SNCF : Grève reconductible 06 avril 20H00.

Message par Leonid » 03 Avr 2010, 13:46

SNCF : Suppressions de postes, bas salaires et restructurations. ASSEZ!

La direction de la SNCF réorganise l'ensemble de l'entreprise en différentes entités cloisonnées et dédiées à une seul type d'activité (ex : marchandises, grandes lignes, TER etc.), mises en concurrence les unes contre les autres. Dans chacune de ces entités, la direction mène une politique de suppressions de postes massive (-22 000 depuis 2002), un blocage des salaires. Partout, l'objectif imposé est toujours plus de travail avec de moins en moins de cheminots. Partout, la direction cherche à imposer une dégradation des conditions de travail, notamment en contournant la réglementation du travail à la SNCF. Le PDG de la SNCF, Guillaume Pépy, n'a pas caché son intention de vouloir imposer à environ 25 000 cheminots dédiés à l'activité TER (transport régional de voyageurs) une réglementation à la baisse pour être encore plus compétitif face à la « concurrence ».


Dans la branche fret (transport de marchandises), la direction cherche par tous les moyens à se débarrasser des transports qu'elle estime économiquement non rentables, quitte à mettre des centaines de milliers de camions supplémentaires sur les routes, à supprimer des milliers de postes et fermer des triages, gares marchandises etc. Dans cette branche ou la direction organise cette baisse brutale de l'activité, elle impose des journées « inutilisées » (équivalent du chômage technique) à bon nombre d'agents de conduite en particulier, ce qui se traduit par des pertes de salaires. Alors même que d'autres services souffrent d'un sous-effectif, au point de ne pas pouvoir assurer tout le service prévu.


Bon nombre de cheminots comprennent que la nouvelle organisation de l'entreprise (les syndicats parlent du « démantèlement » de la SNCF) préfigure une possible séparation de certaines activités de la SNCF, leur transformation en filiales, voir leur privatisation à long terme. Cette nouvelle organisation accompagne la transformation de la SNCF qui recentre de plus en plus ses activités sur ce qui lui semble être le plus rentable à court terme, sans se soucier de l'intérêt de la collectivité à long terme. Ce qui se traduit également par une augmentation sans interruption du prix des billets pour les usagers ... parallèlement à un désengagement de l'Etat qui investit de moins en moins dans un secteur ferroviaire que le gouvernement et l'Union européenne souhaitent voir libéralisé, de plus en plus confié au secteur privé.


Face à une telle politique contraire de tout point de vue aux intérêts des travailleurs du rail, mais aussi des usagers, seule peu répondre une mobilisation importante de tous les cheminots. Les cheminots, comme l'ensemble des travailleurs, n'ont aucune raison d'accepter un recul de leurs conditions de travail et de salaire.


Dans plusieurs régions des préavis de grève reconductibles seront posés le 6 avril au soir, notamment par la CGT – cheminots. SUD-Rail (qui a posé un préavis de grève reconductible dès le 23 mars) s'est positionné depuis longtemps pour l'organisation d'une grève reconductible.


Après le succès des grèves du 3 février et du 23 mars à la SNCF où environ 1 cheminot sur 3 a cessé le travail, espérons qu'un maximum de cheminots se saisissent de cette occasion pour monter d'un cran la riposte. Seule une grève déterminée de tous les cheminots pourra imposer satisfaction de leurs revendications élémentaires : des embauches, des augmentations de salaires, l'arrêt de toutes ces restructurations.

Leonid
 
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Message par Crockette » 04 Avr 2010, 09:37

il manque juste un petit thème que je tiens d'un pote cheminot qui n'est pas du tout syndicaliste d'ailleurs :

- annualisation du temps de travail
- flexibilité des horaires
- alternance du travail jour nuit régulière sur le mois
- week ends "bouffés" régulièrement (c'est la norme)
- non remplacement des collegues malades

Crockette
 

Message par Leonid » 14 Avr 2010, 12:28

SNCF – Grève reconductible du 06 avril : la riposte est montée d'un cran!

