La guerre d'Algérie et le PCF

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par emma-louise » 28 Oct 2004, 15:33

a écrit :Cinquante ans après, la guerre d'Algérie reste un sujet d'embarras pour le PCF
 

Le Parti organise, jeudi 28  octobre, place du Colonel-Fabien à Paris, une soirée à l'occasion de la commémoration du début de l'insurrection en Algérie, le 1er novembre 1954.
Le parti communiste français organise, jeudi 28 octobre place du Colonel Fabien à Paris, une soirée à l'occasion de la commémoration du cinquantième anniversaire du 1er novembre 1954, date du début de l'insurrection en Algérie. Le PCF peine encore à se pencher sur son histoire algérienne.




Deux vérités bien distinctes s'entrechoquent.


La première est celle des historiens qui montrent une direction du PCF extrêmement prudente vis-à-vis de l'insurrection armée et du fait national algérien. L'autre, celle du vécu et de la mémoire militante communiste de base qui a d'autant plus le sentiment d'avoir été parmi les rares à la pointe du combat anticolonialiste que c'est ce récit qui en interne a primé.

Dans cette perception, les saisies à répétition de l'Humanité pour ses dénonciations de l'usage de la torture, les manifestations pour "la paix en Algérie", les figures d'Henri Alleg, de Maurice Audin, les morts de Charonne - ce que l'historien Benjamin Stora appelle le "patrimoine sacré" - l'emportent sur le soutien jusqu'en 1956 à l'Union française, le vote des pouvoirs spéciaux à Guy Mollet, les louvoiements vis-à-vis de la revendication d'indépendance.

Ce choc des vérités fait tout l'intérêt de la soirée du jeudi 28 octobre. Interpellé par ses vieux militants, le PCF a mis en place en 2001 un groupe de travail sur "les communistes et la guerre d'Algérie". Le 8 juin 2001, Roland Leroy, ancien directeur de l'Humanitéavait pris les devants. Dans un entretien qui demeure l'introspection la plus aboutie du PCF sur sa politique vis-à-vis de la question algérienne, celui qui fut jeune député communiste en 1956 estimait que le vote des pouvoirs spéciaux à Guy Mollet était une "erreur d'appréciation". Et reconnaissait, qu'au-delà de la faute tactique, ce vote "touchait à quelque chose de plus profond qui avait à voir avec la stratégie politique du parti communiste à l'époque".

Dans le discours qu'elle devait prononcer jeudi soir, la secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet, montre que la guerre d'Algérie reste un sujet d'embarras important pour son parti. En 1954, "les forces politiques qui appellent alors à maintenir l'ordre contre le mouvement national algérien (...) prennent appui sur un sentiment populaire majoritaire", explique Mme Buffet. Elle affirme, dans la foulée : "Seul le PCF (...), marqué par un combat anticolonial identitaire, est engagé dans le mouvement qui conduira à l'indépendance."

Des forces politiques, certes très marginales (pivertistes, trotskistes, libertaires), avaient toutefois pris position, dès 1954, pour l'indépendance. Ensuite, la direction du PCF ne s'est pas vraiment engagée en 1954 dans un mouvement vers l'indépendance : la ligne officielle du parti est restée pour deux ans encore le soutien à l'Union française.

En revanche, pour la première fois, est évoquée par un numéro un du PCF l'existence d'"actes individuels" de militants, sous-entendu allant plus loin dans l'engagement que la ligne du parti de l'époque et donc en marge de celui-ci. "On ne reconnaît pas assez cette multitude d'actes politiques effectués individuellement ou au nom de la direction du PCF pour la solidarité, la justice et pour les droits du peuple algérien", déclare Mme Buffet.

