Nietzsche

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Barnabé » 25 Avr 2004, 09:26

Moi je suis d'accord avec le texte de Trotsky (que j'avais déjà posté ailleurs). Ce qu'il faut voir c'est ce qu'exprime socialement la pensée de Nietzche. Oui il y a bien une critique de la morale et de la religion, mais c'est une critique d'un point de vu individualiste, de l'individu qui veut s'élevé au dessus de la morale et au dessus des autres. bref c'est un point de vue réactionnaire. Le tout enrobé quand même par un peu tout et son contraire. Bref je reprend intégralement la conclusion du vieux:
a écrit :  D'où cette conclusion : qu'on nous invite autant qu'on voudra à nous plonger en toute confiance dans le nietzschéisme, à respirer à pleins poumons dans les œuvres de Nietzsche le grand air du fier individualisme ; nous ne répondrons pas à ces appels, et, sans craindre les reproches faciles d'étroitesse et d'exclusivisme, nous répliquerons avec scepticisme comme le Nathanaël de l'évangile : " Peut-il y avoir quelque chose de bien à Nazareth ? "
Barnabé
 
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Message par Gaby » 25 Avr 2004, 12:59

La philosophie de Nietzsche n'est pas compatible avec l'idéal socialiste, loin de là.
Il n'est pas si compliqué à comprendre, en compagnie d'un travail d'interprétation bien éloigné de la récupération nazie.

Dans le fond, Nietzsche et son surhomme, c'est l'exhaltation de la compétition, de la carotte et du baton. Il s'agit ainsi d'aller "au delà de l'homme". Certes, libérons-nous de nos faiblesses, là aucun gauchiste n'ira le contredire. Cependant, partant d'une critique de la morale altruiste chrétienne, son cheminement sera tout autre de n'importe quel 68ard, communiste, trotskiste ou anarchiste.

Pour Nietzsche, la religion a accompagné l'existence de l'homme du ressentiment. L'homme du ressentiment est celui qui réagit au lieu d'agir, celui qui ressent sans recul. Il serait un homme de culpabilité, exhaltant l'entraide au lieu du progrès humain individuel.

Ensuite il observe la société contemporaine, la caractérisant comme "nihiliste". Notre société voit l'effondrement des valeurs, parceque leur fondement -la religion- s'est révélé faux, fictif, rien. Nous sommes dans une décomposition dans le rien, dans l'incertitude propre à une époque de transition.

Je cite un passage très clair d'un texte explicitant la pensée de Nietzsche :
a écrit :Les hommes, ou plutôt certains hommes, ceux que Nietzsche appelle les faibles ou encore les esclaves, le troupeau des agneaux bêlants, sont dans la situation de celui qui subit sans pouvoir répondre et qui, par suite, ne peut pas oublier. Ne pouvant réagir en agissant, sa réaction est située sur le plan de l'imaginaire c'est à dire sur le plan des traces que sont les souvenirs douloureusement ressentis (ressentiment). Dès lors le fait même d'exister lui semble un malheur à cause du désir rentré de réagir. À partir de là, tout ce qui nous fait échapper aux douleurs d'exister aura une valeur. On donnera un privilège au sommeil, au rêve, à l'ascétisme (au sens chrétien de mortification). L'ascétisme chrétien est pour Nietzsche le ressentiment qui se retourne sur lui-même. Ne pouvant réagir sur le monde, l'homme du ressentiment réagit sur lui-même. C'est une autodestruction qui n'est rien d'autre que le désir de mort, de néant (nihilisme à nouveau). C'est la vengeance de l'homme malheureux qui se retourne contre lui-même. Mais ce désir de néant doit se masquer, justement par désir de vengeance. L'homme du ressentiment va vouloir se venger de son malheur (qui vient de sa propre faiblesse) contre les autres et notamment contre ceux qui ont échappé au ressentiment parce qu'ils sont forts. Il va dès lors masquer son idéal d'autodestruction par l'altruisme pour mieux les séduire. Pour les obliger eux-mêmes à s'autodétruire, il va prétendre que ce qui fait valeur dans l'existence c'est de se forcer soi-même à l'encontre de ses instincts et, en particulier, de se forcer soi-même à considérer comme mauvais tous les rapports de conflit avec les autres, d'où la morale traditionnelle. C'est sous le prétexte d'améliorer l'homme que cet idéal du prêtre va conquérir le monde alors qu'il ne s'agit que du désir de vengeance des hommes du ressentiment contre les forts qui sont capables de réagir au monde par des actions. On prétend améliorer l'homme alors qu'il s'agit en réalité de le domestiquer, de le soumettre. On va prétendre que l'homme fort (c'est à dire sain) est mauvais et le contraindre à devenir bon. Séduit et trompé, l'homme fort se soumet à la mutilation volontaire de ses instincts. On tente de l'affaiblir et de l'humilier. On le culpabilise pour mieux le soumettre en lui faisant croire qu'il commet le mal.


Le message moral de Nietzsche est très clair. Ne tends pas la main à l'esclave embourbé, il est faible et seul défenseur d'une morale du ressentiment, représentation allant contre l'ordre des choses et contre le chemin vers l'avancement humain. Le surhomme se doit de trouver de nouvelles valeurs, au-delà des caricatures passéistes de bien et de mal. Pour lui, le bon est l'élite, et jamais il ne s'agit de se débarasser d'un rapport de force que jamais Nietzsche ne comprendra autrement que comme l'existence de "surhommes" et de "faibles"...

