par mael.monnier » 14 Nov 2003, 00:33
CITATION (stef @ jeudi 13 novembre 2003, 02:28) CITATION Oui je parle sérieusement, d'ailleurs cette loi de concentration des entreprises, vous ne pouvez que la constater. La concurrence ne peut donc que dépérir. [/quote]
Ce n'est pas vrai.
Le monopole tend effectivement à remettre en cause la concurrence.
Mais la concurrence est le moteur du capitalisme (et notamment de la baisse du taux de profit).
D'où par exemple les lois anti-trust aux USA, les investigations sur Microsoft, etc.
Sans concurrence, le système s'ossifie, il entre en crise, mais il ne disparait pas.
Il n'y a aucun mécanisme naturel qui nous exonèrera de l'activité consciente de "remplacer" le capitalisme et d'avancer vers le socialisme.[/quote]
Bonjour,
Il est vrai qu'avec les lois anti-trusts des Etats-Unis et de l'Europe, la concurrence peut dépérir mais pas entièrement. On peut arriver toutefois à des situations de duopoles dans certains secteurs économiques, dans d'autres secteurs économiques au contraire la concurrence s'accentue : les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC), les biotechnologies, ... Dans les conditions actuelles, en effet, c'est faux ce que je dis du point de vue entrepreneurial. Mais ce serait oublier le capitalisme financier. Le capital financier tend à s'accumuler dans les mains de quelques grands groupes, qui peuvent ensuite exercer leur dictature. Les très riches deviennent de plus en plus riches, les riches ont plutôt tendance à rejoindre les pauvres et les pauvres deviennent de plus en plus pauvres. La "fracture sociale" qui en résulte ne cesse de s'élargir, y compris en France, et ce depuis 1985... Bravo la gauche caviar ! Les très riches exerceront donc leur dictature sur les autres de plus en plus fortement.
Comme vous le dites "il n'y a aucun mécanisme naturel qui nous exonèrera de l'activité consciente de "remplacer" le capitalisme et d'avancer vers le socialisme." Et je le dis moi-même en listant les réformes essentielles à mener pour dépasser ce système capitaliste pourri. C'est vrai que j'avais oublier ces fichus lois anti-trusts, je rajoute donc à ma liste de réformes, à mes mesures de transition, l'abolition de ces lois car il est anti-libéral d'empêcher les prolétaires de réunir leurs coopératives autogestionnaires. Mais en tout état de cause, le prolétariat étant ultra-majoritaire (les possédants sont très minoritaires, et dans ma famille, j'ai même un fils de bourgeois, inspecteur des impôts, qui vote LO, mon père, ingénieur en informatique, aussi, mais il faut savoir qu'avant nous vivions assez difficilement, et que je n'aurais pas pu poursuivre mes études si mon père n'avait pas bénéficié de la vague d'embauches liées au bug de l'an 2000), il y aura forcément dictature du prolétariat dans la sphère politique. Ainsi le prolétariat pourra exercer sa dictature sur le marché et ne subira plus le diktat monétaire comme à l'heure actuelle.
En outre, je ne rejette pas du tout l'emploi de moyens révolutionnaires. Imaginons par exemple qu'il y ait une grève de masse en France, que malgré l'intensification de la grève, le gouvernement Raffarin refuse de céder, ou bien que le mouvement de grève de masse décide d'aller plus loin que l'arrêt de la casse sociale et l'exigence de quelques mesurettes sociales, c'est-à-dire d'aller jusqu'à exiger la démission du gouvernement et la formation d'une autre République avec une démocratie participative réelle (où le peuple gouverne et où le gouvernement obéit), dans ce cas il n'y a pas d'autre solution que la Révolution... Car si on dit comme Thorez, qu'il faut savoir terminer les grèves, ou bien même que l'on espace volontairement les jours de grève pour briser le mouvement comme sait le faire la CGT, cela servira à quoi au bout du compte ? A rien. Même si le gouvernement Raffarin démissionne, et que Chirac dissout l'Assemblée Nationale, au moins pire, c'est le PS qui va reprendre la main, mais il ne reviendra pas sur les mesures de Raffarin (se rappeller les paroles de Jacques Delors, Michel Rocard et autres au sujet de la réforme des retraites, et puis... Jospin avait signé avec Chirac à Barcelone de toute façon...), ou alors ce sera pour prendre des mesures du style hausse de la CSG, qui au final seront néfastes pour l'économie, donc pour le prolétariat.