Evoquant l'action de ceux et celles qui s'engagèrent pour aider personnellement le FLN, elle indique : " Je sais combien celles et ceux qui avaient fait ce choix se sont sentis abandonnés." Pour autant, Mme Buffet estime que si "un recul critique est toujours nécessaire"," notre parti ne doit ni mythifier, ni dénigrer ce qui a été fait". Evoquant le vote des pouvoirs spéciaux à Guy Mollet, le mot erreur ne figure pas dans son intervention. "Si le contexte politique du moment (...) a pu justifier ce vote, il en reste cependant un geste difficile à assumer", indique-t-elle.

Caroline Monnot

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 29.10.04
emma-louise
 
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Message par lohen » 28 Oct 2004, 18:39

a écrit :ce sont les socialistes qui portent l'écrasante responsabilité de la guerre d'Algérie et de son million de morts

La guerre d'Algérie a commencé à Sétif aevc les massacres que l'on sait, avec le soutien du PCF et du PS alors au gouvernement ensemble.
En novembre 1954, il ne me semble pas que la position du PCF soit frappée du sceau de l'internationalisme prolétarien.
En 1956, le PCF vote les pouvoirs spéciaux à Guy MOLLET, pouvoirs spéciaux qui organise l'envoi du contingent en Algérie et le début des opérations de maintien de l'ordre.
Que par la suite, le PCF ait changé de position d'accord, mais la position du PC de 1945 sur les colonies est fondatrice de ses positions plus tard, qu, il me semble, ne sont pas anodines.
lohen
 
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Message par emma-louise » 29 Oct 2004, 01:50

a écrit :De 1945 à 1962, les contradictions des communistes face au conflit
LE MONDE | 28.10.04

Lorsqu'éclate , le 1er novembre 1954, l'insurrection armée en Algérie, le Parti communiste français, dirigé par Maurice Thorez, n'en voit pas la portée. A sa décharge, c'est le cas de l'ensemble des forces politiques de l'époque, extrême gauche exceptée.




Mais le PCF, qui s'est, par le passé, illustré par ses positions anticoloniales - notamment à l'occasion de la guerre du Rif au Maroc en 1925 -, est mal armé pour appréhender la situation. Après la dissolution du Komintern, en 1943, le PCF a pris un tournant national.

"PROVOCATIONS"

Sur l'Algérie, sa grille d'analyse date de 1939. Dans un discours prononcé à Alger, le 11 février, Maurice Thorez a évoqué "une nation en formation". A cette occasion, il s'est prononcé en faveur d'"une union libre entre les peuples de France et d'Algérie". Avant d'ajouter, dans une formule restée célèbre : "L'union libre, cela signifie certes le droit au divorce, mais pas l'obligation de divorcer."

A la Libération, le PCF apporte son soutien au concept d'Union française - soutien qui ne sera pas remis en cause avant son congrès de juillet 1956. Sa ligne apparaît alors comme celle d'une "démocratisation" de l'empire colonial, non de sa remise en cause à court terme. Et encore moins pour l'Algérie, département français.

L'existence d'un Parti communiste algérien (PCA), autonome depuis 1936, n'est pas d'un grand secours, en 1954, pour le PCF. Le PCA "n'a pas su se dégager d'une vision hexagonale qui va lui coûter cher", ainsi que l'ont rappelé Hervé Hamon et Patrick Rotman dans Les Porteurs de valises : la résistance française à la guerre d'Algérie , (Albin Michel). Le 8 mai 1945, lorsqu'éclatent les émeutes de Setif et Guelma et que s'ensuit une répression impitoyable, le PCA, à l'instar du PCF, dénonce la " provocation d'agents hitlériens". Il mettra des années à s'en remettre auprès de la population musulmane.

Le 8 novembre 1954, une déclaration du bureau politique, publiée dans L'Humanité du lendemain, dénonce la répression : "Le PCF dénonce les mesures de violence prises pour tenter de briser le mouvement national algérien." Elle condamne aussi l'insurrection armée : " Fidèle à l'enseignement de Lénine, le PCF, qui ne saurait approuver le recours à des actes individuels susceptibles de faire le jeu des pires colonialistes, même s'ils n'étaient pas fomentés par eux, assure le peuple algérien de la solidarité de la classe ouvrière française dans sa lutte de masse contre la répression et pour ses droits."