En vérité, Nietzsche aura construit un ramassis de conneries avec des illustrations quasi-comiques (notamment l'arbre généalogique du bien et du mal).
Il est de ces philosophes ignares en histoire, en sociologie ou en économie, dont la contemplation ne dépassera jamais... le ressentiment. Ressentiment qu'il aura méprisé toute sa vie, ne sachant pas qu'il était réellement le porte-drapeau exhaltant de la morale bourgeoise, émanation logique de sa condition sociale, de sa classe. Il disait :

" Solitaires d'aujourd'hui, vous qui vivez à part, vous serez un jour un peuple. Vous qui vous êtes élus vous-mêmes, vous formerez un jour un peuple élu - et c'est de ce peuple que sortira le surhomme. "

Nous lui répondrons encore et toujours, par l'appel de l'union des prolétaires. La perspective de homme total l'emportera sur la conception vulgaire de surhomme.
Gaby
 
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Message par Koceila » 25 Avr 2004, 17:24

D’autant plus que scientifiquement parlant, ce ne sont pas les espèces les plus aptes qui survivent : prenez l’exemple des dinosaures qui étaient mieux armés et plus puissants que les mammifères ; les premiers ont été entièrement exterminés par un cataclysme (météorite ou éruptions volcaniques à l’échelle d’un continent ou les deux en même temps ?) survenu il y a 75 millions d’années.

Même chose pour l’homme, il y a tente milles ans coexistaient plusieurs espèces d’homme : deux sûrement (l’homme de Neandertal et l’homme de Cro-Magnon) contrairement aux préjugés et croyances communément admises l’homme de Neandertal avait un volume crânien plus important que celui de Cro-Magnon (ancêtre de l’homme moderne qui n'a pas varié depuis pratiquement) et sa constitution physique était plus robuste que celle de Cro-Magnon. Aujourd’hui il ne reste plus aucune trace de l’homme de Neandertal même dans nos gènes ; voir les études génétiques récentes faites sur le sujet. D’après ces dernières, en même temps que la disparition des Néandertaliens, la race des Cro-Magnon a faillie subir le même sort funeste ; il y a trente mille ans seuls quelques milliers d’hommes subsistaient sur Terre…… Cataclysme ?
Koceila
 
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Message par Mariategui » 26 Avr 2004, 03:32

Adolecent, je suis sorti avec une fille, grande amatrice de Nietzche. Ainsi, elle a légitimé les modalités de notre relation avec les thèses du surhomme (dans son cas, de "surfemme"). Je crois que serais à toujours biaisé contre Nietzche :cry:

Mais on doit être juste avec l'oeuvre de Nietzche et son oeuvre a été utilisé par les fascistes sur la base d'un malentendu ou d'une très mauvaise lecture. Car la philosophie de Nietxche était une philosophie du dépassement individuel qui s'opposait de fond aussi aux principes du fascisme, c'est à dire, le grégarisme ethnique et l'obéissance aux chefs. Sur ces deux points, sa philosophie s'oppose entièrement. D'ailleurs, je suis assez sûr que Dans ainsi parlait Zarathrousta, il ya une critique des socialistes allemands (si je ne me trompe pas, lorsqu'il parle des hommes qui habitent dans des maisons trop petites ou quelque chose comme ca) mais je crois aussi qu'on peut trouver une critique très ferme des nationalistes allemands.

Sinon , le malentendu entre nous est que le matérialisme historique n'est pas un corpus d'idées philosophique mais un instrument d'analyses des conditions sociales d'émergence d'une philosophie ou idéologie. On ne se pose pas alors les mêmes questions. Nous, on analyse le pourquoi et le comment de l'émergence d'une philosophie alors que Manu accepte le jeu philosophique et se place à l'intérieur d'un système d'idées pour le comprendre et bon, penser (ce qui n'est pas une mauvaise chose).

Enfin, pour Canardos et Koceila:

a écrit :en tant que darwinien convaincu, je suis obligé de te contredire.

ce sont bien les plus aptes qui survivent....dans un milieu donné...

le poisson est adapté à la mare, mais quand la mare s'asseche, le poisson meurt...

sur les deux questions que tu souleves, dinosaures et neanderthaliens,si tu veux koceila poursuivons ce debat la dans le fil evolution ou il aura plus sa place.


Je crois que l'ancien Trotskyste Patrick Tort peut veut mettre d'accord lorsqu'il analyse la "deuxieme révolution darwinienne" et l'émergence "laique" de l'éthique. Ainsi, de son point de vue, la stratégie de survie de l'homme a été justement de protégér les plus faible de leur espèce pour se renforcer comme collectif. Dans sa perspective (car il est dur de voior ce qui est à lui dans cette thèse et ce qui est à Darwin), la morale et notre éthique d'entre-aide aurait été un des résultats de l'évolution, une stratégir d'adaptation à un milieu un peu plus raffiné que celle des singes grégaires.
Patrick Tort est une lecture très intéressante mais il doit être la personne la plus imbu d'elle même de l'univers.


Et j'oubliais, il ne faut pas oublier que l'oeuvre de Nietxche est resté largement inachevée et qu'il ne s'agit pas d'un corpus fini. Ainsi, les contradictions sont parfois nombreuses mais elles sont souvent fertiles (comme quoi, je ne suis pas si biaisé que ca, pourtant qu'est ce qu'elle m'a fait souffrir cette fille :( )
Mariategui
 
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