L'appel lancé par la CGT – cheminots et Sud-Rail à faire grève à partir du mardi 6 avril à 20H00 a été globalement bien suivi. Dans plusieurs régions, les cheminots sédentaires (guichetiers, aiguilleurs, agents des voies etc.) ont fait grève jusqu'au samedi 10 avril, parfois au delà. Les roulants (conducteurs et contrôleurs) ont, principalement dans des régions hors Ile de France (Marseille, Lyon, Montpellier etc.) reconduit le mouvement au delà du weekend du 10-11 avril. En Ile de France, où la mobilisation affichait des taux en retrait par rapport à la province, bon nombre de roulants ont reconduits pour ne pas laisser les grévistes en province isolés et remobiliser autour d'eux. La circulation des trains n'était pas revenue à la normale vendredi 09 avril, malgré les annonces de la direction. Ainsi, sur la gare d'Austerlitz, alors même que la direction annonçait dans les médias un « trafic normal », aucun train grande ligne n'a circulé entre 08H00 et 14H00, et tous les trains de nuits étaient supprimés! Le transport de marchandise par train était, selon la direction, paralysé à bien des endroits dans le sud de la France le weekend du 10-11 avril. Bon nombre de grévistes sont déterminés à tout faire pour donner un second souffle à la mobilisation à compter de la semaine du 12 avril!

Cette grève, de l'avis général, n'a pas été préparée dans les meilleures conditions. Cette grève reconductible est venue après les journées isolées du 3 février et du 23 mars, chacune sans réelle perspective derrière, mais toutefois avec des forts taux de participation. La CGT, dont les militants sont dans bien des endroits les principaux animateurs de ce conflit, a lancé des préavis différents selon les filières, les régions, catégories. Plus que la mise en avant de revendications offensives, la direction de la CGT privilégie l'ouverture de nouvelles « négociations » avec la direction. Cela n'a pas contribué à la clarté d'autant plus que les militants syndicaux n'ont eu qu'une semaine pour mobiliser! Les rivalités affichées entre les directions de la CGT et de SUD-Rail n'ont pas aidés et se sont reflétées malheureusement, parfois, sur le terrain entre certaines équipes militantes de ces syndicats. Alors même que ces deux syndicats apparaissent aux yeux de la plupart des cheminots comme ceux regroupant les militants « lutte de classe » en opposition avec la politique de la direction … et qui auraient tout intérêt à aller dans le même sens plutôt que de se tirer dans les pattes.

Dans ces conditions, la participation parfois majoritaire des cheminots - c'est le cas, selon la direction, dans plusieurs établissements roulants où la participation a souvent augmenté au fil de l'action - démontre leur détermination à se battre contre les suppressions d'emplois et réorganisations qui entraînent une dégradation sans précédents des conditions de travail. La question des salaires est également revenue dans les Assemblées générales, dans cette entreprise où la direction impose le blocage des salaires (bien souvent au niveau du SMIC) depuis des années. Alors oui, les cheminots sont excédés par la politique de la direction. Cette grève l'a démontré une fois de plus, en permettant à un nombre non négligeable de cheminots de monter la riposte d'un cran.

Cette grève aura également permis à des équipes syndicales, par delà leur étiquette, d'aller à contre-courant de la division syndicale en resserrant les liens, en jetant les bases d'un travail commun à venir pour « relancer la machine ». Osons espérer que les travailleurs les plus combatifs de l'entreprise sauront se regrouper prochainement pour prendre en main la construction de la prochaine étape. Les revendications demeurent : des embauches, des augmentations de salaires, l'arrêt de toutes les restructurations. Des revendications dans lesquelles peuvent se reconnaître l'ensemble des travailleurs!

La direction de la SNCF, aidée par le gouvernement … mais aussi des représentants de « l'opposition » comme Manuel Valls, député-maire PS, a beaucoup communiqué sur sa hargne vis-à-vis de la « troisième grève depuis le début de l'année ». Dans plusieurs services et régions, la grève se maintient, voir se renforce. Même chez les grévistes ayant repris pour l'instant le travail, la tonalité donnée est claire : la direction doit s'attendre à un regain de tension, des nouveaux conflits prochainement si elle ne donne pas satisfaction!
Leonid
 
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Message par Leonid » 15 Avr 2010, 23:35

Voila le dernier bulletin national du NPA de sa branche SNCF qui fait le point sur la mobilisation.

