Le fondateur de la LCR en vedette chez les militants du parti Maron
Alain Krivine : "Laissez-moi rêver".
Par Bertrand Duchet, Journal de l'île (la Réunion), 30 novembre 2002.
Quelque 200 personnes se sont rassemblées, hier en fin d'après-midi, dans la salle du Grand marché de Saint-Denis pour assister, voire même participer au grand débat organisé par le parti Maron
(Mouvement pour une alternative réunionnaise à l'ordre néolibéral) contre "la mondialisation capitaliste".
En vedette américaine : Alain Krivine qui, malgré des décennies de militantisme, n'a rien perdu de son enthousiasme. Est-ce parce que l'extrême-gauche ne s'est jamais aussi bien portée en métropole ? Toujours est-il que le fondateur historique de la LCR (Ligue communiste révolutionnaire) s'est montré surpris de la situation politique à la Réunion : "Faut avouer qu'on n'a pas l'impression d'être ici à la veille du grand soir."
"Le début de la fin du tunnel"
Mais pas de quoi gâcher son tout premier séjour dans notre île. D'autant qu'Alain Krivine en est convaincu : "C'est le début de la fin du tunnel pour tous les militants qui, jusqu'à maintenant, n'ont connu que des échecs. Il existe aujourd'hui une réelle opportunité pour que la gauche radicale, l'extrême-gauche, la gauche anticapitaliste, appelez-la comme vous voulez, je m'en fous, se réveille et parvienne à imposer une autre conception de la société."
Cette opportunité a bien sûr un nom : antimondialisation. "Il y a dix ou quinze ans, quand on osait critiquer le capitalisme et affirmer que la lutte des classes était une réalité, on nous regardait avec des yeux ronds, se souvient Alain Krivine. Fallait vivre avec la société libérale, point final.
Aujourd'hui, de plus en plus de gens osent dire que le capitalisme, c'est la barbarie." Est-ce à dire que le grand soir se rapproche ?
"Pour la première fois, des dizaines de millions de gens organisés dans des associations, des syndicats, disent non à la société libérale. Et ça, on le doit au mouvement antimondialisation."
"Un cauchemar pour les bourgeois"
Dans cette vaste mouvance particulièrement active en Europe, divers slogans font aujourd'hui figure de doctrine : "Le monde n'est pas une marchandise. Nos vies valent plus que leurs profits." Dès lors, c'est sans surprise qu'Alain Krivine redoute l'éventualité d'un conflit en Irak : "Contrairement à ce que veulent nous faire croire les Etats-Unis, c'est la guerre du pétrole, pas celle des libertés."
Fustigeant la faillite de la gauche traditionnelle, le leader de la LCR estime que "les bases sont là pour créer une autre gauche, 100 % à gauche."
Et tant mieux si on le traite de doux rêveur : "Il y deux catégories d'individus qui ne rêvent pas : les abrutis et les conservateurs. Pour moi, le rêve est progressiste. Il faut réapprendre à rêver pour lutter et faire en sorte que notre rêve d'une autre société devienne un cauchemar pour la droite et les bourgeois."
:bounce: