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Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 20 Juil 2020, 07:03
par artza
C'est la première fois que je lis qu'une tendance trotskyste qui ne fut pas partie prenante de la proclamation de la IVème s'en félicite.

Au moins c'est plus honnête qu'en France où ceux qui n'en furent pas accusent ceux qui en étaient de ne pas en être :lol:

Tout ça serait la faute à Cannon?
J'en doute.
Cannon ne représentait-il pas le point de vue de Trotsky?

L'article accuse l'autre tendance anglaise de "pacifisme stérile" ??

La politique de Cannon (swp) pendant la guerre est connue. Procès de Minneapolis.
On connait la critique sévère de cette politique par Munis.


En France on connait la brochure de la "IVème inter." rédigée par Barta, la lutte contre la deuxième guerre...

En Grande-Bretagne?


Autre chose la tendance Militant dans le parti travailliste ne fut-elle pas exclue suite à sa lutte contre la Poll tax, ce qui provoqua la formation du socialist party...en France la Gauche révolutionnaire maintenant partie prenante de LFI ce qui ne montre pas un ultra-gauchisme forcené.

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 20 Juil 2020, 09:44
par Gayraud de Mazars
Salut camarade Artza,

Pour répondre à une partie de tes questions...

A signaler que Edward « Ted » Grant, de son vrai nom Isaac Blank, né le 9 juillet 1913, en Afrique du Sud et mort le 20 juillet 2006, en Grande-Bretagne, "Ted" Grant qui était issu d'une famille anglophone et juive en Afrique du Sud, aura eu sans doute de cet héritage, à penser lui aussi, à l'échelle de la planète et rester toute sa vie, un internationaliste prolétarien convaincu...

artza a écrit :En France on connait la brochure de la "IVème inter." rédigée par Barta, la lutte contre la deuxième guerre... En Grande-Bretagne ?


Ted Grant.jpg
Ted Grant édition
Ted Grant.jpg (25.44 Kio) Consulté 2376 fois


Ceci est le premier volume des écrits de Ted Grant (1938 - 1942), le second volume traite de la période (1943 - 1945) le tout en anglais aux éditions Wellred Books. Le premier tome couvre la période de 1938 à 1942, date à laquelle il a participé à la constitution des forces du trotskysme en Grande-Bretagne. Au cours des premières années de la Seconde Guerre mondiale, Ted est devenu rédacteur en chef du Socialist Appeal et secrétaire politique de la Ligue internationale des travailleurs (WIL). Dans ce rôle, Ted est devenu le principal théoricien du mouvement trotskyste britannique.

Sa participation au mouvement révolutionnaire s'étendra sur une période allant de 1928, quand il fut initié au marxisme, jusqu'à sa mort en 2006. Pour tous ceux qui le connaissaient, il était une figure vraiment remarquable et inspirante.

Les articles et documents contenus dans ce premier volume de ses Écrits ont coïncidé avec l'émergence de la WIL. Ce volume actuel couvre une période décisive de l'histoire. Ce fut la période la plus éprouvante pour le trotskysme britannique et mondial. Alors qu'Hitler occupait l'Europe, la WIL était une des seules sur le continent à appliquer la politique militaire prolétarienne qui avait été esquissée par Trotsky. C'est ce qu'elle a réussi à faire de la manière la plus réussie, permettant à la WIL d'établir une base prolétarienne importante. Nous ne publions ici que les articles signés par Ted ou rédigés en sa qualité de secrétaire politique de la WIL. Il aurait certainement écrit la grande majorité des éditoriaux de Socialist Appeal, mais ceux-ci n'ont pas été inclus. Ces écrits constituent une partie essentielle et riche de l'héritage théorique du marxisme, qui peut servir à éduquer la nouvelle génération de travailleurs et de jeunes qui entrent dans l'activité politique en cette période de profonde crise capitaliste.


Pour retrouver et découvrir les textes en anglais de Ted Grant du tome 1 (1938 - 1942)...

https://www.marxist.com/ted-grant-writings.htm

Fraternellement,
GdM

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 20 Juil 2020, 11:01
par com_71
Wellred books a écrit : la WIL était une des seules sur le continent à appliquer la politique militaire prolétarienne qui avait été esquissée par Trotsky.


Et qui d'autre ? En situation de le faire ?
Pour parler sérieusement de ces questions il faudrait autre chose que des formules à l'emporte-pièce.
Et d'abord relecture et étude des textes.
Ce qui a été appelé de manière bien grandiloquente "Politique Militaire Prolétarienne" débute pour Trotsky comme une réponse d'agitation face à la conscription.
...Il est très important de comprendre que la guerre n'annule ni ne diminue l'importance de notre programme de transition. C'est le contraire qui est vrai. Le programme de transition est un pont entre la situation présente et la révolution prolétarienne. La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens. La caractéristique de la guerre est qu'elle accélère le développement. Cela signifie que nos mots d'ordre révolutionnaires de transition deviendront de plus en plus réels, effectifs, importants avec chaque nouveau mois de guerre. Nous n'avons bien entendu qu'à les concrétiser et les adapter aux conditions. C'est pourquoi dans votre premier paragraphe, j'éliminerais le mot “ modifier ” parce qu'il peut donner l'impression que nous voulons modifier quelque chose qui a un caractère de principe.

Nous sommes absolument partisans de l'entraînement militaire obligatoire et, de la même façon, du service militaire. Service militaire ? Oui. Par l'État bourgeois ? Non. Nous ne pouvons pas confier cette tâche, comme toute autre, à l'État des exploiteurs. Dans notre propagande et notre agitation, il nous faut différencier très nettement ces deux questions. C'est‑à‑dire, ne pas combattre la nécessité pour les ouvriers d'être de bons soldats et de construire une armée basée sur la discipline, la science, des corps solides, etc., y compris le service militaire, mais contre l'État capitaliste qui abuse de l'armée au compte de la classe exploiteuse. Dans votre paragraphe quatre, vous dites : “ Une fois que le service militaire est passé dans la loi, nous cessons de lutter contre lui mais continuons notre lutte pour l'entraînement militaire, etc. ” Je préférerais dire : “ Une fois que le service militaire est passé dans la loi, sans cesser de lutter contre l'État capitaliste, nous concentrons notre lutte pour l'entraînement militaire, etc.

Nous ne pouvons nous opposer à l'entraînement militaire obligatoire par l'État bourgeois, exactement comme nous ne pouvons nous opposer à l'éducation obligatoire par l'État bourgeois. L'entraînement militaire est à nos yeux une partie de l'éducation. Nous devons lutter contre l'État bourgeois : il abuse dans ce domaine comme dans les autres.

Il nous faut bien entendu lutter contre la guerre, non seulement “ jusqu'au tout dernier moment ”, mais pendant la guerre aussi, quand elle a commencé. Il nous faut cependant donner à notre combat contre la guerre son sens révolutionnaire plein, en nous opposant et en dénonçant impitoyablement le pacifisme. L'idée très simple et très grande de notre combat contre la guerre, c'est : “ Nous sommes contre la guerre, mais nous aurons la guerre si nous ne sommes pas capables de renverser les capitalistes.

Je ne vois pas de raison de renoncer au mot d'ordre de référendum du peuple sur la guerre [1]. C'est un mot d'ordre excellent pour démasquer la futilité de leur démocratie sur une question aussi vitale que la guerre.

Je ne crois pas que la revendication des milices ouvrières doive être éliminée par celle de l'entraînement militaire pour tous. L'approche de la guerre et la guerre elle‑même, avec la montée des sentiments chauvins, vont inévitablement provoquer des pogroms contre les syndicats, les organisations et journaux révolutionnaires, etc. Nous ne pouvons renoncer à nous défendre. L'entraînement militaire pour tous ne peut que nous faciliter la création de milices ouvrières...

https://www.marxists.org/francais/trots ... 400709.htm

Parallèlement Trotsky n'avait pas renoncé au défaitisme révolutionnaire :
Pour créer une situation révolutionnaire, disent les sophistes du social-patriotisme, il faut porter un coup à Hitler. Pour remporter une victoire sur Hitler, il faut soutenir les démocraties impérialistes. Mais si, pour sauver “ les démocraties ”, le prolétariat renonce à une politique révolutionnaire indépendante, qui, au juste, utiliserait une situation révolutionnaire naissant de la défaite de Hitler ? Il n'a pas manqué de situations révolutionnaires dans le dernier quart de siècle. Mais il a manqué un parti révolutionnaire capable d'utiliser une situation révolutionnaire. Renoncer à préparer un parti révolutionnaire sous prétexte de provoquer une “ situation révolutionnaire ”, c'est conduire les ouvriers au massacre, les yeux bandés.

