Centenaire de "l'Humanité"

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par pelon » 24 Avr 2004, 08:13

a écrit :
Le numéro spécial du centenaire de l'Humanité : la mémoire qui flanche

Pour commémorer son centenaire, l'Humanité a édité un numéro spécial évoquant, «en 500 photos, les Unes historiques, les moments forts de 100 ans d'histoire», les événements qui ont émaillé un siècle de publication du quotidien du PCF. Mais, à part quelques fac-similés, il ne s'agit pas d'un recueil d'articles d'époque pouvant permettre de juger sur pièces les choix politiques antérieurs du PCF, mais d'articles rédigés aujourd'hui pour présenter au public un visage conformiste, dans l'air du temps, en écartant ce qui fâche, aussi bien l'engagement révolutionnaire des débuts que le stalinisme qui lui succéda. Des pans de l'Histoire, que le parti, au plus fort de ses années staliniennes, avait effacés, resurgissent, mais avec pour arrière-pensées le désir de trouver une place dans le courant social-démocrate.

Ainsi Trotsky, longtemps calomnié par les rédacteurs staliniens, est évoqué à plusieurs reprises. La révolution russe de 1905 est à peine signalée, mais la condamnation de Trotsky à la «déportation à vie» en Sibérie est mentionnée, sans préciser que cette condamnation était celle du président du premier soviet («conseil») ouvrier de l'histoire.

Ni les Unes de l'Huma titrant «Vive la République des Soviets» (novembre 1917), avec les portraits de Lénine et Trotsky, ni la Une d'août 1921, «Le roman héroïque de l'armée rouge raconté par son créateur: Trotski», ne sont présentées. En revanche on cite Trotsky et «la répression de la révolte de Kronstadt» (1921), une façon de se démarquer, sans le dire, de la révolution russe.

La «construction du socialisme dans un seul pays» chère à Staline fit couler beaucoup d'encre dans les colonnes de l'Humanité des années trente, mais elle n'est évoquée ici qu'en quelques lignes sur la «dictature stalinienne en marche» et l'élimination par Staline, après la disparition de Lénine, de tous les autres dirigeants de la révolution russe, «éliminés par la mort, l'exil, le suicide». L'hystérie stalinienne qui traitait de «terroristes», de «vils agents de la bourgeoisie» et de «complices de la gestapo hitlérienne» les trotskystes qui continuaient de défendre les idéaux du communisme et de la révolution ouvrière, est rappelée en une phrase.

Un article évoque un parti qui aurait toujours pris «le parti du colonisé contre le colonisateur». Mais on fait silence sur les années 1945-1947 où le PCF, au nom de l'«Union française», défendait la nécessité pour les colonies françaises de rester sous la tutelle de la métropole impérialiste. En ces lendemains de «victoire sur le nazisme», les militants nationalistes qui, en Algérie par exemple, luttaient contre le colonialisme étaient traités de «fascistes». Les bombardements de l'aviation française à Sétif, en août 1945, qui firent des milliers de morts civils, sont de même passés sous silence.

Même discrétion pour la politique du «produire, produire, produire» de Maurice Thorez qui, aux côtés de DeGaulle dans le même gouvernement à la fin de la guerre, pesa de tout le poids du PCF, pour que la classe ouvrière française, au prix d'un travail acharné, remette sur pied l'économie de la bourgeoisie française. Là encore, il fallut attendre que les ministres communistes soient écartés du gouvernement en avril 1947, après la grève Renault déclenchée contre l'avis des dirigeants du PCF et de la CGT, pour que la grève cesse d'être considérée par l'Huma et les dirigeants du PCF comme une «arme des trusts».

Les lecteurs de l'Humanité de l'année 1956 n'ont jamais lu le titre «Les chars soviétiques écrasent Budapest». Ils lisaient au contraire que, grâce à l'intervention des chars russes, en Hongrie, «le pouvoir populaire est solidement rétabli». L'Huma saluait les «fermes décisions du gouvernement de Hongrie pour en finir avec les fauteurs de troubles».

La même année, le vote des «pleins pouvoirs» au socialiste Guy Mollet, qui s'en servira pour intensifier la guerre en Algérie, est mis au compte de la malhonnêteté de Guy Mollet qui ne tient pas les «engagements fermes lors de son investiture». On suggère ainsi que les dirigeants du PCF ont été trompés, alors qu'ils ne pouvaient qu'être conscients des conséquences de ce geste, sauf à être des naïfs en politique. C'est d'ailleurs la politique de Mollet, soutenue par le PCF, qui pavera la route au retour de DeGaulle en 1958, et non pas les militaires, comme titre un article de ce supplément.

Mai 68, auquel le PCF s'était largement opposé, de même d'ailleurs que la lutte des Lip, font désormais partie du panthéon du PCF. L'article de Georges Marchais dénonçant les groupuscules gauchistes est passé à la trappe. Enfin, la participation au gouvernement en 1981, derrière Mitterrand, est saluée, mais la politique dite d'austérité ne commencerait qu'après le départ des ministres PCF en 1984, alors qu'en réalité elle a débuté dès 1982. Silence sur le «sale boulot» évoqué par le dirigeant du PS, Mauroy, contre les sidérurgistes, ou la dénonciation des ouvriers de l'automobile en grève chez Citroën, dénoncés par le même comme des «ayatollahs». Quant au vote pour Chirac au deuxième tour de l'élection présidentielle de 2002, il est discrètement présenté comme «faire en sorte que les résultats du candidat Le Pen soient le plus bas possible», en tablant qu'avec le temps ce peu glorieux épisode de la gauche française sera oublié.

Dans cette façon de présenter aujourd'hui les choses, l'Humanité reste au moins fidèle à une école historique capable de réécrire l'histoire au fur et à mesure des tournants politiques, y compris à 180°, qui ont marqué son passé.

