Le Républicain Lorrain
Mont-saint-Martin: Arlette au contact de la révolte
Étape dans les brumes du Pays Haut, pour la parlementaire européenne de Lutte Ouvrière venue soutenir, hier, la cause des Daewoo.
Bousculade entre les murs du réfectoire de l'usine. L'exiguïté des lieux tient chaud, mais c'est surtout la présence d'Arlette qui réchauffe les coeurs. Au micro, la figure emblématique de Lutte Ouvrière appuie là où ça fait mal. Et curieusement, ça soulage. Autour d'elle, deux cents salariés, peut-être davantage encore, conspuent "l'ancien patron> de l'empire Daewoo aujourd'hui en fuite pour cause de banqueroute frauduleuse et accusé "d'avoir escroqué l'équivalent d'un tiers du budget annuel de la Corée>. Qu'il ait pu bénéficier un jour d'un accueil en France, pour rejoindre sa villa dans le sud du pays, "alors que les travailleurs immigrés ne peuvent pas obtenir le renouvellement de leur carte de séjour> indigne l'oratrice qui électrise la salle. "Pour les salariés Daewoo, nous allons demander la prolongation à dix ans du renouvellement des cartes de séjour, actuellement valables un an>, embraie Isabelle Banny au nom de la CGT.
S'éclipsant de la session parlementaire à Strasbourg, la députée européenne vient doper le moral des troupes sur le terrain de la lutte: "Je ne me sentirais aucune légitimité au Parlement européen, ni même comme élue au conseil régional d'Île de France si je n'utilisais mon mandat pour soutenir les travailleurs dans leur combat>, justifie-t-elle. À chaque jour, sa couleur politique: la veille, le député UMP de la circonscription de Longwy l'a précédée sur place, avant de rejoindre le Palais Bourbon pour y interpeller le gouvernement sur l'avenir de l'usine (lire ci-dessus).
Second référendum
Mesurant la vivacité des divisions syndicales sur la méthode à suivre, Arlette Laguiller a évité à plusieurs reprises d'attiser l'affrontement. En dépit des questions pressantes sur l'usage de la violence: "Faut-il faire exploser l'usine pour se faire entendre?> lâche l'un des salariés sur la base de ce constat: "Lorsqu'il n'y a pas d'action, on ne parle plus de nous>. Arlette, prudente: "Je ne suis pas venue en donneuse de conseils>, prévient-elle. Rejetant "la violence gratuite>, elle distille pourtant quelques recommandations, pour finalement approuver la ligne dure défendue par l'intersyndicale (CGT/FO/CFTC) contre l'avis de la CFDT: "Isabelle [Banny] m'a rapporté que le recours à la menace des produits chimiques a constitué un moyen de pression qui a abouti à un premier résultat. C'est tant mieux>, se félicite l'élue d'extrême gauche.
Prenant l'intéressée à témoin, Ammar Bouchama promet d'offrir prochainement à Gérard Longuet "le tube cathodique le plus cher de l'histoire: celui qui permettra de financer le plan social des salariés>. Élue au conseil régional, Christiane Nimsgern suggère avec ironie de faciliter la rencontre, lors de la prochaine commission permanente, le 7 février à Metz. L'occasion pour Arlette Laguiller de saluer la position de la représentante LO à la Région: "Christiane est la seule à s'opposer au déroulement à huis clos de ces réunions qui intéressent pourtant les électeurs>. L'échange sort du cadre de l'ordre du jour, mais bien vite les salariés y remettent bon ordre avec la proposition d'un second référendum en moins de 24 h. Cette fois, il est à l'initiative de l'intersyndicale CGT/FO/CFTC. Sur 167 votants, 145 se prononcent pour la reprise du travail avec occupation du site, 21 veulent une reprise sans occupation et 1 bulletin nul. Une question préoccupe l'assemblée: la venue d'Arlette Laguiller préfigure-t-elle l'arrivée d'autres leaders politiques? Réponse d'Ammar Bouchama: "A eux de voir...".
Xavier BROUET.