Bulletin_Cheminots_NPA_Avril_2010_1.pdf
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Message par John Connor » 16 Avr 2010, 10:12

Pour plus d'infos, cf. la LO de cette semaine.

Une ambiance étrange, très disparate, du coup difficile à appréhender.

Les raisons de se mettre en grève ne manquent pas : les réorganisations regroupées sous le nom "destination 2012" ou "gestion par activités" préparent le grand découpage de la SNCF. Et déjà à la clé des dizaines de milliers de suppressions de postes (à ce sujet, cf. le dossier SNCF du convergences révolutionnaires n°67). Les salaires sont bloqués depuis des années. Les problèmes de tous les travailleurs en somme.

Ce sont ces attaques continues, conjuguées à un mépris qui monte, qui expliquent la détermination des cheminots en grève depuis 10 jours. Ils sont des milliers, 30% des conducteurs et contrôleurs au niveau national. Et ils ont bien raison.

Mais cette grève reste minoritaire et surtout est de fait catégorielle. Et ça, vu les discussions, c'est au moins en partie la responsabilité des directions syndicales.

La plus influente et de loin, la CGT, a mené ces dernières années une politique visible contre tous les mouvements d'ampleur nationale qui ont eu lieu dans la boite : 35h en 99, cap clients en 2001, retraites en 2003, retraites again en 2007. A chaque fois, elle a mis tout son poids pour arrêter les mouvements, et les cheminots les plus combatifs s'en rappellent. Le souvenir de 2007 est particulièrement cuisant.

Depuis, c'est la politique des journées d'action, succession de grèves de 24h sans perspectives, la dernière en date étant le 23 mars, un mois et demi après le 3 février. Rien qui permette aux cheminots de prendre conscience de leur force (évidemment), mais rien non plus qui leur donne confiance dans leurs orgas syndicales.

Et à peine une semaine avant le 6 avril, ce qui était hors de question hier est devenu, en parole, l'objectif de la CGT : une grève reconductible. Sans préparer, sans impulser des discussions et des réunions, sans proposer des revendications claires et chiffrées, en déposant 7 préavis différents par catégorie au niveau national et encore plus au niveau régional, en divisant entre roulants (reconductibles) et sédentaires (carrée), la CGT a lancé un mouvement au forceps, de la seule manière que les bureaucrates imaginent.

La méfiance vis-à-vis de ce mouvement lancé d'en haut a dominé pendant la première phase du conflit (du 6 au 8 avril). L'ambiance dans les AG, de toutes façons peu nombreuses, c'était : "c'est un baroud d'honneur de la CGT de 2 jours maxi, on fait grève pour le principe et de toutes façons ils nous appelleront à reprendre dès vendredi". Ce qui a été le cas dans la plupart des régions et la plupart des secteurs.

La politique de Sud, de toutes façons plus faible en voix et surtout en forces militantes au niveau national que la CGT, n'a pas aidé non plus. A chaque grève carrée, Sud répondait "reconductible" sans se donner les moyens (ou les avoir) de mobiliser les cheminots. Une surrenchère de boutique en somme, qui ne pouvait que démoraliser leur base, les dresser contre les militants CGT. Et qui surtout occultait la vraie préparation d'un mouvement d'ensemble, réduisant le problème à "la CGT n'appelle pas à la reconductible".

Illustration le 23 mars dernier : alors que l'ambiance n'y était pas vraiment (mais c'est difficile à mesurer vu notre taille à tous) et que l'enjeu de cette journée était son caractère interpro, Sud a polarisé le débat sur la reconduction, allant jusqu'à la voter dans des AG ultra minoritaires... Juste pour emm... la CGT.

