Bonjour,
Je ne suis pas "pour les licenciements", je suis contre l'interdiction des licenciements, ce qui n'est pas la même chose. Pour décourager le recours aux licenciements, on peut le faire de façon ultra-libérale en liant les cotisations chômages au comportement social de l'entreprise avec un système de "bonus-malus". Le système existant -qui fixe les cotisations à l’Unedic en fonction de la masse salariale- pourrait être remplacé par une taxe de licenciement liée au taux de licenciement de chaque entreprise. Ainsi les sociétés qui ne licencieraient pas paieraient moins qu’avec le système actuel. Cette taxe de licenciement élevée dissuaderait ainsi les entreprises de licencier sans motif légitime et sérieux. Le CAE (Conseil d’Analyse Economique) souhaite ainsi supprimer le CDD (Contrat à Durée Déterminée) et le CDI (Contrat à Durée Indéterminée) au profit d’un contrat unique d’embauche avec une période d’essai de trois mois à six mois.
Durant cette période l’employeur pourra mettre fin au contrat sans payer de taxe, mais passé cette période il sera soumis au principe d’une taxe de licenciement élevée.
Je suis "pour l'union européenne" mais autrement, pour une République-Europe avec des liens de coopération avec les pays du Tiers-Monde -pour peu à peu aboutir à une République-Monde-, où ce n'est pas l'argent qui prime mais les êtres humains, où le profit ne remplit pas les poches de quelques-uns, mais de tous, où les produits entrants verront leur taxation modulée selon leur plus-value sociale et environnementale. Mais si vous, vous êtes contre l'Union Européenne, je ne vois pas comment vous pourrez changer le monde à l'échelle d'un seul pays.
Je vous renvoie là à Léon Trotsky qui l'a aussi bien expliqué que Bakounine dans La révolution permanente en 1936 (chapitre 9, http://www.marxists.org/francais/trotsky/l...vperm/rp10.html) :
CITATION 10. La révolution socialiste ne peut être achevée dans les limites nationales. Une des causes essentielles de la crise de la société bourgeoise vient de ce que les forces productives qu'elle a créées tendent à sortir du cadre de l'Etat national. D'où les guerres impérialistes d'une part, et l'utopie des Etats-Unis bourgeois d'Europe d'autre part. La révolution socialiste commence sur le terrain national, se développe sur l'arène internationale et s'achève sur l'arène mondiale. Ainsi la révolution socialiste devient permanente au sens nouveau et le plus large du terme: elle ne s'achève que dans le triomphe définitif de la nouvelle société sur toute notre planète.
12. La théorie du socialisme dans un seul pays, qui a germé sur le fumier de la réaction contre Octobre, est la seule théorie qui s'oppose d'une manière profonde et conséquente à la théorie de la révolution permanente.
La tentative faite par les épigones pour limiter, sous les coups de la critique, l'application de la théorie du socialisme dans un seul pays à la seule Russie, à cause de ses propriétés particulières (l'espace, les richesses naturelles), n'améliore rien, mais au contraire aggrave tout. La renonciation à une attitude internationale mène inévitablement au messianisme national, c'est-à-dire à la reconnaissance d'avantages et de particularités spécifiques, qui permettent à un pays de jouer un rôle auquel les autres ne sauraient s'élever.
La division mondiale du travail, la dépendance de l'industrie soviétique à l'égard de la technique étrangère, la dépendance des forces productives des pays avancés à l'égard des matières premières asiatiques, etc., rendent impossible la construction d'une société socialiste autonome, isolée dans n'importe quelle contrée du monde.[/quote]
Je suis aussi "pour que la concurrence (le marché) soit la boussole pour connaître les besoins sociaux", il suffit de bien fixer les règles du jeu monétaire, d'empêcher que quelques-uns puissent diriger la vie de millions d'individus avec leurs richesses que les autres n'ont pas, et comme les entreprises fonctionneront avec des crédits accordés par des banques autogestionnaires et avec des intérêts fixés par les citoyen-ne-s eux-mêmes dans les assemblées locales de quartier et de village, chacun sera égal vis-à-vis des autres quel que soit sa richesse.
Ernest Mandel écrivait dans "Plan ou marché: la troisième voie" (http://www.sap-pos.org/fr/marxisme/mandel/...n_ou_marche.htm) : CITATION une économie de marché généralisée est aussi une économie despotique. Ceci est déjà vrai pour toutes les variétés de sociétés capitalistes. C'est particulièrement vrai pour le capitalisme monopoliste, le stade du capitalisme sous lequel nous vivons depuis un siècle et dont le "capitalisme du troisième âge", celui qui existe depuis la Seconde Guerre mondiale, est une sous-variété.
Dans un tel système économique, les priorités dans l'allocation des ressources sont imposées par les décisions d'investissement des propriétaires des grandes entreprises d'une part, la pression de l'inégale répartition du revenu monétaire et de la richesse financière accumulée d'autre part.
Sur le marché, le simple ouvrier, employé ou technicien a une voix. Le gros bourgeois moyen a 1.000 voix. Les très gros banquiers, industriels, milliardaires (à peine une poignée dans chaque pays) ont 100.000 voix. On en conclut aisément que, dans un pays par exemple de 60 millions d'habitants et 20 millions de ménages, 19 millions de ménages ont 19 millions de voix, 500.000 à 1 million de ménages ont 500 millions voire 1 000 millions de voix. A l'évidence, ce sont ces derniers qui décident des priorités par leurs "voix".
[...]
C'est véritablement le coeur du problème. Cela implique le despotisme de la richesse monétaire -du compte en banque prolongé par le crédit bancaire ou plus modestement du coffre-fort et du portefeuille -, ce qui signifie que les priorités sont décidées dans le dos de l'immense majorité du peuple.
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Sauf qu'en fait il parle là du capitalisme et non pas de l'économie de marché en elle-même, et que le système que je propose s'attaque justement au coeur de la société pourrie dans laquelle nous vivons, qui est la propriété privée des moyens de production, d'échange et de financement.
Alors pourquoi je ne rejoins pas la troisième voie d'Ernest Mandel qui est celle du socialisme autogestionnaire participatif avec planification décentralisée ?
Mandel dit ainsi :
CITATION Ce "troisième modèle" est souhaitable parce qu'il est, à la fois, plus démocratique, plus juste (plus égalitaire, impliquant plus de solidarité sociale, plus de justice sociale) et plus efficace d'un point de vue social général.
Il est plus démocratique, car la grande majorité de la population concernée prend elle-même les grandes décisions relatives à son existence. Sous le despotisme de l'État ou du marché, ces décisions sont prises par de petites minorités. Il implique un degré supérieur de justice sociale, car il assure que les besoins fondamentaux de la partie la plus pauvre, la plus faible de la société seront satisfaits en priorité, avant les besoins moins urgents de la partie la mieux lotie.[/quote]
Cependant, il ne voit pas qu'un jour ou l'autre la partie la plus pauvre, qui est aujourd'hui majoritaire se retrouvera inéluctablement dans les "petits minorités". La partie la mieux lotie, la nouvelle bourgeoisie, deviendra majoritaire et pourra donc exercer sa dictature en toute légalité sur le nouveau prolétariat. De même il ne voit pas qu'en satisfaisant les besoins non fondamentaux de la bourgeoisie, de la partie la mieux lotie, cela permet à ceux qui permettent la satisfaction de ces besoins, au prolétariat, de satisfaire leurs besoins fondamentaux au final grâce au pouvoir d'achat obtenu grâce à la bourgeoisie. Il voit donc la paille qu'il y a dans le système de l'économie de marché actuellement, qui est la propriété privée des moyens de production, d'échange et de financement, paille que l'on peut enlever, mais il ne voit pas la poutre qu'il y a dans son système qui aboutira à une démocrature où une majorité pourra écraser les minorités, même si elles représentent 49% de la population, et en toute légalité, poutre qui sera elle difficile à enlever.
Continuons :
CITATION On peut objecter que cela entraîne une certaine injustice vis-à-vis des besoins des groupes minoritaires de consommateurs. Cette objection est fondée. Mais dans une situation de rareté relative des ressources, certains besoins resteront toujours insatisfaits. Il est plus juste de laisser insatisfaits certains besoins de minorités plutôt que les besoins fondamentaux de la majorité.[/quote]
Je réponds à cela que dans un système autogestionnaire, chacun-e sera rémunérée en fonction de ses capacités et de ses efforts. Une femme de ménage serait payée bien plus que maintenant, une hôtesse de caisse de même tandis qu'il n'y aurait plus de Jean-Marie Messier qui pourrait obtenir des indemnités équivalentes à des années, voire des siècles, d'un salaire d'un ouvrier, comme les décisions seront prises par les travailleuses et travailleurs eux-mêmes, il n'y aura plus lieu de rémunérer ceux qui seront élus pour appliquer et coordonner le fonctionnement des coopératives comme les patrons d'aujourd'hui. Ainsi entre un couvreur et un ingénieur, la différence de rémunération sera très faible et on peut même imaginer que s'il y a plus de jeunes à se tourner vers des métiers d'ingénierie que vers les métiers du bâtiment, un couvreur sera plus rémunéré qu'un ingénieur, ce qui serait fait automatiquement par la loi de l'offre et de la demande du marché de l'emploi où "l'armée de réserve" sera très très réduite et composée uniquement des personnes qui changent volontairement d'emploi ou victimes de la faillite de leur coopérative (mais ce sera très rare). Bien évidemment, pour cela il faut assurer la gratuité totale de l'éducation de la maternelle jusqu'au doctorat en passant par les BEP et CAP, ainsi que l'égalité des possibles tout au long de la vie. "La main invisible" du marché fera donc son travail toute seule afin d'allouer les besoins à ceux qui les méritent, ainsi l'oisiveté sera sanctionnée, celui qui a des capacités mais qui ne fait pas d'efforts sera auto-sanctionné, ce qui est juste et humain.
Enfin, là où la théorie du socialisme participatif est floue, c'est que l'on ne sait même pas comment l'individu lambda pourra fonder une entreprise individuelle ou une coopérative avec ses camarades pour réaliser un projet qui lui tient à coeur. Or si le marché n'est pas ouvert, il n'y a pas de liberté économique, et donc pas de liberté politique au final. Ce n'est donc pas une question de détail, mais une question importante que celle là. Tant que je ne serais pas convaincu de la supériorité du système de l'économie participative sur le socialisme autogestionnaire de marché, j'en resterais à ce dernier.
Fraternellement,
Maël Monnier