Du point de vue d'une révolution dans un pays donné, la défaite de son gouvernement impérialiste est incontestablement un “ moindre mal ”. Les pseudo-internationalistes refusent cependant d'appliquer ce principe aux démocraties vaincues. En revanche, ils interprètent la victoire de Hitler comme un obstacle, non pas relatif, mais absolu sur la voie de la révolution en Allemagne. Ils mentent dans les deux cas.

https://www.marxists.org/francais/trots ... 400630.htm

Sous réserves de vérifications, il semble me rappeler que la politique de la WIL tordait dans l'autre sens le bâton planté par Trotsky avec des formules du style "Pour assurer la victoire contre Hitler il faut...", tout en appelant au "Labour to power" !
http://www.billhunterweb.org.uk/article ... 941_p3.pdf

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 20 Juil 2020, 14:34
par com_71
Workers’ International News, February 1941 a écrit :Le chemin vers les masses consiste à leur montrer une véritable alternative, une véritable lutte contre le danger d'une victoire de l'hitlérisme de l'étranger et du pays. Acceptant l'argument des dirigeants travaillistes selon lequel il est nécessaire de combattre l'hitlérisme, nous devons souligner qu'il est impossible de le faire sous la direction de la classe capitaliste qui doit inévitablement conduire à la victoire d'Hitler ou d'un Hitler ou Pétain britannique. Le terrain peut être coupé sous les pieds des dirigeants travaillistes en exigeant qu'ils prennent le pouvoir sur le programme de revendications énuméré ci-dessus. D'abord sur cette liste doit venir l'armement des travailleurs contre Hitler et la cinquième colonne capitaliste chez nous.

https://www.marxists.org/history/etol/n ... vasion.htm

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 20 Juil 2020, 18:01
par Oxley
Camarade,

L’organisation dirigée par Ted Grant en 1938 en Grande-Bretagne (WIL) était favorable à la création de la 4e Internationale, et voulait en faire partie. Cependant, Ted n’était pas d’accord avec la manière dont James Cannon voulait imposer une « unification » des diverses organisations britanniques se réclamant du « trotskisme », sans chercher à préalablement résoudre les divergences politiques importantes qui existaient entre elles. Trotsky lui-même a compris cette réticence et ne l’a pas remise en cause. Le RSP avait, effectivement, en opposition à Ted Grant, une attitude « pacifiste » concernant la montée du nazisme et n’avait pas de « politique prolétarienne militaire » telle que Trotsky préconisait. Ted disait que forcer une unification sans clarification politique ne donnerait qu'un éclatement ultérieur. Les mois suivants allaient lui donner raison : la section officielle de la 4e Internationale (RSL), qui a défendu une politique de « défaitisme révolutionnaire » dans la guerre contre Hitler, s’est rapidement désintégrée.

Fraternellement,

Greg Oxley

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 20 Juil 2020, 22:20
par com_71
Quand il insistait pour que le SWP prenne en compte la militarisation de la société, et de la période, en 1940, Trotsky ne prenait pas le parti d'un impérialisme contre l'autre, et il rappelait explicitement qu'il ne renonçait pas au "défaitisme révolutionnaire".

Que signifiait celui-ci d'ailleurs ? "La défaite de notre propre pays est un moindre mal..."
Moindre mal par rapport à la catastrophe que représenterait la solidarité du mouvement ouvrier d"un pays avec son propre impérialisme.
Trotsky 12 juin 1940 a écrit :Nous devons être tout à fait catégoriques dans la période qui vient. Nous devons stigmatiser Thomas comme le plus perfide ennemi. Nous devons dire que la guerre est inévitable. Bureaucrates ! Cette guerre signifie la mort de vos syndicats. Il nous faut faire les prédictions les plus terribles sous les couleurs les plus sombres. Nous devons nous prononcer catégoriquement pour la dictature du prolétariat. Nous devons rompre complètement avec les pacifistes. Il n'y a pas très longtemps, tout le monde était contre la guerre. Toute confusion avec les pacifistes est cent fois plus dangereuse qu'une confusion temporaire avec les militaristes bourgeois. Nous préparons l'arène nouvelle où nous abattrons les militaristes. Les pacifistes aident à duper les ouvriers et les faire aider les militaristes. Nous devons le prédire, [Norman] Thomas va soutenir la guerre — la guerre est inévitable. Nous devons apprendre à manipuler les armes. Quant à ceux qui cherchent à lui échapper — y compris de notre propre parti — nous devons en parler avec le plus grand mépris. Ce sont des déserteurs. Exactement comme les objecteurs de conscience qui acceptent tout en temps de paix, mais ne veulent pas accepter la guerre. Ils sont des déserteurs de leur classe et de la révolution.