En 1954, la lutte contre la guerre d'Algérie n'est pas la préoccupation principale du PCF. Elle " passe après le combat contre l'Alliance atlantique et le réarmement de l'Allemagne, après les objectifs européens du mouvement communiste", note l'historien Philippe Robrieux dans son Histoire interne du Parti communiste (Fayard). Cela n'empêche pas des militants communistes français de s'impliquer. Ils sont présents, notamment à Rouen, lors des premières manifestations de rappelés, à l'automne 1955.

LA PAIX, PAS L'INDÉPENDANCE

Le PCF intensifie alors sa mobilisation pour "la paix en Algérie". La paix, mais pas l'indépendance. "La revendication claire d'indépendance n'apparaîtra (...) qu'au début des années 1960, après le discours de De Gaulle sur le droit à l'autodétermination", indique l'historien Benjamin Stora. "Pourtant, dès 1954, des courants se battent. Mais ils ne sont qu'une poignée : trotskistes, membres de la Fédération communiste libertaire de Georges Fontenis, catholiques de gauche."

En mars 1956, le vote par l'écrasante majorité des députés communistes des pouvoirs spéciaux en Algérie à Guy Mollet, à la tête d'un gouvernement de front républicain porté au pouvoir deux mois plus tôt sur l'engagement d'interrompre "une guerre imbécile et sans issue", crée les premiers véritables remous internes. Le 27 mars, Maurice Thorez explique ne pas vouloir sacrifier "le tout" (l'alliance avec les socialistes) à "la partie" (l'Algérie). A titre individuel, des militants du PCF, comme Alban Liechti, refusent de partir sous les drapeaux. Gênée, la presse communiste n'en souffle mot - elle ne rompra le silence que deux ans plus tard.

En attendant, le PCA est passé à la lutte armée. En juillet 1956, ses membres sont intégrés à titre individuel à l'appareil militaire du FLN. Le PCF est embarrassé. En France, ceux de ses militants qui décident de soutenir les réseaux FLN le font en marge du parti. En février 1957, Maurice Thorez indique que, pour le PCF, l'Algérie n'est plus une "nation en formation" : "Nous parlons à juste raison du fait national algérien", explique-t-il. Mais il n'y a pas de soutien au FLN.

La presse communiste dénonce l'usage de la torture, sous laquelle périt un jeune membre du PCA, Maurice Audin, et que subit Henri Alleg, également membre du PCA. L'arrivée au pouvoir de Charles de Gaulle, le 13 mai 1958, et l'apparition de l'OAS amèneront le PCF à s'engager davantage. Le 8 février 1962, huit militants meurent étouffés contre les grilles du métro Charonne à Paris lors de la charge policière qui disperse la manifestation pour la "paix en Algérie et contre l'OAS".

Caroline Monnot
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Message par emma-louise » 29 Oct 2004, 01:58

Rouge cette semaine ( =D> abonnez vous ! )
a écrit :Cinquante ans après

La guerre d’Algérie n’est pas finie



Le 1er novembre 1954 débutait la guerre de libération algérienne. En divers points du territoire, en zones urbaines aussi bien que dans les campagnes, le Front de libération nationale-Armée de libération nationale (FLN-ALN) lançait une série d’opérations armées. L’indépendance ne sera acquise que huit ans plus tard, en 1962, au prix d’un conflit sanglant dont les traces persistent aujourd’hui, dans la métropole coloniale aussi bien qu’à travers le chaos présent en Algérie. Nous avons rencontré Benjamin Stora, historien et enseignant à l’Inalco1. Parmi ses ouvrages les plus récents : « Algérie 1954 » (Le Monde / l’Aube, 2004) ; « La Guerre d’Algérie, 1954-2004 » (en codirection avec Mohammed Harbi, Robert Laffont).

• Cinquante ans après, quel retour sur l’insurrection algérienne ? Benjamin Stora - L’insurrection algérienne contre la présence coloniale française a marqué les esprits, car elle se situe dans le contexte particulier de la décolonisation et de l’apparition du tiers-mondisme. Elle intervient entre deux événements majeurs des années 1950, la Révolution indochinoise, avec la défaite française de Dien Bien Phû en 1954, et la Révolution cubaine. Beaucoup d’espoirs ont été placés dans ce processus de décolonisation, principalement en ce qui concerne deux aspects : le règlement de la question nationale et la possibilité d’améliorer la question sociale, de sortir du sous-développement. La question nationale a commencé à être réglée par la Révolution algérienne contre la colonisation, même si elle persiste encore aujourd’hui, par exemple sous la forme de la question berbère ou des usages de la langue française par rapport à l’arabe ; mais la question sociale ne l’a pas été vraiment, ce qui a suscité beaucoup de déceptions et pose le problème de la nature autoritaire du pouvoir politique. Ce problème social et démocratique s’explique en partie par la longueur de la guerre, huit ans, qui a entraîné une véritable « brutalisation » de la société algérienne. Deux millions de paysans ont été déplacés, des dizaines de villages ont été détruits, des centaines de milliers d’Algériens se sont réfugiés à la frontière, sans oublier bien sûr les disparitions physiques, l’utilisation du napalm, la torture systématisée... Le paysage agricole a été dévasté, ce qui explique aussi les difficultés de l’Algérie indépendante. Le départ des Européens d’Algérie a désorganisé la société, les enseignants notamment étant nombreux parmi eux. A l’intérieur du mouvement nationaliste algérien, la guerre a entraîné une montée en puissance du rôle de « l’armée des frontières » qui s’est affirmée au détriment des maquis de l’intérieur, et la mise à l’écart des dirigeants de la fédération de France du FLN, lesquels avaient été au contact du mouvement ouvrier français. Au moment de l’indépendance, l’armée a ainsi pu éliminer le pouvoir civil symbolisé par le gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).

Le départ des « pieds-noirs » était-il inéluctable ? B. Stora - Les Algériens eux-mêmes ont été surpris par ces départs massifs. Rétrospectivement, quand on observe la fin de l’apartheid en Afrique du Sud par exemple, on se dit qu’il aurait été possible de concevoir une autre société, plus multiculturelle. Mais cela n’a pas été possible en Algérie car le système colonial ancien n’admettait aucune évolution (les Algériens de confession musulmane étaient considérés comme des « sujets » dans ce qui était caractérisé comme... des départements français !) et la guerre a été trop dure entre les communautés. D’autre part, les Européens d’Algérie n’avaient pas de représentants politiques capables de tendre la main aux Algériens et de construire une société ensemble : seuls les ultras de l’Algérie française portaient leur voix et les « libéraux » étaient marginalisés. Le cas d’Albert Camus est révélateur : il a proposé, en 1956, de négocier une trêve avec le FLN et a été rejeté violemment par la communauté pied-noire. Camus n’était pas pour l’indépendance de l’Algérie, il cherchait une solution intermédiaire, de type fédéral, rejetée par les deux camps. Car la guerre a entraîné aussi une radicalisation du FLN, qui est resté figé sur des positions idéologiques très communautaires, à base de religiosité islamique. Le Front n’a jamais vraiment envisagé la dissociation entre nationalité algérienne et appartenance à la communauté musulmane. Il manquait peut-être également au FLN une personnalité hors du commun, comme Nelson Mandela en Afrique du Sud, pour surmonter tous ces problèmes, organiser la réconciliation, sans pour autant oublier.

