Le socialisme d'Oscar Wilde

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par clavez » 22 Nov 2003, 10:20

j'aimerai bien que Dolmancé m'explique ce qu'est un socialiste à la Oscar Wilde. srait-il pour un autre monde phalocratique, machiste et sexiste où il n'y aurait pas d'enculé de trotstkiste?
clavez
 
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Message par Dolmancé » 22 Nov 2003, 14:06

j'aimerai bien que Dolmancé m'explique ce qu'est un socialiste à la Oscar Wilde. srait-il pour un autre monde phalocratique, machiste et sexiste où il n'y aurait pas d'enculé de trotstkiste?

Peut être dans un autre fil alors parce que ça va partir dans le hors sujet. C'est en rapport avec la vision du socialisme adoptée par Oscar Wilde et qu'il a décrit dans "L'âme humaine sous le socialisme".
Dolmancé
 
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Message par Dolmancé » 04 Déc 2003, 19:23

Bon j'avais commencé à écrire un truc et je me suis rappelé que Christopher Lasch en parlait donc je recopie, l'explication sera plus clair et la réflexion fait un peu la synthèse de ce que je reproche aux liguards (exclusivement des jeunes) avec qui j'ai déjà discuté utopie dans des manifs : une propension au mépris des masses (taxé d'être des beaufs qui votent FN, ou des pauvres gens manipulés...), un lyrisme un peu trop artificiel à mon gout et un engagement plus motivé par l'opposition aux valeurs bourgeoises que par la création d'une société...

maintenant j'en fais pas une généralité mais la lecture (survol ?) du bouquin de Besancenot m'a un peu conforté dans cette idée...

Allez extrait :
"
(...) l'âme humaine sous le règne du socialisme, paru il y a un peu plus de cent ans en février 1891. Comme toujours, Wilde avait eu l'intention d'éblouir et de choquer ses lecteurs et son titre avait la fonction typiquement wildienne d'outrager l'opinion des gens respectables. Il associait un concept dérivé de la religion, l'âme, avec une idéologie agressivement laïque tirant une bonne part de son inspiration de Marx qui, dans un mot célèbre, condamne la religion comme l'opium du peuple.

C'était peut-être là la seule formule marxienne à laquelle Wilde pouvait adhérer sans réserves. Son socialisme n'était guère orthodoxe. Il déclarait à un journaliste en 1894 : "Nous sommes tous plus ou moins des Socialistes de nos jours." Mais sa version personnelle de la foi socialiste célébrait l'artiste et non le fils du labeur aux mains calleuse, et concevait en outre le socialisme comme le meilleur espoir d'un type nouveau d'individualisme - un "nouvel héllénisme" comme il le désignait dans les dernières pages de son Manifeste peu communiste. Les marxistes orthodoxes ont tourné en dérision sa variété estétique de socialisme, mais Wilde a fini par avoir le dernier mot. Sa religion de l'art a survécu à l'effondrement de l'utopie marxiste. De toutes les religions laïques apparues au XIXe siècle, celle-ci s'est avérée être la plus durable - et à sa manière, la plus séduisante et la plus insidieuse.

