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Le Parti communiste français revendique 7 000 nouveaux adhérents depuis janvier
Ils ont pris place timidement dans une grande salle de la fédération du Parti communiste de Seine-Saint-Denis à Pantin. Adhérents depuis quelques jours ou quelques mois, ils étaient conviés à une soirée de formation. Comme les 7 000 autres nouveaux militants que le PCF assure avoir recrutés depuis janvier.
Bénéficiant de l'effet campagne contre la Constitution européenne, le PCF attire donc à nouveau. Ces recrues sont plutôt jeunes en majorité trentenaires et "en quête de sens" , explique-t-on, place du Colonel-Fabien, au siège du parti.
Après la période noire du lendemain de la défaite d'avril 2002 le PCF revendiquait seulement 125 000 encartés , les effectifs sont remontés à 138 000 adhérents. Le parti en comptait toutefois le double dix ans plus tôt.
Jonathan est venu parce qu'il trouve que "le parti pose de bonnes questions". Ce comédien de 27 ans s'est inscrit voici deux semaines via le site Internet du PCF. "Sur tous les sites de gauche visités, c'était le plus coloré, vivant et plein de publicités de journaux", explique le jeune homme, qui avoue que "le rouge est -sa- couleur préférée". N'ayant jamais milité auparavant, il a été initié à la politique par son frère, étudiant à Sciences Po et qui "a lu tout Karl Marx".
Habitant à Saint-Ouen, une municipalité communiste, le PCF lui semble également le "plus efficace" dans sa politique culturelle municipale. "Je n'aime pas trop son discours anticapitaliste, je ne comprends pas trop ce que ça veut dire", admet Jonathan, qui vient plutôt chercher "des amis pour discuter politique".
Mohammed (36 ans), lui, a été séduit quand la secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet, est venue soutenir une grève de la faim dans son usine. Ouvrier chez DHL, la société de courrier express, à Roissy, il se revendiquait jusqu'alors "naturellement de gauche mais apolitique". Le délégué CGT attendra encore quelques mois pour prendre sa carte au parti. Après une action à la Romainville, une pâtisserie industrielle "où les ouvriers travaillaient dans des conditions moyenâgeuses", il est interpellé par la police. Et libéré sur intervention du PCF.
"J'en ai eu plein les yeux comme un enfant. J'ai compris que la seule action syndicale ne suffisait pas", raconte-t-il. Du parti, il dit apprécier les valeurs humanistes, la défense des immigrés "comme aucun parti ne l'a fait" et les "actions concrètes sur le terrain".
C'est au soir du 29 mai, après la soirée électorale et la victoire du non au référendum, que Muriel a pris sa décision. Présidente d'une régie de quartier à Montreuil, fonctionnaire au Trésor public, cette mère de 49 ans avait animé un collectif du non sur son lieu de travail. Mais elle manquait de formation, d'un discours politique "sérieux" . "Je me sentais trop légère", admet-elle.
Elle trouvait les communistes montreuillois "ouverts", "en parfaite harmonie avec ses idées d'égalité et de fraternité". Et, plus important encore à ses yeux, "sans volonté de pouvoir". Depuis, Muriel sent que son engagement l'a changée : "Je vais plus au bout des choses", assure-t-elle.
Ahmed est venu "par révolte". Ouvrier chez PSA-Peugeot-Citroën, ce fils d'immigré djiboutien avait toujours voté communiste mais il ne voulait pas s'engager au-delà de son mandat syndical à la CGT pris en 2001 .
"SUR NOS PLATES-BANDES"
Quand, voici six mois, un autre délégué l'a invité à une réunion politique, il s'est laissé entraîner, pensant aller écouter le PCF. Il s'est retrouvé au milieu de militants de Lutte ouvrière.
"Ils parlaient de communisme, collaient au parti tout en le critiquant", se souvient-il, encore "estomaqué". "J'ai réagi en adhérant -au PCF- le lendemain : je ne supportais pas que d'autres groupuscules marchent sur les plates-bandes du Parti communiste." Depuis, il a fait du recrutement son dada. "Il ne faut pas abandonner les portes des usines à la LCR ou à LO. Pour convaincre les ouvriers, il faut leur expliquer qui sont les vrais communistes", continue le nouveau militant, qui dit avoir "feuilleté pas mal de brochures pour assurer".
"Le PCF, c'est ringard", s'est entendu répondre Elise quand elle a dit à sa mère qu'elle s'était inscrite sur le site Internet des communistes. La lycéenne de 17 ans est pourtant persuadée que c'est le parti qu'il lui faut après avoir répondu à "Polytest ", questionnaire qui vous dit "de quel parti vous êtes le plus proche" : Elise avait "le profil PCF". Elle a donc acheté L'Hum anité , l'a lu avec plaisir : "Je trouve ça drôle et pertinent sur l'analyse du capitalisme."
La lycéenne raconte qu'elle aimerait que "les choses changent vite, mais c'est peut-être un rêve de petite fille". Et explique qu'elle veut s'engager parce qu'elle en a "marre de cette société". Elise prendra sa carte dès qu'elle aura rencontré le secrétaire de section d'Aulnay-sous-Bois. Malgré les railleries de sa mère.
Sylvia Zappi