Quels sont aujourd’hui encore les effets en France de la guerre d’Algérie ? B. Stora - Il y a eu transfert d’une mémoire coloniale, qui pèse toujours sur la société française et les mentalités, vers le racisme anti-arabe. La France n’a pas réussi à dépasser le passé colonial, à le regarder en face, ce qui est très mal vécu par une partie de la jeunesse d’origine immigrée. D’autre part, le problème du rapport entre le religieux et le politique, question dont la gauche devrait s’emparer à bras-le-corps, n’a pas été réglé, placé au second plan durant la guerre d’Algérie par l’urgence de la question nationale. Une conception séculière et non communautaire du politique devrait prévaloir. Le racisme colonial contre les populations immigrées et le communautarisme ethnico-religieux de repli sont les deux héritages parallèles de la période coloniale. Ils restent les deux questions à résoudre. Ces deux attitudes risquent de conduire à une guerre de mémoires autour de la guerre d’Algérie, comme je l’avais suggéré dans mon ouvrage, La Gangrène et l’oubli, publié en 1991, au moment des batailles pour l’égalité des droits et contre le racisme.

Faut-il commémorer, et comment le faire, la guerre d’Algérie aujourd’hui ? B Stora - Il ne faut pas s’enfermer dans des pratiques de commémoration qui « muséifient » la mémoire. Une mémoire de ressassement, de rumination, peut être dangereuse, conduire à une volonté de revanche. La seule mémoire qui vaille est une mémoire citoyenne, qui se projette vers l’avenir et se demande comment ne pas répéter les erreurs coloniales du passé. La date choisie par Chirac pour commémorer la guerre d’Algérie (le 5 décembre) ne correspond à rien, évacue l’histoire. La mémoire ne peut s’accrocher qu’à des événements historiques : la date du 19 mars, celle des accords d’Evian de mars 1962, un temps adoptée par la gauche avant qu’elle ne fasse machine arrière, semble être la meilleure. La question de l’Irak, le conflit israélo-palestinien prouvent aujourd’hui que l’importance de la question nationale n’a pas encore été comprise. Un bon usage de la mémoire permettrait d’éviter de rejouer les situations : on ne règle pas les questions nationales et le passage à la démocratie politique par l’installation d’armées étrangères. De tels agissements ne peuvent conduire qu’au renforcement du sentiment nationaliste et/ou religieux, à la violence extrême, à la destruction du champ politique.

Propos recueillis par Sylvain Pattieu

1.Institut national des langues et civilisations orientales.