Dans l'esprit d'Oscar Wilde, le socialisme n'était qu'un autre nom - délibérément provocateur en 1891, dans les cercles de la société où il évoluait naturellement - de l'élimination de la malédiction du travail par les machines. Wilde ne supportait pas d'entendre proclamer la dignité du travail. "Il n'y a absolument rien qui soit nécessairemetn digne dans le travail manuel, pour l'essentiel c'est quelque chose d'absolument dégradant." Dans l'avenir tout cela allait être effectué par des machines très élaborées. Le progrès scientifique et technologique allait éliminer par degrès la pauvreté, la souffrance et l'injustice. La collectivisation de la production libérerait les pauvres du besoin, mais elle libérerait aussi les riches de la corvée de gérer et défendre leurs biens. L'opinion de Wilde était que, si le travail manuel était dégradant, la propriété était "casse-pieds". "Les devoirs qu'elle entraine la rendent insupportable. Dans l'intérêt des riches, nous devons nous en débarasser." L'administration d'un patrimoine ne contribuait pas moins que le travail manuel à distraire les gens de la véritable affaire de la vie : la culture et la jouissance de leur "personalité". Une fois que l'Etat aurait repris le controle de la production des objets utiles, les individus pourraient se consacrer à la production de "ce qui est beau". La "véritable personnalité de l'homme" entrerait en possession de ses ressources. "Elle croîtra naturellement et simplement, comme une fleur, ou comme croït un arbre... Elle ne disputera ou ne querellera jamais. Elle ne sera pas constamment en train de se mêler des affaires des autres, ou de leur demander d'être comme elle. elle les aimera parce qu'ils seront différents... La personalité de l'homme sera parfaitement merveilleuse. Elle sea aussi merveilleuse que la personnalité d'un enfant."

Dans la conception de Wilde, le socialisme ne devait pas advenir par l'action des masses. Les masses étaient trop abruties par le travail pénible pour être en mesure de s'émanciper toutes seules. Elles étaient "extraordinairement stupides" dans leur déférence à l'autorité. De fait, elles n'étaient "pas vraiment conscientes" de leur propres souffrances. "Elles doivent se l'entendre dire par d'autres personnes" - par des "agitateurs", "classe absolument nécessaire" sans laquelle "il n'y aurait pas de progrés vers la civilisation". Les agitateurs étaient l'équivalent politique des artistes : troublan la paix, ennemis de la conformité, révoltés contre la coutume. Ils avaient en commun avec les artistes la haine de l'autorité, le mépris de la tradition et le refus de courtiser la faveur populaire. Les agitateurs et les artistes étaient l'incarnation suprême de l'individualisme, ne désirant plaire qu'à eux mêmes. Ils n'avaient "pas la moindre pensée pour le public". Et ils n'accordaient pas non plus la moindre attention au "discours morbidement hypocrite qui veut que l'on fasse ce que veulent les autres parce qu'ils le veulent ; ou à aucun discours hideusement hypocrite sur le sacrifice de soi". Les artistes n'avaient à répondre de leurs actes que devant eux mêmes et ce qui du point de vue de la moralité conventionnelle, pouvait passer pour de l'égoïsme était la condition préalable à toute authentique réalisation de l'imagination.

(...)ce type de message a séduit des intellectuels en quête d'une solution de remplacement à des croyances religieuses, que l'on considérait largement à cette époque comme insupportables pour l'esprit moderne.(...) Il confortait les artistes et les intellectuels dans leur sentiment de supériorité sur le vulgum pecus. Il ratifiait leur révolte contre les conventions, contre la solennité bourgeoise, contre la bêtise et la laideur. En établissant une équivalence entre justice sociale et liberté artistique, la religion de l'art rendait le socialisme aimable pour des intellectuels qui auraient pu sinon être dégouté par son matérialisme. On ne saurait expliquer correctement l'attirance des intellectuels pour le mouvement socialiste à son apogée si l'on ne considère pas comment il se superposait à la critique de la bourgeoisie par les artistes. Socialistes et esthètes avaient un ennemi commun, le bourgeois philistin, et les flèches incessantes décochées contre la culture bourgeoise ont eu des effets bien plus durables que l'offensive contre le capitalisme, du moins dans le monde occidental, et aujourd'hui il est probable que l'on peut en dire autant à l'Est.

Dans les années 60, les étudiants révolutionnaires avaient adopté des slogans dont l'esprit était bien plus près de Wilde que de Marx : "l'imagination au pouvoir" ; "il est interdit d'interdire". L'attrait que continuent à excercer ces idées trente ans plus tard doit être évident à quiconque jette un oeil sur le monde universitaire et les médias.
Dolmancé
 
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Message par Stanislas » 07 Déc 2003, 09:40

(Dolmancé @ jeudi 4 décembre 2003 à 19:23 a écrit :Dans les années 60, les étudiants révolutionnaires avaient adopté des slogans dont l'esprit était bien plus près de Wilde que de Marx : "l'imagination au pouvoir" ; "il est interdit d'interdire". L'attrait que continuent à excercer ces idées trente ans plus tard doit être évident à quiconque jette un oeil sur le monde universitaire et les médias.