https://www.marxists.org/francais/trots ... 00612b.htm

Trotsky 25 juin 1940 a écrit :Pour créer une situation révolutionnaire, disent les sophistes du social-patriotisme, il faut porter un coup à Hitler. Pour remporter une victoire sur Hitler, il faut soutenir les démocraties impérialistes. Mais si, pour sauver “ les démocraties ”, le prolétariat renonce à une politique révolutionnaire indépendante, qui, au juste, utiliserait une situation révolutionnaire naissant de la défaite de Hitler ? Il n'a pas manqué de situations révolutionnaires dans le dernier quart de siècle. Mais il a manqué un parti révolutionnaire capable d'utiliser une situation révolutionnaire. Renoncer à préparer un parti révolutionnaire sous prétexte de provoquer une “ situation révolutionnaire ”, c'est conduire les ouvriers au massacre, les yeux bandés.
Du point de vue d'une révolution dans un pays donné, la défaite de son gouvernement impérialiste est incontestablement un “ moindre mal ”. Les pseudo-internationalistes refusent cependant d'appliquer ce principe aux démocraties vaincues. En revanche, ils interprètent la victoire de Hitler comme un obstacle, non pas relatif, mais absolu sur la voie de la révolution en Allemagne. Ils mentent dans les deux cas...
En conséquence, la tâche du prolétariat révolutionnaire ne consiste pas à aider les armées impérialistes à créer une “situation révolutionnaire” mais à préparer, fondre et tremper ses rangs internationaux pour des situations révolutionnaires dont il ne manquera pas.
La nouvelle carte de guerre d'Europe n'invalide pas les principes de la lutte de classe révolutionnaire. La IVe Internationale ne change pas son cap.

https://www.marxists.org/francais/trots ... 400630.htm

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 21 Juil 2020, 08:08
par com_71
Par ailleurs, au delà du positionnement différent sur les questions de militarisation. T. Grant se retrouve bien souvent à réagir au même diapason politique que les autres dirigeants de l'Internationale.
L'éternel "Labour au pouvoir" a déjà été cité, on lira aussi ici
http://www.billhunterweb.org.uk/article ... t_1944.pdf
que la Libération de Paris a été le fait d'une insurrection ouvrière armée... C'est donner la part un peu belle à l'apparition publique des FFI qu'on ne pouvait confondre avec les "ouvriers parisiens en armes". On n'est pas loin de la vision du PCI en France quand il se réclame de la Résistance.

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 27 Juil 2020, 16:23
par Gayraud de Mazars
Salut camarades,

Il y a 15 ans tout juste, disparaissait le camarade Pierre Broué, retour sur le militant et l'historien...

Hommage à Pierre Broué
Par Greg Oxley, sur le site de La Riposte

https://www.lariposte.org/2005/08/homma ... rre-broue/

Image

Pierre Broué nous a quitté dans la nuit du 25 au 26 juillet 2005. Le marxisme révolutionnaire a ainsi perdu l’un de ses plus grands représentants. Pierre a consacré sa vie entière à la cause des opprimés de ce monde et à la défense des idées du marxisme.

Résistant contre l’occupant nazi pendant la seconde guerre mondiale, Pierre était membre du Parti Communiste. En 1943, Staline ordonna la dissolution de l’Internationale Communiste, consacrant ainsi l’abandon de l’internationalisme et la politique réactionnaire du « socialisme dans un seul pays. »

Opposé à la politique nationaliste et réformiste adoptée par les partis communistes sous la pression du régime stalinien de Moscou, Pierre se tourna vers la Quatrième Internationale, qui avait été fondée en 1938 par l’Opposition de Gauche, dirigée par Trotsky. La nouvelle internationale se basait sur la théorie, les principes et le programme de l’internationalisme révolutionnaire, tout comme l’Internationale Communiste jusqu’à l’arrivée au pouvoir de Staline, en 1924.