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Un révélateur à gauche

Quand éclate l’insurrection algérienne, le 1er novembre 1954, personne ne connaît le Front de libération nationale (FLN). La gauche est confrontée à deux questions : faut-il soutenir les revendications algériennes et, si oui, qui soutenir ? A la première question, la SFIO (Parti socialiste) répond en défendant l’Algérie française. Guy Mollet, devenu président du conseil en 1956, après une campagne conduite sur un programme promettant « la paix en Algérie », se range du côté des ultras d’Alger et accorde les pouvoirs spéciaux à l’armée. Du côté du PCF, le mot d’ordre est « Paix en Algérie », mais il n’est nullement fait mention de l’indépendance et les députés communistes votent les pouvoirs spéciaux en 1956. Si les dirigeants interdisent tout soutien actif au FLN et tentent, jusqu’au début des années 1960, de stopper les initiatives publiques et manifestations en faveur de l’indépendance, de nombreux militants apportent leur soutien à la lutte du peuple algérien, par le biais du soutien aux prisonniers ou en désertant, tel Alban Liechti. Le PCF paie pourtant un lourd tribut militant (huit morts) lors de la manifestation du 8 février 1962 contre l’Organisation armée secrète (OAS, structure clandestine de l’extrême droite acharnée à défendre « l’Algérie française », qui mène alors une vaste campagne terroriste, en Algérie comme en « métropole »), au métro Charonne à Paris. Le « Parti » ne reste alors plus silencieux, comme il l’avait fait après la répression sauvage de la manifestation du 17 octobre 1961, appelée par le FLN-France dans la capitale, bien que plusieurs dizaines d’Algériens aient trouvé la mort. L’extrême gauche est la première à soutenir l’indépendance de l’Algérie. Les libertaires de la Fédération communiste libertaire (FCL) sont les premiers à coller des affiches pour l’indépendance, dès novembre 1954, et leur organisation disparaît sous les coups de la répression en 1957. Les militants de la Fédération anarchiste (FA) condamnent la répression de l’Etat français mais refusent de choisir entre une forme d’Etat et une autre. Côté trotskyste, les liens étaient anciens avec Messali Hadj, leader historique du nationalisme algérien. C’est la tendance « lambertiste » qui conserve des liens privilégiés avec lui, et soutient son parti, le Mouvement national algérien (MNA), dans lequel elle voit un « nouveau parti bolchevique ». Le MNA disparaît vers 1958, victime d’une guerre fratricide avec le FLN et de la compromission d’une partie de ses élites avec le colonialisme français. La tendance « pabliste » (du nom de Michel Raptis, dit Pablo, alors l’un des principaux dirigeants de la IVe Internationale), réunie en France autour de Pierre Frank choisit le soutien privilégié au FLN, considéré comme le véritable « moteur de la Révolution algérienne ». Pablo organise un soutien international qui culmine dans deux opérations : la fabrication de fausse monnaie française pour le compte du FLN (ce qui lui vaut un procès transformé en tribune politique et quelques mois de prison) et l’implantation d’une usine d’armes clandestine au Maroc. FCL, « lambertistes » et « pablistes » participent aussi aux activités plus classiques des réseaux de « porteurs de valise » (transport d’agent du FLN, faux papiers, soutien aux prisonniers évadés). D’autres groupes d’extrême gauche, Socialisme ou barbarie ou Voie communiste, apportent aussi un soutien pratique ou politique. A un large niveau, l’extrême gauche de l’époque a peu d’influence, mais le Parti socialiste unifié (PSU), issu de secteurs de la SFIO en rupture avec la politique coloniale et d’autres petits courants de gauche ou d’extrême gauche, parvient à organiser, avec l’Unef, les premières manifestations massives contre la guerre. L’indépendance obtenue, certains militants s’installent en Algérie dans l’espoir d’y construire le socialisme, et deviennent des « pieds-rouges ». Parmi eux, Simonne Minguet, Pierre Avot-Meyers, Louis Fontaine (ancien appelé en Algérie, puis ouvrier dans l’usine d’armes du Maroc aux côtés des Algériens), et Pablo, qui devient conseiller d’Ahmed Ben Bella et participe à l’engagement de la réforme agraire. La plupart d’entre eux seront expulsés d’Algérie en 1965, lors du coup d’Etat de Boumedienne.

S. P.
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Message par artza » 01 Nov 2004, 08:56

Contrairement à ce qui est le plus souvent affirmé la politique du PC ne fut nullement le fruit inattendu d'une erreur due à on ne sait trop quelle cécité politique subite.
Le PC depuis son départ du gouvernement provoqué contre son grès par les grévistes de Renault-Billancourt en 47 et son retour rendu impossible pour cause de guerre froide n'aspirait qu'à une chose rejoindre le melting pot des partis ordinaires de la bourgeoisie.
Le vote de ces pouvoirs spéciaux était une occasion rêvée pour tenter cette politique soutenir un gouvernement à direction socialiste issue d'une majorité parlementaire récemment élue sur un programme de "paix en Algérie"...la suite est connue et ces gens la connaissaient d'avance.

Pour les trotskystes c'est une autre histoire.
Il faut tout de même redire que la taille extrêment réduite des groupes trotskystes rendaient la connaissance de leur politique inaccessible et complétement inconnue de la grande masse des travailleurs, et de tous.

