• LE MONDE | 11.02.03 | 13h21
par Dominique Dhombres
Télévision : Arlette et Hardy
Robert barcia faisait ses premiers pas dans le PAF, lundi 10 janvier, chez Chabot. Un vieux mystère de la vie politique française était enfin levé. Barcia, alias Hardy, qui dirige Lutte ouvrière depuis la nuit des temps, apparaissait pour la première fois au grand jour à la télévision. Le grand chef clandestin de cette étrange organisation, aux allures de secte, c'était donc cela, ce vieil homme sentencieux et légèrement méprisant, qui parle comme Georges Marchais naguère, gouaille comprise.
Arlette Laguiller était là, elle aussi, affirmant bien fort qu'elle n'était nullement la créature de ce chef longtemps resté dans l'ombre.
C'était décidément une soirée trotskiste, sur France 2, puisqu'Alain Krivine était également présent, de même que des anciens, passés au PS, comme Henri Weber et Jean-Luc Mélenchon. Arlette Chabot avait beaucoup de mal à les empêcher de tous parler en même temps.
Que retenir de ce coming outde Barcia ? Il n'aime pas les journalistes. Cela, on s'en doutait un peu. Il n'est d'ailleurs sorti de la clandestinité qu'il s'était lui-même imposée que parce que L'Express, en 1998, avait révélé sa double vie. Il y avait d'un côté Hardy, chef d'une organisation révolutionnaire qui prône la mort du capitalisme, et de l'autre Barcia, patron d'une PME liée à l'industrie pharmaceutique. "La petite boîte que j'ai montée",comme il dit. Il a créé une société qui forme des représentants de commerce au service des laboratoires pharmaceutiques. Ses partenaires commerciaux ignoraient tout de son activité politique. Les militants ne savaient rien de sa petite entreprise. Il ne voit pas où est la contradiction. Arlette non plus, apparemment.
Quoi d'autre encore ? Il est contre le mariage et pour l'union libre. Mais les militants de Lutte ouvrière font ce qu'ils veulent. Ils ont même le droit d'avoir des enfants. "Je suis communiste depuis soixante ans", dit Barcia, qui emploie des expressions comme "pouvoir bourgeois" ou "partis bourgeois". Voilà un homme qui n'a pas bougé d'un iota depuis les années 1950. Presque un musée à lui tout seul. Et pourquoi Hardy, au fait ? Par antiphrase. A cause de Laurel.
Très maigre dans sa jeunesse, il formait une sorte de tandem avec un camarade bien enveloppé. Désormais, c'est avec Arlette. Ma chute sera encore pire que d'habitude. Sur France 2, lundi soir, on donnait Arlette et Hardy.
dominique dhombres