Hier mercredi 14 novembre
Pas question de me lever plus tôt que d'habitude. Je dirais même plus, retard pour retard, j'ai attendu l'ouverture d'un magasin pour m'acheter un bonnet. Brrr, il fait froid et la marche dans le froid, cela demande un bon bonnet qui descend bien bas sur les oreilles et sur le front - j'ai oublié d'en prendre un en sortant de chez moi.
Le copain me propose de prendre sa bagnole pour m'avancer un peu... direction ligne 14, celle qui marche puisque "tout est automatique", entendait-on juste avant dans la voiture à la radio.... :hum: "automatique, tu parles, me dis-je en moi-même, et si les électriciens coupaient le courant, enfin si quelques travailleurs, quelque part, le voulaient, même cette ligne là ne fonctionnerait pas..."
Les embouteillages et ma rêverie en écoutant la radio. Je lis quelques passages d'un bouquin que je ne m'étais pas encore décidée à lire, Hatzfeld, Dans le nu de la vie, le récit du massacre des tutsis par des rescapés... c'est par hasard qu'il dépassait de ma bibliothèque en même temps qu'on entendait que l'auteur avait reçu le prix médicis pour le troisième volume de sa trilogie sur le Rwanda, "la stratégie des antilopes". Le copain n'a pas envie d'entendre.
Ligne 14. Montée sans encombre. Nombreuses places assises. Mon arrêt.
Encore 30 minutes de marche. Je peux appeler le boulot... il fallait que je laisse le temps à mes collègues d'arriver pour qu'ils puissent me répondre... "dans 30 minutes ? OK, bon courage. Vous arrivez quand vous arrivez"
Quel beau soleil !
La marche ça aide à réfléchir : je pense tranquillement au texte de l'appel intersyndical que je me suis proposée de rédiger, après avoir contacté plusieurs syndicalistes - une réunion ? faut pas rêver... en fait, ils n'ont pas trop le temps... en fait, ce n'est pas trop leur préoccupation...
Déjà là ? déjà presque arrivée, j'ai même pas vu le temps passer. Pourtant cela fait plus de 30 minutes que je marche...
Arrivée à l'ascenseur, tiens, ma collègue aussi vient d'arriver, elle est dans l'ascenseur. Il est 10h30. Ca alors, je n'aurais pas cru cela d'elle : toujours un point d'honneur à arriver à 8h54 - son heure de début de journée, étant donnés les 70 % imposés qu'elle a tout de même réussi à caser sur trois jours... Elle a réussi aussi à négocier un vachement bon salaire, par rapport à sa catégorie : pas tout à fait 1000 euros nets... Ca fait 10 ans qu'elle travaille ici.
Zut, la porte qui se referme, elle n'a pas trouvé le bouton pour rouvrir la porte.
Tant mieux, 3è étage, en traversant le couloir pour accéder à mon boulot (l'autre ascenseur est en panne depuis une semaine), je passe devant le local aménagé en cafet. Il y a des rires. Je rentre. Chouquettes, flan coupé en petits bouts, café. Allez, je m'assois. Tu veux un café ? Ouais, ils ont déjà dû le prendre dans mon service...
Il y a eu coupure d'eau jusqu'à 10h30 - la plomberie est assez vétuste, alors la pause café a été retardée...
Allez, pendant une bonne demi heure, discussion. Sur le mouvement étudiant "en 86, on avait réussi à faire retirer le projet Devaquet sans bloquer quoi que ce soit. C'est même nous qui débloquions les portes fermées par les proviseurs. Rien ne résistait au déferlement des lycéens - on avait laissé les étudiants-diants-diants à leurs chères études, après avoir essayé pendant une semaine à les faire sortir de leurs cours..." ; sur les cheminots "ils font déjà rarement 37,5 ans, alors cela ne leur fait généralement pas plus de 65% de leur dernier salaire. Alors avec la décote... La FGAC a moins obtenu en négociant la semaine dernière que ce que le gouvernemenet a accepté de lâcher rien qu'avec la menace de la grève : 2,5 années de décote au lieu de 5..." Tout le monde écoute, de temps en temps, remarque ironique sur le "travailler plus pour gagner moins".
Bon allez, on va bosser. :emb: ca fait nettement plus de 30 minutes que j'ai appelé en disant que j'allais arriver dans 30 minutes.
De toute façon, tout le monde sait que c'est inutile de me dire quoi que ce soit. Personne n'a jamais osé. Je raconte brièvement mon périple, en omettant mon petit arrêt café. De toutes façon, ils se doutent que je trame quelque chose : collage d'affichettes, ou coup de fil, ou discussion dans le couloir. ils ont l'habitude.
Voilà pour la première matinée de "galère" pour aller travailler.
En fait, il y a eu le soir même, hébergée chez une collègue qui habite sur Paris - on s'est préparé un de ces gueuletons !
Il y a eu ce matin, réveillée aux aurores pour aller chercher les journaux. Là pas de retard ! Super le velib à 6h30 du mat.
Ensuite, arrivée en avance au boulot... allez, je colle des affichettes. J'aurais préféré faire ça avec mon collègue, celui qui veut bien faire un petit quelque chose et qui fait la tournée des panneaux avec moi d'habitude. Pas grave, ça sera toujours ça de fait. On distribuera peut-être un tract... Tiens je croise des collègues dans la cours, ceux qui-ne-veulent-pas-arriver-en-retard : "au fait, vous savez, lundi, on fait une assemblée générale..." ils discutent avec moi de leur trajet du matin "j'ai pas eu de problème, le métro est arrivé au moment où j'arrivai aussi sur le quai".
Et ce soir, marche. Plein de monde partout, et les vélos partout, et les voitures partout. Dans tous les sens. Une jeune fille assise sur le trottoir, son vélo à côté d'elle, plongée dans la lecture d'un plan. Un scooter s'approche :" vous allez vers où ?" Comment ils vont faire pour ne pas se faire emboutir tous les deux ? Tout ca fait somme toute assez irréel. Je suis sur un petit nuage.
Il fait froid, mais sec. Ce n'est pas désagréable, vraiment.
Voilà la ligne 14 et le bus attrapé inextremis "ce n'est pas la peine de vous lancer sous mes roues, je n'ai pas envie d'avoir un accident, s'énerve le chauffeur". C'est vrai que j'ai été idiote : de toute façon, le bus n'avance pas...
Pas de stress. personne ne m'attend. Le copain est parti à sa réunion pour savoir où en est la grève dans son coin. Ce soir, il va y avoir des nouvelles fraîches.
C'est bizarre tous ces gens qui sont mécontents.
Moi, je me sens légère... drôle d'ambiance.
C'est tard. Demain, je vais peut-être me lever un peu plus tard que d'habitude...
:emb: Mais dans quel genre de boulot elle travaille celle-là ? C'est cool chez elle !
:spamafote: J'sais pas, à mon boulot, il y a aussi ceux qui se lèvent deux heures plus tôt pour arriver... plus tôt que d'habitude. Pourtant c'est le même boulot. :whistling_notes:
Et pour vous, ça se passe comment, cette "galère" pour aller bosser ?