa propre dictature.
Car sur ce point la question de l’Etat reste décisive pour les révolutionnaires. L’ignorer
ou ne pas la poser nettement c’est finalement laisser les mains libres à la bourgeoisie
pour perpétrer sa domination.
Dans le texte préparatoire à la Conférence Nationale Ouvrière d’octobre 1972, nous
écrivions à ce propos :
«L’idée de «l’usine aux travailleurs» n’est révolutionnaire que si on la comprend
comme un premier pas dans la remise en cause du droit de propriété capitaliste sur les
entreprises. Mais si ce premier pas n’est pas suivi d’autres, si on arrive à convaincre les
travailleurs qu’ils doivent se limiter avant toute chose à la gestion de «leur» entreprise,
alors cette même revendication perd tout caractère révolutionnaire et devient carrément
démobilisatrice.
Car les travailleurs ne demandent pas à gérer leur entreprise, ni à «jouer un rôle diri-
geant dans l’autogestion» (texte du P.S.U.). Ils veulent prendre en main l’économie
dans son ensemble. Et «l’autogestion» au niveau des entreprises n’est nullement un
moyen d’y parvenir comme le montrent d’une façon évidente les exemples yougoslave
et algérien, tout comme l’expérience des coopératives agricoles pendant la guerre d’Es-
pagne, souvent invoquée par les camarades anarchistes. Dans tous ces exemples, le
contrôle de la gestion des entreprises, à des degrés divers, par les travailleurs, est allé
de pair avec un pouvoir d’Etat qui leur échappait totalement, de même que, par consé-
quent, la gestion de l’économie dans son ensemble.
En fait, le seul moyen pour la classe ouvrière de s’assurer le contrôle de l’économie,
est de s’emparer du pouvoir politique, de créer son propre pouvoir d’Etat. Au début de la
Révolution Russe, avant qu’ils ne s’estompent devant la domination de la bureaucratie
stalinienne, les Soviets ne jouaient un rôle économique que d’une façon très secon-
daire. Ils étaient avant tout les organes du pouvoir politique de la classe ouvrière, par
lesquels celle-ci contrôlait l’administration et assurait la répression des classes exploi-
teuses, affirmant son rôle dirigeant non pas dans «l’autogestion» – pour parler comme le
P.S.U. – mais bien dans le pouvoir d’État.
Bien sûr le pouvoir des travailleurs s’exercera aussi sur le plan économique. Car la
socialisation des moyens de production fera nécessairement appel, pour être effective,
à l’initiative de tous les travailleurs, et cela aussi bien au niveau de leur entreprise que
de l’État. On peut appeler cela «autogestion» si on veut, à condition de préciser
2.clairement que le contrôle des travailleurs sur leur entreprise, leur rôle primordial dans
l’élaboration du plan économique, ne sont possibles et durables que si leur contrôle sur
l’appareil d’État est total. Mais c’est rabaisser considérablement la lutte politique des tra-
vailleurs que de donner un rôle central à la revendication économique qu’est l’autoges-
tion. Les travailleurs revendiquent avant tout le pouvoir politique, comme moyen
d’arracher les richesses qu’ils produisent au contrôle dans lequel les tiennent les clas-
ses exploiteuses.
Au fond, le terme aujourd’hui à la mode «d’autogestion» recouvre une conception
petite-bourgeoise du socialisme : la revendication d’une «démocratie économique», la
tentative de limiter à ce niveau la lutte des travailleurs, en évitant de parler de la néces-
sité de la lutte politique pour le renversement de l’État bourgeois.»
Pour les révolutionnaires marxistes, la classe a ouvrière, et elle seule, doit, au moyen
de ses conseils, construire son propre État, c’est-à-dire contrôler pleinement toute la vie
politique et sociale du pays.
Vouloir restreindre ce contrôle à l’entreprise ou au seul domaine économique, c’est
laisser dans les faits le contrôle de l’Etat à d’autres, c’est-à-dire à la bourgeoisie. Et de
ce point de vue la réalisation de l’autogestion, telle qu’elle est prônée par la C.F.D.T., le
P.S.U. ou le P.S., conduirait les travailleurs à se contenter de contrôler les livres de
compte en faisant confiance aux bureaucraties réformistes pour s’occuper des questions
politiques et de la question de l’État. C’est une façon comme une autre de s’opposer
en fait au pouvoir des travailleurs et de laisser les mains libres à l’État bourgeois
pour perpétrer sa domination, si besoin est au travers d’organisations réformistes qui lui
sont dévouées corps et âmes.
