M. Seillière critique la "culture de la grève et de la manif" dans les services publics
LE MONDE | 18.06.03 | 13h11
Le Medef veut un droit de grève réglementé
Non , "le Medef n'a pas le sentiment d'être silencieux", a déclaré, mardi 17 juin, Ernest-Antoine Seillière, président de l'organisation patronale. Répondant à ceux qui s'étonnaient de la relative discrétion du Medef sur le dossier des retraites, M. Seillière a précisé qu'il avait "lancé le débat sur tous les sujets de société qui seront traités les uns après les autres" et qu'il était normal "qu'en démocratie, on laisse le Parlement prendre le dessus dans l'expression".
De fait, la réforme proposée par le gouvernement n'oblige guère le Medef à sortir de sa discrétion, nombre de ses recommandations semblant exaucées dans le projet Fillon.
Invitant le gouvernement à ne pas faiblir dans sa conduite de la réforme, M. Seillière a estimé qu'"avec un quinquennat de réformes, la France se développera". "Nous n'avons pas perdu espoir, mais il faut y aller", a-t-il ajouté. Réagissant aux actions de manifestants qui s'en sont pris récemment à plusieurs locaux du Medef, le chef de file des patrons français a dénoncé ces "exactions"et s'est félicité de leur condamnation par les syndicats : "Il faut qu'ils retiennent dans leurs rangs les excités", a-t-il dit.
"Nous ne pourrons maintenir notre niveau de vie que si la liberté du travail est respectée", a par ailleurs affirmé M. Seillière, qui a réclamé avec force "la mise en place d'une réglementation du droit de grève dans les services publics". Réaffirmant le caractère "fondamental" de ce droit, il a expliqué qu'il ne fallait pas accepter "que se développe dans notre pays l'idée que le service public, ce soit la culture de la grève et de la manif", par opposition à l'entreprise qui incarnerait la "culture de travail et de formation".
Insistant sur les risques encourus par l'économie française, jugeant l'"attractivité-compétitivité" du pays en forte baisse, M. Seillière n'a pas souhaité commenter plus avant le dossier des retraites. Tout juste a-t-il indiqué que le transfert des cotisations chômage vers les retraites lui semblait toujours une "idée aléatoire" et que le Medef ne voyait pas "d'éléments de la reprise se mettre en place".
Le président de l'organisation patronale s'est ensuite étonné du "paradoxe" que constitue à ses yeux la protestation syndicale et ses multiples manifestations, alors que les négociations interprofessionnelles auraient, selon lui, atteint un niveau inédit. Rappelant les discussions sur la formation, les retraites complémentaires, les restructurations, les intermittents du spectacle, M. Seillière a feint de s'étonner : "Ceux qui participent aux mouvements sont les mêmes qui viennent s'asseoir à la table des négociations."
PAS DE RETOUR À LA "SÉCU"
Concernant enfin les débats à venir sur l'assurance-maladie, il a indiqué que le Medef n'entendait pas réintégrer la gestion de la Sécurité sociale, opposant ainsi une fin de non-recevoir au désir exprimé par le président de la République. Jacques Chirac avait souhaité, le 12 juin au congrès de la Mutualité française, que les "représentants des entreprises puissent, au côté de ceux des salariés, jouer un rôle actif au sein des caisses de Sécurité sociale". "Nous sommes prêts à contribuer à toute forme de réflexion, a précisé M. Seillière, mais d'où nous sommes, c'est-à-dire de l'extérieur."
Rémi Barroux