La philosophie de Nietzsche n'est pas compatible avec l'idéal socialiste, loin de là.
Il n'est pas si compliqué à comprendre, en compagnie d'un travail d'interprétation bien éloigné de la récupération nazie.
Dans le fond, Nietzsche et son surhomme, c'est l'exhaltation de la compétition, de la carotte et du baton. Il s'agit ainsi d'aller "au delà de l'homme". Certes, libérons-nous de nos faiblesses, là aucun gauchiste n'ira le contredire. Cependant, partant d'une critique de la morale altruiste chrétienne, son cheminement sera tout autre de n'importe quel 68ard, communiste, trotskiste ou anarchiste.
Pour Nietzsche, la religion a accompagné l'existence de l'homme du ressentiment. L'homme du ressentiment est celui qui réagit au lieu d'agir, celui qui ressent sans recul. Il serait un homme de culpabilité, exhaltant l'entraide au lieu du progrès humain individuel.
Ensuite il observe la société contemporaine, la caractérisant comme "nihiliste". Notre société voit l'effondrement des valeurs, parceque leur fondement -la religion- s'est révélé faux, fictif, rien. Nous sommes dans une décomposition dans le rien, dans l'incertitude propre à une époque de transition.
Je cite un passage très clair d'un texte explicitant la pensée de Nietzsche :
a écrit :Les hommes, ou plutôt certains hommes, ceux que Nietzsche appelle les faibles ou encore les esclaves, le troupeau des agneaux bêlants, sont dans la situation de celui qui subit sans pouvoir répondre et qui, par suite, ne peut pas oublier. Ne pouvant réagir en agissant, sa réaction est située sur le plan de l'imaginaire c'est à dire sur le plan des traces que sont les souvenirs douloureusement ressentis (ressentiment). Dès lors le fait même d'exister lui semble un malheur à cause du désir rentré de réagir. À partir de là, tout ce qui nous fait échapper aux douleurs d'exister aura une valeur. On donnera un privilège au sommeil, au rêve, à l'ascétisme (au sens chrétien de mortification). L'ascétisme chrétien est pour Nietzsche le ressentiment qui se retourne sur lui-même. Ne pouvant réagir sur le monde, l'homme du ressentiment réagit sur lui-même. C'est une autodestruction qui n'est rien d'autre que le désir de mort, de néant (nihilisme à nouveau). C'est la vengeance de l'homme malheureux qui se retourne contre lui-même. Mais ce désir de néant doit se masquer, justement par désir de vengeance. L'homme du ressentiment va vouloir se venger de son malheur (qui vient de sa propre faiblesse) contre les autres et notamment contre ceux qui ont échappé au ressentiment parce qu'ils sont forts. Il va dès lors masquer son idéal d'autodestruction par l'altruisme pour mieux les séduire. Pour les obliger eux-mêmes à s'autodétruire, il va prétendre que ce qui fait valeur dans l'existence c'est de se forcer soi-même à l'encontre de ses instincts et, en particulier, de se forcer soi-même à considérer comme mauvais tous les rapports de conflit avec les autres, d'où la morale traditionnelle. C'est sous le prétexte d'améliorer l'homme que cet idéal du prêtre va conquérir le monde alors qu'il ne s'agit que du désir de vengeance des hommes du ressentiment contre les forts qui sont capables de réagir au monde par des actions. On prétend améliorer l'homme alors qu'il s'agit en réalité de le domestiquer, de le soumettre. On va prétendre que l'homme fort (c'est à dire sain) est mauvais et le contraindre à devenir bon. Séduit et trompé, l'homme fort se soumet à la mutilation volontaire de ses instincts. On tente de l'affaiblir et de l'humilier. On le culpabilise pour mieux le soumettre en lui faisant croire qu'il commet le mal.
Le message moral de Nietzsche est très clair. Ne tends pas la main à l'esclave embourbé, il est faible et seul défenseur d'une morale du ressentiment, représentation allant contre l'ordre des choses et contre le chemin vers l'avancement humain. Le surhomme se doit de trouver de nouvelles valeurs, au-delà des caricatures passéistes de bien et de mal. Pour lui, le bon est l'élite, et jamais il ne s'agit de se débarasser d'un rapport de force que jamais Nietzsche ne comprendra autrement que comme l'existence de "surhommes" et de "faibles"...
En vérité, Nietzsche aura construit un ramassis de conneries avec des illustrations quasi-comiques (notamment l'arbre généalogique du bien et du mal).
Il est de ces philosophes ignares en histoire, en sociologie ou en économie, dont la contemplation ne dépassera jamais... le ressentiment. Ressentiment qu'il aura méprisé toute sa vie, ne sachant pas qu'il était réellement le porte-drapeau exhaltant de la morale bourgeoise, émanation logique de sa condition sociale, de sa classe. Il disait :
" Solitaires d'aujourd'hui, vous qui vivez à part, vous serez un jour un peuple. Vous qui vous êtes élus vous-mêmes, vous formerez un jour un peuple élu - et c'est de ce peuple que sortira le surhomme. "
Nous lui répondrons encore et toujours, par l'appel de l'union des prolétaires. La perspective de homme total l'emportera sur la conception vulgaire de surhomme.