Staline, un demi-siècle d'oubli

Message par faupatronim » 05 Mars 2003, 16:01

Staline, un demi-siècle d'oubli
Les Russes préfèrent retenir les aspects positifs du dictateur, mort il y a cinquante ans.

Par Hélène DESPIC-POPOVIC
mercredi 05 mars 2003

42 % des Russes associent Staline au goulag. 36 % considèrent qu'il a fait «plus de bien que de mal». Moscou de notre correspondante


Cinquante ans après sa mort, les Russes continuent d'entretenir un rapport très ambigu avec Staline. Si 42 % associent le dictateur communiste au goulag, selon un sondage réalisé fin février par la Fondation de l'opinion publique (FOP), 36 % considèrent qu'il a fait «plus de bien que de mal». «Staline reste un tyran, explique le directeur de la FOP, Leonid Kertman, mais, quand on interroge les gens sur ses côtés positifs, ils citent la victoire dans la Seconde Guerre mondiale (35 %), le développement économique (22 %), l'ordre (22 %) et les avantages sociaux (8 %). La répression étant le seul côté négatif retenu, on voit que la liste de ses mérites est plus longue que celle de ses méfaits.»

Des chiffres guère différents de ceux obtenus l'an dernier par le Centre de recherche russe sur l'opinion publique (Vtsiom), qui donnait 38 % d'opinions favorables à Staline «Pour les jeunes, il est un mythe, relève Leonid Sedov, chercheur du Vtsiom. On ne parle plus de ses méfaits dans la presse. Peu de gens lisent les recherches historiques. Les masses n'entendent aucune critique contre Staline.»

Les commémorations de la bataille de Stalingrad en 1943, ont ravivé le mythe du «généralissime», dont on rappelle peu qu'il avait décimé l'état-major à l'aube de la guerre. Les anciens combattants ont même réclamé que l'on redonne son nom de Stalingrad à Volgograd, débaptisé après l'éclatement de l'URSS. Des publications ou des expositions ont en plus rendu une certaine légitimité au personnage, dont l'image n'a jamais été revisitée comme fut celle d'Hitler en Allemagne.

Perestroïka. «La déstalinisation, rappelle Sedov, s'est fait par vagues. Après le mouvement impulsé par Khrouchtchev, on a assisté à un mouvement contraire sous Brejnev. Un grand travail s'est fait avec et après la perestroïka. Aujourd'hui, le pouvoir ne veut pas traîner Staline dans la boue. Il pense qu'on ne peut pas refaire l'Histoire, qu'il faut l'accepter et la respecter, Staline inclus.»

A Boris Eltsine, l'homme de la rupture, a succédé Vladimir Poutine, l'homme de la continuité, incarnant la modernité aux yeux des libéraux, des hommes d'affaires et même de l'Occident, et le retour de l'ordre et de l'Etat fort chez les nostalgiques de l'URSS. Le retour à l'hymne soviétique et à l'étoile et au drapeau rouges dans l'armée, mesures prises par Poutine, «conforte ceux qui ont déjà une vision positive de Staline», estime Sedov. «La déstalinisation n'a pas laissé de traces durables dans la population ni chez les hommes politiques, déplore Boris Belenkine, responsable de Mémorial, l'association qui poursuit un travail de mémoire sur ces heures sombres. Toutes ces notions d'ordre et de pouvoir fort sont liées à Staline. Les partisans de la guerre en Tchétchénie se recrutent beaucoup parmi ses admirateurs.»

Panthéon. «Chacun comprend que nous avons failli à accomplir le désir de Staline de préserver la grande puissance», s'est exclamé samedi Guennadi Ziouganov, le leader communiste, lors d'un meeting célébrant le cinquantième anniversaire de la mort du petit père des peuples. Dans leur panthéon, les communistes délaissent la figure de Lénine au profit de Staline. «En 1990, 8 % d'entre eux donnaient la préférence à Staline. En 2002, on est passé à 22 %. Cette dynamique illustre le fait que les communistes ont abandonné le marxisme-léninisme pour la ligne patriotique nationaliste», commente Sedov.

Les nostalgiques se trouvent surtout parmi les plus âgés et les laissés-pour-compte de la transition. «Le mécontentement actuel joue en faveur de Staline, remarque Leonid Kertman. Plus une personne considère que sa vie est dure, plus elle a du mal à dire qu'il a fait quelque chose de mauvais.».

>.Une quarantaine de victimes de la répression soviétique ont présenté, hier à Moscou, le site stalin.memo.ru, qui publie pour la première fois la liste de 40 000 personnes fusillées en 1937-1938, diffusée par Memorial, qui a obtenu l'autorisation des Archives présidentielles.
faupatronim
 
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