L'attrait par les médias sans nul doute oui. Simple question : c'est de toi, de Besancenot ou de Lasch cette formule... hasardeuse ?

Note: Concernant Christopher Lasch, le personnage se référençait (pour autant que je sache) surtout à George Orwell. Voir " Lasch et l'Ecole de Francfort " à ce propos. Enfin, ce que j'en dis hein... c'est toi qui vois.
Stanislas
 
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Message par Dolmancé » 07 Déc 2003, 23:22

C'est de Lasch...(j'ai oublié de fermer les guillemets)

Sinon c'est tiré de La révolte des élites et la trahison de la démocratie, dans ce livre il fait plutot référence aux mouvements ouvriers non marxistes du XIXe siècle...

(de toute façon Lasch a l'immense mérite d'être totalement inclassable)
Dolmancé
 
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Message par Stanislas » 08 Déc 2003, 06:23

(Dolmancé @ dimanche 7 décembre 2003 à 23:22 a écrit :C'est de Lasch...(j'ai oublié de fermer les guillemets)

Sinon c'est tiré de La révolte des élites et la trahison de la démocratie, dans ce livre il fait plutot référence aux mouvements ouvriers non marxistes du XIXe siècle...

(de toute façon Lasch a l'immense mérite d'être totalement inclassable)

Oui, bien sûr les deux derniers paragraphes de ta citation ne laissent aucun doute sur cette référence aux mouvements ouvriers. L'ensemble du texte non plus d'ailleurs, à bien y réfléchir.
Lasch n'est pas inclassable du tout, c'est un petit philosophe petit bourgeois. On peut douter que le progrès soit par principe émancipateur. Mais dénigrer de façon systématique le progrès comme le fait Lasch sans distinguer les formes sociétales (capitalisme, socialime) dans lesquelles celui-ci prend corps relève de l'ineptie la plus totale.
Stanislas
 
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Message par Dolmancé » 08 Déc 2003, 09:35

"petit bourgeois" c'est le qualificatif que les communistes sortent dès qu'ils comprennent pas un truc ? :roll:

Mais dénigrer de façon systématique le progrès comme le fait Lasch sans distinguer les formes sociétales (capitalisme, socialime) dans lesquelles celui-ci prend corps relève de l'ineptie la plus totale.

Vous dénigrez bien de façon systématique le capitalisme sans distinguer les formes sociétales dans lesquelles celui ci prend corps... :hinhin:

De plus il critique une situation actuelle, pas un imaginaire utopique qui n'est jamais arrivé et n'arrivera jamais...
Dolmancé
 
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Message par Barikad » 08 Déc 2003, 09:54

Définitivement, ce fil me parait suréaliste ....
Barikad
 
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Message par Stanislas » 09 Déc 2003, 06:37

(Dolmancé @ lundi 8 décembre 2003 à 09:35 a écrit :Vous dénigrez bien de façon systématique le capitalisme sans distinguer les formes sociétales dans lesquelles celui ci prend corps...  :hinhin:

Oui, c'est en effet assez surréaliste.
Stanislas
 
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Message par Dolmancé » 09 Déc 2003, 09:59

Ben oui soyez réaliste, pourquoi Lasch qui fait de la sociologie irait faire la critique d'un système qui n'existe pas ? Ce serait comme faire une critique du capitalisme financier actuel en étudiant la situation économique d'une vallée du Vermont au XIXe siècle (à l'époque ou tout le monde était indépendant pour sa survie et que le salariat était juste une occupation pour passer le temps) : je n'en vois pas l'intérêt...
Dolmancé
 
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