Jacques FONTENOY

Lutte Ouvrière n°1864 du 23 avril 2004
pelon
 
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Message par emma-louise » 24 Avr 2004, 12:44

"Il besogne à la façon d'un occidental, en «homme d'affaires». Sans doute parce qu'il est juif. Cela n'importe point." :trotsky: ceci est un tout petit bout de phrase , sorti , comme on, dit de son contexte_le texte mentionné ci dessus !!! :wavey: !!! Cela n'enlève rien à la qualité du récit bien entendu , mais souligne l'époque sans doute !
emma-louise
 
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Message par Thomas » 24 Avr 2004, 19:48

Je trouve l'article de LO d'une mauvaise foi désarmante, à peu près égale des historiens pro-capitalistes qui passent leur temps à rabacher que communisme = nazisme, non pas que j'ignore ou que je refuse de voir les conneries du PCF. Mais , cet article est le procédé de toute personne qui part d'une conclusion qu'il veut démonter à tout prix et choisit ses exemples pour arriver à celle ci.
Démontrer que le PCF est un parti antiouvrier relève de la malhonnêteté intellectuelle , on peut démontrer la même chose pour LO et c'est très injuste pour les militants PCF.
Thomas
 
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Message par artza » 24 Avr 2004, 20:11

a écrit :c'est très injuste pour les militants PCF


Les militants PCF présents, passés et futurs(?) ne sont pas l'objet de cet aticle. Un article que pour ma part je trouve excellent ,historiquement entièrement fondé. Tu peux en vérifier chaque terme par toi même. Ce qui est une "injure" aux militants PCF actuels c'est la teneur de ce super numéro de l'Huma qui n'explique rien et passe l'essentiel sous silence, falsifie l'histoire par omission. Sans remonter au plus loin la politique d'Union de la gauche du PC et ses participations gouvernementales succesives ont-elles été bénéfiques aux travailleurs? En rien tout au contraire. La politique menée était pro-patronale et donc anti-ouvrière. Les militants PCF que tu évoques auraient mérité une toute autre politique. Quand à dire on peut en dire autant de LO essayes donc. En toute amitié car je crois en ton honnêteté, étudies l'histoire de ton parti car à l'évidence c'est ton parti et reparlons de tout ça sereinement et sérieusement. Le futur parti communiste authentique ne saurait se former à partir d'horipeaux staliniens mensongers.
artza
 
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Message par Thomas » 24 Avr 2004, 20:45

Salut artza ,

je pense pas que ce numéro de l'huma est une injure par omission , il ne cache pas une une ignoble comme celle de l'hommage au grand Staline , il ne nie pas mais affirme le vote PCF au ppleins pouvoirs du social traitre, Mollet. Je vois pas en quoi ce numéro de l'huma est une apologie de l'union de la gauche , union aujourd'hui anti ouvrière , on est dac. Ce numéro montre également le changement de ton de notre mouvement en voyant la une de la mort de Sacco et Vanzetti, "le protélariat les vengera !" , je regrette que ni LO , ni LCR, ni PCF soit aujourd'hui capable d'un tel langage
En toute amitié , sans penser un seul mot de ce qui va suivre , je peux faire la mm chose pour LO , qui a appelé à voter Mitterrand , le pétainiste social traître responsable du génocide rwandais , en 74 et 81 , qui a permis que le traité de Maastricht , pro patronal , de passer en argumentant avec le fait que Barcia est un chef d'entreprise , je peux te prouver que LO a une politique anti ouvrière . ce qui , bien évidemment est aussi faux que pour le PCF, puisque dans quasiment toutes les luttes , PCF et LO se retrouvent côte à côte , sur des mots d'ordre similaires en faveur des travailleurs.
Quant à moi , je ne suis pas au PCF, je suis proche de ce parti malgré toutes les conneries qu'il a pu faire (le stalinisme en particulier) mais également proche de LO. Je me réclame communiste et je t'avoue que je suis un peu perdu dans cet émiettement de notre mouvement
Thomas
 
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Message par Barnabé » 24 Avr 2004, 21:01

a écrit : je peux te prouver que LO a une politique anti ouvrière . ce qui , bien évidemment est aussi faux que pour le PCF,

Et bien non, cela n'a rien à voir. LO n'a jamais trahi les intérêts de sa classe, la politique de la direction du PC est une trahison permanente depuis plus de 70 ans. Le stalinisme n'est pas comme tu dis une "erreur" du PC, ça a été sa ligne politique. Et cela a consitsté, aux ordre de la bureaucratie qui avait usurpé le pouvoir en URSS à défendre au fond les intérêts de la bourgeoisie dans le mouvement ouvrier. Alors oui, le PC ce n'est pas qu'une direction traitresse, c'est aussi des militants, dévoués à leur classe, sincères, mais trompés par leur direction.
Dans les exemples que tu donnes pour illustrer le caractère "anti-ouvrier" de LO, la mauvaise foi (oui on a appelé à voté Miterrand tout en étant les seules à expliquer dans les campagnes en quoi Miterrand était un homme de la bourgeoisie, celui de l'Algérie entre autre) se dispute avec la calomnie (hardy...).
Pour le PC, c'est l'histoire du mouvement ouvrier dans son ensemble qui est une démonstration des trahisons du stalinisme (et pas qu'en France), de sa politique criminelle en Allemagne en 33, de la trahison du ralliement à Blum en 36 en France, de la trahison de la révolution espagnole, du ralliement à De Gaulle pendant la deuxième guerre, des militants trotskystes assassinés, de "la grève, arme des trusts", et on pourrait continuer l'énumération longtemps.
Barnabé
 
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