Face à une grève de masse importante et qui a tendance à se radicaliser, il n'y a pas d'autre solution que d'internationaliser le mouvement et d'enclencher une Révolution sociale à l'échelle internationale. Si on ne peut pas internationaliser, mais que la grève de masse est à l'échelle européenne, il faudra être plus prudent à cause des Etats-Unis, et il faudra peut-être limiter la Révolution à la sphère politique, en laissant de côté la question de la propriété des moyens de production, d'échange et de financement afin de ne pas faire échouer le mouvement social vers une dictature comme à Cuba. Si la grève de masse reste limitée à la France, on ne pourra que révolutionner la République, mais pas l'économie. Mais il ne faut pas être négatif, en Amérique du Sud notamment, les mouvements sociaux sont importants, avec grève de masse en Bolivie mais aussi dans les Antilles en République Dominicaine (située au nord de la côte du Venezuela), il y a aussi eu récemment une grève générale en Italie (le mois dernier). Il est vrai que s'il y avait une Internationale qui rassemblerait toute la gauche anti-capitaliste, donc à gauche de l'Internationale Socialiste, la tâche serait facilitée car les mouvements sociaux seraient centralisés et il serait possible de coordonner ces mouvements sociaux à une plus grande échelle.
Ensuite, si je n'appelle pas tout de suite à la Révolution, c'est qu'il faut déjà qu'il y ait une forte grève de masse, et la possibilité d'appeler à telle ou telle Révolution change en fonction de l'échelle géographique de la grève de masse. Et ensuite, je n'appelle pas à la grève de masse mondiale, car il n'a rien qui relie le prolétariat pour déclencher une grève de masse mondiale, les reculs sociaux subis sont presque les mêmes mais pas aux mêmes dates. Et puis franchement, imaginez-donc que je sorte un tract avec "grève de masse mondiale" ou "Révolution internationale" ! Déjà, grève de masse européenne, il y a en a qui me prendrait pour un quelqu'un d'éloigné des réalités, mais "grève de masse mondiale" ou "Révolution internationale", c'est pas la peine, mes tracts finiraient tout de suite en boule sur la voie publique et dans les poubelles... Emman m'a fait la remarque d'ailleurs : "Si on avait la force de l'organisee la greve de masse, on l'aurait fait depuis longtemps, et notamment en mai-juin." Comme elle dit, il faut en effet faire bouger le cul à la direction du PCF, car sinon cela sert à quoi de dire "qu'il y a besoin de révolutions" comme le fait Marie-George Buffet, mais bon c'est toujours mieux que Robert Hue, il suffit de comparer le 32e Congrès avec le 31e Congrès pour voir que le PCF a changé et qu'il est plus radical, à défaut de se proclamer révolutionnaire, et d'appeller à la grève de masse, pour faire aboutir à une Révolution Sociale.
Pour répondre au camarade vlassov maintenant, je ne vois pas en quoi une réforme ne pourrait être révolutionnaire, et pourquoi une série de réformes révolutionnaires ne pourrait pas changer le monde. Si cela a échoué jusqu'à maintenant, c'est parce que les réprésentants de la classe ouvrière ont toujours laissés l'Etat tel quel, or ce n'est pas avec un Etat bourgeois que l'on peut faire grand chose, à part du capitalisme d'Etat. Mais on avoit ce qu'a fait un Jules Guesde par exemple, alors que celui-ci a lutté contre les idées de Jean Jaurès, on se dit qu'effectivement, il ne faut pas faire confiance à une quelconque avant-garde.
Concernant le problème soulevé par le camarade pelon : "Gagner les élections ne veut pas dire posséder l'appareil d'Etat qui lui, est au service de la classe bourgeoise." C'est bien pour cela que je dit qu'il faut révolutionner la République, en faisant instaurer par le peuple une démocratie gouvernée par le peuple avec un gouvernement qui obéit au peuple. Il faudra peut-être ruser bien évidemment, pour mettre la bourgeoise devant le fait accompli, ou alors en procédant morceaux par morceaux, lentement mais sûrement, tout retour en arrière étant impossible à opérer par la bourgeoisie sans se compromettre. Et en enseignant au prolétariat les méthodes non-violentes de désobéissance civile, de résistance, de sabotage... le prolétariat serait ensuite capable de rendre inefficace toute tentave de répression de la part de la bourgeoisie. Mais regardez en mai-juin 1936 : le capitalisme ne pouvait plus rien faire pour se sauver, et il fut sauvé par Thorez, Blum et Jouhaux, ce qui montre que le problème vient plutôt des représentants de la classe ouvrière qui se transforment en social-traîtres et en petit-bourgeois. C'est pour cela, qu'il faut apprendre au prolétariat à s'auto-organiser, à garder sa fraîcheur d'Esprit.