Mais, jusqu’en 1968, cette discussion se limitait aux cercles révolutionnaires et à eux
seuls.
Après les événements de Mai-Juin 68 la situation sur ce point va quelque peu changer.
On va voir en quelques mois le P.S.U., puis la C.F.D.T., se faire les champions de
l’autogestion, suivis, quelques années plus tard, par le nouveau Parti Socialiste rénové
par le politicien bourgeois Mitterrand.
Comment expliquer ce succès soudain des idées autogestionnaires ?
Essentiellement par le choix tactique que vont faire le P.S.U. et la C.F.D.T. après
Mai 68.
Pour le P.S.U., qui a «collé» au mouvement étudiant dès le début de la révolte, il s’agit
d’attirer des milliers de jeunes gauchistes qui ne se reconnaissent ni dans les organisations
traditionnelles de la classe ouvrière, ni dans les groupes révolutionnaires. Il
reprend donc à son compte l’idéologie confuse, ronflante et anarchisante du milieu étudiant
qui reflète l’individualisme de l’intellectuel petit-bourgeois en lutte. Et «l’autogestion»
est alors partie intégrante de cette idéologie.
De plus face à un Parti Communiste vomi par des milliers de jeunes pour s’être
opposé aux étudiants dès le début de leur lutte, le thème autogestionnaire peut apparaître
plus radical que la voie électorale que prône le P.C.F. Nul ne sait alors ce que recouvre
exactement ce «socialisme autogestionnaire» mais le simple fait qu’un certain
nombre de leaders étudiants s’en revendiquent et que le P.C.F. le combatte suffit bientôt
3.à lui donner une certaine résonnance contestatrice, gauchiste, voire «révolutionnaire».
La direction du P.S.U. se servit donc largement de ce thème. Lors des élections législatives
de 1968, juste après les événements de Mai-Juin, la campagne du P.S.U., sans
souffler mot du problème du pouvoir bourgeois et de son renversement entra principale-ment
au nom de «l’autogestion», sur la création de mini-pouvoirs à partir desquels chaque
classe sociale pourrait contester la citadelle capitaliste. «Pouvoir ouvrier, pouvoir
paysan, pouvoir étudiant» devint pour longtemps un des slogans favoris du parti.
Mais «l’autogestion» avait pour le P.S.U. un autre avantage. Face au stalinisme et à
la caricature d’Etats «socialistes» qu’étaient l’U.R.S.S., la Chine ou les Démocraties
Populaires, le P.S.U. affirmait que son projet autogestionnaire était le seul susceptible
de «donner au socialisme un visage humain». Et sur cette base-là aussi il put se montrer
à bon compte plus radical que le P.C.F. qui continuait à défendre le régime russe et ceux
que la bureaucratie du Kremlin avait imposés aux Démocraties Populaires malgré quelques
timides dénonciations «d’erreurs» des «camarades» soviétiques, tchèques ou
polonais.
En agissant ainsi, le P.S.U. ne faisait rien d’autre que d’adopter l’attitude classique
que la social-démocratie a toujours fait sienne. Il s’agit, sous prétexte de dénoncer le
stalinisme ou les méfaits de la bureaucratie, d’attaquer la Révolution d’Octobre et ses
acquis, et d’établir une filiation entre léninisme et stalinisme pour mieux rejeter le
premier.