Les trotskystes, tous, ont constamment affirmés le droit des peuples colonisés par la France à l'indépendance ils ont toujours été solidaires des luttes de ces peuples et des militants généralement nationalistes qui les incarnaient.
Ensuite pour revenir à ce que dit Sandino les deux PCI (Lambert et Frank) ont eu la même politique soutenir les nationalistes politiquement.
Les nationalistes étaient divisés en deux FLN et MNA.

C'était une chance ça permettait à chaque PCI d'avoir son favori et en prime de critiquer l'opportunisme voir la trahison de son rival.
Dans cette critique chacun avait en gros raison contre l'autre.

Les trotskystes issus du PCI hâtivement reconstitué en 44 sur une base consensuelle fondée sur l'absolution mutuelle des fautes passées et l'excommunication des empêcheurs d'unifier en rond ne pouvaient ensemble puis séparement que reproduire les mêmes erreurs conduisant aux mêmes errances s'enlisant dans les mêmes impasses.
Pour aider à ça il suffisait de baptiser le mouvement messaliste "plébéïen, prolétarien, lié au mouvement ouvrier français" pour les uns ou de découvrir un FLN devenu miraculement "socialiste" au creux de la vallée de la Soumann pour les autres.
artza
 
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Message par Valiere » 02 Nov 2004, 16:02

Frappons à gauche! frappons à droite! et au centre que s'est -il passé? Quel a été la position de Voix ouvrière? que je ne situe pas au centre politique.
Je pense que les pablistes ont eu tort de soutenir inconditionnellement le FLN mais j'apprécie que la IV ait mis en place un ravitaillement militaire, voire une usine de mortiers !
Valiere
 
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Message par emma-louise » 02 Nov 2004, 17:45

(rojo @ jeudi 28 octobre 2004 à 16:43 a écrit : Etrange de pointer l'embarras du PCF, même si ils ont effectivement étés de bons soutiens du gouvernement colonial, en occultant complètement le fait que ce sont les socialistes qui portent l'écrasante responsabilité de la guerre d'Algérie et de son million de morts
Non , rassure toi , camarade , ce n'est pas "étrange" de ma part , ni anti-ouvrier par rapport au PCF , mais je pense qu'un authentique Parti Communiste dans la métropole aurait du avoir une position plus rapide et claire pour l'indépendance et la défaite de notre(sic) impérialisme. La position molle_pacifiste, complice des socialistes et refusant de reconnaitre une nation algérienne a fait des dégats catastrophiques et en France et en Algérie où de nombreux (relativement , bien entendu) militants ou proches ( du PCA ou du PCF ) ont agi seuls et héroiquement. Oui , j "en veux" au PCF, co-responsable de la violence de cette guerre par sa ligne politique dans les premiers mois de l'insurrection.
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Message par artza » 02 Nov 2004, 18:06

a écrit :la position molle, pacifiste et complice des socialistes


Alors là non. Le Parti socialiste a mené la guerre d'Algérie depuis les postes ministériels qu'il n'a cessé d'occuper jusqu'en 58.
Les Mollet ( président du conseil), Lacoste (ministre résident en Algérie), Lejeune (secrétaire d'état à la Défense), Pineau, Naegelen plus tôt qui fut gouverneur général.
Ils ont envoyé le contingent. Couvert la torture en la niant. Bombardé et largué les paras sur Suez et Port-Saïd.

Pour finir Mollet c'est traîné à Colombey supplié De Gaulle de revenir aux affaires pour "nous" protéger des paras et des factieux d'Alger.
Déjà le vote Chirac décidément une manie!
En remerciement Mollet fut ministre du premier gouvernement De Gaulle et appella à voter oui au référendum au nom de la SFIO qui se vantait d'être "l'avant-garde de la Vème république".


Le PC a voté les pouvoirs spéciaux à Mollet. En 45 il était au gouvernement au moment de Sétif et Guelma. C'est indigne d'un PC et rien que celà le juge définitivement.

Pour le reste de 56 à 62 le PCF à propos de l'Algérie eut une politique "molle, pacifiste" (Paix en Algérie).
artza
 
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