Michel Bakounine ne s'y était pas trompé dans l'Empire knouto-germanique et la Révolution sociale (Lyon, 29 septembre 1870) :
"En France, le culte mystique de l'autorité, l'amour du commandement et l'habitude de se laisser commander, ont détruit dans la société aussi bien que dans la grande majorité des individus, tout sentiment de liberté, toute foi dans l'ordre spontané et vivant que la liberté seule peut créer. Parlez-leur de la liberté, et ils crieront aussitôt à l'anarchie ; car il leur semble que du moment que cette discipline, toujours oppressive et violente, de l'État, cessera d'agir, toute la société soit s'entredéchirer et crouler. Là gît le secret de l'étonnant esclavage que la société française endure depuis qu'elle a fait sa grande révolution. Robespierre et les Jacobins lui ont légué le culte de la discipline de l'État. Ce culte, vous le retrouvez en entier dans tous vos républicains bourgeois, officiels et officieux, et c'est lui qui perd la France aujourd'hui. Il la perd en paralysant l'unique source et l'unique moyen de délivrance qui lui reste : le déploiement libre des forces populaires ; et en lui faisant chercher son salut dans l'autorité et dans l'action illusoire d'un État, qui ne présente plus rien aujourd'hui qu'une vaine prétention despotique, accompagnée d'une impuissance absolue."
Le problème n'est donc pas la bourgeoisie, mais cette culture d'obéissance qui est répandue en France. Si personne n'obéissait, personne ne pourrait commander. La bourgeoisie ne peut pas mettre tout le monde en prison, elles sont déjà saturées de toute façon. Un grand travail de propagande au sein des masses est donc nécessaire, grâce à des forums-citoyens par exemple, où grâce à un dialogue avec les masses peut se faire, où chacun-e retire forcément quelque chose du forum, même celle(s) ou celui(ceux) qui sont en position d'enseignant-e-s. Au cas où je découvrirais que la voie réformiste révolutionnaire que je prône est effectivement une impasse, je n'aurais plus qu'à me proclamer anarcho-communiste et m'a fédéré à la FA. Ma vision de l'anarchisme n'étant pas celle de Trotsky qui a fait croire que tous les anarchistes étaient des nuls pour faire la Révolution, ce que Nestor Makhno a contredit en Ukraine jusqu'au moment où Lénine a donné l'ordre d'exterminer les anarchistes. Makhno contre-révolutionnaire ? Et puis quoi encore ? Ensuite, dire que les anars ne savent pas s'organiser, c'est faux. Bakounine a même inventé l'entrisme ! Et il n'était pas contre l'ordre :
"Tout ennemi que je suis de ce qu'on appelle en France la discipline, je reconnais toutefois qu'une certaine discipline, non automatique, mais volontaire et réfléchie, et s'accordant parfaitement avec la liberté des individus, reste et sera toujours nécessaire, toutes les fois que beaucoup d'individus, unis librement, entreprendront un travail ou une action collective quelconque. Cette discipline n'est alors rien que la concordance volontaire et réfléchie de tous les efforts individuels vers un but commun. Au moment de l'action, au milieu de la lutte, les rôles se divisent mutuellement, d'après les aptitudes de chacun, appréciées et jugées par la collectivité tout entière : les uns dirigent et commandent, d'autres exécutent les commandements. Mais aucune fonction ne se pétrifie, ne se fixe et ne reste irrévocablement attachée à aucune personne. L'ordre et l'avancement hiérarchiques n'existent pas, de sorte que le commandant d'hier peut devenir serviteur aujourd'hui. aucun ne s'élève au dessus des autres, ou s'il s'élève, ce n'est que pour retomber un instant après comme les vagues de la mer, revenant toujours au niveau salutaire de l'égalité." (L'Empire knouto-germanique, Lyon, 29 septembre 1870). Bakounine fut malheureusement trop optimiste, ce qui le mena à de nombreux échecs. Il y a un juste milieu à trouver entre l'excès d'optimisme et la sous-évalutation, et un grand travail de propagande au sein des masses est nécessaire.
Pour répondre au camarade wolf maintenant :
"Mais sur ces réformes.. l'objectif serait (il le répète plusieurs fois) d'aller à une "concurrence non faussée"? , et en plus grâce à l'union européenne?