Au cours de la deuxième moitié du XXe siècle, Pierre Broué, devenu un écrivain et un historien accompli, a fait plus que quiconque en France pour défendre et promouvoir les idées internationalistes du marxisme authentique, que les staliniens voulaient enterrer sous une montagne de calomnies et de mensonges. Le fait d’avoir rassemblé, traduit et publié les écrits de Trotsky, et de les rendre ainsi accessibles aux nouvelles générations de révolutionnaires, était en soi une oeuvre monumentale. Mais en outre, les écrits de Pierre sur l’histoire de l’Internationale Communiste, sur la résistance héroïque à la dégénérescence stalinienne de l’URSS, et sa biographie de Trotsky, constituent un trésor qui profitera grandement à tous ceux qui aspirent à comprendre le passé pour mieux lutter au présent contre le capitalisme.

J’ai rencontré Pierre Broué pour la première fois en août 2003. A ce moment-là, le petit-fils de Léon Trotsky, Esteban Volkov, séjournait chez moi, à Paris, au retour de notre conférence internationale à Barcelone. Pour Esteban, il était impensable de venir en France sans rendre visite à Pierre. Nous sommes donc allés ensemble à Grenoble, où nous l’avons retrouvé dans son appartement aux abords de la ville.

Cette première rencontre fut pour moi un événement tout à fait mémorable. Pierre avait été malade, et n’était évidemment pas au meilleur de sa forme. Et pourtant, on ne pouvait qu’être impressionné par son allure. Bel homme, grand et élégant, son visage exprimait de la dignité, de l’intégrité et du courage intellectuel.

Jusqu’à quelques mois avant cette première rencontre, Pierre n’avait que peu de connaissance directe des idées et du travail de notre mouvement international. C’est dans le cadre de ses recherches sur la lutte de l’Opposition de Gauche que l’on attira son attention sur un article d’Alan Woods traduit et publié par La Riposte. Il s’agissait d’A la mémoire de Valéry Sabline, qui racontait la véritable histoire de la mutinerie qui avait inspiré le film A la poursuite d’Octobre Rouge. La lecture de cet article incita Pierre à faire plus ample connaissance avec les idées et les orientations de La Riposte, ainsi qu’avec les écrits de Ted Grant et Alan Woods publiés sur le site international In Defence of Marxism. De sorte que, lors de notre rencontre à Grenoble, il s’était déjà fait une opinion assez nette de notre démarche.

Pierre était très enthousiaste à notre sujet. Il était particulièrement impressionné par les écrits de Ted Grant, qui se battait jusqu’aux années 60 pour défendre l’héritage théorique de Lénine et Trotsky contre les dérives de la « Quatrième Internationale », avant de rompre définitivement avec elle. Pierre considérait que ses propres idées coïncidaient avec celles défendues par In Defence of Marxism sur toutes les questions fondamentales, et voulait que l’on travaille ensemble sur la base de ces idées communes. Il fut convenu qu’il rencontrerait Alan Woods dès que possible. Malheureusement, peu de temps après notre première visite à Pierre, sa santé se dégrada sérieusement, et la rencontre avec Alan ne put avoir lieu que deux mois plus tard.

La visite d’Alan Woods, le 9 octobre 2003, marqua le véritable début de notre travail commun. Pierre était sur son lit d’hôpital, dans une clinique isolée sur les hauteurs surplombant Grenoble. Il s’exprimait avec précision en Français comme en Anglais. Il accueillit chaleureusement notre « Projet Léon Trotsky », qui consiste à publier, dans plusieurs langues, les oeuvres principales de Trotsky, et accepta immédiatement d’écrire la préface du premier ouvrage à paraître dans la série (Ma Vie, l’autobiographie de Trotsky). Alan a enregistré une interview de Pierre, dans laquelle il adressait un message à Ted Grant, qui venait de fêter son 90e anniversaire.