A malin, malin et demi, la CGT déclenche le 6 avril, "sa" grève "reconductible". Les mêmes qui ne perdent pas une occasion de faire la leçon aux "gauchistes" sur le fait que la grève générale ne se décrète pas... lancent une grève presse-bouton. Les mêmes fieffés bureaucrates, qui appelaient à la reprise en 2007 avec des taux de grévistes honorables appellent à continuer coute que coute avec les taux de grévistes très faibles d'aujourd'hui. Un vrai tournant "troisième période" !

Alors, faire la nique à Sud ? Combat Lereste/Pépy avec les cheminots comme masse de manoeuvre ? Démonstration de Lereste face à Thibault ? Ou bien épuisement des troupes les plus motivées dans une bataille sans perspective ? Les calculs de la fédé sont obscurs, mais ce qui est sûr, c'est que nombre de cheminots combatifs n'ont pas participé à ce mouvement car ils avaient le sentiment de se faire mener par le bout du nez.

Et puis...

Et puis, depuis le début de la semaine, le conflit est entré dans une deuxième phase. La grève est devenue catégorielle (roulants). C'était la volonté affichée dès le départ de la CGT (préavis de seulement 24h pour les sédentaires). C'était une option défendue aussi par Sud dans son matériel national, même si localement ses militants se sont souvent prononcés pour l'extension. Et cette grève est suivie. 30% au niveau national, c'est beaucoup à a SNCF. Surtout que c'est très régional, donc des pics de grève majoritaires dans certaines régions.

L'ambiance dans les coins où la grève est forte, c'est la détermination. Là où il n'y a pas grève, c'est le scepticisme : à la fois pas envie de rester l'arme au pied quand d'autres se battent mais les interrogations par rapport à la stratégie syndicale l'emportent pour l'instant. A noter qu'elles ont été levées de manière spectaculaire à Rouen cette semaine : en débarquant à quelques dizaines pour tracter, les conducteurs ont déclenché la grève dans les ateliers (avec une AG de 250 ouvriers).

C'est bien sûr la seule perspective : l'extension du mouvement à tous les cheminots par les grévistes eux mêmes. Cela signifie : ne pas compter sur les appels syndicaux pour ça (même quand ils existent, ils rencontrent la méfiance des cheminots), mais compter sur les grévistes eux-mêmes. Cela signifie aussi définir des revendications claires (car la CGT ne demande que l'ouverture de négociations) qui parlent aux cheminots : chiffrer les embauches nécessaires par chantier et au niveau national, chiffrer les augmentations de salaires nécessaires en AG (300 euros ?).

Possible, pas possible ? Marchera, marchera pas ? Les chances sont très faibles... Mais elles existent. Le mouvement va-t-il s'étendre aujourd'hui (AG dans des régions pas touchées par le mouvement et dans des secteurs sédentaires) ? Ou lundi ?

L'entame de négociations par régions, les derniers communiqués de la CGT nationale, le test fait en PACA par la fédé CGT de faire voter la suspension du mouvement (raté...) montrent-ils que la fédé commence à se méfier d'une extension du mouvement ? Si c'est ça, le mouvement sera-t-il assez fort pour passer outre ?

En tout cas, la combativité dans de telles conditions est plutot positivement surprenante. A suivre...
John Connor
 
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Message par John Connor » 16 Avr 2010, 10:18

J'ajouterai une chose : il est important dans un mouvement comme celui-là de ne pas bluffer les cheminots. Bien des obstacles sur la voie de l'extension et la politique des orgas qui dirigent la grève n'est pas le moindre. Des obstacles plus "objectifs" peut etre aussi (mais bon... je sais pas...). Il ne s'agit pas à mon avis de juste dire "c'est le moment, faut y aller, maintenant ou jamais, etc". Bien sûr, tu peux pas démoraliser tes collègues au moment où tu veux déclencher la grève... Mais les doutes sont là de toutes façons, il faut les exprimer pour pouvoir y apporter des réponses. Donc rejoindre le mouvement, oui sans hésitation, mais cela signifie prendre notre grève en main, des revendications à son extension, et ne pas se laisser mener par le bout du nez par les directions syndicales... Bref pas évident non plus à formuler...
John Connor
 
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