Ce que je trouve troublant dans cette formulation, c'est que la concurrence "non faussée" fait partie des principes que pose le projet de "constitution européenne". peut-être que cette convergence non voulue devrait faire réfléchir maël? "
Ce n'est pas cela l'objectif, vous n'avez pas compris la ruse, l'objectif pour moi étant le socialisme autogestionnaire de marché, le marché étant sous la dictature du prolétariat. Il y aura très peu de marché dans la réalité à cause des mouvements de fédération entre coopératives. Je garde juste le marché pour éviter la coercicion économique, pour éviter que quelqu'un-e qui veuille créer une coopérative avec ses copines et ses copains, puisse le faire, cela n'étant aucunement la liberté d'exploiter les autres, sachant qu'en outre, il y aura bien plus d'intérêt à rejoindre une coopérative qui existe déjà. Le principe de "concurrence non faussée" rendra anti-constitutionnel des méthodes telles que le RMA par exemple, qui fausse la concurrence entre les travailleuses et travailleurs, et qui va entraîner une spirale baissière des salaires. Le principe de "concurrence non faussée" nécessite également une harmonisation des politiques sociales afin d'éliminer le dumping social et la distorsion de concurrence entre les Etats membres de l'Union. Et ce même principe nécessite aussi de revoir la politique douanière afin d'éviter toute concurrence déloyale. Je retourne en fait l'arme de ces pseudos libéraux contre eux. C'est donc voulu, si je parle de "concurrence non faussée". Le capitalisme est anti-libéral et non pas libéral comme on le dit trop souvent à gauche. Puisque quelques-uns et quelques-unes deviennent de plus en plus riches, ils et elles deviennent plus libres que les autres, donc les autres se retrouvent réduits en esclavage automatiquement, les autres voient leur liberté brisée. Le capitalisme n'est rien d'autre que la liberté du loup dans la bergerie, avec des bergers et des bergères pour protéger le loup.
Wolf me dit ensuite :
"Or comment le faire [le changement] sans concentrer entre les mains de l'Etat les moyens économiques et financiers pour ce faire: sans nationaliser tout le système bancaire et de crédit, sans exproprier les plus gros groupes capitalistes?
Comment le faire sans planifier cet effort gigantesque ? Et comment planifier en laissant libre cours à la concurrence?
Comment le faire en laissant au spéculateurs le pouvoir de ruiner tous les efforts de l apopulation laborieuse pour construire un avenir qui lui ressemble? Et donc comment ne pas établir le monopole du commerce extérieur? Colmment ne pas exproprier les spéculateurs, fonds d'investissements, etc. dénoncer la dette publique française?"
Et voilà ! Encore l'Etat ! Vous ne précisez même pas qu'il faudrait d'abord faire une révolution politique pour que le peuple gouverne et que son gouvernement obéisse, les révolutionnaires pouvant se dissimuler discrètement parmi les masses et ainsi exercer leurs influences pour mener à bien la Révolution sociale. Il ne faut pas nationaliser, mais socialiser, et c'est au peuple de le faire, pas à l'Etat. Idem pour les expropriations : il suffit que les travailleuses et travailleurs prennent eux-mêmes en charge ces gros groupes capitalistes, mais aussi les petits, il n'y a pas de raison de s'arrêter en cours de route. Ce n'est pas à l'Etat de planifier, il faudra que les coopératives se fédèrent entre-elles librement de la base vers le haut afin d'éviter de se concurrencer inutilement et de partager les connaissances et les techniques, les coopératives devant garder leur liberté. Les travailleuses-travailleurs d'une coopérative n'auront aucun intérêt à concurrencer la coopérative de leurs camarades, ce serait s'auto-exploiter. On peut donc leur faire confiance et leur laisser une grande liberté. La planification se fera par la "main invisible" du marché tout simplement, marché sous la dictature du prolétariat, je le répète encore une fois pour que ce soit bien clair, et grâce aux statistiques de consommation et de production détaillées, aux enquêtes de consommation, aux études de marché... Si un produit n'est pas rentable, le marché l'indiquera par les pertes que subira la coopérative. Sachant que s'il est utile socialement, les citoyen-ne-s pourront décider de le financer par des cotisations sociales. Si un produit est fabriqué en trop grandes quantités, son prix chutera, et donc il faudra réduire la production de ce produit au profit d'un autre, ou d'un nouveau produit, etc.
J'ai été très long, mais c'est habituel chez moi, mais j'espère que vous y trouverez les réponses que vous attendez. Je me tiens prêt bien évidemment à toute nouvelle critique.
Fraternellement,
Maël Monnier