Depuis cet entretien, Pierre Broué se considérait et se comportait comme un membre de notre mouvement international. Sa revue, Le Marxisme Aujourd’hui, a régulièrement publié nos textes. Il suivait avec attention notre intervention dans la révolution vénézuélienne – et notamment notre succès dans la lutte pour la nationalisation sous contrôle ouvrier de Venepal. Il se réjouissait, également, des soutiens que nos idées rencontraient à Cuba. Il écrivit la préface du deuxième livre publié dans le cadre du « Projet Léon Trotsky », Not Guilty, – le Rapport de la Commission Dewey (1937) traitant des procès de Moscou. En juillet 2004, il envoya un message à notre conférence internationale : « A vous, mes amis et camarades, j’envoie mon affection et admiration pour votre travail … Vous êtes l’un des meilleurs instruments pour préparer l’avenir de l’humanité, sans doute le meilleur. Merci d’exister, de lutter, et pour l’aide que vous apportez aux militants de notre classe à travers le monde. » Pour notre part, nous étions fiers de compter Pierre parmi nos camarades, fiers de son soutien et de son amitié.

Je lui ai rendu visite pour la dernière fois en avril 2005, accompagné cette fois-ci d’un autre camarade deLa Riposte, Jérôme Métellus. Son ami et camarade Jean-Pierre Juy était également présent. Nous avions trouvé Pierre vivace et enjoué. Sa santé s’était considérablement améliorée. Au cours de notre conversation il nous montrait tour à tour livres, textes et coupures de presse.

Jean-Pierre m’a écrit pour me faire part de la mort de Pierre. Il m’a dit qu’il était parti paisiblement, sans souffrance. La disparition de ce grand camarade est une terrible perte. Mais Pierre Broué vivra toujours dans le cœur de ceux qui l’ont connu et aimé, et surtout dans l’esprit de la génération actuelle de révolutionnaires, qui doit maintenant poursuivre son combat et porter les idées et le programme du marxisme authentique. C’est ainsi que nous pouvons rendre véritablement hommage à cet homme remarquable. La réalisation du socialisme sera aussi son œuvre et sa victoire.


Fraternellement,
GdM

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 06 Août 2020, 06:54
par Gayraud de Mazars
Salut camarades,

Liban : catastrophe mortelle dans un pays déjà sinistré
5 août 2020 sur le site de La Riposte
Sylvain Roch, PCF 19

https://www.lariposte.org/2020/08/liban ... -sinistre/

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Dans un pays qui était au bord de l’implosion par la conjonction de la crise du coronavirus, d’une crise économique qui n’en finit pas, d’une crise politique liée aux confessionnalismes, l’explosion d’hier vient rajouter aux souffrances du peuple libanais. Hier après-midi, deux explosions ont ravagé le port et les quartiers voisins de Beyrouth.

Si les circonstances exactes de cette conflagration restent à déterminer, il apparaît clairement que 2700 tonnes de nitrate d’ammonium sont sûrement le combustible de la deuxième explosion, la plus importante, qui s’est fait sentir jusqu’à Chypre, qui se trouve à une distance de 200 kilomètres.

À l’heure où nous écrivons ces lignes, le bilan serait de plus de 100 morts et de plus de 3000 blessés. Les hôpitaux de Beyrouth sont saturés, certains blessés ont été envoyés dans d’autres villes et les secours tentent de retrouver d’autres victimes dans les décombres des bâtiments détruits. Ce qui est probablement un accident (bien que la piste d’une explosion visant un dépôt d’armes du Hezbollah n’est pas exclue complètement) rajoute à la misère dans laquelle est plongé le pays depuis de nombreux mois déjà.

Cette explosion montre clairement la situation déplorable dans laquelle est plongée la population. Tout d’abord, il est inconcevable qu’une telle quantité de nitrate d’ammonium qui est un combustible extrêmement puissant lorsqu’il est en contact d’une forte chaleur (ce qui fut peut-être le cas pour la première explosion) puisse être stockée dans une zone portuaire d’une ville de cette façon. Le nitrate d’ammonium est à l’origine de la catastrophe d’AZF à Toulouse, où il n’y avait « que » 300 tonnes de cette substance dangereuse.

Les autorités douanières se sont empressées de rejeter la faute sur les autorités portuaires. Il n’en reste pas moins que ces 2700 tonnes de matériaux explosifs qui « traînaient » sur le port depuis 6 ans servaient sûrement de caution ou de moyens de pression pour bénéficier d’avantages ou de bakchich pour les autorités portuaires et douanières qui sont notoirement corrompues (1). L’attitude des douanes pourrait laisser penser que ce stockage résulte de marchandage dont les autorités douanières auraient pu être exclues.