C’est exactement ce qu’a fait et que continue à faire le P.S.U.. Dans la limite de ses
faibles forces, son attitude par rapport à la dictature que les travailleurs établirent en
Russie en 1917 n’est guère différente de celle de l’ensemble de la social-démocratie
européenne et internationale. Elle consiste à s’appuyer sur le dégoût et l’horreur que le
stalinisme a provoqués chez nombre de travailleurs pour convaincre ces derniers que la
dictature du prolétariat – c’est-à-dire leur dictature de classe – est un leurre qui ne peut
que leur être néfaste et qu’il faut combattre. Et la seule différence d’avec la social-démocratie
classique est qu’alors que celle ci porte ouvertement aux nues la démocratie bourgeoise,
le P.S.U., sensible à la pression des milieux gauchistes, préfère exalter le thème
fumeux de l’autogestion capable, parait-il, de désaliéner les exploités. Mais, quant au
fond, les deux attitudes sont identiques.
Et, de ce point de vue, les déclarations gauchistes du P.S.U. ne doivent pas faire illusion.
Même si elles paraissent parfois doubler en paroles le P.C.F. sur sa gauche (ce qui
n’est pas très difficile), elles n’en proviennent pas moins d’une organisation qui sur le
plan social se situe nettement à droite du mouvement stalinien.
Sur le plan syndical la C.F.D.T. a finalement fait le même calcul, mais avec des
moyens autrement plus importants. Pendant la grève générale de Mai-Juin 68, l’attitude
de la C.F.D.T. fut, quant au fond, rigoureusement identique à celle de la C.G.T.. Aux
négociations de Grenelle elle joua le même rôle de briseur de grève que la C.G.T. et
signa avec elle les accords qui vendaient la grève générale pour quelques miettes. Mais
face à une C.G.T. majoritaire dans la classe ouvrière et sur qui reposait donc la responsabilité
de faire rentrer les travailleurs dans les usines, la C.F.D.T. eut les coudées plus
franches pour faire, sans grand risque, des déclarations plus offensives que celles des
responsables syndicaux staliniens. Elle témoigna en outre sa sympathie aux étudiants.
4.De là naquit le mythe d’une C.F.D.T. «gauchiste» face à une C.G.T. réformiste. Et la
direction de l’ancienne confédération chrétienne joua à fond sur cette équivoque. Elle se
proclama elle aussi, dans la lignée de Mai 68, en faveur du «socialisme autogestionnaire»
et tenta d’attirer à elle sur cette base, parfois avec un certain succès, non seule-ment
des jeunes récemment arrivés au syndicalisme ou à l’usine, et dont la sympathie
pour les étudiants était grande, mais également d’anciens militants de la C.G.T. déçus
et écoeurés par la politique de leur Confédération pendant les événements de Mai. De
plus, les idées gestionnaires et autogestionnaires avaient une résonnance chez les
techniciens et cadres parmi lesquels la C.F.D.T. possède ses forces vives. Car dans ces
couches périphériques de la classe ouvrière, le thème de l’autogestion et l’accent qu’il
met sur l’importance de la compétence technique dans la gestion de l’entreprise ne peut
que flatter les préjugés professionnels.
Plus généralement, la C.F.D.T. ne pouvait mener, avec quelques chances de succès,
la lutte d’influence qu’elle a entreprise contre la C.G.T. qu’à la condition de donner
d’elle-même une image plus combative que celle d’un ancien syndicat chrétien mal
déconfessionnalisé ou d’un syndicat «à l’américaine». C’était là un élément indispensable
pour espérer gagner nombre de travailleurs influencés par la C.G.T., qui sympathisent
avec elle ou qui votent pour elle. C’est pourquoi, une fois ses références
chrétiennes jetées par-dessus bord, la C.F.D.T. opta pour le «socialisme autogestion-naire»,
ce qui ne l’engageait pas à grand-chose à une époque où le terme socialisme est
si galvaudé, mais paraissait la situer dans la tradition de Mai-Juin 68 et, par là-même,
plus à gauche que la C.G.T.
Il faut d’ailleurs souligner le rôle qu’ont joué les militants du P.S.U. dans cette évolution
verbale de la C.F.D.T.. Ce sont ces militants qui lui ont donné les idées, les formules
et les slogans dont elle avait besoin pour apparaître plus «gauchiste» et plus «contesta-taire»
que la C.G.T.. Et aujourd’hui encore, sur la foi d’un tel verbiage contestataire, un
grand nombre de militants révolutionnaires, qu’ils appartiennent au courant anarchiste
(Organisation Révolutionnaire Anarchiste) ou au courant trotskyste (Ligue Communiste)
continuent d’entretenir des illusions sur le caractère «centriste», voire «révolutionnaire»,
de la C.F.D.T.