L’autre remarque qu’il vient à l’esprit concerne l’absence totale de l’État libanais. Tous les secours s’organisent en-dehors de l’État. Ce sont les « communautés » et les partis confessionnels et religieux qui ont appelé rapidement à aller donner son sang. Les hôpitaux sont surtout privés, l’État ne gère absolument pas l’offre de soins, et la place vacante est occupée par des instances confessionnelles qui rendent l’accès aux soins terriblement précaire. (2). Il en résulte que les blessés sont amenés dans des hôpitaux surchargés qui parfois doivent leur refuser l’accès, sans compter que certains hôpitaux ont été touchés par l’explosion. Les médecins ont fait passer l’information qu’ils ouvraient leur cabinet pour recevoir les blessés légers pour délester un peu les urgences.

Les conséquences de cette catastrophe sont nombreuses. Il y a d’abord les morts et les blessés dont on ne connaît pas encore le bilan définitif et qui viennent raviver les vieilles peurs issues des guerres civiles et des attaques terroristes. Il y a aussi les dégâts matériels qui sont énormes. L’explosion a rasé un silo à céréales sur le port. De nombreux bâtiments se sont effondrés ou sont très fragilisés dans un périmètre de plusieurs centaines de mètres de l’explosion.

Dans la situation déjà compliquée que vit le Liban depuis plusieurs mois (voir mon article précédent), ce nouveau coup dur aura sans doute des répercussions importantes sur la situation économique, sociale et politique. Le port de Beyrouth est le principal point d’entrée des importations libanaises, notamment en alimentation. 80% des biens de consommation courante sont importés. (3). La destruction du silo du port aura forcément des conséquences sur la capacité de faire rentrer des produits alimentaires, ce qui risque de provoquer une raréfaction de l’offre et donc un renchérissement supplémentaire du prix des produits alimentaires.

Les conséquences de cette catastrophe vont renforcer la défiance face au pouvoir politique. Peu de temps avant l’explosion, une manifestation avait lieu devant le ministère de l’Énergie pour réclamer une meilleure alimentation en électricité (4), manifestation qui fait partie des nombreuses dénonciations d’un État corrompu et incapable de subvenir aux besoins de la population. On voit déjà les manœuvres internationales de la part des puissances ayant des intérêts au Liban. La France, le Qatar, l’Iran, la Russie, les USA, l’Irak ont été les premiers à proposer leur aide et envoient déjà des hôpitaux de campagne et du matériel. Même Israël, après avoir démenti être à l’origine de la première explosion pour détruire une cache d’arme du Hezbollah, propose son aide via des pays tiers. Israël est toujours officiellement en guerre contre le Liban.

En touchant une zone névralgique du Liban, la catastrophe aura des conséquences bien au-delà des morts, blessés et des dégâts matériels dont elle est responsable. Elle place la corruption des élites et le maintien d’un système quasi féodal de confessionnalismes au premier rang des problèmes qui se posent, ainsi que l’urgence, pour le peuple libanais, de prendre en main leur destin en se débarrassant des cliques qui les asservissent et se gavent sur leur dos.

https://www.lorientlejour.com/article/a ... corruption
https://www.lorientlejour.com/article/1 ... tique.html
https://www.lefigaro.fr/conjoncture/le- ... e-20200805
https://www.lefigaro.fr/flash-actu/liba ... e-20200804


Fraternellement,
GdM

Re: fil "interventions de La Riposte"

Message Publié : 08 Août 2020, 18:00
par Gayraud de Mazars
Cher(e)s camarades,

C'est avec une grande tristesse que je dois vous annoncer le décès de notre camarade Gérard Despretz. Il est mort dans les premières heures de la matinée, chez lui, à Pantin. Sa mort intervient moins d'un an après celle de sa femme, Ginette, qui était également membre de notre organisation.

Depuis quelques années déjà, Gérard avait de nombreux problèmes de santé, mais son état s'est considérablement dégradé depuis quelques mois. Régulièrement en contact avec son fils, nous savions que la fin était proche. Pourtant la nouvelle de sa disparition est un choc terrible. Nous perdons un camarade communiste de grande valeur, toujours ferme dans ses convictions révolutionnaires et dans sa confiance en l'avenir socialiste de l'humanité.

Pour La Riposte - Greg Oxley

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Fraternellement,
GdM