Mais, dans la pratique, la fameuse autonomie des travailleurs, qui serait paraît-il le
pendant indispensable à l’autogestion, conduit la C.F.D.T., sous le prétexte de refuser la
lutte proprement politique, à appuyer le nouveau Parti Socialiste de Mitterrand, ce
même Parti Socialiste qui commença la guerre d’Algérie et aida de Gaulle à venir au
pouvoir. A ce niveau, le but de la direction C.F.D.T. est de constituer avec le P.S. un bloc
capable de faire pendant au sein de la classe ouvrière, et plus largement au sein de la
gauche, au bloc représenté par le mouvement stalinien P.C.F.-C.G.T. C’est d’ailleurs la
création d’un tel bloc de gauche non lié à l’U.R.S.S. que la bourgeoisie française appelle
de ses voeux depuis de nombreuses années.
Au sein des entreprises «l’autogestion» cédétiste ne se distingue guère, dans la lutte,
de «l’autoritarisme» cégétiste. La C.F.D.T., qui affirme pourtant vouloir mettre l’accent
sur le contrôle que les travailleurs doivent exercer dans tous les domaines, s’oppose
systématiquement à la création de comités de grève élus démocratiquement par l’ensemble
des travailleurs d’une entreprise, syndiqués ou non syndiqués. Tout comme la
C.G.T., elle les juge irresponsables et n’a de cesse de les combattre dès qu’ils
5.apparaissent. Et, en son propre sein, elle pourchasse et parfois exclut les militants révolutionnaires
qui, dans les luttes, combattent pour que les travailleurs prennent en main
leur propre mouvement, le contrôlent, le dirigent sans s’en remettre à la seule compétence
de bureaucrates éclairés. Mais c’est justement le contrôle réel des travailleurs, de
tous les travailleurs sur leur propre mouvement que la direction C.F.D.T. refuse
d’accepter.
Où est donc passé, dans tout cela, le fameux «socialisme autogestionnaire» ?
Il n’est guère étonnant que le nouveau Parti Socialiste, en quête d’idées nouvelles ou
qui paraissent telles pour parachever son ravalement, ne soit lui aussi déclaré partisan
de l’autogestion. Chevènement, secrétaire national et leader de l’aile «gauche», en a
même fait un de ses thèmes de bataille préféré. L’autogestion apparaît ici comme une
espèce de supplément d’âme qu’il faudrait ajouter à la conquête du parlement pour par-venir
au socialisme véritable,
En fait la caractéristique commune des grandes organisations qui se réclament
aujourd’hui de l’autogestion est qu’il s’agit d’organisations politiques ou syndicales qui
s’appuient principalement sur des milieux de la petite bourgeoisie intellectuelle (étudiants,
professeurs, avocats, etc...) ou des couches périphériques de la classe ouvrière
(ingénieurs, techniciens, cadres, etc...) et qui mettent en avant les thèmes autogestionnaires
pour combattre non seulement les organisations staliniennes et leur influence sur
les couches les plus combatives de la classe ouvrière mais également, au travers elles,
les idées fondamentales du communisme et du marxisme révolutionnaire.
Il ne s’agit plus dès lors pour nous d’un dialogue entre révolutionnaires mais d’un
combat contre des organisations et des individus qui, par tout leur passé, par toutes
leurs traditions, par toutes leurs aspirations, sont anti-communistes et se trouvent, avec
armes et bagages, dans le camp de la bourgeoisie et de son Etat. D’individus et d’organisations
à qui la bourgeoisie offrira demain, sans l’ombre d’une hésitation, la participation
au pouvoir ou à la mangeoire étatique même si elle continue dans le même temps
de la refuser aux staliniens. Et les militants révolutionnaires doivent dénoncer ce leurre
opportuniste destiné à masquer la question fondamentale du pouvoir politique et de qui
le détient. L’autogestion est de ce point de vue une façon comme une autre de détourner
les travailleurs de leur tâche historique : renverser la domination de la bourgeoisie et
construire leur propre Etat.
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